Direct-to-Device : les iPhone parlent avec Starlink, l’Europe veut entrer dans la danse
Du DTC made in Starlink

Cela fait maintenant des mois que l’on parle de Direct-to-Cell ou Direct-to-Device, notamment suite aux annonces de Starlink. Cette fonctionnalité de communication par satellite débarque sur les iPhone aux États-Unis, tandis que l’Europe signe un partenariat avec Viasat. Mais de quoi s’agit-il exactement ?
Le 29 janvier à 14h16
6 min
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L’Agence spatiale européenne (ESA) et Viasat viennent d’annoncer un « accord visant à explorer un partenariat concernant un système satellitaire D2D (Direct to Device), visant à fournir une connectivité mobile à large bande à tout moment et en tout lieu ».
Puisqu’on est dans les acronymes, plongeons gaiement dedans et crevons l’abcès. Dans son communiqué, Viasat parle d’un « Non-Terrestrial Network (NTN) LEO Direct-to-Device (D2D) système » (sic) pour l’Europe et le reste du monde. Reprenons calmement.
Qu’est-ce qu’un Non-Terrestrial Network ?
Les Non-Terrestrial Network (NTN) sont, selon la 3GPP, « des réseaux ou des segments de réseaux qui utilisent soit des systèmes d’aéronefs sans équipage […] soit des satellites ». Plusieurs orbites sont possibles, certaines proches de la Terre, d’autres plus éloignées.
Des tentatives ont déjà été lancées par le passé, notamment avec les ballons connectés Loon de Google et le drone Aquila de Facebook, projets tous deux abandonnés depuis.
LEO : rappel sur les orbites, leurs avantages et inconvénients
LEO (pour Low Earth Orbit) désigne une des nombreuses orbites autour de la Terre. « C’est l’orbite la plus proche de la Terre, entre environ 300 km et 3 000 km d’altitude », précise le Centre national d’études spatiales. « C’est là où se trouvent la majorité (plus de 80 %) des engins artificiels : satellites d’observation, de météorologie, de télécommunications… », ajoute le CNES. Deux principales raisons : « moins d’énergie au lancement. Et cette proximité avec la Terre réduit les temps de trajet des communications entre la surface et l’engin ».
Avant l'arrivée des constellations LEO de type Starlink, il existait déjà depuis longtemps des communications par satellites pour accéder à Internet, mais sur des orbites géostationnaires à 36 000 km d’altitude. Le temps pour le signal de faire des allers-retours fait exploser la latence à plusieurs centaines de millisecondes. En étant 100 fois plus proche de la Terre, la latence est divisée par le double de ce même facteur.
En orbite géostationnaire, le satellite reste par contre toujours à la même place dans le ciel, alors que sur des orbites LEO il le traverse à grande vitesse, obligeant à multiplier les satellites et gérer des communications entre eux.
Direct-to-Device et Direct-to-Cell : c’est quoi, quelles différences ?
Enfin, Direct-to-Device est « une communication directe, qui ne nécessite pas le passage par le réseau cellulaire », explique l’Arcep. On parle aussi de Direct to Cell lorsqu’il s’agit d’un smartphone alors que Direct to Device s’applique à tous les objets connectés.

Comment fonctionne le Direct-to-Cell de SpaceX
Direct-to-Cell est le nom utilisé par Starlink. La société a envoyé ses premiers satellites avec cette technologie début 2024. En pratique, ils disposent d’un modem LTE (eNodeB) « qui fonctionne comme une antenne-relai de téléphonie mobile dans l'espace ». Côté smartphone, « aucune modification du matériel, du logiciel ou des applications spéciales n’est nécessaire ».
« Moins de 6 jours après le lancement, nous avons envoyé et reçu nos premiers SMS vers et depuis des smartphones non modifiés », en utilisant le réseau de T-Mobile. Depuis, les partenariats se sont multipliés avec Rogers au Canada, Optus en Australie, One en Nouvelle-Zélande, KDDI au Japon, Salt en Suisse, Entel au Chili et au Pérou…
Direct-to-Device : cette année, Starlink s’ouvrira à l’IOT
Starlink annonce que les SMS sont déjà utilisables, tandis que les appels arriveront « prochainement ». Pour les données et l’IoT ca sera dans le courant de cette année. Le premier appel en Direct-to-Cell a été passé début 2024.
