Blocage des sites : débats houleux à l’Assemblée entre l’UMP et la majorité
Des hauts, débats
Le 17 décembre 2013 à 08h35
8 min
Droit
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L’Assemblée nationale a achevé cette nuit l’examen, en deuxième lecture, du projet de loi sur la Consommation. Le député UMP Lionel Tardy fut à cette occasion amené à défendre deux amendements qu’il avait déposés sur ce texte, lesquels concernaient le blocage judiciaire des sites Internet. Accompagné de sa collègue Laure de la Raudière, l’élu a tenté de mettre la majorité socialiste face à ses contradictions.
Comme nous le révélions en mai dernier, le projet de loi Hamon met en place un nouveau dispositif de blocage judiciaire des sites Internet. Le texte du ministre de la Consommation prévoit en effet que la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) puisse réclamer du juge « toutes mesures proportionnées propres à prévenir un dommage ou à faire cesser un dommage occasionné par le contenu d’un service de communication au public en ligne » qui viendrait malmener une disposition du Code de la consommation. Cette mesure avait déjà été proposée en 2011 par l’UMP, alors aux manettes, suscitant au passage une vive opposition du PS. Finalement, elle avait été abandonnée.
Remise sur le tapis par la nouvelle majorité socialiste, cette brèche étendant de fait le périmètre des sites pouvant être bloqués sur ordre d’un juge était cependant très mal vue par Lionel Tardy. Le député UMP a donc tout simplement demandé au travers de deux amendements (le premier, le second) la suppression de cette mesure. « Malgré l’emploi du terme "mesures proportionnés", une telle disposition n’est pas acceptable, car elle est prise pour étendre encore la possibilité de bloquer l’accès à certains contenus sur Internet, et finalement stigmatiser une nouvelle fois Internet via la restriction de son accès » expliquait ainsi le parlementaire dans son exposé des motifs.
Lionel Tardy appelle le gouvernement à la cohérence
Hier, dans l’hémicycle, le parlementaire a insisté sur le fait que « le blocage des sites internet, outre qu’il envoie de mauvais signaux, [est] dans tous les cas techniquement inefficace ». Surtout, Lionel Tardy s’est plu à rappeler l’argumentaire déployé par le gouvernement pour revenir sur le blocage administratif des sites prévu par les parlementaires de sa majorité dans le cadre de leur proposition de loi sur le système prostitutionnel (voir notre article).
« Je ne résiste pas au plaisir de vous lire son argumentation, a ainsi déclaré Lionel Tardy : "Le partage entre les responsabilités respectives du juge et de l’autorité administrative dans ces décisions est un sujet qui mérite une réflexion plus approfondie, dans le respect des droits fondamentaux en termes de libertés d’expression et de communication. Le numérique, ses technologies et ses usages peuvent et doivent être un support et un facteur d’approfondissement de ces droits. Le Gouvernement a donc engagé cette réflexion dans le cadre de la préparation de l’habeas corpus numérique. Il est donc prématuré de prévoir l’inscription d’un dispositif de ce type dans toute proposition législative." Je n’aurais pas dit mieux. »
Appelant le gouvernement à respecter la plus grande « cohérence », le député UMP a donc invité l’exécutif à soutenir ses amendements. « Reconnaissez qu’il serait difficilement compréhensible que le gouvernement se contredise » a-t-il lancé.
Razzy Hammadi, rapporteur socialiste du projet de loi, ne l’a néanmoins pas entendu de cette oreille : « Il y a un premier écueil dans votre raisonnement, c’est de faire croire que le texte comporte autre chose que ce qu’il contient ». Le député PS a ainsi tenu à préciser que « le projet de loi ne reconnaît pas à la DGCCRF la faculté de bloquer un site, en aucun cas. Il lui offre la possibilité de saisir le juge afin qu’il délivre une injonction judiciaire en vue de prévenir ou faire cesser un dommage pour les consommateurs inhérent au contenu illicite d’un site internet ».
« Il dit des bêtises ! »
La députée Laure de la Raudière est alors intervenue pour rappeler à l’ordre la majorité : « Ce n’est pas ce que vous disiez lors de la discussion de la loi Lefebvre ! », en référence à l’opposition du Parti socialiste quant aux mesures similaires proposées en 2011 par l’UMP. Comme nous avons déjà eu l’occasion de l’évoquer, l’opposition d’alors affirmait sans détour que « ce n’est pas parce que la procédure fait intervenir un juge qu’elle doit être considérée comme a priori légitime ». Le PS préconisait ainsi de ne réserver le blocage qu’aux atteintes les plus graves, sachant que de telles mesures étaient jugées « potentiellement dangereuses, car attentatoires à la liberté d’expression et de communication sur internet ». Le groupe mené par le député Jean-Marc Ayrault terminait cette descente en règle du projet de loi Lefebvre par ces mots : « Les acteurs de l’économie numérique ainsi que de nombreux techniciens considèrent que le traitement technique des infractions relevées sur internet est inefficace ».
