[Édito] Liberté d’expression n’est pas synonyme d’irresponsabilité
Quand les réseaux sociaux, leurs intérêts et leurs travers occupent l’actualité, la liberté d’expression n’est jamais loin. Trop souvent, cette valeur cardinale est en réalité brandie pour promouvoir une forme d'irresponsabilité des constructeurs de ces outils, comme de ceux qui s'y expriment.
Le 26 janvier à 16h59
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C’est arrivé avec le récent débat autour de Substack : une plateforme qui édite des newsletters (et ressemble de plus en plus à un réseau social) doit-elle héberger des écrits nazis ? Et en tirer profit ?
C’est arrivé avec TikTok, sur lequel on retrouve mythes et légendes sur la guerre en Ukraine, des conseils de santé délirants et des publicités mensongères.
C’est arrivé avec Twitter (nouvellement X), au gré des décisions d’Elon Musk d’y réintégrer des personnalités violentes ou de promouvoir les « super-diffuseurs » de désinformation.
C’est arrivé avec Alphabet, chez qui YouTube hébergeait dès 2017 dix fois plus de vidéos affirmant que la terre est plate plutôt que la réalité scientifique pure et simple : elle est ronde.
C’est arrivé avec Meta, dont le fonctionnement a participé à enflammer les discussions en Birmanie, en Inde ou en Éthiopie, à alimenter des guerres ethniques et à noyer les internautes sous la désinformation en période électorale.
Et chaque fois, le même sujet revient : « oui, mais la liberté d’expression ». En ligne, la liberté d’expression permettrait de tout dire, tout le temps, sur tout le monde et sans limite.
C’est parfaitement vrai : c’est ce qu’une certaine culture numérique clame depuis les débuts du web. C’est aussi complètement faux : le cyberespace n’a jamais été extérieur à la société.
Or la société, qu’elle soit française, américaine ou autre, a posé des limites à la liberté d’expression, parce que c’est la condition du vivre-ensemble.
Et parce que liberté n’est pas synonyme d’irresponsabilité.
Promesses non tenues d’une certaine cyberculture
Précis (extrêmement) succinct de sciences politiques : les humains sont fascinants, mais s’ils ne se cadrent pas, l’expérience a montré qu’ils avaient une légère tendance à sombrer dans la violence. C’est du moins ce qu’a théorisé Thomas Hobbes dans Du Citoyen, en 1641 – « homo homini lupus est », l’homme est un loup pour l’homme – puis Léviathan (1651).
S’appuyant sur divers philosophes antiques, le théoricien imagine un état de nature dans lequel les plus forts (qu’ils le soient grâce à leurs muscles, l’argent, leur fourberie ou autre) tendent à taper sur les plus faibles si le groupe n’instaure pas quelques règles.
La solution, propose-t-il : établir un contrat, une convention par laquelle les personnes se désaisissent de leur pouvoir au profit de représentants au sein de la Cité. À ces représentants de créer les règles qui permettront de vivre en bonne intelligence. Le but : rendre évident que le collectif permet d’aller plus loin que l’individu seul. Ou, plus terre-à-terre : rendre la violence plus coûteuse que la coopération.
Dans la thèse de Hobbes, ce transfert protège aussi les hommes des abus de pouvoir de l’État. Sans vous refaire l’histoire (pour la trouver, par ici ou par là), certains des pionniers de la contre-culture numérique la plus abondamment citée pour justifier toutes sortes de décisions relatives au fonctionnement de l’industrie technologique sont loin d’être convaincus par cette seconde partie.
Il suffit de relire la déclaration d’indépendance du cyberespace de John Perry Barlow pour le constater. En 1996, la tendance était à la lutte contre la censure étatique, et l’esprit était à la promotion d’idées libertaires dans ce nouvel et vaste espace qu’était le monde cyber.
Simplement, le cyberespace a largement évolué et certaines des affirmations formulées par Barlow ont été largement contredites (nous avons bien conscience que son manifeste n’a jamais eu valeur de loi, mais il a le mérite d’exister et de permettre de mesurer le chemin parcouru).
