Depuis l’élection de Donald Trump, la tendance est évidente : un nombre croissant de patrons d’entreprise numériques se rangent derrière le Président des États-Unis. Cela s’est traduit par le financement de son investiture, pour laquelle Amazon, Meta, Apple ou encore Spotify ont versé des fonds.

Certaines ont pris des décisions spectaculaires, comme celle de Mark Zuckerberg de faire voler la modération des services de Meta en éclat, pour adopter des notes de communautés similaires à celles utilisées sur X et assumer de laisser passer des insultes envers diverses minorités.

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Cela s’est aussi traduit par la prise en main brutale de l’administration fédérale par Elon Musk et son « ministère de l’efficacité gouvernementale » (DOGE), qui ont récupéré l’accès aux systèmes informatiques de l’État américain et s’en sont servi pour contrôler et purger des sites internet ou accéder aux données du Trésor, des ressources humaines fédérales et des systèmes publics d’assurance santé et d’assurance pour personnes à faibles revenus Medicare et Medicaid.

Outre les manifestations organisées dans les cinquante états pour protester contre Trump et Musk – « personne n’a voté pour Elon Musk », soulignent certaines affiches brandies lors des rassemblements –, une résistance de consommateurs se met en place à bas bruit.

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Se dévaloriser aux yeux de Meta

Au lendemain des annonces de Zuckerberg relatives à la modération, les recherches Google « Comment supprimer toutes ses images de Facebook », « alternative à Facebook », « Comment quitter Facebook », « Comment quitter Threads » ou « comment supprimer son compte Instagram » avaient augmenté de 5 000 % par rapport aux périodes précédentes, rapportait TechCrunch.

Mais comme le souligne John Oliver, présentateur de l’émission Last Week Tonight diffusée depuis 14 ans sur HBO, tous les internautes ne peuvent pas renoncer aussi simplement à ces réseaux sociaux, que ce soit parce que leurs proches y restent, par méconnaissance d’autres outils, ou pour quantité d’autres raisons. À défaut de quitter les plus grosses plateformes pour Mastodon, Bluesky, Pixelfed ou des services de messagerie comme Signal, le comédien pousse donc son public à réduire l’intérêt publicitaire des données personnelles brassées par l’empire publicitaire de Zuckerberg.

Pour faciliter l’action des internautes, l’équipe de Last Week Tonight a créé un site humoristique (JohnOliverWantsYourRatErotica.com) sur lequel sont détaillées, avec l’aide de l’Electronic Frontier Foundation (EFF), « comment modifier ses paramètres pour se rendre moins intéressant pour Meta ». Autrement dit : comment adapter ses réglages pour réduire la spécificité de la collecte de données des usagers par les réseaux sociaux de Mark Zuckerberg, donc réduire leur intérêt publicitaire.

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Rendre Tesla « toxique »

Pour frapper le principal artisan des coupes en cours au sein de l’administration des États-Unis, certains argumentent pour rendre la possession de Tesla « toxique » – c'est-à-dire sensibiliser les propriétaires de ce type de véhicules aux idées politiques du patron de l’entreprise, les encourager à les revendre, militer pour réduire les contrats ou subventions passés par les acteurs publics avec l’entreprise, etc. Au Canada, la ville de Toronto vient précisément d'annoncer la fin des aides octroyées aux conducteurs de taxi pour l'achat de véhicules électriques de Tesla. La semaine dernière, la chanteuse Sheryl Crow s'est filmée en train de dire adieux à sa Tesla qu'elle a revendue pour, symboliquement, faire un don au média de service public NPR.

Un relatif désamour de la marque se fait déjà sentir depuis plusieurs mois : pour la première fois, en 2024, les ventes de Tesla avaient chuté par rapport à l’année précédente, sur toute la planète. En Europe, si les immatriculations de voitures hybrides ont de nouveau dépassé celles de véhicules à essence en janvier 2025, les ventes de véhicules Tesla ont de leur côté été divisées par deux, ce que le Figaro explique à la fois par un changement de gamme et par les prises de position du patron du constructeur.

La France fait même partie des marchés où les ventes se contractent le plus fortement. Alors que l’hexagone est le deuxième marché européen pour le fabricant de véhicules électriques, les ventes de Tesla ont plongé de 64 % en janvier, contre 6 % de contraction sur l’ensemble du marché de l’électrique.

Appels aux boycotts

Les appels aux boycotts de différents services numériques se multiplient, eux aussi. En janvier, des artistes comme Neil Young ou Joni Mitchell avaient appelé à celui de Spotify, à la fois pour protester contre sa participation au financement de l’investiture de Donald Trump et contre plusieurs autres problématiques spécifiques à la plateforme – trop faible rémunération des artistes, diffusion de musique générée par IA, promotion de désinformation via ses podcasts, etc.

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Ces derniers jours, les appels au boycott se tournent vers une autre plateforme emblématique de l’industrie du numérique : AirBnb. Connu jusqu’au début des années 2020 pour son soutien au camp démocrate, le cofondateur de la plateforme Joe Gebbia a récemment rejoint l’équipe du DOGE. En réaction, certains propriétaires ont retiré toutes leurs annonces de la plateforme, tandis que d’autres, locataires ou propriétaires, appelaient en ligne à boycotter le service.

Un porte-parole d’AirBnb a néanmoins rappelé au San Francisco Standard que Joe Gebbia n’avait plus joué de « rôle opérationnel au sein de l’entreprise depuis juillet 2022 », date à laquelle il avait annoncé se mettre en retrait, mais rester au conseil d’administration de la plateforme de location.

Rappelons que des campagnes de boycott ont déjà eu lieu par le passé, sans nécessairement avoir d’effet concret sur les résultats des entreprises. Meta, en particulier, a essuyé à plusieurs reprises des campagnes de suppressions de comptes et des boycotts d'entreprises publicitaires, sans que son chiffre d'affaires ne plonge réellement.

Du côté de X, en revanche, elles ont suffisamment d’impact pour qu’Elon Musk poursuive en justice des sociétés ayant suspendu leurs contrats avec lui (l'entrepreneur est un habitué des bras de fer juridiques). Selon le Wall Street Journal, les dirigeants de X auraient même récemment menacé de répercussions administratives des agences publicitaires qui n’accepteraient pas de signer de nouveaux contrats avec le réseau social.

À moins d’être rapidement freinées, les méthodes d’Elon Musk, soutenu par Donald Trump, risquent quoi qu'il en soit de provoquer une « récession très profonde », alertait l’économiste Jesse Rothstein début février devant le nombre de contrats et d’emplois fédéraux.

Une perspective éloignée des promesses électorales de Trump en matière de réduction de l’inflation ou d’aide des classes moyennes à faire face au coût de la vie. Pour certains analystes, les effets des actions des cinq dernières semaines pourraient se faire sentir pendant plusieurs décennies.