Pourtant, le rapporteur est resté droit dans ses bottes : « Non, car à l'époque il n’y avait même pas le filtre du juge » a-t-il rétorqué à Laure de la Raudière. « Mais si ! » a alors hurlé l’élue UMP, tandis que le président de séance lui demandait d’attendre son tour pour prendre la parole. « Il dit des bêtises ! » a-t-elle néanmoins eu le temps d’insister... Et pour cause : le projet de loi Lefebvre prévoyait bien un recours « à l’autorité judiciaire » (voir l’extrait du texte ci-dessus).
« Je voulais juste rectifier les propos de monsieur le rapporteur, qui a dit quelque chose de faux, a poursuivi la députée après avoir repris la parole. L’article présent dans la loi Lefebvre était exactement le même que celui-là. Il était donc bien prévu l’intervention d’un juge ». En direction de Razzy Hammadi elle a lancé : « Quand vous vous êtes opposés il y a moins de deux ans - pas vous personnellement, monsieur le rapporteur, car vous n’étiez pas encore député-, quand certains de vos collègues présents ici ce soir se sont opposés à ce texte, c’était justement pour les mêmes motifs que ceux avancés par Lionel Tardy ». Ce dernier a d’ailleurs eu l’occasion de lancer « Mais ce soir, on ne les entend plus ! ».
Les amendements de Lionel Tardy rejetés, le projet de loi part au Sénat
En dépit des objections formulées par les deux députés UMP, le rapporteur et le gouvernement ont donné un avis défavorable aux deux amendements de Lionel Tardy. « C’est seulement si le propriétaire d’un site dont les contenus illicites contribuent à tromper et, disons-le, à voler les consommateurs, n’est ni joignable ni identifiable que la procédure pourra être mise en place, avec le filtre du juge » a insisté Razzy Hammadi. Contrairement au projet de loi Lefebvre, le texte de Benoît Hamon veut en effet respecter le principe de subsidiarité : face à une infraction, l’autorité devra s’adresser d’abord à l’éditeur d’un site, puis en second rang à son hébergeur et à défaut, au FAI. Le texte de l’UMP permettait quant à lui d’agir directement contre le FAI.
Les amendements de Lionel Tardy ont finalement été rejetés sans qu’aucune autre voix ne se fasse entendre dans l’hémicycle. Le projet de loi a ensuite été adopté dans sa globalité par l’Assemblée nationale. Le texte part donc au Sénat pour une seconde lecture, qui ne devrait pas intervenir avant début 2014.
Très attentive sur ce sujet, la Quadrature du Net n’a pas tardé à réagir au vote de cette mesure. « Cette loi vient une nouvelle fois banaliser le blocage de sites comme mode de régulation de la liberté de communication sur Internet, et ce en dépit des graves risques inhérents à ce type de mesure comme le surblocage de contenus parfaitement licites » a ainsi déclaré Félix Tréguer, co-fondateur de l’association de défense des libertés numériques. Selon lui, « le gouvernement et le législateur s'obstinent dans leur entreprise de contrôle d'Internet, et restent sourds aux appels à protéger dans les faits la liberté de communication en ligne ».
Blocage des sites : débats houleux à l’Assemblée entre l’UMP et la majorité
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Lionel Tardy appelle le gouvernement à la cohérence
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« Il dit des bêtises ! »
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Les amendements de Lionel Tardy rejetés, le projet de loi part au Sénat
Commentaires (57)
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Abonnez-vousLe 17/12/2013 à 09h10
Dommage que cela ne soit qu’une pièce de théâtre , l’opposition ferait de même si elle était au pouvoir , le bal des hypocrites et faux-culs
Le 17/12/2013 à 09h16
Au moins cela commence à bouger un peu. Après il faudrait que l’UMP se saisisse du dossier (par opportuniste soyons pas fou), mais cela lancera le débat au niveau sociétale.
Ces dernières semaines nous montrent bien que le numérique ne peux réduire à sa portion économique, il est temps que l’on lance une réflexion de fond sur l’impact du numérique en général, et d’internet en particulier. Pour l’instant ce débat est réservé aux technophiles, c’est insuffisant et potentiel grave pour l’avenir de notre société.
Le 17/12/2013 à 09h21
Lionel Tardy appelle le gouvernement à la cohérence
Le 17/12/2013 à 09h30
Le 17/12/2013 à 09h34
Droit à l’oubli VS devoir de mémoire " />
Le 17/12/2013 à 09h55
l’ #UMPS dans toute sa splendeur.
