Une nouvelle loi interdit le démarchage téléphonique non consenti
Laissez-moi tranquille !

Le Sénat a voté mercredi, en seconde lecture, une proposition de loi visant à renforcer la protection des consommateurs face au démarchage téléphonique. Le texte, dont l'entrée en vigueur est programmée pour 2026, exige un consentement explicite avant toute prospection commerciale, et fait porter la charge de la preuve sur le professionnel.
Le 23 mai à 09h30
5 min
Droit
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Après la loi Hamon de 2014 suivie du lancement de Bloctel, un nouveau texte en 2020, ou la mise en place de restrictions horaires en 2023, force est de constater que le démarchage téléphonique reste considéré comme une nuisance répandue : « 97 % des Français se déclarent agacés par le démarchage commercial », affirmait par exemple l'UFC-Que Choisir suite à un sondage réalisé en octobre dernier.
De l'opt-out à l'opt-in
La donne s'apprêterait-elle à changer ? Le Sénat a voté mercredi, en deuxième lecture, une loi contre les fraudes aux aides publiques, qui inclut tout un volet de mesures spécifiques au démarchage téléphonique.
Sur ce terrain, le texte inverse la mécanique de protection du consommateur. Alors qu'il fallait précédemment signaler son désir de ne pas être prospecté, le démarchage téléphonique est désormais interdit auprès d'un consommateur « qui n’a pas exprimé préalablement son consentement à faire l’objet de prospections commerciales par ce moyen ».
En termes marketing, on passe d'une logique d'opt-out (je demande à sortir du dispositif) à une démarche d'opt-in (je donne mon consentement). Et ce consentement se doit, selon le texte de la « petite loi » issue du vote, d'être parfaitement explicite.
« Pour l’application du présent article, on entend par consentement toute manifestation de volonté libre, spécifique, éclairée, univoque et révocable par laquelle une personne accepte, par un acte positif clair, que des données à caractère personnel la concernant soient utilisées à des fins de prospection commerciale par voie téléphonique. »
Le texte prévoit par ailleurs qu'il incombe au professionnel « d’apporter la preuve que le consentement du consommateur a été recueilli dans les conditions prévues », y compris si le démarchage est réalisé par l'intermédiaire d'un tiers.
Le texte, qui durcit donc les conditions d'exercice de la prospection téléphonique, négocie en échange une forme de souplesse : cette dernière sera désormais autorisée en dehors des horaires instaurés par le décret de 2023, uniquement « si le consommateur consent explicitement à être appelé à une date et à un horaire précisément spécifiés et que le professionnel peut en attester ».

Une exception pour les « contrats en cours »
Si la prospection est interdite par défaut, le démarchage à des fins de vente additionnelle ou vente croisée (technique visant à profiter d'une transaction déjà engagée pour proposer un produit complémentaire ou une gamme supérieure) reste autorisé.
Le texte dispose en effet que l'interdiction n'est pas applicable « lorsque la sollicitation intervient dans le cadre de l’exécution d’un contrat en cours et a un rapport avec l’objet de ce contrat, y compris lorsqu’il s’agit de proposer au consommateur des produits ou des services afférents ou complémentaires à l’objet du contrat en cours ou de nature à améliorer ses performances ou sa qualité ».
Prospection commerciale interdite pour la rénovation énergétique
Double vitrage, pompe à chaleur, isolation des combles... le secteur de la rénovation énergétique est, de notoriété publique, particulièrement sujet au démarchage, en partie parce qu'il bénéficie d'un important dispositif d'aides publiques.
En réponse, la proposition de loi interdit la prospection commerciale par voie électronique (« par message sur un service de communications interpersonnelles, par courrier électronique ou sur un service de réseaux sociaux en ligne ») pour les travaux liés aux économies d'énergie, à la production d'énergies renouvelables (panneaux photovoltaïques) ou à l'adaptation du logement au vieillissement ou au handicap. Tout manquement devrait être passible d'une amende administrative pouvant atteindre 375 000 euros pour une personne morale, précise le texte.
Un impact à étudier ?
La loi ne devrait entrer en vigueur que le 11 août 2026, date à laquelle le contrat de l’État avec Bloctel prend fin. En attendant, les mesures liées au démarchage suscitent la vive opposition des spécialistes du secteur. L'Association française de la relation client (AFRC) s'est par exemple mobilisée lors de l'examen du texte par la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale, pour faire retirer plusieurs amendements du texte. L'un d'eux proposait la « réduction drastique des plages horaires (limitées à 4 heures par jour ouvré !) et de la fréquence des appels (seulement 2 tentatives sur 80 jours) », selon l'association.
« Économiquement, les risques de destruction d’emplois liés à ce système paraissent particulièrement élevés », estimait de son côté la commission des lois du Sénat en novembre dernier (PDF). S'appuyant sur des chiffres transmis par la DGCCRF, elle évaluait alors que « la relation client représente entre 29 000 et 40 000 emplois pour les centres d’appels externalisés » et remarquait que le volume de consommateurs acceptant d'être démarché serait vraisemblablement très faible.
