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Le « payer ou accepter » de Meta incompatible avec le RGPD pour le CEPD

Schrems vs Meta, une histoire sans fin

Le « payer ou accepter » de Meta incompatible avec le RGPD pour le CEPD

Sans citer clairement Meta, le Comité européen de la protection des données juge que, pour les grandes plateformes, proposer seulement une alternative payante à l'acceptation d'un système de publicité comportementale ne permet pas le consentement libre des utilisateurs exigé par le RGPD.

Le 18 avril à 11h51

Dans un avis rendu mercredi 17 avril [PDF], le Comité européen de la protection des données (CEPD, ou EDPB, de l'anglais European Data Protection Board, qui regroupe les CNIL européennes) explique que les plateformes doivent donner un « véritable choix entre le consentement ou non » à un service comportant de la publicité comportementale.

« Dans la plupart des cas, les grandes plateformes en ligne ne pourront pas se conformer aux exigences en matière de consentement si elles ne proposent aux utilisateurs qu'un choix binaire entre le consentement au traitement des données à caractère personnel à des fins de publicité comportementale et le paiement d'une redevance », affirme le comité.

Meta ciblée mais pas citée

Depuis octobre dernier, Meta est le fer de lance d'un nouveau genre de paywall qui propose une alternative entre « payer ou accepter ». Sur Facebook et Instagram, il faut débourser au moins 119,88 euros par an si on ne veut pas de publicité comportementale dans son fil.

Si l'utilisateur ne veut ou ne peut pas payer la somme fixée, il ne peut qu'accepter que ses données soient utilisées pour afficher des publicités en fonction de son comportement sur les réseaux sociaux du groupe.

Lors de l'annonce de la mise en place de ce nouveau système, Meta l'avait présenté comme une mise en conformité avec le RGPD, qui l'oblige à demander le consentement de ses utilisateurs avant de leur présenter ce genre de publicités ciblées.

Mais des voix se sont levées pour dénoncer une alternative qui n'en serait pas vraiment une. Max Schrems et son association noyb ont été les premiers à porter plainte auprès de la CNIL autrichienne, considérant que cette façon de « payer ou accepter » viole le RGPD et la Charte européenne des droits fondamentaux.

Si Meta n'est pas citée dans l'avis du comité, son système est clairement ciblé par l'instance européenne de protection des données personnelles. C'est d'ailleurs suite à la demande des CNIL autrichienne, norvégienne et allemande, qui sont particulièrement actives à propos du système de publicité comportementale de Meta, que le CEPD l'a publié.

Les données personnelles ne sont pas des biens commercialisables

Il y « rappelle que les données à caractère personnel ne peuvent être considérées comme des biens commercialisables et que les responsables du traitement doivent garder à l'esprit la nécessité d'empêcher que le droit fondamental à la protection des données ne soit transformé en une caractéristique dont les personnes concernées doivent payer pour bénéficier ».

Le CEPD affirme que « les responsables du traitement doivent veiller à ce que le prix ne soit pas de nature à empêcher les personnes concernées de faire un véritable choix à la lumière des exigences d'un consentement valable et des principes énoncés à l'article 5 du RGPD, en particulier l'équité ».

Pour le comité, « lors de l'élaboration de l'alternative à la version du service comportant de la publicité comportementale, les grandes plateformes en ligne devraient envisager de fournir aux personnes concernées une "alternative équivalente" qui n'implique pas de paiement », avec, par exemple, une « forme de publicité qui implique le traitement de moins (ou pas du tout) de données à caractère personnel ».

Enfin, pour les régulateurs européens, « les responsables du traitement doivent évaluer, au cas par cas, si un paiement est approprié et de quel montant », toujours en tenant compte des alternatives possibles à la publicité comportementale.

Dans le communiqué annonçant cet avis, la présidente du Comité, Anu Talus, réaffirme que « les responsables du traitement doivent veiller à tout moment à éviter de transformer le droit fondamental à la protection des données en une fonctionnalité dont les particuliers doivent payer pour bénéficier. Les individus devraient être pleinement conscients de la valeur et des conséquences de leurs choix ».

Meta reste sur sa position

Contactée par le Monde, Meta reste sur son interprétation de la loi européenne en déclarant que « l’année dernière, la Cour de justice de l’Union européenne a statué que le modèle des abonnements était un moyen juridiquement valable pour les entreprises de demander le consentement des personnes pour la publicité personnalisée ». Elle estime que « l’avis rendu [mercredi] par le CEPD ne modifie pas ce jugement et l’abonnement sans publicité est conforme à la législation européenne ».

