La justice européenne définit la parodie et ses limites
Qu’est-ce qu’être drôle ?
Le 03 septembre 2014 à 09h38
4 min
Droit
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La CJUE vient de rendre un important arrêt sur la notion de parodie, une exception au droit d’auteur qui n’avait jusqu’alors pas été définie dans le droit européen. Un éclairage qui sera suivi de près par ceux qui, comme les dessinateurs et graphistes en ligne, s'adonnent à ce genre d'exercice.
Le contexte, déjà résumé dans cette actualité, était né en Belgique. M. Deckmyn, membre du Vlaams Belang (un parti politique flamand d’extrême droite), avait diffusé un calendrier 2011 lors d’une manifestation organisée lors du Nouvel An par la ville de Gand. Ce calendrier pompait, pour le détourner, un dessin d’une couverture de Bob et Bobette. « Le dessin original représentait un personnage emblématique de la série, revêtu d’une tunique blanche et entouré de personnes qui essayaient de ramasser les pièces de monnaie qu’il jetait autour de lui » résument les services de la Cour. Problème : « sur le dessin ornant les calendriers de M. Deckmyn, ce personnage était remplacé par le bourgmestre de la ville de Gand, tandis que les personnes qui ramassaient les pièces de monnaie étaient voilées et de couleur ».
Les ayants droit n’ont pas apprécié ce détournement et l’affaire est partie devant les juridictions belges. Les uns évoquent un abus, vecteur d’un message discriminatoire, les autres se protégeant derrière l’exception de parodie. Le dossier est alors remonté jusqu'à la Cour de Justice de l’Union européenne, puisque si la directive sur le droit d’auteur prévoit l’exception de parodie, elle se garde bien de la définir.
Qu’est-ce qu’une parodie ?
Suivant l’analyse de l’avocat général, la CJUE a considéré d'abord dans son arrêt (PDF) que la parodie était une notion autonome, en ce sens qu’elle devait être uniforme juridiquement dans toute l’Union européenne. Ceci dit, les juges ont été conduits à la définir ainsi :
« La parodie a pour caractéristiques essentielles, d’une part, d’évoquer une oeuvre existante, tout en présentant des différences perceptibles par rapport à celle-ci, et, d’autre part, de constituer une manifestation d’humour ou une raillerie. »
De même :
« la notion de «parodie » (…) n’est pas soumise à des conditions selon lesquelles la parodie devrait présenter un caractère original propre, autre que celui de présenter des différences perceptibles par rapport à l’oeuvre originale parodiée, devrait pouvoir raisonnablement être attribuée à une personne autre que l’auteur de l’oeuvre originale lui-même, devrait porter sur l’oeuvre originale elle-même ou devrait mentionner la source de l’oeuvre parodiée ».
En clair, la parodie se suffit à elle-même pour être protégée, il n’est pas nécessaire qu’elle soit elle-même empreinte d’originalité. Il suffit simplement qu’elle comporte des différences notables avec l’œuvre parodiée. Il n’est pas davantage obligatoire qu’elle puisse être attribuée à un tiers, ni porter sur l’œuvre initiale ni même qu’elle mentionne la source de l’oeuvre parodiée.
La couverture originale de Bob et Bobette (édition WPG), face à sa possible parodie
En résumé, une fois ces qualités retenues (évocation d’une œuvre existante, raillerie, humour, et différence perceptible par rapport à l’œuvre originale), le créateur d’une parodie ne peut pas être inquiété d’une action en contrefaçon. Un éclairage intéressant alors que cette exception est souvent mise en avant par les graphistes sur Internet.
Les limites de la parodie
Cependant, même en respectant ces conditions, tout et n’importe quoi ne peut être dit par ce biais. La parodie doit en effet répondre à un juste équilibre entre les intérêts des créateurs et des titulaires de droits et la liberté d’expression de celui qui s’en prévaut, tempère la Cour :
« Si une parodie transmet un message discriminatoire, les titulaires de droits de l’oeuvre parodiée ont, en principe, un intérêt légitime à ce que leur oeuvre ne soit pas associée à un tel message » résume alors la Cour de justice qui pose classiquement, que la liberté d’expression n’est pas absolue. La balle est désormais renvoyée dans les mains des juridictions belges qui devront vérifier à la lumière de ces indications, si ce dessin transmet bien, selon les titulaires de droits, un message discriminatoire.
La justice européenne définit la parodie et ses limites
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Qu’est-ce qu’une parodie ?
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Les limites de la parodie
Commentaires (63)
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Abonnez-vousLe 03/09/2014 à 11h22
Le 03/09/2014 à 11h22
Le 03/09/2014 à 11h59
Le 03/09/2014 à 12h02
D’un cote, on nous explique que la parodie, c’est de la parodie. Mais de l’autre on t’annonce ce que tu as le droit de parodier sinon ce n’est plus de la parodie.
interressant " />
Le 03/09/2014 à 12h03
Le 03/09/2014 à 12h09
Le 03/09/2014 à 12h22
Le 03/09/2014 à 12h23
Le 03/09/2014 à 12h27
Le 03/09/2014 à 12h34
Le 03/09/2014 à 12h39
Le 03/09/2014 à 12h42
Le 03/09/2014 à 12h45
Le 03/09/2014 à 12h59
Le 03/09/2014 à 13h00
Par contre on ne peut pas se cacher derrière la parodie pour faire passer des messages discriminatoires
La parodie ne cache justement rien. Elle est définie comme une “Imitation burlesque d’une oeuvre”. Il s’avère que les synonymes de burlesque sont:
comique, grotesque, risible, ridicule, moquerie, caustique
Discriminer: établir une différence entre des personnes ou des choses.
