Bruxelles rappelle l’Arcep à l’ordre sur l’ouverture du réseau fibre d’Orange aux concurrents
Vous (n')avez (pas) le monopole de la fibre
Le 08 décembre 2017 à 10h32
5 min
Internet
Internet
Dans une décision, la Commission européenne demande à l'Arcep de ne pas s'en tenir aux promesses d'Orange sur l'ouverture de son réseau. Sur le marché professionnel, dominé par l'opérateur historique, l'institution rappelle que le bitstream d'Orange (une offre clés-en-main pour d'autres opérateurs) est envisageable.
La Commission européenne tient l'Arcep à l'œil. Dans une décision datée du 24 novembre, l'institution critique la quatrième analyse de marché de l'autorité française sur l'Internet fixe. Le sujet a rythmé la première moitié de 2017 en France, avant le brouhaha causé par la promesse de SFR de fibrer toute la France d'ici 2025, sur laquelle il est récemment revenu.
En janvier, l'Arcep a détaillé quelques mesures contre les « derniers bastions du monopole d'Orange », dont l'accès au génie civil ou le marché entreprises. Orange a causé une esclandre sur le coup, pour ensuite ne plus s'y opposer publiquement. En juillet, le régulateur livrait une version quasi finale de ses remèdes.
L'autorité a légèrement renforcé les contraintes de l'opérateur historique sur son réseau, sans entrer dans une régulation ouvertement asymétrique. Orange est tenu à de nouvelles obligations sur ce qu'il a d'unique, l'Arcep lui faisant confiance pour ouvrir son réseau en fibre jusqu'à l'abonné (FTTH) aux autres opérateurs. Pas de quoi totalement convaincre la Commission européenne.
Pas de vraie garantie d'Orange sur la fibre grand public
La domination d'Orange sur la fibre, que nous constations début 2016, reste une réalité. Elle dépend de deux phénomènes : l'avance de l'opérateur historique dans le déploiement de la fibre et son activisme commercial. Il est donc encore souvent le seul fournisseur d'accès disponible, même si la situation s'améliore peu à peu, avec la couverture des zones très denses (les 100 agglomérations les plus peuplées) par les concurrents et le cofinancement des lignes en zones moins denses (les agglomérations moyennes).
Dans sa décision, la Commission européenne félicite donc l'avancée de la mutualisation des réseaux FTTH, à 65 % à fin mars. Même si la situation s'améliore dernièrement, « la Commission fait toutefois observer que, par rapport à la situation observée lors de la dernière analyse de marché, Orange a renforcé sa position sur le segment FTTH et la concentration sur le marché s’est progressivement accrue ».
Notons tout de même que la part de marché d'Orange décroît légèrement depuis le milieu d'année, même si encore très lentement. L'institution communautaire regrette, sur le marché résidentiel, l'autorité française n'a pas mis en place d'équivalence des intrants (EoI), c'est-à-dire de garantie que les concurrents de l'opérateur ont accès aux mêmes offres de gros, pour avoir les mêmes capacités techniques.
« À cet égard, l’Arcep déclare qu’une obligation d’EoI serait disproportionnée mais sans pour autant démontrer clairement que les coûts de mise en œuvre de l’EoI seraient supérieurs aux bénéfices escomptés » tacle l'exécutif européen. Il souhaite que l'autorité puisse « imposer une obligation d’accès au segment terminal sur fibre sur la base de l’EoI, notamment en ce qui concerne les processus opérationnels et techniques tels que les systèmes d’information, la commande, la livraison et le service après-vente ». Autrement dit, que les belles promesses d'Orange deviennent des obligations réglementaires.
Le spectre du « bitstream » sur le marché entreprises
L'autre gros morceau est le marché entreprises, sur lequel la fibre reste encore une denrée rare, même si les grands opérateurs (dont SFR) commencent à revoir sa commercialisation. Jusqu'ici, la solution envisagée pour ouvrir le marché est d'ouvrir la fibre grand public d'Orange à des opérateurs tiers, chargés de « l'activer » (faire passer le signal) et de la revendre à des opérateurs de détail. Le premier est Kosc, un consortium mené par OVH, promu comme sauveur de la fibre pour entreprises.