Ainsi de ce vœu formulé à l’adresse des gouvernements : « Lorsque de véritables conflits se produiront, lorsque des erreurs seront commises, nous les identifierons et nous les réglerons par nos propres moyens. Nous établissons notre propre contrat social. L’autorité y sera définie selon les conditions de notre monde et non du vôtre. »
La liberté d’agresser est une menace pour les libertés démocratiques
Dans les couches hautes, force est de constater que cette prédiction ne s’est pas réalisée : c’est une poignée d’entreprises privées qui sont venues imposer leurs propres règles, qu’elles appliquent à l’envi. Parmi leurs pratiques, un laisser-faire à dimension variable lorsqu’il s’agit de gérer les cyberviolences et la désinformation.
La propagation de ce type de contenu a pourtant des conséquences bien réelles sur le monde hors ligne. De mon côté, j’en ai d’abord pris conscience en constatant leurs effets sur la liberté d’informer. C’est simple : ça la limite. C’est une forme de censure.
Puis j’ai appliqué au sujet mes questionnements en matière d’inégalités. Et de constater que les études et les témoignages s’accumulaient, sur la violence spécifique, supplémentaire, que des internautes déversaient contre les femmes et les minorités. Quand se taire est la seule manière d’éviter la violence, quand disparaître des espaces numériques devient enjeu de survie, où est la liberté d’expression ?
De fait, le libre cours laissé aux publications les plus nauséabondes est une menace pour la démocratie, et l’alerte de plus en plus largement et fréquemment tirée.
La liberté d’expression absolue n’existe pas
Surtout, en France, la liberté d’expression est ancrée dans l’article 10 de la Convention européenne des droits humain et l’article 11 de la Charte européenne des droits fondamentaux. Pour autant, elle est limitée à « certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l'intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l'ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d'autrui, pour empêcher la divulgation d'informations confidentielles ou pour garantir l'autorité et l'impartialité du pouvoir judiciaire ».
L’article 17 de la Convention prévoit aussi qu’aucune de ses dispositions « ne peut être interprétée comme impliquant, pour un État, un groupement ou un individu, un droit quelconque de se livrer à une activité ou d'accomplir un acte visant à la destruction des droits ou libertés reconnus dans la présente Convention ou à des limitations plus amples de ces droits et libertés que celles prévues à ladite Convention ».
Là, c’est le moment où quelqu’un dit « oui mais aux États-Unis ». Et bien aux États-Unis aussi, quand bien même le 1er amendement de la Constitution locale consacre une liberté d’expression plus large que dans la plupart des démocraties, il existe des limites. Le premier amendement ne permet pas d’inciter à commettre un acte illégal, par exemple. Et s’il protège l’expression des opinions politiques de manière plus libérale qu’ailleurs, il permet aussi de se taire.
Surtout, brandir la liberté d’expression pour évoquer les discours en ligne, c’est oublier la question algorithmique. « Free speech is not the same as free reach », écrivait la brillante sociologue de la tech Zeynep Tufekci en 2018 : le problème n’est pas tant l’opinion prononcée que la propension des outils sur laquelle elle est émise à la promouvoir, à la diffuser à une vitesse inégalée jusqu’ici.
Sans reprendre l’intégralité de la liste à la Prévert de tout à l’heure, rappelons tout de même que dès 2016, des documents internes alertaient les chefferies de Facebook sur le fait que 64 % des personnes qui ont rejoint des groupes à tendance extrémiste les ont trouvés grâce à leurs propres outils de recommandations.
En 2021, les documents diffusés par la lanceuse d’alerte Frances Haugen permettaient de révéler que pendant trois ans, la mécanique du réseau social avait systématiquement survalorisé les publications attirant l’emoji « colère » – c’est-à-dire les contenus les plus violents ou, souvent, faux.
De même, quand un Elon Musk réintègre des utilisateurs bannis pour leur violence ou leur propension à diffuser de fausses informations, il ne peut ignorer que la décision initiale de bannissement avait été faite par les équipes « Trust and safety » de Twitter, pour la sérénité des échanges et la sécurité des utilisateurs.
Quelles solutions ?
Évidemment, qui dit démocratie dit diversité d’opinions, et si le problème devient chaque jour plus évident, il y a débat sur les solutions à apporter au problème. La solution choisie par l’Union européenne : formaliser certaines obligations de modération et de gestion des discours pour les plateformes les plus grandes. Quitte à les menacer de les couper purement et simplement s’ils ne coopèrent pas (c’est du moins l’option adoptée par Thierry Breton à la veille de l’entrée en vigueur du règlement sur les services numériques).