Une nouvelle loi interdit le démarchage téléphonique non consenti
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De l'opt-out à l'opt-in
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Une exception pour les « contrats en cours »
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Prospection commerciale interdite pour la rénovation énergétique
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Un impact à étudier ?
Commentaires (38)
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Abonnez-vousLe 23/05/2025 à 09h45
Le 23/05/2025 à 09h48
Je ne sais pas ou ça en est mais tant que les opérateurs ne sont pas capables de s'assurer que le numéro affiché correspond réellement au numéro de l'appelant je doute qu'on puisse punir.
Modifié le 23/05/2025 à 10h44
C'est exactement cela. L'exploitation des réseaux ne repose pas sur des normes nationales, mais sur le multilatéralisme à un échelon supra-national (et ce dès qu'on s'est dit que cela serait peut être pas mal que les réseaux permettent aux gens de communiquer avec d'autres gens dans d'autres pays, cela remonte donc à 1865 avec l'UIT).
Sur le papier, on pourrait tout à fait casser des appels où CLI (forgé par le terminal, échappant au contrôle opérateur) ≠ ND (forgé par le réseau, maitrisé par l'opérateur, et par ailleurs systématiquement présenté aux services d'urgence et conservé 1 ans, avis aux amateurs d'appels anonymes / numéro usurpé), sauf que dans la pratique, c'est l'écroulement garanti des réseaux français avec la perte du trafic roaming et donc un taux explosif d'appels en échecs (situation parfaitement connue de pays pas vraiment amis qui se sont déjà caractérisés par des pratiques agressives sur la stabilité des infrastructures stratégiques de ce pays). Tant que les opérateurs départ à l'étranger (certains l'ont fait, mais pas tous, donc cette situation est exploitée par les margoulins et services pas vraiment amis) ne signeront pas les appels, il sera difficile de bloquer, car trop de faux positifs et dans un pays où les réseaux accueillent chaque année + que leurs propres abonnés, c'est trop risqué (c'est la raison pour laquelle la loi a été tunée en urgence pour exclure les réseaux mobiles d'une application trop rigoureuse du MAN).
Au final, cette loi ne sera efficiente que pour les services "légaux" établis en France. Et, en l'absence de généralisation de la signature des appels en provenance de l'international, parfaitement inopérante pour les appels générés depuis l'international, qui se développent à vitesse grand V.
Le 23/05/2025 à 12h29
Concernant cette partie, quand tu parles d'écroulement, tu parles d'une grosse baisse de trafic, ou tu parles d'un réseau qui ne fonctionne plus du tout ?
Le fameux "CLI" est transmis d'opérateur en opérateurs, mais pas le "ND", c'est bien cela ?
Il y a quelque chose qui empêche les opérateurs de bloquer un appel sortant quand ils détectent que leur client tente de lancer un appel avec un CLI ne correspondant pas au ND qui lui est assigné ?
Le 23/05/2025 à 12h40
Le 23/05/2025 à 20h53
Le 24/05/2025 à 13h17
Le 23/05/2025 à 10h03
À voir la mise en oeuvre, mais si c'est comme les plaintes auprès de Bloctel (j'en ai vu une qui date de 2 ou 3 ans "en cours" sur mon profil...), autant dire que les démarcheurs auront la vie belle. En attendant, je continuerai d'appliquer mes principes habituels : ne pas répondre aux numéros inconnus, raccrocher directement si j'ai eu un doute (pas de au revoir rien, ils ont eu raison de ma politesse : le respect se mérite), et envoyer balader mon contact favori, Suspected Spam.
Le 23/05/2025 à 11h16
Espérons que ça va calmer les ardeurs de certains.
Le 23/05/2025 à 11h47
Le 23/05/2025 à 19h32
Le 23/05/2025 à 19h48
Le 23/05/2025 à 10h13
Mettre en avant le personnel alors qu'ils essayent de le réduire pour faire plus de gains, c'est vraiment pas ce qui va inciter les gens a répondre, déjà que le consentement "client" n'est pas pris en compte, et même sur les lignes pro c'est le bordel (ligne qui sert uniquement pour le pro, donc ne devrais pas avoir de démarchage pour des fenêtres & co.
Le 23/05/2025 à 10h15
PS : Quid de par SMS ?
Modifié le 23/05/2025 à 10h18
Le 23/05/2025 à 10h36
Le 23/05/2025 à 19h33
Le 23/05/2025 à 15h03
Je n'ai plus d’indulgence sur les spam telephonique qui ne respectent pas ces indicatifs de démarchage, je les laisse causer et je raccroche sans rien dire... et biensur je suis inscrit sur bloctel depuis très longtemps pour une efficacité plus que discutable (dommage la démarche etait louable).