Cette longue chaine d'intermédiaires a mis beaucoup de temps à se mettre en place, devenant même un point de vigilance pour l'Avicca, une association de collectivités. Cette dernière s'inquiète aussi de voir que le contrat signé entre Orange et Kosc ne soit pas fourni tel quel à d'éventuels concurrents, alors que Kosc vient à peine de signer avec deux premiers opérateurs de détail, pour une commercialisation début 2018... alors que le système est censé être opérationnel en janvier.
Les opérateurs alternatifs, dont les plus petits réunis au sein de l'AOTA, réclament à cors et à cris des offres activées de référence, directement fournies par Orange. Elles permettraient aux opérateurs alternatifs de louer son réseau fibre grand public, composé de 8,4 millions de lignes à date, dans des conditions transparentes, facilement opposables face à l'Arcep.
Pour la Commission européenne, si les barrières à l'entrée restent pour les opérateurs alternatifs, « la Commission réitère son observation formulée dans le cadre de la précédente analyse de marché invitant l’autorité à reconsidérer l'imposition d'une obligation de fournir des produits d'accès sur fibre de type bitstream, au moins dans les zones où d’autres produits d’accès ne sont pas économiquement viables ».
L'Arcep a donc une pression supplémentaire pour que son plan actuel fonctionne, sans quoi elle pourrait être amenée à imposer du « bitstream » à Orange, c'est-à-dire un accès régulé et « activé » à son réseau aux autres opérateurs. Une perspective qui ne l'enchante guère, le régulateur martelant qu'il n'a jamais envisagé cette solution. Le ton se fait tout de même menaçant, évoquant l'idée d'une séparation fonctionnelle dans un entretien à Edition Multimédia, le mois dernier.
Bruxelles rappelle l’Arcep à l’ordre sur l’ouverture du réseau fibre d’Orange aux concurrents
-
Pas de vraie garantie d'Orange sur la fibre grand public
-
Le spectre du « bitstream » sur le marché entreprises
Commentaires (33)
Vous devez être abonné pour pouvoir commenter.
Déjà abonné ? Se connecter
Abonnez-vousLe 08/12/2017 à 11h32
Bon, ce n’est pas que de la faute des autres s’il n’y a qu’Orange comme fibre chez moi, si j’ai bien compris…
Le 08/12/2017 à 12h11
Le 08/12/2017 à 12h24
Le 08/12/2017 à 12h25
Pourquoi cela poserait plus de problème en fibre qu’en XDSL où cela se passe déjà comme cela ?
De plus, l’opérateur ne serait pas inconnu puisque l’entreprise l’aurait choisi en toute connaissance de caus.
Le 08/12/2017 à 12h34
Le 08/12/2017 à 12h44
Tu es sûr de ce que tu avances dans le monde professionnel ?
Si tu as bien choisi ton opérateur, il travaillera avec Orange pour résoudre le problème.
Le 08/12/2017 à 12h48
Le 08/12/2017 à 13h01
Le 08/12/2017 à 13h42
Le 08/12/2017 à 13h58
" />
Le 08/12/2017 à 14h11
On connais le taux de déploiement de fibre de nos voisins ?
Le 08/12/2017 à 14h34
Courtier : un intermédiaire puis ensuite relation directe.
Cas présent : deux intermédiaires sans relation directe.
Le 08/12/2017 à 16h06
Autan lorsqu’il s’agissait du cuivre d’Orange qui a été repris de l’existant ( ex France Télécom) ok.
Qu’une régulation soit imposée je peux comprendre.
MAIS
Sur la fibre grand publique tout le monde est parti en même temps.