Pour d’autres, comme la Quadrature du Net, le salut viendrait plutôt de la décentralisation et de l’interopérabilité des réseaux : en permettant à chacun d’échanger depuis la plateforme qui lui convient, aucun internaute n’aurait l’obligation de rester sur une plateforme dont les règles de modération lui déplaisent au motif que s’y trouve sa communauté de contacts.
Mastodon tente d’en proposer un exemple, d’ailleurs. Mais force est de constater qu’avec 8 millions d’inscrits et un peu moins de 2 millions d’utilisateurs actifs en septembre 2023, il rencontre un succès moindre qu’un Threads (propriété de Meta, compterait actuellement 160 millions d’utilisateurs, dont 23,7 millions d’actifs mensuels en septembre 2023), ou des plus de 350 millions d’utilisateurs actifs de X.
Quelle solution, face à des contenus qui déplaisent ou des outils qui les promeuvent ? À la fin de son ouvrage Servitudes Virtuelles, le philosophe et informaticien Jean-Gabriel Ganascia propose, au sujet de l’intelligence artificielle, de suivre les principes éthiques qu’avait proposé Albert Camus pour l’exercice d’un journalisme libre dans un manifeste de 1939 : la lucidité, le refus, l’ironie et l’obstination. « En face de la marée montante de la bêtise, écrivait le journaliste, il est nécessaire également d'opposer quelques refus. »
Le rapport avec nos réseaux sociaux ? Quand on critique ses logiques d’amplification et de distorsion, ce sont ses algorithmes que l’on pointe. Par ailleurs, à l’heure de la « révolution de l’information », chaque internaute est forcé d’adopter certaines des pratiques jusqu’ici prépondérantes au métier de journaliste : pour s’orienter dans le flot des publications dont nous abreuvent nos outils numériques, chacun doit trier, faire exercice d’esprit critique, hiérarchiser, choisir (ce qui peut mener parfois à de la fatigue décisionnelle, mais c’est un sujet pour un autre jour).
Prenons conscience de ces libertés et de la responsabilité qu’elles représentent.
« Car, s'il ne peut dire tout ce qu'il pense » écrit Camus au sujet du journaliste libre, mais reprenons le ici pour tous les internautes, « il lui est possible de ne pas dire ce qu'il ne pense pas ou qu'il croit faux. (…) Cette liberté toute négative est, de loin, la plus importante de toutes, si l'on sait la maintenir. Car elle prépare l'avènement de la vraie liberté. »
[Édito] Liberté d’expression n’est pas synonyme d’irresponsabilité
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Promesses non tenues d’une certaine cyberculture
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La liberté d’agresser est une menace pour les libertés démocratiques
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La liberté d’expression absolue n’existe pas
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Quelles solutions ?
Commentaires (40)
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Abonnez-vousLe 26/01/2024 à 17h25
Modifié le 26/01/2024 à 18h40
(à peu près)
Modifié le 26/01/2024 à 19h00
Larousse
Le 26/01/2024 à 19h02
Modifié le 27/01/2024 à 13h09
modif : cette carte est titrée "Map of the square and stationary Earth" – traduction Carte de la Terre carrée et immobile – cette carte est une interprétation de la Bible (probablement une traduction, et essentiellement une lecture littérale de la Genèse) par Orlando Ferguson (qui m'était inconnu mais qui a sa fiche Wikipedia en anglais) dont la thèse souhaite réfuter la «théorie du globe» terrestre, de la Terre «volante» que rien ne maintient (des anges se situeraient aux 4 coins de la Terre pour la maintenir). La Terre ne serait donc pas ronde mais carrée.
Le 28/01/2024 à 18h31
Encore des gens qui lisent ce qui veulent comprendre...
Modifié le 28/01/2024 à 19h32
Une autre traduction : « Il habite au-dessus de la voûte qui couvre la terre (…) »
L'AELF catholiques francophones
Le 26/01/2024 à 19h17
Modifié le 26/01/2024 à 21h58
Mouais... J'ai perdu un compte Twitter car j'essayais d'expliquer à un américain que sa façon de penser était similaire à celle que les violeurs invoquent pour justifier leurs actes, et donc que sa logique était absurde. On m'a banni pour « slut-shamming » après l'évocation de mon exemple.
