La Haute Autorité s'apprête à lancer un marché public visant à « l’acquisition de données de mesure d’audience ». La cible ? Jauger les évolutions dans les usages « de sites internet proposant des biens et services culturels dématérialisés, que ce soit de manière licite ou illicite ».
Quelles sont vraiment les pratiques de consommation des œuvres culturelles en ligne ? C’est à cette épineuse question que la Hadopi entend avoir des éléments de réponses. En témoigne cet appel d'offres diffusé le 31 octobre dernier, et signé par Christian Phéline, président de la Haute Autorité.
Ce marché s’inscrit dans le temps puisque conclu pour 6 mois, renouvelable trois fois par période de 12 mois, soit une durée totale de 42 mois. Montant total évalué ? 175 000 euros HT, avec 25 000 euros pour la première période, puis 50 000 euros pour chaque renouvellement.
Films, séries, matchs, stream-ripping
L’heureux prestataire qui l’emportera aura alors pour mission de mesurer les sites licites et illicites, avec une attention particulière sur les films et séries TV « mais aussi sur les sites de live streaming (de séries et d’évènements sportifs) », prévient le cahiers des clauses particulières disponibles ci-dessous.
En pratique, un panel d’internautes sera choisi, sous-entendu sur la base du volontariat. Leur consommation quotidienne sera alors « observée directement » depuis tous leurs écrans, PC, téléphone, tablette, etc.
De cette base, la Haute Autorité espère suivre dans le temps l’évolution de l’audience de leurs sources d’approvisionnement, que ce soit en streaming, direct download, pair à pair, sachant que seront aussi sondés les sites et applications de stream-ripping.
Qui pirate le plus, l’ouvrier parisien ou le cadre marseillais ?
Pour nourrir cette vaste moisson, il faudra une foison d’indicateurs : « le nombre de visiteurs uniques mensuels du site, le temps moyen passé sur le site, le nombre de pages vues, les pages les plus vues sur le site, etc. ». Évidemment, chacun des cobayes sera profilé (âge, sexe, catégorie socioprofessionnelle, région d’habitation…) tout comme sa consommation d’œuvres (volume, temps de consommation).
Les yeux au-delà de nos frontières, la Hadopi se réserve dans la foulée la possibilité de jauger dans les mêmes conditions « l’accès à des données d’audience concernant des sites licites et illicites diffusant des biens culturels dématérialisés pour un pays supplémentaire », en l’occurrence les États-Unis.
Via une ribambelle de bons de commande, l'autorité, qui devrait obtenir une dotation de 9 millions d'euros l'an prochain, pourra demander au prestataire des rapports d’études complémentaires visant une galaxie de sites déterminés par ses soins. Attention, prévient l’entité : « Ces rapports d’études devront faire ressortir une analyse riche et des conclusions opérationnelles ».
De l’efficacité
Que faire de ce stock ? La Rue du Texel pourra déduire quelques utiles informations, pourquoi pas sur l’efficacité de la riposte graduée qui, bien que ne visant que le seul P2P, est un sujet récurrent.
Rappelons, de l’aveu même de Mounir Mahjoubi, que l’autorité prépare une évaluation de ses millions d'avertissements ayant abouti à 151 condamnations. De fait plutôt qu'une mission, deux maitres des requêtes au Conseil d’État ont été chargé de doser la faisabilité juridique d’une amende administrative infligée par elle, plutôt que l'actuelle contravention prononcée par la justice.
La Hadopi, qui a toujours l’espoir d’entretenir des relations apaisées avec les ayants droit, pourra dans tous les cas mettre sur leur table ces précieuses données afin de les comparer avec celles de l'ALPA par exemple. Les fruits du présent marché pourront alors alimenter leurs futures actions en justice voire nourrir l'évolution législative de la réponse pénale face à la migration des pratiques illicites.
- Télécharger le règlement de consultation
- Télécharger le cahier des clauses particulieres
Commentaires (43)
#1
Il y a vraiment des gens assez cons pour accepter d’être pistés pour ce genre “d’étude” ? Oo
#2
Mais… Mais… Si on est volontaire, qu’on sait qu’on peut faire ce qu’on veut sans risquer le coup de fouet (enfin je l’espère pour les cobayes), cela fausse totalement la consommation " />
Et puis qui va accepter de se faire pister par la Hadopi ? C’est rémunéré ? Quel intérêt peut-on en tirer ? S’exempter à vie de toute menace parce qu’on a joué le jeu ? Economiser quelques euros d’un VPN ? " />
#3
3 ans et demi de glande
#4
Évidemment, chacun des cobayes sera profilé (âge, sexe, catégorie socioprofessionnelle, région d’habitation…)
Comment connaître l’âge et le sexe de l’utilisateur sur un site illicite? (même avec un compte d’ailleurs). Que ces informations obligatoires quand on crée un compte sur un site légale, d’accord, mais sur un site illicite, je ne vois pas comment glaner ces informations.
#5
1er avril ? " />
#6
Être volontaire ne signifie pas être « exempté » du respect des dispositions pénales du CPI, que ce soit celles régissant la suspension de l’accès à internet ou bien celles relatives à la contrefaçon.
J’irais même jusqu’à avancer que, grâce au « mouchard » de la HADOPI, on pourra matérialiser plus aisément la contrefaçon. Peut-être que cet « offre » est en fait un honeypot pour faire monter les chiffres de l’efficacité de la haute autorité, justement…
" />
#7
“un panel d’internautes sera choisi, sous-entendu sur la base du volontariat”
euhh …. ahahah
#8
[MODE RIEN A VOIR]
Je ne supporte pas les gens qui se font photographier avec les bras croisés.
Je trouve cette pause hautaine, pleine de “suffisance” et d’auto-satisfaction.