First video call on @X completed through @Starlink Direct to Cell satellites from unmodified mobile phones!
— SpaceX (@SpaceX) May 21, 2024
We’re excited to go live with @TMobile later this year 🛰️🌎 pic.twitter.com/v4nA5B75EX
Direct-to-Cell de Starlink chez T-Mobile : après Samsung, Apple
En décembre, T-Mobile ouvrait les inscriptions pour tester, en bêta, le Direct-to-Cell de Starlink. L’opérateur expliquait alors que 300 satellites compatibles étaient en orbite et rappelait que la FCC venait de donner son autorisation à cette expérimentation.
Seuls des smartphones Android (de chez Samsung qui plus est) étaient éligibles dans un premier temps. C’est désormais également possible sur les iPhone, comme le rapporte Reuters, à condition d’avoir la mise à jour 18.3 d’iOS.
Comme le précise MacRumors, des clients inscrit au programme reçoivent le message suivant : « Vous êtes dans la version bêta de T-Mobile Starlink. Vous pouvez désormais rester connecté en envoyant des SMS par satellite depuis pratiquement n'importe où. Pour commencer à profiter d'une couverture plus étendue, veuillez effectuer la mise à jour vers iOS 18.3 ».
Apple propose pour rappel depuis déjà un moment des SOS d’urgence par satellite, à partir des iPhone 14. La fonctionnalité est arrivée en France fin 2022, et permet « d’envoyer un message aux services d’urgence en l’absence de couverture réseau cellulaire ou Wi-Fi ».
T-Mobile cible la « grande majorité des smartphones modernes »
Cette fonctionnalité est limitée aux clients aux États-Unis pour le moment. Durant la phase bêta, elle est gratuite, mais le prix par la suite n’est pas précisé. L’opérateur prévoit, selon nos confrères, de déployer cette fonctionnalité sur la « grande majorité des smartphones modernes ».
L’Europe s’associe à Viasat pour son propre Direct-to-Device
Revenons maintenant à l’annonce entre Viasat et l’ESA : il s’agit de proposer une alternative au réseau de Starlink, avec du Direct-to-Cell et plus largement du Direct-to-Device. Viasat étant une société américaine, pour la souveraineté on repassera.
« Nous sommes engagés dans le développement de capacités spatiales Direct-to-Device basées sur la 3GPP et d’autres normes ouvertes pertinentes, en combinant les satellites GEO [orbite géostationnaire à 36 000 km, ndlr] existants avec une nouvelle constellation de satellites LEO qui répond aux besoins des utilisateurs en Europe et dans le monde entier », explique Mark Dankberg (CEO de Viasat).
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Commentaires (26)
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Abonnez-vousLe 29/01/2025 à 14h26
Quid de la puissance d'émission d'une smartphone ? Déjà que certains constructeurs se font épingler plus ou moins régulièrement en Europe sur des dépassements de DAS pour une antenne sensée être à proximité, je n'ose imaginer pour un satellite à plusieurs centaines de km.
Et c'est jouable niveau saturation des réseaux ? Ca peut tenir le choc ?
Si l'idée n'est pas forcément mauvaise en soi (par ex. zone sans couverture, ou après un sinistre majeur), à mon sens, il faut que cela reste une solution de "secours".
Le 29/01/2025 à 14h54
L'utilisateur lui il a toujours son icone 4G/5G et sa barre de réception. Éventuellement ça peut se comporter comme un roaming international (ça coupe internet, tu reçois des tarifs...)
Le 29/01/2025 à 15h00
et les antennes qui peuvent saturer en ville si y'a des centaines de connexion simultanées, comment gère un satellite qui est censé couvrir des milliers voire millions de connexions ?
Le 29/01/2025 à 15h34
C'est pour ça que j'évoque un traitement similaire au roaming. Tu bascules sur le réseau partenaire (Starlink, Viasat...) et tu as des tarifs spéciaux, élevés, comme quand tu vas dans un pays non couvert par ton forfait, pour limiter les usages, donc la saturation.