Le risque d'être « responsable » pour un réseau social, c'est d'aller trop loin dans la modération et/ou de devenir une chambre d'écho à terme car la façon la plus simple d'éviter toute « aggressivité » c'est encore de s'assurer que les usagers soient tous identiques. Quand tout le monde a les mêmes pensées et discours, tout devient plus simple en particulier la modération. Il suffit de voir certains célèbres sous de Reddit pour s'en convaincre. C'est pourquoi l'option « Mastodon » et même « Threads » ont été très tentantes suite au rachat de Twitter par Elon Musk, mais au final seuls les usagers qui adorent cette logique ont suivi.
On vit dans une ère où même placer un point à la fin d'une phrase est potentiellement « aggressif » (ce que j'ai appris seulement l'année dernière), où utiliser certains emojis peut être vu comme « hostile », etc. Il est impossible de ne pas « agresser » quiconque avec une si large population terrestre. Je considère depuis que si vous vous sentez aggressé par mes mots, c'est VOTRE problème, non le mien.
Le 26/01/2024 à 23h00
Le 26/01/2024 à 23h05
Par exemple, comment t'es-tu senti réellement suite à la lecture de ma phrase précédente ? Y a-t-il ne serait-ce qu'un tout petit peu de colère ou de tristesse ? Si c'est le cas, c'est que la violence dont j'ai usé dans ma phrase (l'utilisation du "tu qui tue") était suffisante pour faire naître chez toi une émotion négative.
Allors, certes, ce sont TES émotions et donc TON problème, mais ça n'en demeure pas moins MOI le responsable déclencheur. J'ai la responsabilité civique de n'aggresser personne, et donc c'est bel et bien AUSSI mon problème que de m'exprimer avec non-violence et dans le respect de l'autre.
Et pour les smileys, je terminerais par ceci :
Modifié le 27/01/2024 à 14h46
Il est impossible de ne pas être « violent » « à tout moment » contre quelqu'un vu que nous ne sommes plus dans l'ère des forums à quelques centaines de personnes mais dans une communauté globale, et surtout s'il s'agit d'une personne qui a envie de ressentir une « violence » dans mes propos que ce soit par mauvaise foi ou par un sérieux souci d'éducation.
Car le problème est que nos jours le caractère MANIFESTE n'est plus impératif pour désigner une supposée « violence », de part le fait que la définition de « violence » a été corrompue avec le temps (tout comme d'autres mots comme « fasciste », etc.).
Il y aurait une violence manifeste si en réponse à une personne m'indiquant que je suis « littéralement en train de le tuer », je lui répondrai alors de bien vouloir mourir. Cependant comme je le montre par mes exemples, des détails de forme pourtant ridicules comme un point à la fin d'une phrase suffit à « agresser » quelqu'un. A ce stade, TOUT est « violence ».
De fait je joue au moindre effort, et où se situe-t-il ? Chez « l'agressé ». Il peut facilement ignorer et/ou oublier les propos ou faits supposés « violents », alors qu'il m'est impossible d'éviter de choquer personne sur cette planète sauf à me taire définitivement, ce que je refuse. C'est donc VOTRE problème.
Je suis néanmoins conscient que cette situation a un travers : c'est de rendre le discours sur les « snowflakes », les « éternels offensés » et similaires très tentants, ce qui est la porte ouverte à être influencé par des biais anti-génération Z et autres.
Le 27/01/2024 à 16h58
Au vu de ce que je lis dans ta réponse, il me semble que la "communication non-violente" (CNV) ne t'est pas familière.
Je vais ici avoir un discours quelque peu prosélyte : avant de découvrir la CNV, j'avais tendance à avoir le même schéma de penser que toi, aussi je crois bien te comprendre. Cependant, et même si ta façon de voir les choses est tout à fait viable, il me semble que tu y gagnerai à te renseigner et à te former à la CNV, principalement pour améliorer tes relations humaines.
Il y a pléthore de documentation sur le sujet sur internet. 😉
Si tu t'y met, je peux te garantir une seule chose : ta vision des humains changera, tu comprendras un peu mieux tes congénères, et tu profiteras plus de tes échanges avec eux, sur le long terme. Tu éviteras aussi pas mal de conflits mineurs. 😊
Le 28/01/2024 à 14h02
Le 28/01/2024 à 20h20
Modifié le 01/02/2024 à 20h00
En clair, ce type de communication ressemble à la notion de civilité à l'américaine, que je soupçonne d'avoir contribué à créer certains de leurs délires sociétaux actuels. Exemple, on ne peut plus dire qu'être obèse crée de gros problèmes de santé car ça choque les personnes visées, sauf que cela a permis l'émergence d'un courant contraire affirmant que l'être ne pose AUCUN souci de santé en affirmant même qu'il n'y a aucune étude prouvant le contraire, au point que des médecins jouent le jeu outre-atlantique. En voulant ne pas les choquer, cette civilité fait que ces personnes pensent qu'on les valide dans leurs idées ridicules.
