Afin de mieux lutter contre les propos haineux ou injurieux sur Internet, la secrétaire d’État au Numérique a affirmé hier qu’elle souhaitait apporter des modifications à la loi de 1881 sur la liberté de la presse. Plusieurs pistes de travail seraient actuellement examinées par Bercy, dont la création d’un « référé numérique ». Des annonces qui font suite à celles de la Garde des Sceaux, qui veut de son côté étendre le blocage administratif aux sites racistes et antisémites.
Plus d’un mois et demi après les attentats de Charlie Hebdo, se tenait hier après-midi au Sénat un débat sur le thème d' « Internet et la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse ». Ce texte fondateur, amendé au fil du temps par le législateur, permet aujourd’hui de sanctionner la diffusion de propos racistes, injurieux, incitant à la haine raciale... y compris sur Internet et les réseaux sociaux (voir des exemples de condamnations ici, là ou là).
Ce débat se voulait particulièrement brûlant puisque le délit d’apologie d’actes de terrorisme sur Internet a été transféré de cette loi vers le Code pénal voilà quelques mois, et que François Hollande veut en faire de même pour les propos racistes et antisémites. Un tel basculement emporte pourtant d’importantes conséquences sur le plan procédural. Les délais de prescription sont plus longs (en principe trois ans contre trois mois ou un an, selon les cas), la comparution immédiate est possible, etc.
Le retour de l'internet, zone de non droit...
Force est toutefois de constater que les avis des sénateurs divergent fortement. « Certes, les technologies numériques permettent la diffusion de discours haineux. Mais selon nous, les informations doivent continuer à relever de la loi de 1881, et non du Code pénal. Seule exception : la provocation publique au terrorisme, suivie d'effets » a ainsi soutenu Esther Benbassa, au nom du groupe écologiste. Elle fut rejointe par le sénateur UMP Alain Joyandet : « Non, je ne suis pas favorable à un renforcement de la législation. Le contrôle de la presse s'exerce en France a posteriori, cela vaut aussi pour Internet. Plus qu'à la censure de ceux qui ne sont pas des professionnels de l'information, je suis davantage partisan d'un renforcement de la déontologie. »
Mais comme on pouvait le craindre, certains sont rapidement tombés dans la caricature. Aux yeux de Pierre Charon, lui aussi UMP, Internet « est devenu un espace de liberté absolue, s'affranchissant de toutes les frontières géographiques, juridiques, voire morales. En 2015, il apparaît comme un espace sans foi ni loi, où se diffuse le pire de ce que l'humanité peut produire, où une organisation comme l'État islamique peut lancer, profitant d'une existence médiatique sans limite, sa propagande fanatique ». L’élu s’est félicité du récent blocage administratif de sites « terroristes », et prôné une modernisation de l’arsenal législatif en vigueur.
Ils furent ainsi nombreux à souhaiter un dépoussiérage de la loi de 1881, mais selon des sens encore flous. « Le cadre procédural de la loi de 1881 n'est pas adapté au web 2.0. Il est urgent de préciser les notions d'espace public et privé » a par exemple soutenu l’écologiste Esther Benbassa. Le communiste Robert Hue a de son côté tenu à insister sur le fait que le législateur « a tendance naturellement à vouloir renforcer l'arsenal législatif, mais il ne faut pas oublier la fonction de l'éducation, la responsabilité de chacun. Se poser les bonnes questions, c'est déjà y répondre partiellement. » a-t-il conclu.
« La loi de 1881 doit être revue » selon Axelle Lemaire
Intervenant en clôture de ce « débat » (où chacun parle en fait à tour de rôle, sans qu’il n’y ait de véritables échanges), la secrétaire d’État au Numérique s’est montrée favorable, de la même manière que la semaine dernière devant l’Assemblée nationale, à une « actualisation » de la loi de 1881.
« Internet a permis le meilleur. (...) Mais Internet est aussi le véhicule du pire. Des condamnations pour entrave à la liberté d'expression, injures ou diffamations ont été prononcées, mais restent rares » a ainsi exposé la locataire de Bercy. En cause, la complexité des procédures (« quand bien même les faits sont convenablement qualifiés, le plaignant doit se référer précisément aux articles et aux alinéas pertinents de la loi, sinon sa requête est considérée comme nulle et non avenue »), le manque de moyens des procureurs face aux nombreuses plaintes qu’ils reçoivent, la faible coopération de certains intermédiaires, etc.
