Jean-Marc Ayrault signe une circulaire pour le libre dans les administrations
Et pendant ce temps en Europe...
Le 24 septembre 2012 à 14h09
6 min
Droit
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Une première ! Le premier ministre a publié au journal officiel une circulaire définissant les orientations pour l’usage du logiciel libre dans l’administration. Un poids politique fort applaudit par plusieurs groupements favorables au secteur, qui militent cependant pour une démarche encore plus ambitieuse.
La circulaire annonce que désormais, au regard du contexte, « le logiciel libre doit être considéré à « égalité avec les autres solutions. C’est dans cette évolution que s’inscrit l’usage du logiciel libre dans l’administration ». Selon le document, « de nombreux logiciels sont maintenant des « utilités » avec une valeur d’innovation limitée, et les clients acceptent de moins en moins de payer un prix élevé pour des produits jugés communs et rentabilisés, et d’être liés à un fournisseur ». Bref, le moment est venu pour accompagner ce mouvement.
Le document se veut pédagogique puisqu’il décrit tout d’abord les différentes libertés associées au logiciel libre (liberté d’exécuter, d’étudier le fonctionner, d’améliorer le programme, etc.). La circulaire applaudit le libre en qu’il tend à s’auto-entretenir, pour les besoins de l’utilisateur, sous le contrôle de la communauté, tout en créant l’émulation nécessaire à la créativité. Et elle affirme ce que répètent depuis des lustres les partisans du secteur : les solutions libres sont souvent moins chères, pilotées par les besoins, non par le superflu, et qui facilitent les adaptations, tout en garantissant un support à long terme et une mutualisation.
Quand le leader du marché élimine la concurrence
Au fil des pages, le document vante aussi les mérites concrets du secteur citant des cas où les coûts de fonctionnement des applicatifs ont été divisés par dix. La circulaire assène même quelques coups à un éditeur basé à Redmond : « certains produits d’éditeur ont de moins en moins d’alternatives commerciales crédibles, le leader du marché ayant éliminé la concurrence. Le logiciel libre apporte alors des possibilités alternatives ». Le texte administratif n’évoque pas cependant les autres problèmes que peuvent générer les solutions propriétaires, à savoir la dépendance technologique ou les questions d’intelligences économiques du fait d’un code fermé.
Tout n’est cependant pas rose : la circulaire reconnaît que quand il n’a pas de prix, « le logiciel libre (…) est parfois jugé sans valeur » du côté de l’utilisateur influencé par l’effet marketing. S’adonner au libre conduit aussi pour une administration à suivre une communauté d’acteurs « pour s’assurer de la pérennité et du sérieux de la solution », le tout sous un cadre juridique spéfique, davantage tourné vers la propagation des connaissances que leur monopole. De même, l’utilisateur surtout professionnel « ne peut se limiter à profiter du système ; il doit entretenir le modèle par réinjection d’une part de ses gains sous une forme ou une autre. »
Mutualiser les efforts, réinvestir les dépenses évitées
Sur ce terrain, la circulaire Ayrault demande que les administrations mutualisent leurs efforts afin de gagner en efficacité, notamment sur la correction de bug. Le document rappelle qu’un « cadre de convergence des souches à privilégier dans le développement des systèmes d’information de l’État » a été défini cette année. Il est « désormais maintenu en concertation interministérielle ». Le texte veut ainsi que « chaque ministère doit participer au maintien à jour de ce cadre et à son renforcement progressif. En particulier il déclarera régulièrement l’usage fait des souches du cadre et les usages hors du cadre, pour permettre le suivi de sa prise en compte et la gestion de son évolution ». Une mise à jour trimestrielle est du coup prévue, aidée d'un réseau d’experts.
Cette notion de mutualisation a un versant économique concret, mais non obligatoire : la circulaire propose que les administrations réinjectent 5 à 10% des coûts de licences évités dans l’enrichissement de certaines souches. Avec une certaine prudence, le document demande aussi que l’État développe la culture d’usage des licences libres dans le développement de systèmes d’informations publics. Comment ? Par exemple en préparant ou faisant usage de licences libres, tout en veillant « à faire prévaloir cette liberté vis-à-vis de ses prestataires dans tout contexte pouvant amener à réutilisation, sauf si un surcoût explicite est induit ».