Evidemment extrapoler la CNV avec ce genre de délire est une exagération que mon cerveau tordu réalise souvent. Pour autant, j'exècre l'hypocrisie. Je préfère la franchise dure mais sincère et constructive, ce qui est différent de vouloir humilier le destinataire. J'estime que l'on avance pas en voulant caresser dans le sens du poil les sentiments des gens, au contraire même vu comment se sentir offensé pour tout et surtout n'importe quoi s'est généralisée depuis l'émergence des réseaux sociaux.
A défaut d'une communication « violente », il faut que les gens se durcissent un peu. Il est vrai que les réseaux sociaux sont une nouveauté dans l'histoire humaine qui permet de dépasser de loin le nombre de Dunbar, mais cela fait que chacun est plus susceptible de se faire sortir de sa zone de confort à tout moment. Si les gens n'y tiennent pas compte ils vont sombrer, peu importe la sémantique employée.
Le 26/01/2024 à 23h08
Le 27/01/2024 à 08h05
Le 27/01/2024 à 09h02
J'en profite pour placer un conseil de lecture : l'esprit critique d'Isabelle Bauthian et Gally.
https://www.editions-delcourt.fr/bd/series/serie-l-esprit-critique/album-l-esprit-critique
Une très clair et complète démonstration de ce qu'est l'esprit critique.
Le 27/01/2024 à 10h38
Desproges disait : "bienvenue dans cette société qui a résolu tous ses problèmes en appelant un chat un chien"
Du coup, j'essaye d'appeler un facho un facho, etc.
Ça m'a valu de la fermeture et du bannissement de comptes. Là, je suis dans la merde, Twitter vient de me réactiver mon dernier compte, après 1 an 1/2 - 2 ans de "lecture seule" ...
Guy Béart chantait : "le premier qui dit la vérité, il doit être exécuté"
Le 27/01/2024 à 10h58
Le 31/01/2024 à 09h15
Le 03/03/2024 à 12h45
Ceci n'est pas du tout contradictoire avec ce que j'ai dit. Au contraire, ça le renforce ! On ne peut pas connaître le statut de véracité de celui qui est "exécuté" (réellement ou médiatiquement), a fortiori si on ne sait pas ce qu'est la vérité !
Modifié le 27/01/2024 à 16h20
C'est ce que font les plateformes de réseaux sociaux et de messageries : un brouhaha d'infos divertissantes et de captation de l'attention. Il n'y a aucune vérité qui puisse émerger de ces chambres d'écho médiatiques, de ces théâtres d'ombres chinoises, de ces caisses de résonance. En tout cas, les quelques vérités qu'on y trouve sont comme des pépites ou des champignons : il faut chercher longtemps, connaître les bons coins et savoir les reconnaître.
Le 27/01/2024 à 11h17
Modifié le 27/01/2024 à 15h47
Le 27/01/2024 à 11h36
Pour le reste, édito intéressant et incisif. Merci Mathilde.
Le 27/01/2024 à 13h33
La pub me parait toujours mensongere.
Mensonge par omission ?
Le 27/01/2024 à 14h32
Le 27/01/2024 à 14h00
Le 27/01/2024 à 14h57
À partager sans modération :)
Le 29/01/2024 à 18h54
Tout ce qui est dit est logique. Mais il est bon de rappeler les basiques.
On nous rabâche souvent les besoins de liberté de chacun ou de tous, mais les devoirs de responsabilités sont beaucoup moins souvent mis en avant.
Le 27/01/2024 à 17h29
Et il parle de quoi en fait ?
Liberté d'expression n'est pas synonyme d'irresponsabilité.
La liberté d'expression, qu'elle soit aux USA, en Europe (et dans l'UE) ou en France (je suis ignorant pour les autres pays), je vois assez bien ce que c'est, qui a droit à cette liberté (les individus ou groupes), par rapport à qui (par rapport aux états qui ne peuvent la limiter que dans certains cas variables suivant la localisation) et sur quels textes elle s'appuie (pour les texte, c'est dommage de ne pas avoir cité pour la France les articles 10 et 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 mais uniquement des textes Européens). D'ailleurs, dans tous ces textes, la liberté d'expression inclut en particulier la liberté de la presse (ou bien elle est citée en même temps comme dans le premier amendement des USA).
