Comment un simple tweet a fait tanguer les marchés à hauteur de 2 000 milliards de dollars
Down Rodeo

Un simple tweet, publié par un compte X « certifié », a mis le feu aux marchés lundi, entraînant une hausse momentanée de quelque 2 000 milliards de dollars de la capitalisation boursière mondiale. L'incident, survenu dans un contexte de fébrilité exceptionnel, souligne à quel point les marchés restent vulnérables à des tentatives de manipulation délibérées.
Le 08 avril à 15h02
5 min
Économie
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Plus volatil, tu meurs. Sur les forums spécialisés comme sur les réseaux sociaux, l'annonce d'une embellie s'est propagée comme une traînée de poudre lundi après-midi (heure de Paris) : après trois jours de baisse continue, l'heure du rebond est arrivée, et les indices repartent à la hausse ! Pendant vingt minutes, une forme d'euphorie gagne les investisseurs.
Entre le moment où la contagion a débuté et celui où le feu de paille s'est éteint, les places boursières ont regagné lundi l'équivalent de quelque 2 000 milliards de dollars de capitalisation perdus depuis le 3 avril et l'annonce de la mise en place des droits de douane exceptionnels décidés par Donald Trump. Avant de les reperdre, tout aussi rapidement. Que s'est-il donc passé ?
Une interview détournée
Le phénomène débute avec un tweet massivement relayé par de nombreux comptes présentant des affinités avec les thématiques de l'investissement en bourse ou des cryptomonnaies. Écrit tout en majuscules, il affirme : « Trump envisage une pause de 90 jours dans la mise en place des droits de douane pour tous les pays sauf la Chine ». Souvent, il est assorti d'un nom propre, Hassett, en référence à Kevin Hassett, le conseiller économique de Donald Trump à la Maison-Blanche.
Une heure plus tôt, la question d'une possible pause dans la mise en œuvre des droits de douane lui avait bien été posée au micro de Fox News, mais Kevin Hassett avait alors botté en touche, indiquant que le président déciderait... ce qu'il déciderait.
Une intox particulièrement virale
C'est cette déclaration, plutôt prudente, qui semble avoir servi de point de départ à la diffusion d'une fausse information. D'après le déroulé retracé par NPR, la fake news aurait d'abord été propagée par un compte X baptisé Hammer Capital, et doté de la coche bleue (accessible en souscrivant un abonnement payant) qui permet de disposer de la mention « certifié » à côté de son pseudonyme et offre une portée supérieure aux messages. Le compte initial affiche environ 1 100 followers, mais la fausse information gagne rapidement en visibilité grâce au relais de nombreux autres comptes.

Quelques minutes plus tard, elle gagne une nouvelle caisse de résonance : le message est repris par le compte @DeItaone, qui compte pour sa part quelque 850 000 abonnés, et adopte « Walter Bloomberg » comme pseudonyme sur le réseau social X.
Officiellement, le compte n'a aucun lien avec la célèbre agence d'actu financière Bloomberg, mais il relaie fréquemment les alertes de cette dernière, ce qui explique vraisemblablement sa popularité. Le flux de dépêches de Bloomberg est très prisé des investisseurs particuliers, dans la mesure où il permet d'être alerté très en avance de phase d'éventuelles informations susceptibles d'influencer la bourse, mais il est payant (et facturé très cher).
Une caution journalistique
À ce stade, ni Bloomberg, ni la Maison-Blanche, ni Fox News n'ont confirmé la soi-disant pause sur leurs propres canaux, et même si la rumeur a déjà entraîné un début de hausse sur les marchés, son effet reste encore limité. Le véritable déclencheur intervient peu après 16 heures (heure de Paris), quand CNBC relaie l'intox – via son bandeau d'informations écrites – sur son direct. Cinq minutes plus tard, l'agence Reuters envoie à son tour une dépêche, qui confère, aux yeux de nombreux investisseurs, une légitimité à l'information... jusqu'à ce que la Maison-Blanche démente.
