L’encéphalogramme plat des chiffres de l’état d’urgence
État d'urgence ou urgence de l'État ?
Le 30 mars 2016 à 14h03
4 min
Droit
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En fin de matinée, la Commission de suivi de l’état d’urgence s’est une nouvelle fois réunie pour dresser son point d’étape sur cet état exceptionnel initié après les attentats de novembre 2015. Son rapport intermédiaire, dont nous avons pu obtenir copie, préfigure un document final attendu pour mai.
Ce rendez-vous est le premier organisé depuis la nouvelle prolongation de l’état d’urgence en février dernier par le Parlement. Autant le dire tout de go, les derniers chiffres sont dignes d’un encéphalogramme plat. Les députés notent par exemple que 65 % des assignations et 52 % des perquisitions administratives (notamment dans le matériel informatique) ont été décidées durant les deux premières semaines après les attentats.
Au 1er janvier, cette concentration a été encore plus perceptible puisque « 98% des perquisitions avaient déjà été conduites », notent-ils dans leur synthèse. Depuis, c’est une mer d’huile comme on peut le voir sur la copie ci-dessous (de mauvaise qualité).
Deux infractions révélées depuis la nouvelle prolongation
La Commission révèle également que la moitié des perquisitions ont été conduites à l’initiative des services du renseignement (essentiellement la DGSI et le renseignement territorial). Au 27 février, 17 % des perquisitions ont débouché sur des actions judiciaires, principalement pour infraction à la législation sur les armes ou celles sur les stupéfiants. Sans surprise, la concentration précitée est encore plus forte en matière de découverte d’infraction : 315 l’ont été durant le premier état d’urgence, 305 pendant le deuxième état d’urgence et seulement… 2 depuis la nouvelle prolongation !
Alors que François Hollande vient tout juste de clore le débat constitutionnel, faute de majorité suffisante pour inscrire la déchéance de nationalité et l’état d’urgence dans le texte de 1958, les rapporteurs estiment que ces perquisitions « n’ont donc eu statistiquement qu’une incidence modeste sur le plan judiciaire ». Pire : du fait d’une récente décision du Conseil constitutionnel, les autorités ne peuvent plus copier les données informatiques des ordinateurs, tablettes, téléphones trouvés sur les lieux perquisitionnés. La plus-value en termes de renseignement s’en trouve « logiquement affaiblie » concluent-ils.
Les auteurs de la synthèse essaient malgré tout de se consoler d’avoir voté ce régime exceptionnel : « les perquisitions administratives ont constitué un choc, particulièrement vigoureux dans les premières semaines sur une mouvance difficile à caractériser comme strictement délinquante ou strictement radicalisée, mais qui peut apparaitre comme un terreau favorable à l’accueil et au soutien éventuel des réseaux terroristes ».
Pour l’avenir, ils sollicitent une réforme souhaitée par le Défenseur des Droits et la CNCDH. Ils suggèrent qu’un récépissé de perquisition administrative soit « systématiquement remis à l’intéressé afin le cas échéant de lui permettre de faire valoir ses droits ». En outre, les formalités d’indemnisation des bris de portes ou de fenêtres devraient être allégées et facilitées lorsqu’une aucune infraction n’a été constatée. Enfin, une attention particulière devrait être « portée aux mineurs présents sur les lieux de perquisitions administratives ».
Les assignations à résidence en chute libre
Pour les assignations à résidence (AAR), le phénomène de concentration est encore plus massif. Durant les trois premiers mois, 374 assignations avaient été décidées. 268 étaient en vigueur au 25 février. Le chiffre au 16 mars est de 70 mesures : 69 renouvelées et 1 nouvelle assignation décidée. Plusieurs explications : 25 assignations ont par exemple été bloquées au plus tôt « afin de préserver les surveillances en cours sur des cibles pouvant in fine être poursuivies pénalement ».
De plus, la nouvelle prolongation de l'état d'urgence en février n'a pas automatiquement reconduit les assignations décidées durant la première période. Une contrainte née de la jurisprudence constitutionnelle qui a sans doute permis de révéler des dossiers insuffisamment étayés. Remarquons d'ailleurs que « 61 assignations ont été abrogées par le ministère de l'Intérieur après réexamen du dossier, principalement à l'occasion d'une procédure contentieuse ».
Les députés, qui ignorent en outre le taux de judiciarisation, s’interrogent : « le ciblage initial des mesures d’assignation était-il adapté ? ».