Et l'irresponsabilité (et la responsabilité), c'est celle de qui dont il est question ?
Celle de ceux qui s'expriment ou celle des lieux (plateformes) où la liberté d'expression s'exerce ?
Je dirais les 2 comme le souligne l'entête de l'édito, même si j'ai l'impression que l'on parle surtout de celles des plateformes.
Quand on parle de liberté d'expression, on parle de droits fondamentaux, que ce soit en Europe ou aux USA.
Il y a des restrictions à cette liberté dans tous les cas, mais beaucoup plus en Europe qu'aux USA.
À par ces restrictions (lois ou jurisprudences), rien ne peut empêcher la liberté d'expression sauf le respect d'un autre droit fondamental qui sera jugé plus important au cas pas cas. J'ai parlé récemment de cas où le droit à la vie privée avait été reconnu supérieur à la liberté d'expression, mais ce n'est pas une règle, toujours du cas par cas.
Donc, pour ceux qui s'expriment, quand on oppose liberté d'expression et responsabilité, c'est forcément d'un point de vue légal. Le faire sur un autre plan (point de vue moral par exemple) n'a que peu d'intérêt parce que on pourra certes jeter sa désapprobation sur certains propos, mais c'est tout. Tant que celui qui s'exprime reste dans le cadre de la loi, l'État ne pourra rien contre lui.
Par contre, s'il sort du cadre de la loi, là, il devient responsable de ses propos et pourra en rendre compte devant la justice.
Remarque : il peut y avoir d'autres règles que les lois qui limitent la liberté d'expression quand celle-ci s'exerce sur un média privé. Twitter, Facebook et même Next peuvent établir leurs propres règles et ils le font. Il est évident (ou à peu près) qu'elles ne peuvent pas être plus permissives que les lois applicables.
Passons donc à la responsabilité (ou absence d'irresponsabilité) des plateformes.
La première chose est que la plupart de ces plateformes ont leur siège aux USA. J'ai l'impression que dans celles- citées seule TikTok n'est pas dans ce cas et est chinoise.
Quand on parle de liberté d'expression, cela est important parce que celles des USA est beaucoup plus large qu'en Europe et en France. Elle est consacrée par le premier amendement à leur constitution, c'est dire l'importance qu'ils ont accordé à cette liberté. Cette liberté est très ancrée dans la culture américaine. Et oui, là-bas, on peut avoirs des propos nazis et se balader avec des uniformes nazis avec la protection des forces de l'ordre. Mais, il faut quand même faire attention à ne pas diffamer, Trump vient d'en faire une expérience très coûteuse.
Donc, que les plateformes écrivent leurs règles avec cette liberté en tête est normal, qu'ils aient du mal avec les règles européennes l'est aussi dans une certaine mesure, mais il faut qu'ils s'y plient et qu'ils adaptent leurs règles au droit local.
Mais quand Musk demande à T. Breton de dire en public au non de la liberté d'expression ce que la Commission demande à Twitter/X de supprimer, c'est un bouffon (et il le sait probablement) qui essaie de décrédibiliser l'UE et son DSA. Par contre, quand il décide de réintégrer des personnes bannies précédemment pour lesquelles le droit US s'applique, il en a le droit parce que rien ne s'oppose à ça aux USA et parce qu'il est le propriétaire de cette société. Est-ce qu'il rend service à sa société ? C'est un autre problème. Est-ce que c'est nocif pour la société ? Ce n'est pas dans ses préoccupations, donc, la responsabilité morale n'a pas de prise sur lui, il s'en fiche.
Substack et les nazis : c'est surtout une histoire de conscience (responsabilité morale) en terme de responsabilité, par contre, le boycott des autres utilisateurs aurait pu influer sur leur choix, mais en fait, cela n'a pas été le cas. Ils ont juste supprimé les publication qui pouvaient avoir un problème légal, donc lié à leur responsabilité légale.
Donc, a priori, ils préfèrent gagner de l'argent avec des propos nazis quand ceux-ci sont légaux aux USA. Je dis ça, mais en fait, c'est peut-être juste le côté culturel de la liberté d'expression à l'américaine qui a dicté leur choix ; comme je l'ai déjà dit, il est très fort.
