Les députés réservent la TVA à taux réduit aux eBooks sans DRM !
Un coup de pioche dans l'Apple
Le 15 novembre 2013 à 08h32
6 min
Droit
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Le groupe des écologistes avait déposé un premier amendement visant à réserver la TVA à taux réduit aux seuls eBooks sans verrou numérique. Le texte avait été retiré avant le début des débats, mais le même parti avait sous le coude un autre amendement identique. Surprise ! Contre l’avis du gouvernement et de la commission, ce texte a finalement été adopté par les députés.
Le groupe EELV a déposé victorieusement un amendement au projet de loi de finances pour 2014 visant à réserver le taux réduit de TVA aux seuls eBooks sans mesure technique de protection ou de formats fermés.
Ses auteurs expliquent qu’ « alors que la majorité des acteurs concernés (auteurs, éditeurs, bibliothécaires, responsables politiques) appellent à un plus grand respect des droits des lecteurs, notamment en essayant de promouvoir l’interopérabilité des livres en format électronique, il nous paraît important de favoriser les vendeurs qui respectent ce principe ». Ils proposent du coup que « seuls les livres électroniques vendus en format électronique ouvert puissent bénéficier de la TVA à taux réduit. Les systèmes à base de licence de lecture qui enferment le client avec un logiciel spécifique n’en bénéficieront plus. »
L'eBook ouvert, un livre, l'eBook fermé, un service
Dans l’univers feutré des eBooks, expliquent encore Isabelle Attard, Sergio Coronado, Barbara Pompili et les autres députés verts, « les principaux acteurs ont profité de leur avance pour constituer des écosystèmes fermés. Lorsque l’on regarde les contrats de vente qu’ils proposent, on réalise facilement que ce ne sont pas des livres qui sont vendus, mais des licences de lecture. Ces licences contiennent bien plus de contraintes que celles entourant la vente d’un livre papier (notamment concernant l’épuisement des droits). »
L’aiguillon de cette TVA pourrait selon eux susciter un effet pour le moins vertueux puisque « cette incitation fiscale à la vente de livres permettra aux éditeurs de se recentrer sur leur métier principal, sans dépenser des fortunes en mesures de protection qui finissent toutes par être contournées. »
Hier, lors des débats, Éric Alauzet a repris cette même idée : « quand vous achetez un livre numérique chez Amazon ou chez Apple, vous ne pouvez le lire que sur un appareil autorisé par cette entreprise ». Une prison technologique à laquelle le député oppose les systèmes ouverts : « il existe des livres numériques en système dit ouvert, soutenus par la majorité des acteurs concernés – auteurs, éditeurs, bibliothécaires, responsables politiques –, qui revendiquent un plus grand respect des droits du lecteur, notamment en essayant de promouvoir l’interopérabilité des livres au format électronique. »
Selon lui, ces livres ouverts se rapprochent finalement des livres de papier : « vous pouvez les lire, les prêter, même les revendre – bref, en disposer à votre guise. De ce fait, nous considérons que, contrairement aux livres en système fermé, les livres en système ouvert ont toute légitimité pour bénéficier de la même TVA que les livres de papier, et c’est ce que nous proposons par cet amendement. »
Le gouvernement veut une TVA à taux réduit, même pour les systèmes verrouillés
La Commission des finances s’est opposée à une telle discrimination (taux de TVA réduit si pas de verrou, taux normal si verrou). Christian Eckert, le rapporteur général de la loi de finances pour 2014, répondra aux auteurs de cet amendement que « la France se bat pour que la TVA à taux réduit puisse s’appliquer aux livres électroniques. Or, vous proposez de faire de ce principe une exception. Je comprends votre intention, mais cela risque de fragiliser la position de la France dans les négociations en cours, où nous espérons obtenir une généralisation du taux réduit de TVA à tous les livres, quel que soit leur support. »