« Il est donc temps d'adapter la loi de 1881 à l'ère du numérique, sans la bouleverser » a poursuivi Axelle Lemaire. L’intéressée a annoncé que plusieurs des propositions formulées le 12 février dernier par la Commission nationale consultative des droits de l'homme (PDF) faisaient actuellement « l'objet d'une expertise juridique ». Ont ainsi été citées : une actualisation des notions d'espace public et privé ; la création d'un référé numérique qui permettrait de simplifier les procédures ; l’instauration d’un « droit de réponse numérique pour les associations » ; un renforcement des pouvoirs du juge ; une harmonisation des délais de prescription, une extension du régime de la responsabilité pénale des personnes morales « au-delà des seules entreprises de presse ».
Modification de la LCEN, éducation à la « citoyenneté numérique », etc.
La secrétaire d’État au Numérique a ajouté que la loi de 1881 n'était « pas le seul cadre » a devoir évoluer. Parmi ses pistes de travail, figure la modification de l’article 6 de la loi pour la confiance dans l’économie numérique, qui vise cette fois les hébergeurs ; une augmentation des moyens, notamment pour la plateforme de signalement Pharos ; le développement de « contre-discours » ; ou bien encore l’éducation. « Il nous faut aussi intervenir en amont, en développant une citoyenneté numérique, pour que les enfants ne soient pas des consommateurs passifs. Le numérique est aussi une affaire d'éducation, de pédagogie, d'où le rôle essentiel de son apprentissage à l'école » a-t-elle soutenu.
La présentation de l’hypothétique projet de loi numérique, promise pour le mois de juin, ainsi que celle du plan gouvernemental contre le racisme et l’antisémitisme, devrait permettre d’en savoir plus sur les mesures finalement retenues par l’exécutif sur ce dossier.
Commentaires (146)
#1
Ca y’est c’est en marche…
#2
Vous trouvez pas ça flippant pour vous ?
#3
C’est pour ton bien " />
#4
En 2015, il apparaît comme un espace sans foi ni loi, où se diffuse le pire de ce que l’humanité peut produire, où une organisation comme l’UMP peut lancer, profitant d’une existence médiatique sans limite, sa propagande fanatique
Fixed " />
Bon ça marche avec les autres ceci dit. Pas de jaloux hein
#5
Des condamnations pour entrave à la liberté d’expression, injures ou diffamations ont été prononcées, mais restent rares
Pour lutter contre les entraves à la liberté d’expression, on va entraver la liberté d’expression.
C’est aussi débile que Mass Effect 3 là.
#6
N’empêche, ce serait comique que, suite à un défilé sur la protection de la liberté d’expression (et de la presse), on cherche à réduire par la loi ces deux dernières " />
#7
C’est comme Jésus dans “Jésus 2 le retour” : “Pour sauver sa peau… il doit mourir” " />
#8
L’injure ou la diffamation ne sont pas des entraves à la liberté d’expression. Ou alors on a ni le même dictionnaire ni la même culture juridique.
Sinon c’est assez flou tout ça. Sachant que les dispositions de loi de 1881 et de la LCEN offrent des possibilités d’action suffisantes pour internet.
J’ai du mal à voir où ils veulent en venir.
Par exemple cet histoire de droit de réponse ouvert aux associations, pas évident d’en déterminer l’intérêt même si on le voit venir;
#9
ça grade dans le mauvais là… bientot le gunkata!!
#10
« Il nous faut aussi intervenir en amont, en développant une citoyenneté numérique, pour que les enfants ne soient pas des consommateurs passifs. Le numérique est aussi une affaire d’éducation, de pédagogie, d’où le rôle essentiel de son apprentissage à l’école »
Maintenant on en est sur, Axelle Lemaire ne sait pas ce qu’est internet.
#11
Ni la liberté de la presse ni la liberté d’expression ne sont absolues en France et en Europe.
En l’état elles sont même déjà limitées..
#12
Ca fait mal au début, mais après ce n’est pas forcément désagréable
#13
C’est typiquement ce que je dirais à quelqu’un sur le billard devant subir une lobotomie " />
#14
#15
Allez savoir pourquoi, je m’attend au pire.
#16
+1 " />
#17
Cabu et consorts doivent se retourner dans leurs tombes. " />
#18
On ne va peut être pas mettre les partis politiques français au même niveau que l’EI…
#19
D’un autre côté quand je lis « Il est donc temps d’adapter la loi de 1881 à l’ère du numérique […] » je suis d’accord avec ça. Les lois sont faites pour s’adapter à l’époque, s’enrichir au fil du temps.
Sinon on continue de se trimballer des textes datant de Mathusalem aujourd’hui complètement désuets. Exemple bête mais concret : l’interdiction d’appeler son cochon Napoléon, ou l’interdiction pour les femmes de porter un pantalon (datant de 1800 et seulement effacée en 2013). Certes ces lois ne s’appliquent plus, ne servent plus à rien, mais elles restent écrites, faute de réactualisation.
#20
Ah ? pourquoi pas ?