Un point de départ sur les alternatives « payer ou accepter » pour noyb

Pour l'association noyb, « cette décision interdit à Meta d'utiliser une demande de consentement illégale pour le traitement de données à caractère personnel ».

Max Schrems, son président, affirme que « dans l'ensemble, Meta n'a plus le choix dans l'UE. Elle doit maintenant donner aux utilisateurs une véritable option oui/non pour la publicité personnalisée. Elle peut toujours facturer les sites pour le reach, s'engager dans la publicité contextuelle et d'autres activités similaires, mais le suivi des personnes à des fins publicitaires nécessite un "oui" clair de la part des utilisateurs ».

Mais l'association pointe le fait que le CEPD a l'intention de publier d'autres avis dans le courant de l'année sur les alternatives « payer ou accepter » pour des acteurs autres que les grandes plateformes. Celui-ci ne serait donc qu'un point de départ sur le sujet.

Commentaires (35)

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Ça ne concerne pas que Meta.

Tous les sites de Webedia, L'Équipe, Le Figaro, Le Monde et plein d'autres sont bien sur ce modèle de "pubs ciblées ou abonnement".

Quelles différence avec Meta?
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L'avis vise les "grandes plateformes en ligne".

Comme dit dans l'article, noyb « pointe le fait que le CEPD a l'intention de publier d'autres avis dans le courant de l'année sur les alternatives « payer ou accepter » pour des acteurs autres que les grandes plateformes. Celui-ci ne serait donc qu'un point de départ sur le sujet ».
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Okay, merci.

J'avais raté ce point.
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Pour Meta tu partages tes données ou tu payes, alors que tu veux juste dire "Bonjour" sur ton profil à toi.
Pour les journaux, tu partages tes données (pour rémunérer le journal) ou tu payes (le journal) pour accéder a un contenu qui a été travaillé (je précise pas la qualité du travail, chacun jugera ..)

Quand tu vas faire tes courses tu peux avoir une reduc avec une carte de fid ou payé plein pot, ça se rapproche de la partie journaux, tu pars avec des produits.
Sur Meta tu payes pour créer le produit (le message "Bonjour")
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Là où le raisonnement est fallacieux pour les « tu rémunères les journaux » c’est que ne pas accepter les cookies ne coupent pas le financement lié à la publicité.

Et payer ne retire pas la publicité non plus chez eux, d’ailleurs (contrairement à Next par ex).

Refuser les cookies ce n’est pas refuser de payer ou d’afficher des publicités donc ce n’est pas refuser de rémunérer le journal. Cet amalgame tient du chantage.

Cookies ou pas cookies il y a de la publicité qui rapporte au journal. Tout comme pour meta cela devrait être totalement interdit.
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C'est faux !! Je suis abonné au Figaro depuis plusieurs années. Si on n’est pas abonné, la plupart des articles (une grosse grosse majorité) s’arrêtent et ensuite s’affichent (comme sur NXI d’ailleurs) : "Il vous reste encore 80% de l’article à lire".

Donc ce n’est pas de la pub mais un paywall ici.

C’est pas la même chose…

:non:
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Le Monde aussi, j'ai confondu. Mon mauvais.

(Mais je maintiens pour les sites Webedia et pour L'Équipe :prof: )
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:yes:

Je ne connais que le Figaro (mais je suis pas encore un vieux con :D)
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C'est une question de point de vue. Je connais quelques lecteurs du Figaro, et en matière de "vieux cons", ils ont du niveau :mrgreen:
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Sud Ouest a une autre pratique vicelarde : si on n'accepte pas les cookies, le bandeau prend quasiment toute la place de l'article (on doit voir les 50 premiers caractères...).

Sur le web il suffit de jouer avec les outils dévs pour le faire sauter. Sur mobile je n'ai pas encore trouvé.
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Sur portable, le mode lecture de Firefox fait des miracles sur beaucoup de sites
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le modele de pas mal de journaux est bien à vomir aussi.
- "vous devez vous abonner ou accepter les cookies pour consulter le contenu"
- click sur accepter
- 3 lignes d'article suivies de "cet article est réservé aux abonnés

......

Donc en acceptant les cookies j'ai annoncé à la terre entiere mon intérêt pour un article que j'ai pas pu lire...
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Fais comme moi : face au chantage "tes données pour les infos", je ne lis pas (sauf si je peux passer outre leur mur en carton en bloquant le script).
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Comment définir le juste prix légalement d'un service commercial ?
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Le problème c'est que c'est pas un prix classique, c'est une alternative au modèle économique de base (l'exploitation des données), qui de base rapporte bien moins. Ils auraient calés le coût d'abonnement sur l'ARPU, ça aurait probablement pu passer, ou au moins être défendable.

