L’étau européen se resserre autour de Shein et Temu
La Commission passe en mode « détective holistique »

Les plateformes d’e-commerce Temu et Shein sont plus que jamais dans le collimateur de la Commission européenne et d’associations de consommateurs. Temu est déjà sous le coup d’une procédure formelle, Shein devrait suivre demain. La Commission prépare de son côté un projet avec une approche holistique sur les grandes plateformes de commerce en ligne.
Le 04 février à 11h37
5 min
Droit
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Depuis plusieurs mois, différentes instances européennes s’intéressent de près à la plateforme d’ecommerce Temu. Le BEUC (bureau européen des unions de consommateurs) tirait la sonnette d’alarme en mai dernier, affirmant que Temu « ne protège pas les consommateurs en enfreignant le Digital Services Act ».
Temu sous pression, la Commission européenne enquête
Fin octobre, la Commission européenne ouvrait une « procédure formelle à l'encontre de Temu au titre de la législation sur les services numériques » (DSA). Elle enquête sur des domaines « liés à la vente de produits illicites, à la conception potentiellement addictive du service, aux systèmes utilisés pour recommander des achats aux utilisateurs, ainsi qu'à l'accès aux données pour les chercheurs ».
Le BEUC est revenu à la charge cette semaine, dénonçant « des trous béants dans la sécurité des produits vendus sur Temu ». En cause, des « petites pièces de jouets pour enfants et de produits pour bébés trop facilement détachables pouvant provoquer une suffocation », des listes d’ingrédients incorrects dans les cosmétiques, des « radiateurs électriques extrêmement dangereux », etc.
« Un point d’entrée pour des produits illégaux »
Pour Agustín Reyna (directeur général du BEUC), Temu est « un point d’entrée pour des produits illégaux qui n’ont pas leur place sur nos marchés ». Le Bureau européen des unions de consommateurs demande donc à la Commission de terminer son enquête au plus vite et « de prendre des mesures dissuasives et efficaces contre Temu dans l’intérêt des consommateurs et des entreprises » qui respectent les règles de l’Union.
Le BEUC demande aussi la mise en place d’un « plan d’action ambitieux et vaste pour l’e-commerce visant à résoudre les problèmes auxquels les consommateurs sont confrontés sur les marketplaces, y compris des règles claires en matière de responsabilité ». La Commission devrait le présenter demain, nous allons y revenir.
Une enquête devrait aussi s’ouvrir contre Shein
Une autre plateforme est dans le collimateur de la Commission européenne : Shein. Selon l’AFP, « l'UE s'apprête à ouvrir une enquête contre la plateforme chinoise ». L’annonce devrait être faite demain selon deux sources de nos confrères.
« Shein est considéré comme un emblème des dérives sociales et environnementales de la mode à petits prix. Mais l'entreprise a promis de collaborer avec toutes les parties prenantes pour répondre aux préoccupations exprimées », rappelle l’AFP.
En juillet 2023, Bruno Lemaire, alors ministre de l'Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et du Numérique, saisisait la DGCCRF sur les risques de la fast fashion, avec Shein dans le viseur.
Shein (comme Temu) est pour rappel une très grande plateforme au titre du règlement sur les services numériques (DSA). Elle compte « plus de 45 millions d'utilisateurs réguliers par mois dans l'Union européenne », selon ses propres chiffres transmis à la Commission en avril 2024.
La Commission européenne passerait en mode « holistique »
Selon Euractiv, la Commission européenne devrait « adopter une approche "holistique" à l’égard de Temu et Shein ». Le projet, consulté par nos confrères et qui devrait être publié demain, prévoirait des « modifications structurelles des règles douanières de l’UE, l’application de la législation européenne existante en matière de protection des consommateurs et l’adoption de règles environnementales ».
Sur les questions douanières, la Commission souhaiterait « fournir des ressources supplémentaires aux autorités douanières nationales afin qu’elles puissent examiner les petits envois ». L’intelligence artificielle devrait aussi être utilisée afin de vérifier les envois de marchandises, avec la mise en place d’une « nouvelle autorité de l’UE pour traiter les données douanières dans le cadre d’un système informatique unique », toujours selon le projet consulté par Euractiv.
La montée en puissance de Temu et Shein en Europe
Pour se rendre compte de la montée en puissance de Temu et Shein, on peut se tourner vers… La Poste. Plus précisément, l’audition de Philippe Wahl (PDG de la Poste depuis 2013) par la Commission des affaires économiques.
Il y parlait de la « montée des plateformes chinoises Temu et Shein, qui représentent 22 % de nos colis en Europe. C'était moins de 5 % il y a cinq ans, 1 % de plus qu'Amazon qui est […] le premier client mais aussi le premier concurrent de la Poste ». Amazon, Shein et Temu représentent ainsi 43 % des colis acheminés par la Poste en Europe.