Même analyse de Bernard Cazeneuve, ministre délégué, qui représente la voix du gouvernement. « Nous nous battons, au sein de l’Union européenne, pour que l’ensemble des supports de lecture bénéficie du taux réduit de TVA. C’est l’un des éléments de notre combat en faveur de l’exception culturelle, de l’accès pour tous à la culture et du livre. Comme vient de le dire M. le rapporteur général, prendre des dispositions dérogatoires ne peut que porter atteinte à la portée de notre combat, qui n’est déjà pas si facile à mener. En adoptant un tel amendement, nous risquons d’affaiblir notre position vis-à-vis de nos interlocuteurs, et de mettre en péril notre capacité à atteindre l’objectif que nous nous sommes fixé. Je vous invite donc également à retirer cet amendement, monsieur le député. »
Du droit de lire
Le député Noël Mamère répondra que dans le cadre de l’accord sur le marché transatlantique négocié entre l’Union européenne et les États-Unis, il faut justement défendre cette discrimination fiscale au titre du droit à la lecture ou du « droit à revenir sur un livre qu’on a déjà lu ». « Si notre amendement n’était pas adopté, nous risquerions de porter [à l’exception culturelle] un coup fatal en laissant libre cours à Apple et Amazon, sinon pour exercer leur dictature – le mot est un peu fort –, du moins pour mettre à bas l’exception culturelle dans le cadre du marché transatlantique ». Son collègue Éric Alauzet embrayera : « la transparence n’est pas vraiment le maître-mot en la matière, et les personnes achetant des livres électroniques vont finir par s’apercevoir, au bout de quelques semaines ou quelques mois, que le livre en leur possession ne fonctionne plus et qu’elles n’ont en réalité acquis qu’une licence, qu’elles vont devoir racheter au même distributeur ! Il y a, je le répète, un grand risque à ne pas dissocier le livre électronique vendu sous système fermé de celui vendu sous système ouvert. »
L’amendement, qui a peu de chance de survivre au Sénat, sera finalement adopté contre l’avis de la Commission des finances. Et contre celui du gouvernement qui n'a pas su convaincre que le soutien d’un système verrouillé et non interopérable utilisé par les mastodontes Apple ou Amazon revient à défendre l’exception culturelle européenne et française.
Les députés réservent la TVA à taux réduit aux eBooks sans DRM !
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L'eBook ouvert, un livre, l'eBook fermé, un service
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Le gouvernement veut une TVA à taux réduit, même pour les systèmes verrouillés
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Du droit de lire
Commentaires (66)
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Abonnez-vousLe 15/11/2013 à 08h41
C’est bien que ça soit passé à l’assemblée, mais ne rêvons pas trop, il y a encore le Sénat à passer et puis ensuite sans doute le conseil constitutionnel. Je vois bien Apple y contester cette mesure…
Le 15/11/2013 à 08h43
Sur le coup j’applaudis cette mesure et j’espère qu’elle passera tous les obstacles.
Le 15/11/2013 à 08h43
“Nous nous battons, au sein de l’Union européenne, pour que l’ensemble des supports de lecture bénéficie du taux réduit de TVA. C’est l’un des éléments de notre combat en faveur de l’exception culturelle, de l’accès pour tous à la culture et du livre.”
Quel clown !
Le 15/11/2013 à 08h45
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Le 15/11/2013 à 09h30
Le 15/11/2013 à 09h32
Avant de réduire la TVA des eBook qu’ils commencent déjà à revoir le prix des ebook
car bon un ebook au même prix qu’un livre papier (même déjà vu plus cher)
Le 15/11/2013 à 09h35
Le 15/11/2013 à 09h38
Le 15/11/2013 à 09h37
Le 15/11/2013 à 09h38
Les ebooks français sont souvent plus chers que les versions poche du même bouquin (quand ces versions poche sont disponibles, bien sûr).
Je trouve vraiment les ebooks VF hors de prix. Sans déconner, un bouquin électronique est vendu une 10aine d’euros, alors qu’il a suffi généralement d’un homme/année de travail pour l’écrire et le publier. A côté de ça des jeux vidéos ayant impliqué des 10aines de types à plein temps pendant 2-3 ans se trouvent sans problème à 5€ à peine 1 ou 2 ans après leur sortie. Et on me fera pas croire que c’est la logistique qui coûte cher, entre un bouquin de 50ko et un jeu de 10Go, y’a pas photo.
