Vendredi dernier, un procès s’est tenu à Paris opposant une internaute, Émilie Colin, à MM. Patrice Guyot et Jean-Philippe Muller, deux hauts fonctionnaires qu’elle avait présentés sous des termes acidulés comme négociateurs français du projet de l’accord anticontrefaçon, ACTA, désormais rejeté par le Parlement européen.
En 2010, Émilie Colin avait publié un article intitulé « ACTA : mais où est caché Charly ? » sur le site de la ligue Odebi. Elle avait spécialement cité Guyot et Muller, deux conseillers techniques de Bercy comme impliqués dans l'Accord Commercial Anti-Contrefaçon au nom de la France.
En note de bas de page, Émilie Colin égrainait leurs CV respectifs avec des commentaires doux-amers : des non-élus qui entretiennent selon elle des liens étroits avec l’industrie agrochimique ou celle de la pharmacie. C’est cette contextualisation nuageuse qui a âprement déplu aux deux intéressés qui ont trainé l’auteure devant la 17e chambre du TGI de Paris. À ses côtés, Thibault Lesage fut lui aussi sur les bancs des accusés, non comme auteur de l’article mais pour ses fonctions sur le site.
Des noms déjà lâchés sur Twitter
Dans l’ordonnance de renvoi en correctionnel, il est fait état de termes « susceptibles de renfermer des allégations et des imputations de faits de nature à porter à l’honneur et à la considération » de ces deux hauts fonctionnaires. Ils réclament un euro de dommages et intérêts pour ce qu’ils considèrent être des diffamations.
Après des heures de plaidoiries vendredi dernier, « la procureure a estimé qu’il s’agissait d’un jugement de valeur qui n’avait rien de diffamant » nous résume Émilie Colin qui rapporte que l’un et l’autre démentent toujours avoir été négociateurs sur ACTA pour la France mais revendiquent un rôle plus subalterne de suivi du dossier. Nuance.
Dans le crépitement d’ACTA, les noms de ces deux personnes n’étaient pourtant pas inconnus puisque le porte-parole de la Quadrature du Net, Jérémie Zimmermann, les avait cités sur son fil Twitter dès le 26 février 2010. On les retrouvait également à l’honneur sur le site de la Quadrature par exemple ce communiqué de mars 2010 annonçant une rencontre entre ces deux personnes, le collectif et Act Up ou celui-ci, sans évoquer plusieurs articles de presse.
Une autre procédure a visé Act Up
Fin 2010, les deux intéressés avaient par ailleurs adressé une mise en demeure adressée à Act Up Paris pour faire retirer un article où l’association juge que « dans les mois qui suivront ACTA, le blocage des médicaments génériques causé par cet accord va tuer. Les négociateurs en seront directement responsables ».
Or, selon le cabinet chargé de la défense des deux fonctionnaires, « MM. Guyot et Muller se voient ici imputer non seulement d’être les acteurs principaux d’un grave déni de démocratie dont des ministres, un secrétaire d’État et le président de la République seraient les complices, mais encore de tuer, et ce sciemment ». Et celui-ci d’insister : ces deux personnes « ne sont pas négociateurs de l’accord ACTA » et n’ont donc « pas vocation à être ainsi violemment et publiquement prises à partie, ces propos excèdent les limites d’un débat même vif sur un sujet d’intérêt public ». L’article d’Act Up en cause est toujours en ligne.
Pétition et soutiens
Pour aider Émilie Colin, et par contrecoup Thibault Lesage, un site a été mis en ligne accompagné d’une pétition: l’accord ACTA représentait « un danger pour la liberté d’expression » expliquent ses auteurs. Émilie Colin, poursuivent-ils, avait « produit beaucoup d’articles pour alerter sur la non-transparence des négociations et sur les dangers posés par le traité. Elle dénonçait le fait que les parlementaires ne soient pas associés au processus de décision, celui-ci étant mené exclusivement par des techniciens sans mandat électif. »
D’autres soutiens sont venus depuis comme Noël Mamère qui regrette des poursuites « absurdes » (notre capture), ou encore José Bové et même Richard Stallman.
Venue témoigner vendredi, l’eurodéputée Sandrine Bélier considère pour sa part que « ce procès fait peser une menace sur les lanceurs d’alerte en France » et « si l’on se concentre uniquement sur le fond de l’affaire, que reproche-t-on en effet vraiment à Émilie Colin et Thibault Lesage ? D’avoir réussi à rendre public [des noms] jusque-là tenus secrets, et de s’être inquiétés des positions que ceux-ci étaient susceptibles de défendre, là où nul, pas même le Parlement européen, n’était tenu informé par les États parties à l’accord tant du contenu du texte en préparation que de l’identité de ses négociateurs ? »
La parlementaire en profite pour dénoncer l’opacité d’ACTA et d’un autre accord UE-Etats-Unis (TIPP/TAFTA). Selon elle, cette procédure manifesterait la volonté de « continuer à confiner au secret toute négociation actuelle et future engageant l’avenir de nombreux pans de notre société, de l’accès aux médicaments génériques, à la protection des libertés publiques, en passant par le droit de nos agriculteurs à ne pas dépendre juridiquement de grandes firmes agrochimiques. »
Le délibéré a été fixé au 2 mai 2014.