« Alors que nous suivions l'évolution du marché en temps réel, nous avons diffusé des informations non confirmées dans une bannière. Nos reporters ont rapidement corrigé l'information à l'antenne », précise une porte-parole de CNBC au Wall Street Journal. « La Maison-Blanche a démenti ces informations. Reuters a retiré cette information erronée et regrette son erreur », réagit Reuters dans la même veine.

Immédiatement, les investisseurs qui avaient acheté des titres ou des fonds cotés pour essayer de profiter de la hausse s'extraient du marché, provoquant la fin de l'embellie. Dans le lot, d'aucuns s'estiment toutefois heureux : la hausse a été si fulgurante que celui qui a acheté et vendu au bon moment a pu, en quelques minutes, réaliser un gain à deux chiffres.
La martingale est d'ailleurs si belle qu'elle devrait, en théorie, motiver l'ouverture d'une enquête, notamment aux États-Unis, où Donald Trump a récemment renforcé son pouvoir de contrôle sur le gendarme de la bourse, la SEC.
Comment un simple tweet a fait tanguer les marchés à hauteur de 2 000 milliards de dollars
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Commentaires (20)
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Abonnez-vousLe 08/04/2025 à 16h20
Le 08/04/2025 à 16h43
C'est vrai que Trump a dit en gros "Ne soyez pas stupide, on va tous devenir très riche".
Tu penses qu'il fait ça pour faire baisser la bourse et que lui et ses potes profitent des prix soldés avant de faire remonter les cours en annulant tout ?
Ce serait gros quand même
Le 08/04/2025 à 17h33
Le 08/04/2025 à 18h23
Le 08/04/2025 à 20h23
Le 09/04/2025 à 18h30
Le 09/04/2025 à 20h28
Idem pour @Erwan123 qui est "assez" d'accord.
Modifié le 10/04/2025 à 01h09
Quand une entreprise veut se développer, elle a besoin de ressources, cad de pognon, pour investir dans des nouvelles machines par ex. ou ouvrir de nouveaux bureaux.
4 choix possibles (à ma connaissance, mais je ne bosse pas dans la Finance non plus):
1 - Réinvestir tous les bénéfices de l'année précédente. Ex: Mars (les barres chocolatées & la bouffe pour chat... Et une visite d'usine à 9h, pas l'usine des barres chocolatées, l'autre malheureusement, et bien ça donne presque envie de gerb... bref).
Donc c'est long & lent car dans l'industrie, on ne fait 40% de marge. Donc pas des dizaines de millions tous les ans de dispo à réinvestir.
2- Faire un ou plusieurs emprunts auprès de plusieurs banques. Typiquement Peugeot s'était développé assez rapidement grâce à l'emprunt quand Renault utilisait plutôt sa trésorerie accumulée.
3 - Faire un emprunt où tout le monde peut prêter, moyennant une reconnaissance de dette. La personne qui prête sera remboursée dans 10 ans (par exemple), mais pour la faire patienter, tous les ans, à la fin de l'année, elle pourra toucher des êtrennes, un % de ce qu'elle a prêté. Ça s'appelle des obligations et les êtrennes des coupons
On y arrive:
4 - La boîte ne veut pas s'endetter, donc les dirigeants décident de vendre des parts, des morceaux de la boîte en échange de pognon.
Au départ, c'est forcément des gros morceaux, et seulement des zinzins y ont accès (investisseurs institutionnels: banques , compagnies d'assurance, fonds d'investissement). C'est le capital risque ou Prívate Equity.
Ensuite si la boîte marche bien, au bout de 4 à 7 ans, elle peut espérer rentrer en Bourse, cad que tout le monde aura la possibilité d'acheter des parts de la boîte et non plus seulement les zinzins.
Là le prix de la part est fixé par l'offre et la demande sur un marché boursier.