La circulaire intervient dans un contexte où les administrations notamment indépendantes n’ont souvent d’yeux que pour les solutions propriétaires. Cet été, la Hadopi a ainsi publié un appel d’offres sous forme d’accord-cadre où elle cite notamment Microsoft Office 2010 Pro, Office 2013, Visio 2010, Project 2010, Exchange, Forefront TMG 2010 ou Sharepoint, sans oublier Windows 7, Windows 8, Windows Server…
Une prise de position claire, engagée
Le Conseil National du Logiciel Libre (CNLL) applaudit l’initiative et spécialement le groupe de travail de la DISIC, auteur du texte. « C’est un peu un coming-out du gouvernement sur le logiciel libre ! Depuis longtemps, le logiciel libre tient une place de choix dans les services informatiques de l’État, mais les prises de position officielles avaient rarement été aussi claires et engagées, accompagnées de résolutions concrètes » affirme Patrice Bertrand, président du CNLL. « Elles se limitent à ce stade au périmètre des systèmes d’information de l’État, et nous espérons que d’autres mesures confirmeront cette orientation au plan de la politique industrielle de la France ». Le CNCLL ajoute que l’État doit continuer l’effort et soutenir l'innovation et la formation, en militant pour les standards ouverts tout en refusant les brevets logiciels.
D'autres chantiers : les brevets logiciels, l'éducation, les appels d'offre
Du côté de l’April, on se « réjouit » tout autant du document. L’association pour la promotion du libre applaudit « la circulaire présente le Logiciel Libre comme un « choix raisonné » qu’il faut diffuser dans tous les ministères. Elle montre que, par les libertés qu'il donne à ses utilisateurs et son mode de fonctionnement, il offre des solutions extrêmement intéressantes pour l'administration tant au niveau de la gestion des coûts que de l'indépendance technologique des différentes administrations. De plus, cette circulaire valide et renforce le travail effectué depuis plusieurs années par les agents publics dans les groupes thématiques de mutualisation ».
Lionel Allorge, président de l'April : « Après la circulaire Fillon sur la généralisation de l'usage des formats ouverts, cette décision du premier ministre est une bonne nouvelle pour l'administration française. Nous espérons que le gouvernement Ayrault saura également faire profiter les citoyens français de sa bonne volonté en ce qui concerne le Logiciel Libre afin que cessent les inégalités dont ils sont victimes, par exemple en matière de DRM ou de vente liée. ». Mais plus qu’un aboutissement, l’association y voir surtout le premier pas d’une démarche qui reste à accomplir, notamment en matière d’éducation ou, là encore, contre les brevets logiciels.
Jean-Marc Ayrault signe une circulaire pour le libre dans les administrations
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Quand le leader du marché élimine la concurrence
Commentaires (66)
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Abonnez-vousLe 25/09/2012 à 09h56
Le 25/09/2012 à 21h40
Le 26/09/2012 à 10h16
Le 26/09/2012 à 11h19
Le 26/09/2012 à 12h43
Le 24/09/2012 à 14h12
Oui ! " />
Le 24/09/2012 à 14h14
Ils vont s’équiper de pare feu open office ?
Le 24/09/2012 à 14h20
C’est un bon début… Enfin c’est mieux que rien quoi…
Le 24/09/2012 à 14h27
Juste quelques questions pour ce brave enseignant de college qui se trouve en fait etre premier ministre de la France.
S’est il posé les questions des regles de concurence et des regles des marchés publics ?
Manifestement non
S’est il reellement posé les problemes ? Car il existe une sacré difference entre traiter des problemes de monopoles evidents et imposer une licence qui ne répond en rien aux problemes evoqués (GNU). On fait de la merde aussi bien avec du fermé que du ouvert.
Sa lettre d’intention couvre t’elle les IPAD offerts par son superieur hierarchique à ses administrés de Correzes qui sont encore plus proprietaires que Office ?
Va t’il renoncer à son IPhone ? Faire interdire les produits Apple chez les bobos socialistes ?
Vaste sujet. Mais quand on enclanche une reflexion de ce genre, on va au bout, et on evite de rester dans le superficiel et le démago
Le 24/09/2012 à 14h29
@Marc
Article intéressant mais il y a un problème de fond qui me perturbe :
ou en est-on au niveau du brevet logiciel dans les législations les plus importantes (économiquement) ?
Exemple stupide, si une boite inventait une nouvel excel, dans quel pays aurai-t-on le droit d’en développer des clones du concept ?
Et là je parle des brevets logiciel, mais c’est pas mieux pour le hard (samsumg/apple avec le brevet des bords arrondis toussa….)
Bref un article ou mieux encore un dossier sur un état des lieux sur le brevet logiciel pourrait être salutaire….
Enfin je dit ça mais je dit rien hein :)
Le 24/09/2012 à 14h36
Bon après généralement dans les progiciels ce qu’on paye c’est pas la technologie mais la veille juridique et l’assistance utilisateurs… Après des années à dégraisser la fonction publique en externalisant, faut pas attendre des gens qu’ils soient capables de tout paramétrer, les fonctionnaires sont devenus avant tout des passeurs de marchés publics et des contrôleurs de travaux finis.