L’encéphalogramme plat des chiffres de l’état d’urgence
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Deux infractions révélées depuis la nouvelle prolongation
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Les assignations à résidence en chute libre
Commentaires (67)
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Abonnez-vousLe 30/03/2016 à 14h15
Les auteurs de la synthèse essaient malgré tout de se consoler d’avoir voté ce régime exceptionnel : « les perquisitions administratives ont constitué un choc, particulièrement vigoureux dans les premières semaines sur une mouvance difficile à caractériser comme strictement délinquante ou strictement radicalisée, mais qui peut apparaitre comme un terreau favorable à l’accueil et au soutien éventuel des réseaux terroristes ».
Faut-il se réjouir ou non que cela se soit fait sans contrôle d’un juge ? J’en doute.
Le 30/03/2016 à 14h15
Les députés, qui ignorent en outre le taux de judiciarisation, s’interrogent : « le ciblage initial des mesures d’assignation était-il adapté ? ».
Voila une question qu’il serait bon de se poser plus souvent, pour plein de sujets.
Par exemple : L’inscription dans la constitution de la déchéance de nationalité est elle adaptée ?
Le 30/03/2016 à 14h20
Vous avez fait les poubelles de la Commission pour récupérer le graphique ? " />
Le 30/03/2016 à 14h21
#jouesrouges c’est pas tout à fait ça ;)
une image HD arrivera dans qq jours qd le doc sera officiellement mis en ligne.
Le 30/03/2016 à 14h38
On peut voir les autres photos prises après celles du papier ? historie de voir le journaliste se faire taper et mettre au sol par des agents de sécurité ? :)
Le 30/03/2016 à 14h43
“Ce n’est pas parce que l’encéphalogramme est presque plat que ça ne fait pas de bruit”" />
Signé Hanouna " />
Le 30/03/2016 à 14h47
Pour le moment ça m’a juste servi à perdre 3 heures au controle aux frontières quand j’ai voulu prendre l’avion pour retourner en Italie.
Le 30/03/2016 à 14h49
Le 30/03/2016 à 14h54
Alors ça a servir à ça l’état d’urgence?
Simplifier l’indemnisation des bris de porte?
La montagne accouche de rien au final, désespérant
Le 30/03/2016 à 14h57
On parie que l’état d’urgence sera prolongé, malgré ces chiffres ?
Le 30/03/2016 à 15h00
Le 30/03/2016 à 17h46
Le 30/03/2016 à 17h54
Le 30/03/2016 à 19h29
les perquisitions administratives ont constitué un choc,
particulièrement vigoureux dans les premières semaines sur une mouvance
difficile à caractériser comme strictement délinquante ou strictement
radicalisée, mais qui peut apparaitre comme un terreau favorable à
l’accueil et au soutien éventuel des réseaux terroristes
Cette phrase ne veut rien dire.
Je veux bien admettre qu’ils s’emmerdent en commission, mais de là à meubler un sujet qui pourrait facilement faire l’objet d’une thèse, c’est qu’ils devaient vraiment rien y glander.
Le 30/03/2016 à 19h44
Le 30/03/2016 à 19h48
J’adore lire “encéphalogramme plat” à côté de la photo de Bernard Cazeneuve. Un vrai plaisir." />
Le 30/03/2016 à 20h14
“Les assignations à résidence en chute libre” …
Ben évidement, ‘sont tous partis en Syrie ou en Libye CQFD " />
Le 30/03/2016 à 20h24
Je suis déçu, moi qui croyait que, vue la dictature dans laquelle nous vivons, la prolongation de l’état d’urgence allait entrainer une augmentation exponentielle des atteintes aux droits de l’homme, du muselage des opposants politiques et autres assignations arbitraires. Finalement rien de tout cela… " />
Le 30/03/2016 à 21h30
Le 30/03/2016 à 21h39
Désolé pour l’erreur de la 1ere citation : je voulais citer gavroche69 (pas TaigaIV) " />
Le 31/03/2016 à 03h56
Il n’y a pas de mal à laisser cet état d’urgence, puisque les français veulent l’Euro 2016 en France.