Le 23/05/2025 à 10h21
Oui, mais dans quel pays ?
Le 23/05/2025 à 10h21
Il n'y a qu'un moyen de faire cesser ces pratiques, ce sont des sanctions dissuasives à chaque infraction plus évidement l'interdiction de diriger une autre entreprise pour les dirigeants de l'entreprise qui sera mise en faillite par les amendes, sinon, c'est facile : on recommence avec une autre société.
Le 23/05/2025 à 10h56
Ils vont dire que ce sont les centres d'appel sous traitants qui sont en faute.
Le 23/05/2025 à 13h34
Le 23/05/2025 à 21h03
A mon sens c'est aussi un problème pour les opérateurs étrangers, qui peuvent donc pas facturer les appels... (mais bon ça on y peux rien nous en France)
Le 23/05/2025 à 10h22
- les centres d'appel ont été massivement délocalisés à l'étranger ;
- le recours massif à l'IA montre qu'ils se moquent bien de l'emplois.
Du reste, ce sont des emplois qui sont trés dur psychologiquement et payés une misère.
Le 23/05/2025 à 16h24
Donc oui, le chantage à l'emploi n'a plus aucun sens.
Le 23/05/2025 à 11h00
Beaucoup de bruit et au final des résultats minables en rapport aux enjeux.
À l'an prochain pour le prochain article sur le sujet.
Le 23/05/2025 à 11h18
- un numéro que je ne connais pas m'appelle, je ne décroche pas et lui laisse une chance de déposer un message sur mon répondeur
- pas de message ? >>> signalement et blocage
(je suis sur liste rouge aussi)
Le 23/05/2025 à 21h13
Depuis l'entrée en vigueur du MAN (censé authentifier les appels) j'ai autant, voir plus d'appels en spam provenant aussi bien de 06/07 que de n° géographiques, surtout de ma zone voire même de ma ville.
Surtout, il ont trouvé une nouvelle technique: Si tu décroche & ne dit rien , t'a , très très vite, une voix (enregistrée, humaine) qui dit "Allo ? Allo ? Tu m'entends ? "
Et si tu réponds "oui ?" (vu que c'est une voix humaine), ya 1s de pause puis la voix de l'IA (ou le disque) démarre ("Bonjour, votre fournisseur d'énergie .... blah blah" , en général je raccroche là)
Et vu qu'ils appellent entre 3 et 10x par jour, sur mon portable, et ce que je raccroche ou que je laisse le tel en comm pour rien, ils rappellent systématiquement mon n°. Je vois même pas à quoi ça sert vu que j'ai jamais réussi à avoir un vrai humain au tel, tout est "guidé" par IA quand tu "joues le jeu" de répondre aux questions.
=> Pour moi les émetteurs ne paient pas les com', donc comme pour le spam simplement ils inondent, même pour rien. Ptet que ce sont des boites qui ont réussi à vendre au forfait un nombre d'appels aux "producteurs d'énergie", se foutant complètement du taux de succès effectif de ces campagnes (c'est du one-shot, pas un business pérenne).
Le 23/05/2025 à 12h44
Les subventions publiques ne font qu'accélerer la fin inflammable et justifient certainement de taire cette même fin.
Le 23/05/2025 à 16h07
Le 23/05/2025 à 16h23
Modifié le 25/05/2025 à 13h34
edit: damn! ça s'affiche bien comme une image dans le preview mais pas après le post (T_T )
Le 24/05/2025 à 07h08
Le 25/05/2025 à 13h28
Le 23/05/2025 à 16h10
Pendant ce temps, combien de millions de gens emmerdés, et combien de milliers d'arnaques menées ?
Qu'en est-il de la prospection où on a donné son numéro de téléphone, mais qu'on n'est pas allés plus loin ? On est prospect à partir de quelle étape, ou pour combien de temps ?
Par exemple une agence immobilière qui garde le numéro 10 ans, ou un commercial d'une société de recrutement.
Ils continuent d'appeler (sans parler des SMS "STOP" qui ne sont pas stoppés) dès qu'ils ont une "bonne affaire" qui correspond (ou pas) à nos critères.
Quand on donne son numéro à l'oral, on ne connait pas la durée de conservation prévues dans la politique de confidentialité. Est-ce donc illimité ? Pour moi, je ne donne pas suite au bout de 6 mois = je ne suis plus intéressé par tes services, donc mon dossier devrait être supprimé, sans même devoir en faire la demande.
Le 24/05/2025 à 13h13
J'ai beau signaler les appels ou les SMS, j'ai toujours autant d'appels. Pas de retour sur le signalement pour savoir si il a été utile.
Le 25/05/2025 à 09h43
Modifié le 27/05/2025 à 10h27
En effet, un des critères du consentement est d'être spécifique, en plus d'être univoque (action positive explicite).
Comment du démarchage pour proposer un produit complémentaire ou "supérieur" peut-il est considéré comme un usage légitime sans ce consentement explicite ?