Le Conseil constitutionnel retoque le « reporting public » prévu par la loi Sapin 2
Chaud sapin
Le 09 décembre 2016 à 14h16
4 min
Droit
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Saisi par des parlementaires suite à l’adoption définitive du projet de loi « Sapin 2 », le Conseil constitutionnel a validé jeudi 8 décembre la majeure partie des mesures votées par le Parlement (à commencer par le registre numérique de lobbyistes). Le dispositif de « reporting public », destiné à lutter contre l’évasion fiscale, a cependant été censuré.
Alors que la France s’apprêtait à anticiper la mise en œuvre de la future directive européenne sur la transparence des entreprises, voilà une (très) mauvaise nouvelle pour les pourfendeurs de l’optimisation fiscale. Les « Sages » de la Rue Montpensier ont estimé que l’article 137 de la loi portée par le ministre de l’Économie et des finances portait une « atteinte disproportionnée à la liberté d'entreprendre ».
Les dispositions retoquées auraient contraint, à partir du 1er janvier 2018, les sociétés au chiffre d’affaires de plus de 750 millions d’euros à mettre en ligne chaque année un rapport contenant de précieuses informations : nombre de salariés, chiffre d’affaires net, montant de l’impôt sur les bénéfices acquitté, etc. Le tout pays par pays, et « dans un format de données ouvertes, gratuites, centralisées et accessibles au public ».
Les « Sages » font primer la liberté d’entreprendre sur la lutte contre l’évasion fiscale
Le Conseil constitutionnel a jugé que ce dispositif dit de « reporting public » était « de nature à permettre à l'ensemble des opérateurs qui interviennent sur les marchés où s'exercent [les activités des sociétés concernées], et en particulier à leurs concurrents, d'identifier des éléments essentiels de leur stratégie industrielle et commerciale ».
Tout en reconnaissant que le législateur avait voulu, « par une mesure de transparence, éviter la délocalisation des bases taxables afin de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales » (objectif de « valeur constitutionnelle » selon les Sages), le juge a estimé que l’atteinte à la liberté d’entreprendre était malgré tout « manifestement disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi ».
Concernant le reporting pays par pays, il faut passer par le niveau européen #OGP16 #Sapin2
— Michel Sapin (@MichelSapin) 9 décembre 2016
Pour les associations de lutte contre la corruption, qui voyaient déjà en cette réforme une avancée aux « nombreuses zones d’ombre », c’est un peu le second effet Kiss cool... Dans un communiqué commun, Oxfam France et CCFD-Terre Solidaire regrettent « le choix du Conseil constitutionnel de placer cette liberté d’entreprendre au-dessus d’autres principes constitutionnels, tels que l’égalité devant l’impôt et le droit des citoyens et de leurs représentants à savoir si les contribuables paient leur juste part ».
À leurs yeux, il s’agit d’un « signal désastreux au niveau européen, la semaine où la France accueille un sommet international sur la transparence (Open Government Partnership) et alors même que la France était en train de redevenir un pays en pointe sur les questions de transparence », poursuivent Oxfam France et CCFD-Terre Solidaire.
Le registre numérique de lobbyistes validé en quasi-totalité
Le Conseil constitutionnel a en revanche validé l’essentiel du futur registre de représentants d’intérêts, qui devrait progressivement être mis en œuvre à partir de juillet 2017 (voir notre article).
Le juge a formulé une « réserve d'interprétation » selon laquelle l'article encadrant ce nouveau dispositif « ne saurait, sans méconnaître le principe de la séparation des pouvoirs, interdire aux assemblées parlementaires de déterminer, au sein des représentants d'intérêts, des règles spécifiques à certaines catégories d'entre eux ou de prendre des mesures individuelles à leur égard ». Assemblée nationale et Sénat auront en ce sens la faculté de décider par exemple quelles sanctions infliger à des lobbyistes qui ne respecteraient pas leurs règles respectives.
Le projet de loi « Sapin 2 » devrait désormais pouvoir être promulgué dans les tous prochains jours par François Hollande.
Le Conseil constitutionnel retoque le « reporting public » prévu par la loi Sapin 2
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Les « Sages » font primer la liberté d’entreprendre sur la lutte contre l’évasion fiscale
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Le registre numérique de lobbyistes validé en quasi-totalité
Commentaires (50)
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Abonnez-vousLe 09/12/2016 à 15h12
Le 09/12/2016 à 15h13
Le 09/12/2016 à 15h15
Le 09/12/2016 à 15h15
Le 09/12/2016 à 15h18
Le 09/12/2016 à 15h19
Le 09/12/2016 à 15h22
J’aurais dû mettre “des États”, effectivement, mais ça donne un peu la tendance des “solutions” imaginées pour combler la dette.
Quant à la France, comme l’a dit Ricard, le programme de François Fillon semble assez clair sur la perspective d’une application future de l’austérité…
Le 09/12/2016 à 15h25
Il y en avait un, mais il à trébuché à la première haie." />
Le 09/12/2016 à 15h31
Bha; ça ne fait que compenser la non inflation.