Le 31/03/2016 à 04h37
Le 31/03/2016 à 04h56
Perso n’aime pas le Foot." />
Le 31/03/2016 à 05h15
Le 31/03/2016 à 06h20
Alors ça serait bête de pas s’en servir de cet état d’urgence alors qu’on pourrait résoudre toutes ces enquêtes financières qui piétinent, toutes ces œuvres d’art vendues à “oups j’ai oublié à qui je les ai vendu, honnête”, tous ces comptes bancaires fantômes à Singapour en Suisse et autres paradis fiscaux, tous ces pays amis attaqués pour couvrir des financements occultes de campagnes électorales, toutes ces évasions fiscales…
Le 31/03/2016 à 06h25
Le 31/03/2016 à 07h13
pour instaurer une dictature, il faut d’abord un terreau fertile :
la France n’y est pas encore, mais on s’y rapproche indéniablement. Pourvu que la situation ne s’accélère pas dans le mauvais sens et on peut continuer à penser que ça va s’arranger à l’avenir.
Le 31/03/2016 à 07h23
tes prérequis marchent également pour une révolution sanglante avec coupage de tête " />
Le 31/03/2016 à 08h16
Le 31/03/2016 à 08h39
Qu’est-ce qui a suivi la révolution chez nous ? Napoléon, puis le retour à la monarchie, une courte pause puis retour à un Napoléon.
Donc révolution et dictature, c’est assez lié dans notre histoire en fait.
Le 31/03/2016 à 09h13
Oui… depuis 1789, la France a connu 5 républiques, 4 révolutions, 3 monarchies (en comptant celle en place en 1789), 2 empires et une dictature (Vichy)…
Pendant ce temps, les USA n’ont eu qu’une seule république, toujours en cours.
Le point commun par contre, nos démocraties sont suffisamment anciennes et ancrées. Une “vraie” dictature n’est pas prête de voir le jour de sitôt en France. Nos institutions sont robustes (preuve : l’échec de la modification de la constitution) et disposent d’encore trop de contres pouvoirs.
Mais surtout, personne en France n’a l’âme et le charisme d’un vrai dictateur qu’une majorité serait prête à suivre…
Le 31/03/2016 à 09h30
Le 31/03/2016 à 09h31
Le 31/03/2016 à 10h39
En réalité cette phrase veut bien dire quelque chose et elle démonte tout l’intéret sécuritaire de l’état d’urgence, le rendant donc totalement inutile puisqu’il créé un dangereux cercle vicieux :
Comme nous sommes en état d’urgence on a tapé large et de façon totalement désorganisé, donc on augmente les perquisitions donc on augmente les griefs contre l’état de la délinquance qui hésite à soutenir l’islamisme, donc on augmente le soutient au terrorisme, donc le risque lié au terrorisme (ce conduisant à un nécessaire état d’urgence).
Pour faire bref : l’état d’urgence augmente le risque d’attaques terroristes.
Le 31/03/2016 à 10h47
mouais enfin l’arrivé au pouvoir de napoléon fait toujours bondir tous les français en criant à la dictature en oubliant tout bonnement que si il a pu accéder au pouvoir c’est bien parce qu’il fallait un chef des armées pour repousser tous les voisins monarchistes qui voulaient venir jouer dans nos plates bandes….bon après c’est pas sa faute si il a gagné et qu’il a envahit les pays nous voulant du mal….répandant de ce fait les idéaux de la révolution française!
Ils nous auraient foutu la paix en restant tranquilou entre consanguins sans essayé de recoller un cousin dégénéré chez nous il n’y aurait pas eu de napoléon
Le 31/03/2016 à 11h16
Si j’en crois Wikipedia, c’est la France qui a déclaré la guerre en premier. Le concept de “guerre préventive” existait peut être déjà à l’époque :)
Napoléon a réformé le pays et l’a protégé des voisins, certes, mais sur le principe il a cherché à avoir toujours plus de pouvoir sur nos voisins, quitte à aller contre leur volonté. Et je pense que la population française a bien morflé pour servir ses campagnes militaires.
Le 31/03/2016 à 11h31
heeeeeu tu sembles passer très vite sous silence toutes les tentatives de déstabilisation de nos voisins à commencer par la déclaration de Pillnitz, et avant d’être empereur des cons en chef il a été premier consul ;) y en avait 2 autres avec lui. Consulat mis en place justement pour avoir un pouvoir fort histoire de pouvoir en remonter aux anglais prussiens autrichiens et consort…..et la c’est pas du wikipédia, mais de l’histoire moderne dispensé à tolbiac en fac d’histoire….bon je sais ça fait un bail que mes fesses ne se sont pas posées dans un amphi, mais bon, l’histoire c’est pas comme la géo, ça change pas ( à priori ;) )
Le 31/03/2016 à 12h15
L’Histoire ne change pas, mais son histoire c’est une autre… histoire.
