Direct-to-Cell : mais comment diable un smartphone peut communiquer avec un satellite
Avec des ondes, tout simplement !

Comment un smartphone arrive-t-il à communiquer avec un satellite distant de plusieurs centaines de kilomètres, même en orbite basse ? Cela se fait-il au prix d’une explosion du DAS (et donc des émissions d’ondes pour l’utilisateur) ? L’ANFR répond à nos questions.
Le 07 février à 08h45
6 min
Internet
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La semaine dernière, plusieurs nouveautés ont été annoncées dans le petit monde du Direct-to-Cell, c’est-à-dire des communications directes entre des satellites et des smartphones non modifiés. Ça marche : c’est déjà une réalité dans plusieurs pays avec Starlink et des opérateurs locaux.
SMS et appels par des satellites sont déjà une réalité
Chez T-Mobile, les iPhone sont pris en charge depuis peu, en plus de smartphones Samsung sous Android. En Europe, un accord a été signé entre l’Agence spatiale européenne et Viasat afin de déployer du Direct-to-Device. Dans la foulée, l’opérateur britannique Vodafone passait un appel vidéo avec AST SpaceMobile.
Mais, comme l’ont soulevé des lecteurs dans les commentaires, comment se passent les communications avec un satellite à plusieurs centaines de kilomètres d’altitude et qu’en est-il du niveau d’exposition aux ondes (DAS) des utilisateurs ? Nous avons posé la question à l’Agence nationale des fréquences (ANFR).
« Il ne devrait donc pas y avoir d’impact sur le DAS »
Pour commencer, elle nous rappelle que l’objectif du Direct-to-Cell « est d’utiliser le même smartphone que pour les communications terrestres, avec la même puissance maximale que celle qu’il utilise pour ses communications habituelles ». Cela a une conséquence directe sur le niveau d’exposition aux ondes : « Il ne devrait donc pas y avoir d’impact sur le DAS, toujours évalué avec la puissance maximale ».
Il y a aussi une autre possibilité : les services par satellites n’utilisent pas les fréquences terrestres, « mais les fréquences plus élevées du service mobile par satellite ». Dans cette situation, « le DAS ne s’appliquerait pas puisque cette notion ne convient pas pour les hautes fréquences, il faut alors calculer la densité de puissance ».
- Expositions aux ondes (DAS) : tout ce qui change ce 1er juillet
- Ondes émises par les smartphones : #PhoneGate, risques sanitaires et mesure du DAS
Quid de la « densité de puissance » ?
Sur cette page, l’ANFR rappelle que « la mesure de référence est le débit d’absorption spécifique (DAS), pour toutes les ondes comprises entre 100 kHz et 10 GHz ». Au-delà, on passe sur la densité de puissance. Cette mesure intéresse l’Agence qui s’est équipée début 2023 d’un nouveau banc de test pour mesurer l’exposition du public aux ondes électromagnétiques.
L’ANFR explique qu’avec des hautes fréquences (il était question de la 5G à 26 GHz dans son article), « l’énergie captée dans les tissus reste localisée à la surface de la peau. Dans ce cas, l’exposition se caractérise […] en densité de puissance absorbée (DPA) dans les tissus biologiques et s’exprime en Watt par mètre carré (W/m2) ».
Comme nous le rappelions dans notre antisèche sur la 5G, la bande des 26 GHz va permettre aux opérateurs de proposer des débits très importants (en liaison terrestre), mais cette fréquence haute souffre d’une limitation importante : elle ne passe pas à travers les murs, les obstacles et même à travers la main.
Puissance vs autonomie du smartphone
L’ANFR ajoute que les fréquences élevées du service mobile par satellite sont « peu susceptibles de produire une "explosion" des puissances, ne serait-ce que parce que l’autonomie du smartphone demeure prioritaire pour les opérateurs et les utilisateurs ». Augmenter la puissance entraine mathématiquement une consommation plus importante et donc une baisse de l’autonomie.
L’Agence nationale des fréquences restera évidemment « vigilante pour assurer la conformité des terminaux avec les limites de DAS ou de densité de puissance ».
Les antennes des satellites sont beaucoup plus performantes
Nous avons ensuite demandé comment un smartphone pouvait joindre un satellite à plusieurs centaines de kilomètres alors qu’il est parfois difficile d’accrocher des antennes à quelques (dizaines de) kilomètres. L’explication de l’ANFR est assez simple :
« Contrairement aux réseaux terrestres, la liaison montante vers le satellite bénéficie d’une propagation sans obstacle : la puissance transmise n’est donc pas atténuée par les constructions ou les mouvements de terrain.
Bien sûr, elle s’atténue du fait de la grande distance, mais les antennes sur les satellites sont beaucoup plus performantes que les antennes-relais terrestres et elles autorisent des amplifications sans commune mesure : une fois dépliées, elles sont de très grande taille, comme celle du système AST Space Mobile ».
AST Space Mobile, nous en parlions la semaine dernière avec un premier appel vidéo par satellite en partenariat avec l’opérateur Vodafone. Le fabricant explique que chaque satellite « dispose d’une antenne réseau à commande de phase mesurant 64 m² ». Elle est déployée (on peut voir le résultat ci+dessous dans les laboratoires de l’entreprise) une fois le satellite dans l’espace.