[/MODE RIEN A VOIR]
Désolé pour le HS mais concernant la Hadopi, je suis comme la Hadopi : pas vraiment inspiré… " />
#9
Mais du coup vu que t’es sur de te faire prendre vu que t’as le mouchard de la hadopi et que tu risques bien de plonger, tu ne vas pas frauder quel est l’intérêt de l’étude alors?
Y’a un truc que je pige pas?
#10
Dans les deux cas HADOPI gagne :
#1. Tu « pirates » -> condamné pour contrefaçon = HADOPI efficace
#2. Tu ne « pirates » pas -> HADOPI a réussi sa mission de prévention et de promotion des usages légaux
#11
#12
Euh leur budget annuel ils l’ont déjà. Là c’est eux qui sont commanditaires de l’étude…
#13
Chouette. Encore une étude (payée par nous) sur les habitudes de consommation de produits culturels des français.
C’est la combien déjà ?
#14
Faut voir… Même si je suis franchement réservé sur la pertinence même de cette étude, je suis curieux de voir quels résultats elle va sortir.
À suivre quand même, bien qu’il ne faille pas en attendre des miracles.
#15
Je crois qu’il existe pourtant un rapport (européen, toussa) montrant que le piratage n’est pas si nocif que ça, ça serait même bénéfique, mais il aurait été envoyé à la casse sans explication.
Donc là, la Hadopi va faire plusieurs essais pour montrer que le piratage c’est mal (si les gens ne vont pas assez sur l’offre légale c’est forcément à cause du piratage, bien évidemment…). S’ils n’y arrivent pas, ils vont aussi détruire l’analyse et tout recommencer plus tard ? Accessoirement en demandant plein de sous au contribuable, sous qu’ils auraient pu donner à la promotion de la culture.
#16
Oh yes une amende administrative, les faux positifs vont adorer.
#17
Encore une étude qui cherche à prouver que l’offre légale est pertinente et que les pirates ne sont que de vils radins de mauvaise foi qu’il faut éradiquer.
#18
#19
#20
#21
>Qui pirate le plus, l’ouvrier parisien ou le cadre marseillais ?
Après avoir payé son loyer je doute qu’il reste grand chose à dépenser à l’ouvrier parisien. Si tout ce passe bien ils vont conclure que la hausse des loyers favorise le piratage.
#22
délai ultime pour une question ultime ? " />
#23
le rapport en question dit surtout qu’il est impossible de clairement déterminer l’impact du piratage sur la création artistique parce qu’il est impossible d’obtenir des données fiables (si je me souvient bien, ils avaient un pourcentage d’erreur très important). Les ayants droits étaient surtout outrés parce que l’étude remettait en question leur axiome 1 oeuvre piratée= 1 vente non conclue.
Cette étude aura les mêmes biais que les autres puisqu’elle a toutes les chances d’influencer les volontaires (et juridiquement c’est impossible de faire cette étude sur des non volontaires). Et j’ai le sentiment qu’ils en sont parfaitement conscient au vu des pauvres objectifs qu’ils fixent à cette étude.
De toute façon, ils refusent déjà de regarder les faits: le piratage est massif et culturellement ancré, les gens ont le sentiment que les diverses taxes qu’on leur prend rendent le fait de pirater légitime, et l’industrie culturelle fonctionne très bien malgré un cadre législatif toujours plus agressif pour l’utilisateur et protecteur pour l’auteur.
#24
ou le cadre marseillais
Ah, c’est donc ça qu’il faut dire plutôt que parrain de la mafia ? " />
#25
#26
42 mois !?
Tiens donc, combien de temps reste t’il avant le dernier vote budgétaire de cette présidence ?
" />
#27
Je suppose que la participation au panel d’étude garantit l’anonymat des données transmises à la Hadopi dans l’étude (le mouchard appartient au prestataire chargé de l’étude, pas à la Hadopi).
De ce fait, tu n’es, en principe, ni plus susceptible que d’habitude d’être flaggé par Hadopi, ni bénéficiaire d’une “immunité” à la riposte graduée. Sinon ça biaise complètement les statistiques et je pense qu’ils sont pas assez idiots pour ne pas le savoir.
Dans les faits par contre, si un volontaire se fait alpaguer par la Hadopi, à part la parole du presta et celle d’Hadopi, rien ne permettra d’affirmer si c’est une coïncidence (tu te fais attraper de la même façon que M. Tout le monde) ou une violation des termes de la participation à l’étude (tu te fais attraper parce que le prestataire t’a balancé à Hadopi).
#28
En informatique on appelle ça du brute force " />
#29
#30
Taper su les gens et ensuite les édudier, nice one….
#31
#32
Tout le monde n’est pas expert en piratage/streaming/partage/contrefaçon/téléchargement/copie privée/darkweb/piraterie/consommation d’oeuvre culturelles/p2p " />
Ils peuvent donc consommer du piraté sans le savoir.
D’autres s’en foutent royalement.
#33
#34
#35
#36
#37
En pratique, un panel d’internautes sera choisi, sous-entendu sur la base du volontariat. Leur consommation quotidienne sera alors « observée directement » depuis tous leurs écrans, PC, téléphone, tablette, etc.
Difficile d’avoir une utilisation qui reflète la réalité.
Il est tout à fait possible de restreindre ou augmenter sa propre fréquence de téléchargement lorsqu’on sait qu’on est “épié”, que ça soit délibéré ou inconscient, en fonction de ses intérêts ou opinions.
Perso, je donne plus de valeur au pq que j’utilise quotidiennement qu’à ce genre de “sondage”.
#38
#39
#40
#41
#42
Par définition, l’auteur est, au moins pendant une certaine période un ayant-droit.
#43