Pour la puissance d'émission, c'est une bonne question et je n'ai pas la réponse. Logiquement en émission oui il va falloir pousser un peu !
Le 29/01/2025 à 16h12
la question était sur le coté technique :)
Le 29/01/2025 à 15h43
Le 29/01/2025 à 16h14
c'est juste pour parler de la volumétrie en jeu, en antenne en ville va capter les téléphone dans un certain rayon relativement limité quand le satellite couvrira une zone beaucoup plus large
Le 29/01/2025 à 15h46
Le 29/01/2025 à 16h23
si une antenne tombe subitement, elle ne pourra pas signaler aux antennes alentours les appareils quittant sa zone et qui vont bientôt se connecter à une de ses voisines
en terrestre les téléphones vont rechercher une nouvelle antenne, et celles alentours vont prendre en charge les appareils à portée, mais le satellite aura tout le monde "à portée"
exemple hypothétique : 4 antennes subissent un incendie criminel, tous les appareils qui y étaient connecté vont rechercher une nouvelle antenne, les cellules terrestre vont avoir une surcharge limitée par leur portée, le satellite va voir arriver la totalité des appareils, il va devoir trier même si au final tous les téléphones se reconnectent au sol ...
Le 29/01/2025 à 15h49
Le satellite utilise des antennes à décalage de phase pour "pointer" précisément vers un mobile au sol. Il peut théoriquement découper le sol en petite cellules avec un trafic indépendant.
Les tours mobiles font un truc similaire mais uniquement en azimut.
Le 29/01/2025 à 16h26
par contre il lui faut toujours "écouter" tout le territoire pour chopper une demande de connexion, ça me semble plus complexe avec le "bruit" omniprésent des communications actives au sol
Le 29/01/2025 à 22h40
Côté antenne, c'est difficile de compenser : les satellites starlink utilisent effectivement une antenne à commande de phase en bande Ku pour internet, mais probablement pas pour la bande L ou S des fréquences 4G/5G qui aurait peu d’intérêt (pour que ça ait intérêt il faudrait un antenne de taille importante qui permet d'obtenir un gain de réseau significatif). Et même si c'était le cas, par exemple avec une antenne de 1m x 1m (qui est déjà énorme pour des petits satellites Starlink), à 1800 MHz (une des bandes 4G), la gain de l'antenne serait de 26dBi (4piS/lambda). Le gain des antennes 4G/5G est généralement entre 10 et 25dBi. En pratique l'antenne est probablement plus petite que 1m², et le gain doit être du même ordre que pour les antennes relais, voir inférieur.
Enfin, il y a effectivement moins de masquage par satellite mais en contrepartie les pertes atmosphériques sont plus importantes.
Au final, pour faire passer quelques b/s ou kb/s pour des SMS ou des appels basse qualité ça doit suffire, mais pour de l'internet c'est compliqué, ou alors il faut des satellites bien plus gros.
Le 29/01/2025 à 15h47
c'est rien d'autre qu'une antenne LTE/5G à basse orbite, et non un satellite téléphonique classique.
Le 29/01/2025 à 15h50
Cela reste un smartphone qui passe par des protocoles classiques du mobile, mais au lieu d'être fourni par des antennes terrestres, c'est fourni par un satellite (d'où le "satellitaire").
Le 31/01/2025 à 10h09
- La puissance est nécessaire lorsqu'il y a atténuation, et dans ces bandes c'est surtout les obstacles qui atténuent. Ici on est en vue directe, et en partie dans du vide.
- Les antennes côté satellite sont très performantes et nombreuses, ainsi que le nombre de satellites. En outre, l'orbite est très basse.
Franchement c'est un progrès énorme, surtout pour les zones blanches ou en pleine mer.
Le 31/01/2025 à 10h32
La puissance maximale côté smartphone étant normalisée, il faut donc jouer côté de la réception pour capter un maximum de signal (taille de l'antenne) puis amplifier ce signal sans le détériorer. Rien de très simple.
En fait, l'antenne est composée de plein de petites antennes (
Ce type d'antennes permet aussi de meilleures performances côté émission satellite.
Le 31/01/2025 à 10h48
Mais cela serait quand même intéressant d'approfondir le sujet.