Mais ils le savaient certainement dès le départ que ça ne passerait pas. Ils font exactement comme Apple avec les Store alternatifs : ils lancent une offre inintéressante au possible, et quand les autorités commencent à taper du poing, ils vont appliquer les directives exigées au départ, mais tout le monde aura déjà abandonné l'idée d'en bénéficier car dans l'inconscient collectif ce sera déjà classé "pas intéressant" (dans le cas de Meta, on aura tous coché qu'on voulait pas s'abonner quand le prix sera attractif).
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Je coche pas, du coup je loupe plein de trucs des connaissances sur les outils Meta, mais balec.

#NoWhatsAppAgain
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Pourquoi est-ce que c'est censé cibler Meta ? Ceux qui rétribuent l'usage de vos données personnelles en argent sonnant et trébuchant, c'est plutôt Temu.
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Did someone said cheh !" ?


(mort de rire 🤣)
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Max Schrems, son président, affirme que « dans l'ensemble, Meta n'a plus le choix dans l'UE. Elle doit maintenant donner aux utilisateurs une véritable option oui/non pour la publicité personnalisée. Elle peut toujours facturer les sites pour le reach, s'engager dans la publicité contextuelle et d'autres activités similaires, mais le suivi des personnes à des fins publicitaires nécessite un "oui" clair de la part des utilisateurs ».
Meta dispose encore d'autres choix, comme :
- fermer purement et simplement Facebook en Europe ;
- rendre Facebook totalement payant en Europe.

Irréaliste diront certains. Pourtant, à force de tout faire (à tort ou à raison, là n'est pas la question) pour remettre en cause le modèle de rémunération actuel, le jour où la balance entre ce que coûte un utilisateur non payant (les serveurs, la modération, les espaces de stockages, les tuyaux, etc. ce n'est pas gratuit) et ce qu'il rapporte sera en la défaveur de Facebook, c'est bien ce qui pourrait arriver, car il faut bien garder en tête que la publicité non ciblée paye beaucoup moins que la publicité ciblée.
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Dans le même temps, c'est bien Facebook qui annonçait fièrement sur sa page d'accueil un message du genre "C'est gratuit et ça le restera toujours". Et avec toutes les casseroles qui montrent que Meta se moque complètement de la protection des données privées (Cambridge Analytica, etc.), il ne faut pas s'étonner si la législation évolue et je ne peux qu'approuver la position de Max Schrems.
Edit: faute d'orthographe corrigée.
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Et le mantra de Google à ses débuts étaient... "don't be evil" ;)

Je me souviens parfaitement de Facebook annonçant que Facebook resterait gratuit. Mais il ne faut pas se leurrer. C'est une entreprise, et s'il y a une chose que Meta a su prouver jusqu'à aujourd'hui, c'était qu'elle était loin d'être philanthropique. Le jour où cela coutera plus à Meta de rester en Europe que d'en partir, l'annonce du "gratuit pour toujours" tombera vite dans les oubliettes.

Ce genre de promesse n'engage que celles et ceux qui y croient ;) (à moins que ce soit dans leur CGU, marqué comme un article irrévocable, mais j'avoue que j'ai la flemme de lire les CGU les plus longues et les plus incompréhensible du monde pour trouver ça !).
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Si la publicité ciblée disparaît dans toute l'UE (au moins pour les grandes plateformes), la pub non ciblée mais intelligente (contextuelle, catégories anonymes (genre les cohortes de Google en plus soft),...) va probablement payer plus.

Sinon, oui, il est possible que Meta fasse ce que tu dis. Ils avaient déjà envisagé de partir de l'UE quand se posait l'invalidation du EU-US Privacy Shield en 2020. Cela avait été évoqué comme risque dans leurs documents à destination des actionnaires. Mais heureusement pour eux, l'UE et les USA ont signé un nouvel accord qui n'est pas encore tombé.

Par contre, j'ai du mal à deviner quel serait leur choix, parce qu'entre la peste et le choléra, c'est difficile de choisir.
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Honnêtement, rendre Facebook payant (pour tout le monde) et abandonner la valorisation sur le pompage de données transformerait probablement tellement le produit dans le bon sens (le clickbait n’aurait plus aucun intérêt, l’algorithme d’« engagement » non plus …) que si ça se trouve je pourrai même m’y réinscrire… et payer.