Le 24/09/2012 à 14h37
Le 24/09/2012 à 14h39
‘tain, voilà qui est inespéré ! " />
Comment ? Il n’y a pas un lobby qui a une oreille favorable de la part de ministres/députés/Président copaings ?
Une deuxième médaille Légion d’Honneur à un PDG de M$ ?
Bon, trêve de plaisanterie.
Il ne s’agit certes pas d’imposer partout du Libre au nom d’une doctrine anti-capitaliste, mais simplement en effet de rationnaliser l’utilisation de l’informatique en trouvant un juste équilibre, de vrais appels d’offre, et d’offrir par le biais du Libre une plus grande indépendance vis à vis des multinationales, et peut-être par la même occasion des opportunités de débouchés au sein de notre pays.
Le 24/09/2012 à 14h41
Mouaip mais ce sont les régions qui payent pour l’Education Nationale et tous les ENT et ordis sont payés par eux donc…" />
Après il reste la police et la gendarmerie dont une partie est déjà sous logiciel libre, l’armée on ne sait pas trop (quand j’étais au service, internet existait déjà mais la compta des fournitures voyageaient en disquette dans le camion). Les hôpitaux ont besoin de windows pour faire tourner les logiciels spéciaux qu’ils utilisent.
Reste pas grand chose qui concerne ce plan là dans la fonction publique d’Etat.
Maintenant c’est bien d’avoir mis les choses au point " />
Le 24/09/2012 à 14h41
Le 24/09/2012 à 14h44
Le 24/09/2012 à 14h45
Et pendant ce temps en Europe…
Affaires à suivre ? " /> Et suivi. merci Marc
Le 24/09/2012 à 14h45
Le 24/09/2012 à 15h34
Mais tu disais: “Les hôpitaux ont besoin de windows pour faire tourner les logiciels spéciaux qu’ils utilisent. “.
Ton lien (que j’ai parcouru très rapidement) ne montre pas qu’il n’est pas possible d’avoir une infrastructure basée sur Linux, avec des logiciels spéciaux alternatifs compatibles.
C’est comme dire: dans ma maire, le maire utilise MSword, donc, les mairies ont besoin de windows pour faire tourner les logiciels spéciaux qu’ils utilisent.
Pour moi le dossier médical personnel c’est un logiciel spécial pour les hôpitaux et professionnel. Après pour le reste je ne suis pas un spécialiste pour savoir si l’imagerie médicale ou les appareils de surveillance de santé dans les blocs sont sous windows ou pas.
Mais à terme celui qui contrôlera le DMP contrôlera toute la chaîne.
Le 24/09/2012 à 15h37
Le 24/09/2012 à 15h37
Le 24/09/2012 à 15h47
Le 24/09/2012 à 15h51
Le 24/09/2012 à 16h03
Le 24/09/2012 à 16h07
Pour les economies on repassera : Office 2011 coute 40 € pour une administration par poste.
40€ c’est une heure de travail (toutes charges incluses patronales + salariales)
Les problemes divers et varies des suites “libres” (ou pompees sur Office) coutent vites bien plus que cela.
Le 24/09/2012 à 16h07
Le 24/09/2012 à 16h08
Le 24/09/2012 à 16h08
Le 24/09/2012 à 16h11
Le 24/09/2012 à 16h16
Le 24/09/2012 à 16h19
Le 24/09/2012 à 16h22
Deux ou trois problèmes que ça soulève:
Après, on peut trouver d'autres moyens de bosser, mais dans une grande organisation les produits de M\) trouvent très bien leur place, et n’ont guère de concurrents sérieux
(blague : vous avez envie de taper vos rapports avec LaTex ? Bon, là j’exagère parce qu’il y a bien sûr openoffice, mais dans d’autres domaines ça va être de ce niveau-là !!!)
Sauf que.. c’est le pognon le problème, mais bel et bien le nombre de programmeurs costauds - et volontaires - pour s’y mettre
Essayez donc de trouver sur le marché un un BON administrateur MySQL ou PostGres, et on en reparle.. (= pas un étudiant d’école d’ingé qui a fait un peu joujou avec MySQL, mais un gars du niveau d’un “Oracle Certified Professional”).
Le 24/09/2012 à 16h27
Le 24/09/2012 à 17h45
boudiou! Que ça fait du bien!