#21
#22
Ils n’en ont plus rien à cirer de la connerie humaine.
#23
Après, il ne faudrait pas confondre “liberté” et “libertarisme”. Un peu de contrôle n’a jamais fait de mal. Aujourd’hui sur internet, on peut raconter tout et n’importe quoi en toute impunité.
#24
Je te laisse réfléchir 2 secondes.
Allez, un indice : il y en a 1 qui prône la mort des opposants.
Je suis bien conscient que ce sont tous des truands, mais pas des terroristes.
#25
Les méthodes différents mais ils veulent tous contrôlés le citoyens de base.
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#27
C’est aussi ce qu’a dit le directeur d’école aux gamins " />
#28
#jetaischarly ?
#29
#30
#31
C’est dingue comme certains drames sont utile à certains.
#32
Encore une qui croit qu’on lutte contre l’obscurantisme en le bloquant…
Je pensais que 2000 ans d’histoire nous avaient au moins appris que c’était par l’éducation.
Quant à l’antisémitisme, ce mot-valise qui ne veut rien dire (est-ce contre une “race” ? Une religion ? Une culture ? nul ne le sait mais c’est pas grave “on” va dire que c’est pareil…)
#33
Ça n’a rien à voir…. A moins que ta maison soit un endroit ouvert au public….
#34
“Internet a permis le meilleur. (…) Mais Internet est aussi le véhicule du pire”
Notre franco-canadienne découvre la nature humaine ?
Elle bosse bien, en sous-marin, pour l’état d’où elle est née.
Vivement que l’on foute dehors cette bande de traitre à la nation.
#35
aussi, ouai.
#36
Autre exemple, la loi Gaysso antisémite d’un certaine point de vue (la méthode de recensement des juifs, utilisant les même méthode que les nazis, t’es fils d’un juifs alors t’es juif c’est pas super niveau antiracisme) et ayant un effet contraire à celui prétendument recherché et qui a réinstauré le délit d’intention.
#37
Il faut juste savoir lire : Shlomo sand, E. Chouard, L. Ferry pour savoir qui sont les sémites et par-delà comprendre enfin ce que veut dire antisémite …
… et par de là l’honnêteté avec laquelle il est utilisé dans chaque coupure de presse ou par nos merdias et hommes politiques français (ou d’ailleurs)
Est-ce trop demander aux peuples ?
#38
Mais dit voir , dis nous qui a pondu cette loi , qui a poussé pour cette loi ?
allez google is your friends !
#39
C’est une vieille technique, une dynamo accrochée au corps et c’est de l’énergie pas cher. Comme le disait l’autre porte avion, en France, on a pas de pétrole, mais on a des idées… plein… mais alors tout plein d’idée de merde.
#40
axelle parle nous du TAFTA avec Guiguou stp.
on va rire … ou plutot pleurer.
On est en train de vendre votre pays.
Bientôt votre âme.
#41
Je suis plus pour le système anglo-saxon où ils peuvent raconter ce qu’ils veulent et qu’après qu’on puisse contre argumenter voir même les voir invité dans des émissions se ridiculiser.
#42
Déjà, pour commencer : “Révolte !”
Ensuite, si la loi a été conçue à l’époque, c’était pour une raison précise à propos de la presse. L’existence d’internet aujourd’hui ne remet pas en cause les fondements moraux de la presse. C’est évident que son action ne sert qu’un intérêt privé.
Enfin, la phrase :
“Internet « est devenu un espace de liberté absolue, s’affranchissant de toutes les frontières géographiques, juridiques, voire morales.”
WRONG !!!
Internet n’est pas “devenu” comme ça, il l’était à la base et c’était fait exprès. Ce qu’il est devenu c’est ce que cet UMP et ses collègues essaient d’en faire : un media inerte et reposant.
#43
Je pense que l’idée est de combattre tout propos n’allant pas dans le sens du “dogme gouvernemental”: ça les emmerde, sur internet tout le monde peut s’exprimer.
#44
La liberté d’expression ne l’est pas vraiment. Les démocraties ne le sont pas vraiment.
A-t-on des choses dont on est sûre?
#45
pluzin
Une idée doit être combattue par une idée, pas par la répression.
Et comment peut-on cultiver des idéaux humanistes si on ne peut pas les confronter à des valeurs opposées?
Si on se contente de dire aux citoyens “Voici nos valeurs et notre culture, héritées du siècle des lumières. Faites avec.”, jamais ils ne pourront se les approprier, jamais ils ne les partagerons vraiment.
#46
Faux, les lois existent déjà, avec un processus bien défini : on contacte l’auteur, puis l’hébergeur, et enfin le FAI.
