Plainte contre l’alternative paiement ou publicité comportementale de Meta
Schrems vs Meta, saison 3
L'association noyb porte plainte auprès de la CNIL autrichienne contre Meta, considérant que l'alternative publicité comportementale ou paiement laissée aux utilisateurs de Facebook et Instagram n'est pas conforme au RGPD.
Le 28 novembre 2023 à 17h31
5 min
Droit
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Dans un communiqué publié sur son site ce jeudi 28 novembre, noyb, l'association de Max Schrems, annonce porter plainte contre Meta pour l'alternative qu'elle appelle « Pay or Ok » proposée par les plateformes de la multinationale du numérique.
À savoir, soit vous payez, soit Facebook et Instagram utilisent vos données pour afficher pendant votre navigation de la publicité comportementale. Cette plainte était prévisible. Chez Next, on trouve même que noyb a été un peu lent à la détente.
En effet, Meta a annoncé fin octobre une offre payante pour Facebook et Instagram en Europe. Dans cette annonce, l'entreprise expliquait que la mise en place de cette alternative lui permettrait, de son point de vue, de se mettre en conformité avec le RGPD. Celui-ci l'oblige à demander le consentement des utilisateurs de ses réseaux sociaux avant de leur présenter de la publicité comportementale.
Meta explique se conformer au RGPD avec son alternative
Jusque-là, Facebook et Instagram imposaient l'affichage de cette forme de publicité s'adaptant aux données récoltées sur les profils de ses utilisateurs sur les bases juridiques du contrat et de l'intérêt légitime, arguant que cette pratique était compatible avec le règlement européen.
Mais cette interprétation a été mise à mal par plusieurs autorités de contrôles européennes. Au point que le Comité européen de la protection des données (CEPD, ou EDPB en anglais) a ordonné à la Data Protection Commission (DPA), autorité irlandaise, d' « imposer une interdiction du traitement des données à caractère personnel à des fins de publicité comportementale sur les bases juridiques du contrat et de l'intérêt légitime dans l'ensemble de l'Espace économique européen ».
En proposant une alternative payante, Meta expliquait faire basculer ses utilisateurs de la Suisse, de l'Union européenne et de l'Espace économique européen (EEE) vers les bases juridiques du consentement en ce qui concerne le traitement des données collectées sur ses propres plateformes à des fins publicitaires.
« La possibilité d'acheter un abonnement sans publicité répond aux exigences des régulateurs européens tout en laissant le choix aux utilisateurs et en permettant à Meta de continuer à servir tous les habitants de l'UE, de l'EEE et de la Suisse », arguait l'entreprise, ajoutant que « la CJUE a expressément reconnu qu'un modèle d'abonnement, comme celui que nous annonçons, est une forme de consentement valable pour un service financé par la publicité ».
Depuis, on en sait un peu plus sur l'alternative payante : la Meta addition est à partir de 119,88 euros par an pour un seul compte et 251,88 euros par an si l'utilisateur veut le mettre en place pour son compte Facebook et son compte Instagram, tout de même.
noyb considère qu'elle viole le RGPD et la Charte européenne des droits fondamentaux
Dans sa plainte [PDF de la version anglaise en traduction automatique], noyb considère, elle, que cette alternative viole plusieurs articles du RGPD (les articles 6.1, 7.4 et 5.1.a) et l'article 8 de la Charte des droits fondamentaux (CDF) de l'Union européenne sur la protection des données à caractère personnel.
S'appuyant sur le montant demandé par Meta pour utiliser un compte Facebook et un compte Instagram, la plainte explique que, « dans ce cas, Le plaignant devait consentir au traitement de ses données personnelles, qui sont protégées par des droits fondamentaux, ou payer 251,88 euros par an. Le droit fondamental à la protection des données prévu à l'article 8 de la CDF ne serait donc accordé (à l'instar de l'ancien droit de vote au recensement) qu'à ceux qui en ont les moyens. ».
Pas de choix « libre » selon noyb
Et noyb, argumente toujours autour de ce droit fondamental, en arguant que « même si certains droits sont intrinsèquement commercialisés, les droits fondamentaux sont généralement inaliénables. Ils doivent être exercés de manière égale par tous. Le droit fondamental à la protection des données ne peut donc être aliéné à aucune autre personne et est hautement personnel. Cependant, lier le consentement au titre de l'article 6, paragraphe 1, point a), du RGPD à un paiement a l'effet exactement inverse : le droit fondamental est abandonné en échange d'un paiement (ou de l'évitement d'un paiement). Par conséquent, le droit fondamental ne serait plus inaliénable, mais dégénérerait en marchandise ».