Pour Alphabet et Meta, ça me semble aussi un mix entre la culture de la liberté d'expression et de recherche de chiffre d'affaire maximal. On ne devient pas les plus gros groupes mondiaux en étant moral.
(À suivre, je n'ai pas fini)
Modifié le 27/01/2024 à 18h22
« Nous disons Liberté-Égalité-Fraternité parce que notre volonté est de demeurer fidèles aux principes démocratiques (…) qui sont l'enjeu de cette guerre pour la vie et la mort. » – le général de Gaulle – Discours du 15 novembre 1941
Le 27/01/2024 à 18h57
Certes, la morale aide à un moment donné à définir le droit, mais c'est tout. Une fois, le droit établit, lui seul oblige.
Une responsabilité peut être légale ou morale. Le TLFi définit la responsabilité morale comme : C'est donc très personnel.
Le mot morale n'apparaît pas dans la Déclaration des droits de l'homme et du Citoyen de 1789. C'est donc bien qu'il n'en est pas question. Celle-ci ne fait que définir des droits et libertés ainsi que quelques devoirs et des principes.
Modifié le 28/01/2024 à 17h06
« Free speech is not the same as free reach ».
Dans une société libre, la liberté d'expression c'est justement aussi la liberté des plateformes de décider ce qu'ils acceptent ou non sur leur plateforme. C'est aussi le propos de XKCD.
La loi offre une base de ce qui n'est pas autorisé, mais ce qu'ont démontré les expériences de Musk sur Twitter cette année est que se tenir à une application stricte de la loi américaine est intenable, malgré ses discours sa position a évolué, et par ailleurs il ne manque pas de bannir arbitrairement tout ce qui lui déplait depuis le début.
Par ailleurs il y a une responsabilité envers la société. Une politique qui (tout en étant légale) encourage la haine ou des positions extrémistes va causer des critiques légitimes de la société civile et va décourager certains publicitaires. C'est le fonctionnement normal d'une société saine.
Le 28/01/2024 à 10h14
Autrement dit : avoir suffisamment d'ouverture d'esprit concernant les opinions d'autrui mais savoir nuancer ses réponses (pour ne pas tomber dans le flaming). Toutes proportions gardées bien évidemment. :-)
Le 28/01/2024 à 21h33
Le 01/02/2024 à 15h16
Étant moi-même plutôt favorable à une liberté d'expression quasi totale, j'ai toujours du mal avec certaines tendances à vouloir toujours censurer, supprimer, criminaliser des propos, mais d'un autre côté je sais que la liberté totale dans un monde globalisé avec énormément de visions et de cultures différentes mène à beaucoup d'incompréhension, d'agressivité, qui dégénère souvent, l'humain étant ce qu'il est. Et le manque de mesure, de réflexion et de recul n'aide pas.
Cela dit, même si ça pourrait me porter préjudice et me "ranger" dans une catégorie (passe-temps favori à l'ère des réseaux sociaux) à laquelle je ne pense pas appartenir, j'avoue que j'en peux plus des phrases du genre "Le racisme n'est pas une opinion, c'est un délit" qu'on sort souvent au quart de tour. Bah en fait, c'est les deux. On a le droit de trouver que c'est une opinion débile, et certes c'est punissable de nos jours, mais pour moi c'est bien les deux. Et de l'autre côté du spectre, les phrases comme "On peut plus rien dire" ou "C'est du fascisme" (ou du nazisme) sorties tout autant au quart de tour, pour tout et n'importe quoi, ça me sort par les trous de nez aussi. (pauvre de moi, je devrais éviter les réseaux sus-cités, qui sont remplis de tout ça :) )
Le 01/02/2024 à 18h58
Être raciste n'est pas un délit. C'est le comportement qui en découle qui peut être un délit.
Ça comprend : l'injure raciste, la diffamation raciste, la discrimination, la provocation à la haine, à discrimination ou à la violence, les menaces, les violences en raison de la race réelle ou supposée de la victime.
J'en ai peut-être oublié.
Mais ne pas aimer quelqu'un ou un groupe de personnes en fonction de sa race si cela ne se traduit pas par un acte condamné par la loi, ce n'est pas un délit.
Les raccourcis, c'est toujours dangereux sur ces sujets.
Ceci l'explique pas mal.