Le 24/09/2012 à 14h47
Le 24/09/2012 à 14h48
Le 24/09/2012 à 14h50
Le 24/09/2012 à 14h50
Le 24/09/2012 à 14h53
Le 24/09/2012 à 14h53
Le 24/09/2012 à 14h57
Le 24/09/2012 à 14h59
AlphaBeta a écrit :
Juste quelques questions pour ce brave enseignant de college qui se trouve en fait etre premier ministre de la France.
S’est il posé les questions des regles de concurence et des regles des marchés publics ?
Manifestement non
Il n’est pas aussi intelligent que toi, et il est de gauche, c’est pour ça. " />
Bon : les appels d’offre dans les parcs infos sous la ministritude splendide de Fillon ton pote du même bord que toi ont brillé par leur absence, tu parles d’une référence !
Il est vrai qu’on ne pas trahir quelqu’un qui a été décoré de la Légion d’Honneur (cf Ballmer pour les ignorants). Ça, c’est du respect de la la concurrence et des règles de marché ! " />
Le 24/09/2012 à 15h01
Le 24/09/2012 à 15h02
Source?
Je travaille en recherche en partenariat avec un hopital est la pluspart des logiciel que je vois utilisé sont soit en java soit multiplateformes. Et les serveurs de deux plateformes sont sous linux/unix
Ce que je vois n’est peut-être pas représentatif mais…
autopromo de windows mais qui donne une bonne vue qu’ils ne sont pas absents, les régions citées sont parmi les plus peuplées de France.
Le 24/09/2012 à 15h06
Je rebalance ce que l’on utilise au sein du MEDDE : serveurs sous EoLE (distribution similaire à celle de l’Education Nationale basée sur Ubuntu), bases de données sous MySQL et PosGre. En suite bureautique, un projet MiMO qui a comme base LibreOffice. En navigateur, Firefox ESR. En client de messagerie+agenda : un “Courielleur Melanie 2” basé sur Thunderbird + Lighnting + diers modules complémentaires. En alternative à Mapinfo Professionnel, on passe de plus en plus à QGIS.
Et il y a des études pour passer à terme en environnement utilisateur Linux pur (possible pour 90% des gens sans le moindre problème).
Très bien va dire ça aux créateurs d’ENT pour l’éduc nat, ce matin je tente sous firefox d’aller sur la messagerie interne de mon ENT et c’est impossible Firefox semble “incompatible” dixit le responsable info du lycée. Résultat obligé de passer par internet explorer 6.0… le seul installé sur la bécanne
Le 24/09/2012 à 15h06
Le 24/09/2012 à 15h23
Le 24/09/2012 à 15h25
un éditeur basé à Redmond
Tu parles bien de la division Amérique de Nintendo ? " />
Et sinon, ça en est où à l’Assemblée nationale ?
Le 24/09/2012 à 15h27
Le 24/09/2012 à 15h29
Le 24/09/2012 à 17h58
Le 24/09/2012 à 18h02
Le 24/09/2012 à 18h25
Le 24/09/2012 à 19h02
Des faits, pas des déclarations.
Le 24/09/2012 à 19h05
En quelques années, on est passé du possesseur de logiciels (achetés) à locataire de logiciels achetés (évidement, bugs, incompatibilités fonctionnelles et matérielles ont modifié en douceur la qualité première de l’achat) (et dire qu’un ‘patch’ ou plus, peut suffire, mais interdit)
Nous sommes tous conscients qu’il y a entourloupe (on est passé du logiciel gratuit avec l’achat du PC à la version limitée (ES)° et ensuite, à la version 3 mois gratuit)
°Edition Spéciale
Il me semble qu’à un certain moment, on parlait de mises à jour payantes, je suppose, qu’ils ont abandonné en faveur de nouveaux programmes payants.
Le changement d’OS pousse aussi au renouvellement de logiciels " />
Et l’obsolescence programmée matérielle vient rajouter une nouvelle couche à tout ce racket que certains fuient comme la peste en se nourrissant dans le logiciel libre (pour simplifier)
Le 24/09/2012 à 19h06
Le 24/09/2012 à 19h41
J’applaudis des deux mains !
Le 24/09/2012 à 22h18
Le 24/09/2012 à 22h22
Le 24/09/2012 à 22h35
Le 24/09/2012 à 23h07
Enfin, en espérant voir Windows dégager lorsqu’il n’est pas indispensable (donc dans 95% des cas)
Le 25/09/2012 à 06h46
le logiciel libre doit être considéré à « égalité avec les autres solutions
Je crois que tout est résumé dans cette courte phrase. " />
Le 25/09/2012 à 07h24
Le 25/09/2012 à 08h36
Cool !!! :)
Le 25/09/2012 à 08h41
Le 25/09/2012 à 09h17