Bravo, bravo " />
Le 17/12/2013 à 09h57
Le 17/12/2013 à 10h02
L’Assemblée nationale a achevé cette nuit l’examen, en deuxième lecture, du projet de loi sur la Consommation…Le texte part donc au Sénat pour une seconde lecture, qui ne devrait pas intervenir avant début 2014.
Il y en a encore beaucoup ? " />
Le 17/12/2013 à 10h03
La news dit :
Les amendements de Lionel Tardy ont finalement été rejetés sans qu’aucune autre voix ne se fasse entendre dans l’hémicycle. Le projet de loi a ensuite été adopté dans sa globalité par l’Assemblée nationale. Le texte part donc au Sénat pour une seconde lecture, qui ne devrait pas intervenir avant début 2014.
Le député L. Tardy doit vraiment se sentir seul! " />
Le 17/12/2013 à 10h07
Le 17/12/2013 à 10h23
Le 17/12/2013 à 10h24
Le 17/12/2013 à 10h26
PC INpactTiens je ne savais pas qu’E.T était député.
Le 17/12/2013 à 10h34
A l’assemblée on devrait les obliger à jurer de dire la vérité rien que la vérité et toussa
et on les virerait quand ils sont pris en flagrant délit de mensonge
ça créérait quelques centaines d’emploi en quelques semaines
" />
Le 17/12/2013 à 10h36
Tant que c’est pour empêcher le consommateur d’être trompé et volé ça me va " />
Le 17/12/2013 à 10h41
Le 17/12/2013 à 13h26
Le 17/12/2013 à 13h39
Le 17/12/2013 à 13h43
Le 17/12/2013 à 14h02
Le 17/12/2013 à 15h05
On est dans une cours de récréation là !
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Le 17/12/2013 à 15h24
Le 17/12/2013 à 15h28
Le 17/12/2013 à 15h45
Le 17/12/2013 à 15h47
Le 17/12/2013 à 16h19
Le 17/12/2013 à 16h21
Le 17/12/2013 à 17h23
Le 17/12/2013 à 17h28
Le 17/12/2013 à 17h30
Le 17/12/2013 à 17h37
Le 17/12/2013 à 20h42
Le 17/12/2013 à 08h43
Il n’y a pas d’extrait video du débat?
Je demande parce qu’il arrive souvent qu’on ait des replays LCP, et c’est toujours intéressant de voir les réactions “en live” (même différé).
Ceci étant c’est vrai que ce genre de news ne tend qu’à nous rendre toujours plus pessimiste et défaitiste face à la politique…
Le 17/12/2013 à 08h50
Lionel Tardy appelle le gouvernement à la cohérence
Bon courage." />
Le 17/12/2013 à 09h02
Le 17/12/2013 à 09h10
Je pensais qu’il y avait des problèmes beaucoup plus urgent en France, je dois sans doute me tromper.
Décidément, certains lobbies font très fort en ce moment.
J’imagine déjà la liste des sites que la SACEM et consœur ont préparé !
Finalement, la liste blanche des sites autorisés, on y vient (enfin pour les M. et Mme Michu, comme d’habitude).
J’avais déjà senti le vent des vestes qui se retournent avant les dernières présidentielles, je ne l’oublierais pas pour les prochaines et je ne louperais le député PS de ma circonscription !
Le 17/12/2013 à 10h47
C’est fou ce que le fait d’être dans l’opposition rend les député(e)s plus sensibles aux problématiques des libertés individuelles…
Le 17/12/2013 à 10h49
Le 17/12/2013 à 10h52
Le 17/12/2013 à 10h53
Le 17/12/2013 à 11h02
Le 17/12/2013 à 11h03
Le 17/12/2013 à 11h08
Le 17/12/2013 à 11h11
Le 17/12/2013 à 11h31
Le 17/12/2013 à 11h35
Le 17/12/2013 à 11h48
Le 17/12/2013 à 12h28
Le 17/12/2013 à 12h50
Le 17/12/2013 à 12h54
Le 17/12/2013 à 13h15
Le 17/12/2013 à 13h18
Le 17/12/2013 à 20h43
Qu’ils la pondent leur nouvelle loi… On va rigoler avec le surblocage…
Et pendant ce temps, les vendeurs de gros firewalls se frottent les mains d’avance !
Le 17/12/2013 à 23h48
Le 18/12/2013 à 06h06
Blocage des sites : débats houleux à l’Assemblée entre l’UMP et la majorité
à voir la vidéo ils ont déjà bloquée l’hémicycle, ne reste plus beaucoup de monde
Le 18/12/2013 à 07h53
Le 18/12/2013 à 09h00