Dans son communiqué, l'association affirme que « non seulement ce coût est inacceptable, mais des chiffres de l’industrie laissent entendre que seulement 3 % des utilisateurs souhaitent être pistés, tandis que 99 % d’entre eux ne souhaitent pas payer quand on leur impose des frais pour protéger leur vie privée ».
Et son président en rajoute une couche, expliquant que « lorsque 3 % des gens veulent nager, mais que 99,9 % finissent dans l'eau, chaque enfant sait qu'il ne s'agit pas d'un choix "libre". Ce n'est ni intelligent ni légal - il est tout simplement pitoyable que Meta continue d'ignorer la législation européenne ».
Plainte contre l’alternative paiement ou publicité comportementale de Meta
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Meta explique se conformer au RGPD avec son alternative
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noyb considère qu’elle viole le RGPD et la Charte européenne des droits fondamentaux
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Pas de choix « libre » selon noyb
Commentaires (40)
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Abonnez-vousLe 28/11/2023 à 18h19
Modifié le 28/11/2023 à 19h04
Le 28/11/2023 à 19h13
Le 28/11/2023 à 19h25
Ils peuvent mettre payant pour tout le monde ou plein de pub non ciblée, pas de souci.
Le 28/11/2023 à 23h02
Le 29/11/2023 à 14h50
Le 29/11/2023 à 14h50
Considères-tu avoir un choix libre et éclairé?
si 99% des gens vont choisir la bourse, cela signifie-t-il qu'ils n'en ont rien à faire de leur argent?
Faut arrêter à vouloir faire des raccourcis partout. on faux choix n'est PAS un choix.
Le 29/11/2023 à 14h51
Le 28/11/2023 à 18h20
Perso, je considère que vendre mes données personnelles pour un service, c'est une forme de prostitution.
Avec les outils de meta et certaones applications telles que Duolingo on en arrive même à leur vendre notre carnet d'adresses et donc leur permettre de collecter des données personnelles sans l'accord des personnes concernées.
Je suis étonné que nyob n'ai pas encore exploité ce filon
Modifié le 28/11/2023 à 22h49
Le 29/11/2023 à 09h27
Sauf que l'arrêt de la CJUE sur lequel se fonde Meta pour son alternative payante consacre, par une interprétation discutable du RGPD, une forme de patrimonialisation.
A voir ce que donnera l'action de NOYB.
Le 28/11/2023 à 18h41
Et si oui, est-ce qu'on devrait réclamer à Facebook les 251,88€ (même pas le tarif psychologique ) que valent la non utilisation de nos données ?
Le 28/11/2023 à 18h43
En effet, ceux qui ne paient pas (quasiment tout le monde, vu q'ils ont été habitué à ne pas payer pour cette plateforme) n'ont aucun changement vis à vis de leurs traitements des données.
Next est de moins en moins dans le futur lointain, une partie des services gratuits, tel qu'on les connait,ne pourront plus exister encore longtemps.
Le 28/11/2023 à 19h11
Le 28/11/2023 à 22h56
Par contre, beaucoup de gens quitteront les services de Meta et comme ils vivent de la pub, ça m'étonnerais que ça arrive...
Le 28/11/2023 à 23h01
Le 29/11/2023 à 09h36
Soit le service de Meta est payant de base, parce qu'il a un coût, et là c'est indépendant du traitement des données personnelles, et Meta est quand même obligé de respecter le RGPD pour les utilisateurs du service (qui paie pour le service).
Soit le services de Meta est "gratuit", et Meta se finance autrement (par la pub). Dans ce cas là, le respect du RGPD est le même, soit il a le consentement et il fait de la pub ciblée, soit il ne l'a pas et il ne fait pas de pub ciblée. Mais ce n'est pas discutable.
Dans tous les cas tu doit respecter le RGPD.
Le problème ici, c'est qu'on en est à un point où soit tu t’assois sur tes droits, soit tu paie. Et ça, ça ne peut pas être conforme au RGPD.
Et accessoirement on a fait croire au gens que ces services pouvaient être gratuits.
C'est pas au RGPD de s'adapter au business modèle de Meta, en principe, c'est l'inverse.
Le 28/11/2023 à 23h05
Modifié le 29/11/2023 à 10h58
Il me semble que la CNIL avait validé les cookiewalls, mais peut-être que la justice a un avis différent.
Ou alors, les deux sujets n'ont strictement rien à voir, mais je ne vois pas trop pourquoi.
Le 29/11/2023 à 09h46
Le 29/11/2023 à 10h22
La CNIL autrichienne (ou irlandaise, je ne sais pas qui va décider ici)peut dire que le montant demandé par META n'est pas approprié (en fait trop cher) et sanctionner META sans que cela fasse jurisprudence sur des sites qui demandent un montant plus raisonnable.