Le but d'aller en Bourse est de lever des capitaux, du pognon pour que la boîte se développe.
Mais faire de la spéculation sur le cours d'une action n'est absolument la raison 1ere de l'actionnariat, qui est d'acheter une part d'une société pour l'aider à se développer.
Dominique Strauss Kahn ,(PhD en Macro économie) avait au moins fait une bonne chose : le PEA: Plan d'Epargne Actions.
Si on garde ses actions 5 ans, il n'y aura pas de taxe sur les plus values... sous entendu, les actions, ce n'est pas à la base pour acheter & revendre.
Et pour conclure, la pire stupidité que j'ai vu en Finance, c'est le Trading Haute Fréquence, quand des machines font des milliers d'opérations d'achats & reventes par ... seconde... Et dans les salles de marché, ils en sont à mesurer la longueur des câbles réseaux essayant de minimiser la longueur le plus possible pour avoir le moins de latence possible, et on parle de milli secondes voire moins simplement pour jouer sur des micro écarts de quotation sur une même action entre 2 places de marché (New York - Paris par exemple), un manager chez BNP - Paribas @ Hong Kong m'avait un peu expliqué... J'ai trouvé que c'était juste du n'importe quoi...
Faire du pognon à partir de rien et avec ZÉRO création de valeur ajoutée...
Voilà c'est plus clair !?
Et je m'arrête là car j'ai les doigts qui saignent.
Les actions c'est avant tout pour investir dans des sociétés qui ont besoin de capitaux pour se développer...
Sinon y'a le casino ou le Tiercé quarté si on veut JOUER avec du pognon mais utiliser des actions, bof bof... surtout quand des traders jouent à la baisse, cad faire des plus values quand l'action dégringole (produits dérivés et options, mais là c'est encore un autre chapitre bien bien long), mais assez ignoble d'espérer qu'une boîte va se casser la gueule pour ramasser une plus-value en ayant pris des positions - des options de vente/d'achat - sur des actions de d'entreprises.
Bref... Sujet clos pour moi ici.
Le 10/04/2025 à 01h13
Tu introduits des notions que je n'attendais pas mais que je connaissais. Je voulais juste savoir comprendre pourquoi pourquoi la bourse ne devait pas exister.
La bourse, c'est juste un second marché des actions ou même des obligation, les fameux emprunts dont tu parles en 3 -.
Pour rester sur les actions qui étaient le sujet ici, ça permet aux actionnaires primaires (ceux qui ont apporté du capital à la société) de revendre ces actions avec une certaine liquidité, donc d'établir une valeur à ces actions. Si la bourse n'existait pas, ça serait beaucoup plus difficile de trouver un acheteur de ses parts de la société si on veut les vendre. La vente se ferait donc avec éventuellement avec une décote, donc moins cher que la valeur réelle des actions. Et ça permet ensuite aux différents acheteurs d'actions de les revendre à leur tour, et ça toujours au meilleur prix puisqu'il y a concurrence entre les acheteurs.
Sans bourse, il n'y aurait pas autant d'investisseurs qui apporteraient du capital à une société qui veut grandir.
Mais, la société peut emprunter, tu disais. Oui et non. Les banques prêtent (ton 2 -) uniquement que si le risque est assez faible, les obligations permettent de prêter avec un risque plus fort et une rémunération plus forte pour compenser ce risque. Mais quand le risque est vraiment trop fort, il faut faire une augmentation de capital et donc émettre des actions. La rémunération sera plus forte si tout va bien ou ça sera une perte plus ou moins importante suivant le cas.
Sans la bourse, cette partie là de l'investissement serait beaucoup plus limitée et on n'aurait pas eu tous les progrès industriels et technologiques.