#47
#48
Modification de la LCEN, éducation à la citoyenneté numerique: pensée unique, etc " />
#49
Ça vaut tout aussi avec ta réponse " />
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#50
Est bien Charlie qui veux
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#51
#52
Je connais l’historique de cette loi abjecte niant les droits fondamentaux en matière de liberté d’expression, je n’ai pas besoin de Google.
#53
#54
Je cherche encore le rapport avec une loi sur la liberté de la presse et par essence les commentaires des articles qui n’ont rien à voir avec la liberté de la presse.
Après oui, la presse est libre. Mais juridiquement il est interdit d’avoir des propos diffamatoires, et des propos allant à l’encontre de la personne humaine, tel le racisme ou l’apologie du meurtre.
Rare sont les journalistes qui font ces dérapages.
Du coup les sites tenus par des amateurs, sans accréditation de journaliste, peuvent être, il me semble, attaqué via le droit commun.
#55
#56
Idée de sujet pour le prochain bac de philosophie:
Etre ou ne pas être Charlie telle est la question?
N.B: Veuillez prendre en compte les nouvelles dispositions légales dans l’élaboration de votre expression
N.B: A titre exceptionnel vous disposez de 7h et d’une boite d’aspirine pour cette épreuve.
#57
Il est temps de laisser tomber le modèle républicain.
Passez à un modèle de démocratie directe et fédérale. C’est moins d’emmerdes, plus de légitimité et surtout le citoyen peux plus (+) facilement s’investir de lui-même dans la politique.
#58
« Internet a permis le meilleur. (…) Mais Internet est aussi le véhicule du pire. “
Quand comprendront-ils que le vrai véhicule du meilleur comme de la haine, c’est l’être humain!
Vraiment ils se ridiculisent à force.
#59
Non, c’est après minuit qu’il ne faut pas le nourrir. Ni le mouiller.
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#61
J’ai soumis à Mme Lemaire l’idée de navigation dur internet soumise à autorisation administrative. J’espère être entendu.
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« Le cadre procédural de la loi de 1881 Généralement l’homme politique français n’est pas adapté au web 2.0. »
Fixed.
#66
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Non, ça c’est pour un mogwaï.
#68
Arrêtez de critiquer le gouvernement vous risquez de faire fermer NextInpact … C’est les prochaines propositions de loi.
Ce gouvernement fait n’importe quoi et ils sont de gauche, si la droite revient au pouvoir cela va faire encore plus mal (sur ce sujet en tout cas) car ils sont d’accord avec ces nouvelles lois.
#69
Non, ils sont contre. Elles ne vont juste pas assez loin.
#70
Idée de merde et complètement inutile" />" />
C’est pas en cachant les idées nauséabondes qu’on les combat " />" />
#71
Internet « est devenu un espace de liberté absolue, s’affranchissant de toutes les frontières géographiques, juridiques, voire morales. »
Holala ! Mais c’est un drame. " />
#72
#73
J’avais proposé de mon coté la carte nationale d’identité digitale (les ministres sembles aimer le “digitale”, c’est peut être à cause de l’aire du tactile j’imagine).
Alors, l’idée est un peu flou techniquement, mais en gros, cela permet de reconnaître anonymement les personnes qui poste sur internet. Quand tu allumera ton ordinateur, tu devras activer ton identité numérique. Ainsi, plus personne ne pourra poster sans que l’état ne puisse retrouver la véritable identité de celle-ci. Mais il faut que ça reste anonyme pour les sites, il ne faudrait pas que Google se fassent du beurre sur ces information. Non, c’est nous, qui allons les lui vendre, comme pour la carte grise.
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La France : le pays où il ne se passe pas un jour sans qu’on légifère contre les droits de l’homme…
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Oui mais dans le cercle privé donc avec peu d’impact
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Internet « est devenu un espace de liberté absolue, s’affranchissant de toutes les frontières géographiques, juridiques, voire morales. En 2015, il apparaît comme un espace sans foi ni loi, où se diffuse le pire de ce que l’humanité peut produire »
C’est pareil à l’Assemblée nationale et pourtant, on ne fait pas des lois pour que les députés arrêtent de raconter des conneries " />
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C’est quoi “l’expérience du train” ?
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Si, essaie et tu verras. Rien ne t’empêche de tenir les propos que tu veux dans la rue à un instant T. Tu risques d’avoir des problèmes à l’instant T+1 ça on est d’accord, mais il n’y a aucun système sur tes cordes vocales qui t’empêche de dire ce que tu veux.
Et devine quoi ? C’est pareil sur internet. Je peux écrire ce que je veux à un instant T, et je risque les mêmes ennuis à l’instant T+1. Pourquoi devrait-on faire une différence ?
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C’est toujours pareil, la liberté s’arrête là où commence celle des autres
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Non mais allo quoi: J’ai voulu faire un jeux de mot entre «récurrent» et «brosse».
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