Non. Le Conseil d'État avait dit à la CNIL qu'elle ne pouvait pas dire dans ses préconisations (soft law) que les cookies walls étaient interdit. Il disait lui aussi qu'il fallait voir au cas par cas et la CNIL dit aussi que ça dépend du montant demandé.
La CNIL (ou le Conseil d'État) disait aussi que ça dépendait si le service était disponible ailleurs ou pas gratuitement (par exemple pour les sites de recettes de cuisine).
Ça a bien à voir quand il s'agit de cookies destinés à la pub comportementale (ciblée).
Comme on peut le voir, la CJUE et le Conseil d'État ont tous les 2 des positions proches et ça va être compliqué d'avoir une jurisprudence simple puisqu'il faut juger au cas par cas probablement en comparant la valeur du service et le montant demandé.
Le 30/11/2023 à 11h02
Modifié le 29/11/2023 à 14h55
"« mais des chiffres de l’industrie laissent entendre que seulement 3 % des utilisateurs souhaitent être pistés, tandis que 99 % d’entre eux ne souhaitent pas payer quand on leur impose des frais pour protéger leur vie privée »
« lorsque 3 % des gens veulent nager, mais que 99,9 % finissent dans l’eau, chaque enfant sait qu’il ne s’agit pas d’un choix « libre »."
le fond du problème ne sont pas les chiffres.
Peste ou Choléra, la bourse ou la vie, ... ne sont pas des choix.
Quand un "service" qui se veut gratuit depuis sa mise en ligne a rendu dépendant des milliards d'individus leur propose ce genre de choix, la possibilité de dire non aux deux devient impossible.
Le 29/11/2023 à 17h02
Le 29/11/2023 à 16h00
Soit tu paies plein pot et tu as le contenu et pas de pub.
Soit tu paies moins cher mais en échange tu donnes tes données personnelles et tu as de la pub ciblée (ce n'est même pas gratuit comme FB).
Le 29/11/2023 à 17h03
(source : https://help.netflix.com/fr/node/126831?q=publicit%C3%A9 )
Tant que tu peux refuser le ciblage sans payer plus, il n'y a pas de soucis.
Modifié le 29/11/2023 à 22h11
Le 01/12/2023 à 10h48
Modifié le 01/12/2023 à 12h40
Mais je suis d'accord avec toi.
Modifié le 29/11/2023 à 16h32
Imaginons qu'un service X (rien à voir avec Twitter hein !) soit payant de base. Tous les utilisateurs ont donc un abonnement.
Un jour, pour convaincre plus de monde, X propose un accès "gratuit" contre de la pub. Le choix ainsi proposé est le même (payer ou être pisté). Etes-vous pour ou contre ?
Le 29/11/2023 à 17h05
Le 29/11/2023 à 17h52
Dans ce cas, ça passe pour moi.
Modifié le 29/11/2023 à 22h20
D'une manière générale, je bloque la pub sur le web maintenant. De toute façon la publicité rédactionnelle est quasi partout dans la presse papier et la presse en ligne (coucou! groupe Ebra, Numerama, PQR, je vous salue). Je supprime aussi progressivement mes profils de réseaux sociaux (quand ils ne ferment pas, comme des plateformes de réseaux entre voisins qui avaient fait des levées de fonds dans les années 2010). Il me reste Facebook, Twitch, Linkedin, Pinterrest, Nextdoor (j'en oublie peut-être car j'utilise seulement Linkedin et Mastodon depuis plusieurs mois). Pour être honnête, je teste actuellement les plateformes de financement comme Ko-fi, Patreon, et bien sûr Ulule pour la campagne Nextinpact-le mag.
À bas la publicité rédactionnelle (native advertising), les contenus suggérés ou sponsorisés, les magazines municipaux, la publicité de rue !
Le 29/11/2023 à 22h24
Le 30/11/2023 à 07h54
Le 01/12/2023 à 09h48
Le 01/12/2023 à 11h39
Le 01/12/2023 à 20h30
Modifié le 03/12/2023 à 23h50
J'avoue avoir été assez déçu de certains journaux en voyant cela mis en place.
Bon, et il y a certaines chaines privées pour lesquelles la gloutonnerie est connue qui le font aussi, mais c'était cette fois tout à fait prévisible, vu la taille des rats.
Si seulement les autorités de soi-disant "contrôle" publiques pouvait leur tomber sur le rab comme le prévoit la loi… CNIL comme ARCOM. Mais non. L'illustration du respect de la loi à plusieurs vitesse en fonction de l'abondement des finances.
Le 04/12/2023 à 20h20