Le 29/01/2025 à 15h20
Si le but à la fin c'est de streamer youtube, je suis dubitatif.
Le 29/01/2025 à 15h45
le D2D n'est certainement pas fait pour le divertissement/loisir.
Le 29/01/2025 à 18h38
Modifié le 29/01/2025 à 18h08
certes concernant la puissance c'est toujours assez flou pour moi, mais il faut admettre que cette expérience n'est pas là pour être utilisée au quotidien
le projet D2D de starlink, c'est simple : au lieu de transformer les téléphones en mobiles satellites, on envoie l'antenne 4G/5G dans l'espace.
à partir de là :
-évidemment la puissance nécessaire pour le joindre sera atomique
-évidemment le temps nécsesaire pour l'envoi d'un SMS sera de quelques minutes
-évidemment c'est fait pour tout sauf de la data/streaming/loisir, faut voir ca comme un réseau très léger
-évidemment l'objectif du projet est de permettre la communication vers les secours de manière très ponctuelle et certainement pas quotidienne ni permanente.
en gros, les abonnés tmobile qui en bénéficient aujourd'hui, s'en servent très exceptionnellement, dans des zones où le mode avion sera de mise à l'exception d'une urgence, en raison de :
- la nature de l'accès qui est satellitaire et donc très faible de consommation (SMS/tel uniquement)
- l'utilisation de la batterie de dingue qui sera nécessaire pour la communication (souvenez du scandale du ping pong entre le réseau free propre et l'itinérance orange 3G? ouin ma batterie fond comme neige au soleil)
- les frais d'itinérance : ce n'est pas le réseau tmobile ou de votre opérateur cellulaire, il faut voir cet accès comme une itinérance zone internationale/spéciale, cad que le SMS vous sera facturé rubis sur ongle.
- l'usage de cette solution reste très très ponctuel et exceptionnel : aucun doute que son usage se fera pour les situation d'urgence, vie en danger, etc... c'est tout sauf pour du permanent, de la transmission occasionnelle de SMS, c'est tout.
je vous suggère fortement de faire un tour sur le fil starlink de lafibre, plein de bonnes infos :
https://lafibre.info/starlink/starlink-v2-5g/
et pour info, les premières impressions des retours abonnés tmobile (usa) qui en bénéficient (tel samsung ou iphone dernier cri indispensable)
edit : rajout des captures d'écran iphone/android
pour info, différentes captures faites sur samsung/android et apple/iphone dernière génération :
https://pix.milkywan.fr/d9lPzQ73.jpeg
https://pix.milkywan.fr/ftaidF9M.webp
https://pix.milkywan.fr/rewvsBbr.webp
https://pix.milkywan.fr/mRlhwF8c.webp
Le 29/01/2025 à 16h59
The direct-to-cellular system also presents significant opportunities for Internet-of-Things (“IoT”) applications. With enhanced space-based coverage, users will be able to deploy off-theshelf, low-cost, commercially available IoT devices equipped with a T-Mobile SIM card to monitor critical infrastructure, track vehicles, deploy smart agriculture solutions, and detect wildfire activity in remote locations, to provide just a few examples.
S'il doit y avoir surconsommation de la batterie c'est à cause des boucles de perte/recherche de connexion.
Mais pas à cause de la communication en elle-même.
Le 29/01/2025 à 18h37
Vous êtes sûr de votre coup sur le "double" ?
Si la satellite est 100 fois plus proche, la distance aller-retour est elle aussi divisée par 100, pas par "le double de ce même facteur", nope ?
C'est déjà très bien, ça permet d'obtenir une latence totale normale malgré le trajet via un satellite :
+250 ms pour un passage via un satellite géostationnaire, ça se ressent !
moins de 3 ms pour un passage via un satellite en orbite basse, ça reste très tolérable comme ajout.
Modifié le 30/01/2025 à 16h24
Le 30/01/2025 à 12h13
imaginons un satellite à 1 km et un autre à 100 km
l'aller retour est à 2km au lieu de 200km
le rapport reste de 100
Le 29/01/2025 à 21h47
Quand on part en montagne, ça serait tellement plus sécurisant de pouvoir joindre les secours même sans réseau.