Alors, oui, il y a peut-être quelques aspects négatifs, mais pas tant que cela. Même le Trading Haute Fréquence a ses raisons, il apporte une plus grande liquidité au marché, les actions trouvant toujours preneur même si c'est pour les revendre rapidement après et faire un tout petit bénéfice à chaque fois. Oui, ils prennent une petite rémunération au passage, mais en fait, c'est indolore pour ceux qui achètent pour la durée, bien plus indolore que la Taxe sur les Transactions Financières française qui a encore augmenté ce mois-ci.
Les vrais côtés négatif en bourse sont les manipulations de cours, mais, là on est dans l'escroquerie, plus dans la bourse. C'est pour cela qu'il y a partout des organismes de régulation des marchers financiers.
Globalement, il y bien plus de côtés positifs de la bourse que négatifs.
Modifié le 12/04/2025 à 12h49
Après quand j'ai entendu un manager de trading dire : "quand une action va monter ou descendre à New York, on sait qu'elle va aller dans le même sens à Paris - par exemple - quelques dizaines de millisecondes plus tard et donc on va jouer sur ces micro variations pour faire du gain" , franchement, la création de valeur dans l'économie réelle, elle est où là ?
Et prendre des positions à la baisse, par exemple au travers du SRD à la Bourse de Paris (Système de Règlement Différé), ou vente à découvert, système qui avait été interdit pendant quelques semaines durant la crise des subprimes en 2009 (car plus le marché baisse, plus on peut espérer des gains), et bien sur le fond, éthiquement, j'ai toujours du mal à le comprendre, de parier pour qu'une entreprise se casse la figure...
Enfin merci pour avoir pris le temps et l'effort d'une réponse longue, complète & argumentée.
(toujours le kimouss mal placé
Modifié le 13/04/2025 à 10h43
Quand le bonhomme dit "on sait qu'elle va bouger à Paris", il veut dire que l'arbitrage va forcément être fait par d'autres de toute façon car c'est le seul moyen de synchroniser le cours, et du coup il préfère le faire lui-même avant les autres (enfin y participer car il ne comble sans doute pas l'écart à lui tout seul). C'est un principe vieux comme le monde et ça avait d'ailleurs donné lieu au premier piratage de télécommunications de l'histoire en 1834, où deux frères avaient corrompu des employés du télégraphe Chappe pour obtenir à Bordeaux (qui était une place boursière) avant tout le monde les variations de la bourse de Paris qui arrivaient normalement par la poste (bon là quand-même c'était plus de la fraude que de l'arbitrage technique).
Quand à la vente à découvert (qui est différent du SRD qui lui n'est qu'un crédit qui peut être utilisé pour acheter ou vendre), il y a quand-même quelques limitations dues au fait que le SRD expire tous les mois, et que si la vente est perdante à ce moment-là, le compte est débité de la perte latente et il faut éventuellement rajouter de l'argent pour pouvoir garder sa position. De plus l'utilisation du SRD coûte de l'argent. Alors qu'une position à l'achat prise sans SRD peut être conservée indéfiniment sans contrainte ni coût. Les positions vendeuses seront donc souvent à plus court terme pour viser plutôt une correction temporaire, qu'un "cassage de gueule" de l'entreprise qui habituellement prend du temps (sauf en période de krach, d'où sa suspension dans ce cas).
Le 08/04/2025 à 20h35
Le 08/04/2025 à 23h53
Le 09/04/2025 à 11h13
Le 09/04/2025 à 19h24
Mode opératoire :
-Acheter du APPLE
-Conserver le APPLE
-Revendre les actions, nourrir l'état à 30% du bénef.
Grace aux bénéfices, pouvoir acheter son iPhone qui est maintenant à 2600€
Le 09/04/2025 à 16h44
- Si c'est écrit, c'est que c'est vrai.
- Si c'est vrai, il faut le dire.
- Si c'est dit, il faut l'écrire.
Modifié le 09/04/2025 à 18h31
Le 09/04/2025 à 21h25
Le 10/04/2025 à 06h43
Le 10/04/2025 à 08h21