Le passé est raconté selon l’envie du moment…
Le 31/03/2016 à 12h48
le passé est surtout raconté par les vainqueurs….vu la branlée finale qu’a pris napoléon…….
Le 31/03/2016 à 13h40
Le 31/03/2016 à 13h59
la je suis désolé de répondre qu’il a pensé avec son gland en écoutant joséphine qui avait oreille des lobbies de planteur de cannes étant fille de colons martiniquais ….. c’était la pascal nègre de l’époque ;) (tain chuis en forme)
Le 31/03/2016 à 14h06
Ça pouvait aussi servir à calmer les riches histoire qu’ils alimentent l’effort de guerre non ? C’est une vraie question, je me demande comment Napoléon pouvait réussir à la fois à tenir la population récemment révoltée et à financer ses armées.
Le 31/03/2016 à 14h08
Le 30/03/2016 à 15h05
La vraie question est : ces perquisitions et leurs suites judiciaires, et ces assignations à résidence, auraient-elles été impossibles sans l’état d’urgence, ou simplement un peu plus compliquées pour la police du fait du contrôle d’un juge ?
La Commission s’est-elle posé la question ?
Le 30/03/2016 à 15h05
Les chiffres fournis prennent en compte les journées du 22 et après, histoire de savoir si les attentats en Belgique ont réveillés ou non les beliers ?
Bon sinon, je passe sur les éléments de langage à base de “choc”. " />
Le 30/03/2016 à 15h06
Puis l’état d’urgence sera prolongé jusqu’au élection de 2017 :-(
Le 30/03/2016 à 15h08
Le 30/03/2016 à 15h10
L’Etat d’urgence ou la Hadopi du ministère de l’intérieur…
Le 30/03/2016 à 15h12
Le 30/03/2016 à 15h21
Tu veux dire qu’il peut y avoir des perquisitions chez Les Républicains pendant leur primaire ?
Alors je suis pour le maintien de l’état d’urgence finalement, on va bien rigoler " />
Le 30/03/2016 à 15h27
Le 30/03/2016 à 15h35
Tu n’as pas honte de poser des questions bien plus appropriées que celles que pose cette (grosse) commission ?
Le 30/03/2016 à 16h20
et encore après, puisque le nouveau président ne pourra prendre le risque de le dégager. ^^
Le 30/03/2016 à 16h21
En tous cas on est loin de la dictature annoncée par tant de monde quand cet état d’urgence a été décrété… " />
La crainte était qu’il y aurait trop de perquisitions et maintenant on va trouver qu’il n’y en a pas assez… " />
Le 30/03/2016 à 16h46
Voilà ce qui arrive quand on laisse les experts en communication décider de ce qui est bien ou pas bien de faire.
Avec tous ces couacs, on peut dire que l’équipe de communication de l’Elysée n’est pas très forte. J’espère qu’ils ne sont pas hors de prix sur la place de Paris.
Le 30/03/2016 à 17h08
Le 30/03/2016 à 17h24
Le 30/03/2016 à 17h29
Le 30/03/2016 à 17h44
Le 31/03/2016 à 14h10
Le 31/03/2016 à 14h20
C’est Napoléon 3 ça ;) Du coup c’est plus nos voisins qui en ont profité ^^
Le 31/03/2016 à 14h26
Le 31/03/2016 à 19h55
Ce dont peu de personnes se rendent compte, c’est tout de même la surcharge phénoménale de travail sur certaines institutions. Quoique vous me direz, c’est très paradoxale avec le taux de chômage actuel…
Le 01/04/2016 à 06h14
my bad, je me suis planté de quelques décennies " />
Le 01/04/2016 à 08h17
Et dire que malgré ces chiffres éloquents le gouvernement souhaite renouveller l’état d’urgence : https://www.mediapart.fr/journal/france/310316/letat-durgence-se-meurt-le-gouvernement-evoque-son-renouvellement
NextInpact vous êtes cités comme source d’ailleurs ! Bien joué " />
Le 01/04/2016 à 08h28
Comte de Bouderbala, sors de ce corps ! " />
(Si tous les supporters pouvaient se donner la main… Et se jeter dans le vide !) " />
Le 04/04/2016 à 08h41
On peut ressortir les mêmes arguments qui ont conduit à la suppression des élections prudhommales : trop d’abstention et trop cher…