Facebook a été sympa au début, ça a pas duré longtemps mais je pourrai lâcher une petite pièce pour retrouver ça. C’est vraiment toute la rentabilisation par la rétention artificielle (pour vendre de la pub) qui a rendu Facebook totalement nauséabond.
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Je crois qu'on a tous les deux une vision biaisée du rapport des gens à l'abonnement dans le web du tout gratuit.

Si j'extrapole l'expérience Next, même dans une communauté engagée et au pouvoir d'achat certain, la transformation est relativement faible.
Si c'était possible pour FB, ils auraient ne serait-ce qu'essayé.
Je peux me tromper, mais si je devais parier, je dirais que c'est impossible pour FB d'avoir une offre d'abonnement qui dépasse 5% des utilisateurs actifs.
Time will tell.
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Notons que le montant évoqué dans l'article ne concerne qu'une seule personne. Dans le cas d'une famille avec deux ados, il faut multiplier par quatre pour le foyer, puis par le nombre d'applis utilisées. De fait, et même si le but de Meta était de faire repoussoir avec un montant aussi élevé, faute d'une position claire et uniforme, bénéficier du droit fondamental à la protection des données deviendrait effectivement un sport de riches.
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C'est quoi le reach ?
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Le reach sur Facebook c'est la portée d'un message. C'est le nombre de personnes qui ont vue un message donnée.
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Merci de la définition. Par contre, je ne comprends toujours pas la phrase.

Ils veulent facturer qui dans quel cas ?
(Je n'y connais rien aux services de Meta.)
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J'avoue que c'est pas très clair pour moi aussi. Je suppose faire payer une entreprise (i.e. = une page), peut être.
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Le merci s'adressait à toi, mais pas la question qui s'adressait à quiconque comprenait la phrase. ;)
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Le Reach Facebook, c'est quoi ? – Marketing Système 2.0 sur LinkedIn (30/03/2022)

En gros, le reach est la visibilité d'une publication sur le fil d'actualité Facebook (ou Instagram). Et Meta est rémunéré pour ça (ciblage publicitaire, mise en avant de publications, etc).
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Elle peut toujours facturer les sites pour le reach
What he says?
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C'est un peu hors-sujet mais ça arrive conjointement avec ce « payer ou accepter » : depuis peu facebook réduit les fonctionnalités de son site mobile, l'application est nécessaire pour répondre aux stories et dernièrement un petit bandeau permanent s'affiche en bas de l'écran en cours de navigation sur mobile pour recommander l'application.
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Vivement que les "bulles d'enfermement social" disparaissent.
Il faut les matraquer, qu'elles partent, on repartira sur de meilleures bases, alternatives.
J'ai un ami qui ne connaissait pas le fonctionnement des algos FB (reach &co).
Il pensait que tous ses contacts voyaient toutes ses publications...
Quelle grosse bouse ce truc(FB). Je suis bien content de l'avoir abandonner. Je me reconnecte quand même une fois par an, pour les quelques contacts que je n'ai que sur cette plateforme : ça fait peur la dérive que ça a pris!
Le rgpd est un bon début, ça devrait suivre avec l'interdiction d'utiliser des algos de traçage et surtout d'influence.
Notamment interdiction totale concernant les mineurs de leur proposer du contenu qui pourrait les influencer négativement. Pour le coup les LLM pourraient faire un super travail là dessus dans l'analyse.
Il faut bien comprendre que les patrons de ce type de société (meta) sont des bonimenteurs, démagogues. Ils n'en n'ont rien à faire de foutre en l'air les personnes, les enfants, de mal filtrer les contenus, ce qui les impactent n'est que leur portefeuille. Le reste à leurs yeux n'a aucune valeur. Qu'ils partent, bon débarras.
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La visibilité des statuts des « amis » est beaucoup plus importante que celle des publications des pages dans le fil d'actualité et un commentaire déposé sur une page est visible sur le fil d'actualité de ses « amis ». Pour augmenter le reach d'une page facebook, il suffit d'augmenter les interactions de ses abonnées (partager, liker, commenter) mais pour ça il faut souvent payer au départ. Les interactions entre « amis » servent surtout à Facebook pour générer de l'activité (collecte de données) et de l'audience (audience vendue aux annonceurs).

Le « payer ou accepter » de Meta incompatible avec le RGPD pour le CEPD

  • Meta ciblée mais pas citée

  • Les données personnelles ne sont pas des biens commercialisables

  • Meta reste sur sa position

  • Un point de départ sur les alternatives « payer ou accepter » pour noyb

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