Commentaires (66)
Douce France dictature.
Aller en commence à emmerder les gens qui se battent pour dénoncer des vérités qui dérangent.
il vont gagner en prime un magnifique effet Streisand
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Seno ACTA gamat
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C’est clair que comme c’est parti le métier d’avocat est vraiment un métier d’avenir…
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Bientôt comme aux US ils feront de la pub à la TV et il y en aura presque un par habitant…
La vérité qui fâche…Equilibrium n’est pas loin…
Je dis cela, je ne dis rien en même temps.
L’abus de droit, nouveau sport de riches quand la population leur demande des comptes.
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Il y a du laid dans l’Acta ?
Elle dénonçait le fait que les parlementaires ne soient pas associés au processus de décision, celui-ci étant mené exclusivement par des techniciens sans mandat électif.
Bizarrement, on n’entend jamais ces parangons d’activistes parés de leur démocratisme de façade dénoncer ces mêmes “techniciens sans mandat électif” quand leur “travail”, qui perdurent depuis des décennies au vu et au su de tous, va dans le “bon sens” (càd le leur) : leur attitude héroïquement hypocrite ne trompe que les naïfs.
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…
Oh wait, ici on n’attaque pas la dénonciation d’ACTA mais une attaque ad-nominem contre des personnes bien précises.
Le moins qu’on puisse leur proposer c’est de se défendre y compris via un tribunal non ?
Ou alors sous prétexte qu’elles ont travaillé sur Acta, elles sont d’offiice, accusées, coupables et condamnées ?
Il y a du laid dans l’Acta ?
Les produiiiiits latieeeers sont nos amies po…
*Aie,ouille,arrêtez d’me balancer des pierres,moi aussi je trouve cette pub merdique,aïe.*
Enfin le font du problème c’est de savoir si oui, ou non, ils sont les négociateurs d’ACTA. Parce que si ils le sont pas, on peut quand même comprendre leur réaction. Personnellement, ça me dérangerait d’être accusé de quelque chose que je n’ai pas fait.
Si c’est pas un signe supplémentaire pour faire peur aux lanceurs d’alertes…
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La Justice, c’est comme l’hôpital, ce n’est jamais bon d’y aller. Mais ça enrichi les avocats, c’est sûr.
deubeule, ergonomie à revoir
Quand je vois que environ 400 jeunes européens se sont déplacé à Bruxelles il y a quelques semaines, afin d’interroger les parlementaires sur des questions d’avenir, et qu’ils ne se sont fait recevoir que par un seul d’entre eux (le parlementaire Belges, qui donc habite à proximité), et que l’info n’a à peine été reprise par les médias (si ce n’est la télé belge… et encore), je me dis que, même en voulant bouger les choses et en ce mobilisant, ça ne fais ni chaud ni froid… (Cherchez Raise Youth Voice (ouhttps://www.facebook.com/RaiseYouthVoice) pour ceux qui veulent un peu plus d’info - pour le peu qu’il y a :x)
Il y a du laid dans l’Acta ?
Du laid a mal tourné, il fait de la crème sur Twitter ?
J’ai ma liberté d’opinion et rien ne me la supprimeras, surtout pas des personnes qui ne supporte pas LA vérité.
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l’un et l’autre démentent toujours avoir été négociateurs sur ACTA pour la France mais revendiquent un rôle plus subalterne de suivi du dossier. Nuance.
Ils ne font rien, ils se situent.
Ils sont consultants ambigus
Des hydres multinationales.
Pas de nom et pas de photo,
Leurs sociétés sont étrangères.
Plus compliqué est le réseau
Qui les relie à leurs affaires.
Troisièmes Couteaux
ACTA : deux hauts fonctionnaires de Bercy attaquent une internaute
aléa jacta est, Acta est fabula
La dictature, c’est maintenant.
VOUS SAVEZ MAINTENANT POUR QUI NE PAS VOTER…
MAIS N’OUBLIEZ PAS QUE DES COUPS TORDUS ET AUTRES ÉLIMINATIONS PHYSIQUES SE PRÉPARENT :
http://www.pcinpact.com/news/86607-la-dgse-puise-a-sa-guise-dans-flux-dorange.ht…
et paris qui parle de moscou…
Il est nécessaire et salutaire pour la démocratie de lutter sans relâche contre tous ces projets de traités. Il est même crucial de se mobiliser très fortement contre l’accord UE-Etats-Unis (TIPP/TAFTA). Tous les moyens doivent être employés et en premier lieu la publication des noms des négociateurs puisque l’opacité la plus grande règne lors de ces discussions. On commence maintenant à s’attaquer aux simples citoyens qui dénoncent ces cuisines immondes qui sont autant d’attaques contre la démocratie. Les peuples ne vont pas se laisser faire et s’il faut lutter contre cette oligarchie européenne par la force, les peuples finiront par le faire. Nous sommes entrés dans une période pré-révolutionnaire comme en 1789 !
Honte à ces gens qui pour de l’argent sont prés à tout…détruire !
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