Et puis j’ai en tête quelques situations ou les promesses des autres intervenants sur le marché n’ont pas été tenu et le consommateurs ont été contents qu’Orange soit là et fasse le boulot…
Le 08/12/2017 à 16h40
si par nos voisins tu veux dire les autres pays d’Europe, ils ont pour une grande part choisi le FTTLA, et leur couverture est (forcément) plus élevée.
Le 08/12/2017 à 16h56
L’empilement des opérateurs n’est pas une très bonne idée mais ne demandez pas à l’ARCEP de comprendre ce qu’ils ne connaissent pas.
En gros en résumé on aura : Orange -> Kosc -> Opérateur de détail qui “collecte” les flux de Kosc, lui même va aller en chercher chez Orange via sa boucle locale passive ou active.
Et si l’on suit l’article, il pourrait même y avoir le cas : Orange -> Kosc -> Opérateur agrégateur -> Opérateur de détail.
C’est n’importe quoi pour la partie technique et c’est tout aussi mauvais pour la concurrence qui ne pourra pas s’aligner commercialement. On a vite compris qui allait gagner à tous les coups à ce jeu la.
Le 08/12/2017 à 17h14
Mon exemple n’était peut être pas bon " />
Le 08/12/2017 à 10h43
Ce serait intéressant pour bien des entreprises !
Le 08/12/2017 à 10h49
Y aurait-il un problème d’Orange Mécanique ?
Le 08/12/2017 à 11h05
J’ai quand même un doute qu’une entreprise puisse confier son accès à un opérateur inconnu. Bien sur, quand tout va bien, c’est moins cher, mais en cas de souci, plus de sav garanti par Orange. L’entreprise aura comme interlocuteur l’opérateur de détail, lui même en contact avec l’opérateur de gros qui a loué l’accès auprès d’Orange. Bon courage en cas de pépin " />
Le 08/12/2017 à 17h41
Le 08/12/2017 à 21h36
Pour moi la “plaisanterie” a été salutaire, avant de choisir un nouveau fai je vérifie qu’il a son propre équipement dans le dslam. " />
Le 09/12/2017 à 08h05
Séparation fonctionnelle des activités d’Orange, telle est la solution viable.
Le 09/12/2017 à 08h40
Le 09/12/2017 à 08h45
Sauf que l’état ne veut pas assumer la mise en oeuvre d’un réseau fibre national !
Le 09/12/2017 à 09h15
Le 09/12/2017 à 09h29
Je dirais plutôt “proche des préoccupations de l’État français” : on peut être une entreprise publique ou quasi-monopolistique sur un marché et proposer des services non-marchands/universels/régulés/etc, avec une préoccupation du service rendu, au lieu d’une préoccupation d’influence diplomatique ou économique sur le reste de la Société.
Le 09/12/2017 à 10h36
…….le consommateurs ont été contents qu’Orange soit là et fasse le boulot…
le problème (en ZMD) c’est : qu’à part Orange……y-a personne !
(les autres FAI n’ont qu’à venir dans les Zones Rurales….mais voilà, c”est pas ASSEZ rentable, alors
“cette-façon” d”aller pleurer à l’ARCEP, heu, comment dire…" />)
Le 09/12/2017 à 19h18
Le 10/12/2017 à 00h58
Le 10/12/2017 à 08h50
Le 11/12/2017 à 20h39
Quelle concurrence sur la Fibre ?
Il faudrait déjà qu’il y en aie une. Ce n’est pas la faute de l’opérateur historique.
Le 11/12/2017 à 21h26
Quelqu’un a le PDF de la décision de la CE ? Le lien donné par l’article donne in fine sur un formulaire a remplir avec une en-tete qui dit que la CE se reserve le droit de ne pas donner le document.
NextINpact a-t’il eu le texte ?
Le 12/12/2017 à 16h21
Maintes fois démontré (ici entre autres) que l’opérateur historique abuse de sa position historique pour entraver les déploiements des autres, petite recherche Orange + Génie civil