Certes elle n’a pas l’air douloureuse, puisqu’on a toujours les mêmes chiffres sur les bulletins de salaire, mais le coût de la vie augmente, et inversement l’état paye moins cher les intérêts de la dette…
Le 09/12/2016 à 15h35
Le 09/12/2016 à 16h09
Pas la peine de me retourner ce que je te dis… Ça ne te donne pas plus raison. En plus tu rajoutes une bêtise, Giscard ne fait pas de politique au CC, et Sarkozy n’y a presque rien fait.
Tu as écrit une ânerie, en parlant des politiques, alors que justement ce sont des politiques au pouvoir qui ont voulu aller dans le bon sens, en l’occurrence Michel Sapin, le gouvernement, et les députés.
Le 09/12/2016 à 16h24
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Le 09/12/2016 à 16h25
Je l’ai lu hier j’étais mort de rire haha !
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Le 09/12/2016 à 16h26
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Le 09/12/2016 à 19h07
Le 10/12/2016 à 00h26
Le 09/12/2016 à 14h24
Sapin’se ou ça casse
Leurs arguments peuvent s’entendre c’est vrai
Mais je comprends pas le tweet de Sapin, il dit qu’il faut passer par l’UE pour passer outre le CC?
« alors même que la France était en train de redevenir un pays en pointe sur les questions de transparence », poursuivent Oxfam France et CCFD-Terre Solidaire.
Vous enflammez pas les gars " />
Le 09/12/2016 à 14h29
Au moins, c’est clair.
La liberté de s’affranchir de la loi pour les entrepreneurs est supérieure à l’égalité devant l’impôt et l’intérêt commun.
A force de tirer sur l’élastique, certains vont finir par se prendre des baffes.
Le 09/12/2016 à 14h37
Pour ceux qui se posaient encore des questions sur non politiciens." />
Le 09/12/2016 à 14h39
En plus, on ne leur demandait que des informations comptables, pas leurs secrets industriels. L’assertion du Conseil Constitutionnel comme quoi cela dévoilerait la “stratégie industrielle et commerciale” des entreprises concernées est complètement fausse.
Ce qui est disproportionné actuellement, c’est le manque à gagner provoqué par l’optimisation fiscale pour les caisses de l’État… qui tente d’être comblé à coup de tentatives inutiles d’austérité et en pressant le contribuable lambda comme un citron.
Le 09/12/2016 à 14h40
Le 09/12/2016 à 14h42
Bande de cochons! " />
Michel Sapin s’apprête à affronter les jeux de mots du mois de décembre
http://www.legorafi.fr/?p=23883
Le 09/12/2016 à 14h44
Le 09/12/2016 à 14h47
C’est déjà Noël ? " />
Le 09/12/2016 à 14h56
D’ailleurs, je serais curieux de savoir en quoi ce dispositif pourrait violer la liberté d’entreprendre inscrite dans la Constitution… Les “Sages” sont quand même dans une interprétation assez libre du projet de loi, ils sortent de leur rôle de détermination de la stricte conformité ou non à la Constitution.
Reste plus qu’à attendre un consensus au niveau européen. Soit 2046 si tout va bien. " />
Le 09/12/2016 à 14h56
Oui, Sapin a les boules.
Le 09/12/2016 à 15h05
J’aimerais bien savoir où tu as vu de l’austérité… pas en France en tout cas;
En grèce oui, avec des salaires de fonctionnaires qui ont perdu 25% voire plus; en Espagne avec tous les salaires qui ont diminué de 30 à 40%, au Portugal, je veux bien… mais chez nous certainement pas.
Le 09/12/2016 à 15h11
Et la baisse des prestations sociales, comme les remboursements de la Sécu, les moyens au sein de l’Education Nationale, les crèches… et toutes les autres coupes budgétaires au niveau Culturel, de la Santé en général et j’en passe.
C’est aussi une forme d’austérité, faut pas se leurrer.
Le 10/12/2016 à 09h00
J’ai un peu de mal à comprendre en quoi ces informations sont sensibles, ces compagnies ne donnent elles pas déjà des informations bien plus stratégiques dans les bilans pour leurs actionnaires ?
Les entreprises avec “plus de 750 millions d’euros de chiffre d’affaire” il doit pas y en avoir des dizaines qui ne soient pas en bourse.
Si quelqu’un peut m’expliquer de façon pragmatique leur point de vue, je prend.
Le 10/12/2016 à 09h12
aussi approuvé par le cc :
http://www.francetransactions.com/actualites/assurance-vie/Loi-Sapin-II-le-bloca…
Le 10/12/2016 à 09h45
Le 10/12/2016 à 09h48
Le 10/12/2016 à 10h12
Le 10/12/2016 à 10h18
Le 10/12/2016 à 10h19
Le 10/12/2016 à 10h24
OK, donc on en revient à la proposition de 127 : on publie aussi nos relevés de comptes et nos avis d’imposition pour éviter les petits arrangements avec le fisc.