De mon point de vue, c’est au lecteur à faire face à la parodie, et à en comprendre ses intentions.
Et non museler selon les croyances des uns ou des autres, en fonction du temps.
Le 03/09/2014 à 13h10
Le 03/09/2014 à 10h10
Le 03/09/2014 à 10h11
Encore une limite de liberté sous pretexte de nous protéger …
La démocratie se rapproche de plus en plus de la dictature dans cette pauvre Europe.
Le 03/09/2014 à 10h13
Le 03/09/2014 à 10h16
Le 03/09/2014 à 10h18
Le 03/09/2014 à 10h25
Le 03/09/2014 à 10h39
Sans être étrangère à notre jurisprudence, la vision de la CJUE est plus souple, notamment, sur le fait que chez nous l’exploitation commerciale de la parodie elle-même (de même pour la caricature), peut limiter grandement la possibilité de parodier (ou de caricaturer).
Je ne sais pas si ce calendrier était par ailleurs vendu, mais la CJUE ne limite pas son principe au regard de la commercialisation ou non de la parodie.
Décision très intéressante. Merci Marc " />
Le 03/09/2014 à 10h42
Quelqu’un peut remettre en ligne le générateur de Martine alors !? " />
Le 03/09/2014 à 10h43
Le 03/09/2014 à 10h43
Tiens, les trolls anti Union européenne sont lâchés. " />
Et citer cette pauvre Amidala, c’est totalement hors contexte. La République galactique est justement ce qui se rapproche le plus de l’Union européenne (un ensemble d’États [planètes] ayant accepté de déléguer certaines de leurs compétences à un organisme supranational). Or Amidala prononce cette phrase lorsque la République tombe et devient l’Empire, mais vous utilisez cette phrase pour demander que l’UE disparaisse.
En gros vous citez Amidala alors que vous voulez que la République/UE tombe. Elle souhaitait justement le contraire. " />
Le 03/09/2014 à 10h49
Le 03/09/2014 à 10h51
Le 03/09/2014 à 10h52
Le 03/09/2014 à 10h55
Le 03/09/2014 à 11h06
Le 03/09/2014 à 11h20
Et la parodie ne concerne qu’une œuvre ?
Il peut y avoir d’autre créations de l’esprit sous le régime du droit d’auteur qui ne sont pas des œuvres ? (je pense particulièrement aux logiciels comme ça… Mais il y a peut être d’autre domaine ou le brevet ne peut s’appliquer mais le droit d’auteur peut être ?)
Le 03/09/2014 à 09h42
Qu’est-ce qu’être drôle ?
‘cule un mouton ?
" />
Le 03/09/2014 à 09h45
Le 03/09/2014 à 09h46
On peut rire de tout, mais pas avec tout le monde.
Le 03/09/2014 à 09h47
L’Europe étant une parodie de démocratie, elle essaye de réécrire le dictionnaire en sa faveur " />
Le 03/09/2014 à 09h48
Le 03/09/2014 à 09h52
Le 03/09/2014 à 09h53
En résumé, une fois ces qualités retenues (évocation d’une œuvre existante, raillerie, humour, et différence perceptible par rapport à l’œuvre original), le créateur d’une parodie ne peut pas être inquiété d’une action en contrefaçon.
Bon ben il est foutu.
Le 03/09/2014 à 09h56
Définir la parodie, c’est définir l’humour, c’est délimiter la liberté pour mieux la contenir ensuite, puis la contraindre.
Comme c’est l’Europe, tout les gouvernements doivent appliquer tels des moutons. Donc notre gouvernement l’appliquera puisque “c’est pas sa faute, mais celle de l’autre !”.
Applaudissons tous !
… hormis cela, on n’a pas de fachos masqués au gouvernement … qu’il soit européen, ou européanisant d’ailleurs.
" />
Et c’est ainsi que s’achève la liberté, sous une pluie d’applaudissements.
Sénatrice Padmé Amidala …
Le 03/09/2014 à 09h58
Tant mieux qu’il y ait de la limitation de l’abus. Sachant qu’en plus :
« Si une parodie transmet un message discriminatoire, les titulaires de droits de l’oeuvre parodiée ont, en principe, un intérêt légitime à ce que leur oeuvre ne soit pas associée à un tel message »
Je comprends que s’ils veulent ne pas donner suite pour éviter l’effet Streisand, c’est laissé à leur appréciation. Mais, qu’en cas contraire, le droit leur donne raison.
Je n’aimerai pas qu’une de mes peintures soit détournée, humour ou pas, pour la propagande d’un parti d’extrême-droite, par exemple, et que la justice m’envoie balader sous prétexte qu’il s’agit d’une parodie.
Si vous êtes auteur d’oeuvres de quelque nature qu’elle soit, et qu’un malotru se les approprie pour faire passer des idées ignobles, c’est quand même rassurant que la justice dise qu’en pareil cas, il y a une limite de franchie et que c’est inacceptable. A bon entendeur…
Le 03/09/2014 à 09h59
Les entreprises et les administrations ont plagié “1984”, ça compte ?
Le 03/09/2014 à 10h00
Le 03/09/2014 à 10h01
Le 03/09/2014 à 10h04
Le 03/09/2014 à 10h06
Le 03/09/2014 à 10h07
Le 03/09/2014 à 10h09
La décision paraît équilibré, le parodieur est protégé des atteintes sur le doit d’auteur et l’auteur garde une sorte de droit morale sur son oeuvre.
Le 03/09/2014 à 13h11
Le 03/09/2014 à 14h03
Le 03/09/2014 à 14h04
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