L’étau européen se resserre autour de Shein et Temu
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Temu sous pression, la Commission européenne enquête
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« Un point d’entrée pour des produits illégaux »
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Une enquête devrait aussi s’ouvrir contre Shein
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La Commission européenne passerait en mode « holistique »
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La montée en puissance de Temu et Shein en Europe
Commentaires (16)
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Abonnez-vousModifié le 04/02/2025 à 13h43
Le 04/02/2025 à 13h03
Quand les gens comprendront que les normes, ce n'est pas juste pour enquiquiner, mais pour éviter que brancher le grille-pain à 2€ ne foute le feu à la barraque, ou que le petit dernier ne s'étouffe pas avec l'oeil de sa peluche qui s'est détaché...
Le 04/02/2025 à 13h48
Modifié le 04/02/2025 à 13h58
Ceux qui n'ont pas beaucoup de moyens, je ne pense pas que l'écologie soit leur premier problème. Ils font avec leur budget, ils ne cherchent pas le produit éco-responsable, le jambon sans nitrite ou le savon naturel. Tu prends un teeshirt produit en Asie par une marque Française : 20€, tu prends le même qui sort de la même usine sur un de ces sites : 8€, les deux sont de mauvaise qualité (heureusement, pas toutes les marques Française).
Le problème de base reste toujours la société de consommation, ceux qui achètent pour acheter en se disant "on s'en fiche ça coute que 8€" et je ne pense pas que ceux-ci soient des défenseurs de l'écologie non plus.
Sans parler des jouets, c'est pas non plus ce qui se vend le plus sur Shein et temu.
Le 04/02/2025 à 15h11
Combien de personnes trouvent que la qualité est insuffisante ? On en parle juste pas assez... Le prix c'est l'argument privilégié. Ce pourrait autre chose.
Quand je vois le nombre de Mercedes, Audi, WW sur nos route, c'est pas une question de prix... C'est une question de comment on valorise certains types de consommation
Le 04/02/2025 à 13h50
Modifié le 04/02/2025 à 14h28
Ce n'est pas tant la qualité le problème, il y a de tout, comme chez beaucoup de nos enseignes.
Le problème est plus du côté des normes (produits utilisés en teinture, etc), des questions environnementales liés à (l'ultra)fast-fashion et des questions éthiques (Ouïgours, etc).
Trouver de la qualité à un prix abordable relève maintenant du parcours du combattant, énormément d'enseignes ayant emboîté le pas du consommable pour ne pas sombrer face à cette concurrence...
Le 04/02/2025 à 14h56
(*) oui, brulés, une norme européenne allait l'interdire mais les pays nordiques (qui hébergent H&M et consorts) se sont opposés à l'idée https://www.francetvinfo.fr/economie/hm-la-marque-accusee-de-bruler-des-invendus-devenus-encombrants_2680514.html
Le 04/02/2025 à 15h01
Celio, Devred, Bonobo, Kiabi, Jules, etc... C'est pas vraiment du made in France. Tu prends un polo à 45€ tu le mets 2 fois c'est encore plus énervant. L'été dernier, j'ai pris un short en jean, tout ce qu'il y a de plus classique, 35€. Je l'ai mis une seule fois et il était décousu...
Donc je peux concevoir qu'une personne qui n'a pas 90€ a mettre dans un produit fiable, préfère prendre le risque d'avoir une bonne surprise plutot qu'une mauvaise.
Par contre ceux qui achète volontairement en quantité pour mettre 1-2 fois effet de mode et consommation, j'ai plus de mal.
Modifié le 04/02/2025 à 16h28
Le 04/02/2025 à 17h02
Le 04/02/2025 à 16h59
Le 04/02/2025 à 13h28
Modifié le 04/02/2025 à 16h36
Et tous les produits sont concernés ? Parfois je me demande même s'il y a des normes. Par exemple, des écouteurs sans-fil. Vendu entre 50 et 100 euros en France, entre 2 et 10 euros sur Ali express. Le produit chinois est dangereux, le français est bon ? Il y a une norme sur les émissions ? Un peu comme le DAS pour les mobiles. Si oui, ce n'est jamais présenté. Quel est l'organisme qui fixe ces normes ? c'est un pour tous (la Commission Européenne), ou chaque secteur fait ce qu'il veut ?
Le 04/02/2025 à 18h17
Les normes n'ont pas été inventées pour emmerder le producteur mais pour que le consommateur sache qu'il peut brancher son appareil sans avoir peur que sa maison prenne feu ou qu'un enfant peut jouer sans mettre sa vie en danger.
Cela permet aussi la politique de rappel de produits non conforme afin de garantir au mieux la sécurité des consommateurs.
C'est tout ce que Musk veut mettre par terre aux US (entre autres) afin de faire baisser les couts.
Modifié le 06/02/2025 à 09h24
Par exemple c'est grâce aux normes misent en place en France et dans les pays européens que l'on a pu bloquer dès les années 50/60 l'importation en masse des voitures US entre autres.