SI tu remets en cause le fisc, on ne va pas pouvoir discuter longtemps sur le sujet ! Si le gouvernement voulait que le fisc puisse magouiller, il n’aurait pas poussé cette loi.
Le 10/12/2016 à 10h28
Le 10/12/2016 à 11h40
Le 10/12/2016 à 11h45
Le 10/12/2016 à 11h52
Le 10/12/2016 à 11h54
Le 10/12/2016 à 12h49
Le 10/12/2016 à 13h51
Non mais là ça ne compte pas, les fonctionnaires sont des parasites bien trop payés. Rends-toi compte qu’ils ne créent même pas de richesse ! " />
Le 10/12/2016 à 15h55
Ben tu sais quoi … nos fiches d’impositions sont déjà publiques \o/
Tout le monde peut avoir accès à la fiche d’impots de tout le monde en se rendant au centre des impots de la personnes dont tu veux avoir les informations.
Et dedans il y a les revenus déclarés, donc à peu près ce qu’on demande.
C’est en place depuis fort longtemps, et l’idée était exactement le même qu’actuellement : pouvoir dire que ton voisin/…. a un train de vie bien supérieur à ce qu’il déclare.
En effet, si la mairie ne fait pas son travail de recouvrement des impots, les habitants de la municipalité peuvent se subsitutier au maire et demander une étude plus approfondie (je ne sais plus si il faut qu’ils déposent plainte ou demande aux impots, ou au préfet, ou…)
Bref, pour les multinationales, c’est très grave, il faut protéger un “droit” qui n’est inscrit nulle part (et absolument pas dans la constitution). Par contre les droits d’égalités devant l’impot, qui lui est inscrit, ne doit pas être respecté \o/
(ni celui d’égalité des armes et tutti quanti).
Le 10/12/2016 à 16h32
Le 10/12/2016 à 21h00
Le 11/12/2016 à 11h35
Perso je comprends le point de vue du conseil constitutionnel. C’est sûr que mettre des infos qui peuvent être stratégiques pour des entreprises à la vue de leurs concurrents, clients, fournisseurs, acheteurs etc… c’est pas forcémment la meilleure solution. Ya des solutions qui peuvent être moins extrêmes. Et certaines ne nécessitent même pas de loi.
1- Une qui est déjà citée dans les commentaires c’est de permettre l’accès à ces infos au fisc et à des groupes de travail par exemple avec éventuellement des intervenants extérieurs mais qui signeraient des clauses de confidentialité par exemple.
2- Obliger déjà toutes les branches de l’état qui font appel à des géants mondiaux à se faire facturer par les entités françaises. Parce que quand je vois que microsoft facture à l’armée avec son entité irlandaise, ça me fait sortir les yeux de la tête. L’état peut tout à fait imposer ça au vu de ce que microsoft aurait à perdre. Un simple ultimatum suffirait => soit tu me factures avec microsoft France, soit je passe tout au libre. Pour microsoft le calcul serait simple => je paye plus d’impots sur des millions de dollars ou je paye 0% sur 0€.
3- Obliger les groupes avec des activités supérieures à 750M (ou moins éventuellement) qui ont une activité significative en France à facturer avec leurs entités françaises.
4- Appliquer les mêmes règles pour l’IS que pour la TVA qui normalement doit être acquittée en France si les destinataires sont des particuliers français (pour un montant supérieur à 35000€ par an)
Service PublicMême si ça reste un peu plus complexe que l’IS (mais bon, si c’est limité aux entreprises les plus grosses (et qui vont donc rapporter le plus en impôts) autant mettre quelques personnes de plus sur ces dossiers.
5- ntroduire dans la loi une règle simple qui dirait que quand un prêt n’a pour seul but qie de payer le moins d’impôts/d’échapper à l’impôt, le prêt est invalidé du point de vue du fisc. Comme la plupart des optimisations fiscales se basent sur le prêt, ça démontera la plupart des montages (sans mauvais jeu de mot). Si tu prouves que le prêt n’avait aucun but (quel but aurait un prêt de plusieurs centaines de millions d’euros entre google france et google irlande qui n’est ni réinvesti ni ne sert à payer quelque chose de concrêt?) sauf celui de payer le moins d’impots, le montant du prêt doit être introduit dans la comptabilité de l’entité française et donc être décompté dans les bénéfices.
Mais bon, je note au moins une volonté de ce gouvernement de faire quelque chose dans le bon sens même si ils ont pas encore trop avancé. Mais au moins ils essaient.
@+
Le 12/12/2016 à 09h35
Le 12/12/2016 à 13h20
Le 14/12/2016 à 07h30
C’est pas ce qui est écrit.
Ils disent qu’on ne peut pas consulter la déclaration (détaillée, donc), MAIS qu’il est possible d’avoir le montant total des revenus, le nombre de parts fiscales, et le montant d’impôts réclamé.
Et si lié par une pension alimentaire, on doit pouvoir consulter plus d’infos ( probablement pour pouvoir vérifier que les éléments dont on a connaissance ont bien été déclarés, puisque les pensions alimentaires sont généralement calculées sur la base de la différence de revenus… )