Starlink reste assez discret sur le détail technique de sa solution. La société utilise des antennes réseau à commande de phase de « 2,7 x 2,3 m avec des récepteurs radio extrêmement sensibles et des émetteurs haute puissance afin de communiquer avec les smartphones depuis l'espace ».
Avec déjà plus de 6 000 satellites en orbite et une constellation prévue de 12 000 en phase 1, la flotte de Starlink sera bien plus importante que celle d’AST Space Mobile avec « seulement » 243 satellites. Mais les antennes de ces derniers sont plus grandes.
Améliorer les antennes des satellites pour le haut débit
« Ces antennes peuvent capter un signal montant très faible, ce qui autorise d’ores et déjà des services à bas débit (service de type messagerie) », précise l’ANFR.
Pour la suite, le gros du travail sera à faire du côté des satellites : « Pour des services plus élaborés, comme la navigation sur internet et les appels vidéos, les efforts de développement se concentrent également sur les antennes des satellites, puisque le principe du D2D reste de préserver les conditions d’usage et l’autonomie des smartphones ».
Dernière précision et pas des moindres : « bien sûr, ces services ne fonctionneront correctement que lorsque l’utilisateur se trouve en extérieur ».
Direct-to-Cell : mais comment diable un smartphone peut communiquer avec un satellite
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SMS et appels par des satellites sont déjà une réalité
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« Il ne devrait donc pas y avoir d’impact sur le DAS »
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Quid de la « densité de puissance » ?
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Puissance vs autonomie du smartphone
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Les antennes des satellites sont beaucoup plus performantes
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Améliorer les antennes des satellites pour le haut débit
Commentaires (23)
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Abonnez-vousLe 07/02/2025 à 08h52
Un bémol à ça quand même : la météo & la pollution. Les liaisons Starlink sont apparemment très sensible à ça. Je suppose qu'il en sera de même ici.
Le 07/02/2025 à 09h57
Le 07/02/2025 à 11h11
Le 07/02/2025 à 17h11
Ha les cévènnes...
Le 07/02/2025 à 14h16
Ça m'a rappelé qu'une antenne fonctionne autant en émission qu'en réception. Du coup, si une antenne satellite couvre une surface similaire à une antenne terrestre, la qualité de réception reste globalement comparable (en simplifiant). Chaque satellite doit disposer de plusieurs faisceaux de communication, ce qui signifie qu'il établit autant de liaisons avec le sol.
J'ai aussi découvert les antennes réseau à commande de phase, qui j'imagine permettent à Starlink de pointer une zone fixe sur Terre et d’adapter la couverture en fonction des besoins. Sans ce système, les satellites, se déplaçant à environ 7 km/s, changeraient constamment d’antenne.
Le 08/02/2025 à 18h08
Modifié le 07/02/2025 à 09h38
Et quels coûts aussi ?
J’imagine que ça poserait souci si l’utilisateur était directement envoyé sur une communication par satellite facturée à prix d’or sans le prévenir … d’ailleurs la législation nationale s’appliquera t elle sur ces services (prix de roaming dans l’UE etc) ? Car si c’est le même far west que les communications mobiles marines au secours ….
Le 07/02/2025 à 10h23
Par contre les satellites aussi sont spécifiques, ça sera difficile à amortir en concurrence avec starlink internet, plus performant et les opérateurs traditionnels.
Le 07/02/2025 à 11h25
Le 07/02/2025 à 09h40
Quelle est la latence dans ce cas ?
Le 07/02/2025 à 09h58
Le 07/02/2025 à 09h59
Le récent Vendée Globe nous a montré que les liaisons sont quasi permanentes avec l'hexagone, partout autour du monde, probablement avec du matériel moins grand public, mais pas niveau militaire non plus
Le 07/02/2025 à 11h02
Le 07/02/2025 à 11h14
Modifié le 07/02/2025 à 12h47
Les trucs au sol émettent en bande L
Modifié le 07/02/2025 à 10h00
Merci pour cet article très intéressant. À sa lecture, je me pose une question par rapport aux satellites Starlink : quid de ces milliers de satellites et de la pollution qu'ils engendreront ?
E. Musk a-t-il prévu de dépolluer l'espace ?
Je n'ai pas trouvé d'articles à ce sujet, je pense que ça serait très intéressant à étudier comme question !
Le 07/02/2025 à 10h05
Après, il y a aussi d’autres pollutions
Il y a de nombreuses autres actualités sur le sujet sur Next :)
Le 07/02/2025 à 13h41
Le 07/02/2025 à 11h03
Est ce que ça veut dire que l'interception par des satellites de nos communications est deja une réalité ?
Le 07/02/2025 à 11h21
Le 07/02/2025 à 11h28
Le 09/02/2025 à 13h05
Et uniquement su ces bandes ? Je suppose aussi qu'une fraction des téléphones est compatible avec ces bandes.
Le 09/02/2025 à 14h24