D’ailleurs pour les bouquins anglo-saxons, il est assez facile de chopper un ebook en promo à moins de 5€. Mais pas de ça chez nous, prix unique du livre et tout ça. Favoriser l’accès à la lecture pour tous, c’est juste une façade.
Le 15/11/2013 à 09h47
Le 15/11/2013 à 09h51
Le 15/11/2013 à 10h00
Le 15/11/2013 à 10h03
Le 15/11/2013 à 10h07
Le 15/11/2013 à 10h07
Le 15/11/2013 à 10h09
Le 15/11/2013 à 10h12
Le 15/11/2013 à 10h19
Le 15/11/2013 à 10h29
Le 15/11/2013 à 08h44
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Petite question néanmoins. L’amendement nous dit
sauf si le ou les fichiers comportent des mesures techniques de protection, au sens de l’article L. 331-5 du code de la propriété intellectuelle
La définition du DRM par cet article est elle suffisamment solide pour ne pas être contournée facilement ? (de mémoire oui, mais si quelqu’un peut confirmer, je suis preneur " />)
Le 15/11/2013 à 08h47
Comme quoi il y a quand même des gens avisés et du côté des citoyens parmi nos politiques. Des gens qui comprennent les problématiques privateur/libre, chose impensable il y a 5 ou 10 ans.
Heureux de voir qu’il n’y a pas que des Christine Albanel à l’assemblée " />
Le 15/11/2013 à 08h48
Le 15/11/2013 à 08h49
Le 15/11/2013 à 08h54
Le 15/11/2013 à 08h55
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Comme quoi, les écolos ne servent pas à rien sur les questions sociétales aussi…
Le 15/11/2013 à 08h57
Le 15/11/2013 à 09h00
L’idée n’est vraiment pas mauvaise et si cela peut pousser les éditeurs à ne pas mettre de DRM.
Quid des systèmes de watermark avec le nom de l’acheteur ?
Je suppose que ce n’est pas considéré comme un DRM puisqu’on peut lire le fichier partout ?
Le 15/11/2013 à 09h02
Le 15/11/2013 à 09h04
Le 15/11/2013 à 09h08
C’est une très bonne chose mais la corruption (intellectuel ou financière) fera son effet au Sénat ou à la cour constitutionnel malheureusement.
+1 aux députés qui ont proposé cet amendement. Un livre avec DRM n’est qu’un service, on a aucun droit sur le livre.
Le 15/11/2013 à 09h11
Pas d’accord avec l’amendement.
Licence de lecture ou pas, si on décide qu’on doit favoriser la lecture par un taux réduit de TVA, c’est pour tous les livres, quels qu’en soit le support.
Ca me paraît un peu cavalier de prendre la comparaison avec le livre papier pour différencier les deux modèles.
Rien ne m’empêche de prêter ma liseuse (certes, je prête du coup toute ma bibliothèque numérique d’un coup) et peut-on parler de prêt quand rien ne m’empêche d’envoyer mon epub à 300 personnes par mail, sans pour autant m’empêcher de lire.
Qu’on veuille favoriser la vente de formats dépourvus de protections, c’est louable, mais à mon sens, pas au détriment d’un autre impératif qui est celui de réduire au maximum le coût de la lecture pour en favoriser l’accès à tous.
Enfin le chapelet “poussons les éditeurs à se recentrer sur leur cœur de métier”, je vois pas de quoi ils se mêlent. C’est encore aux entreprises de décider de la gestion de leurs affaires.
Le 15/11/2013 à 09h13
gouvernement qui n’a pas su convaincre que le soutien d’un système verrouillé et non interopérable utilisé par les mastodontes Apple ou Amazon revient à défendre l’exception culturelle européenne et française.
Ouille, ça pique " /> " />
Autant, ne fournir qu’une simple licence d’exploitation/utilisation dans le temps ne me semble pas spécialement déconnant dans le cadre d’un soft qui a besoin de l’infra du fournisseur pour fonctionner (disons un MMO ou un machin cloud), autant appliquer ce concept à tout ce qui est vendu en dématérialisé (musique, film, livre, logiciel stand alone) me semble une pente pour le moins savonneuse.
Le 15/11/2013 à 09h18
Youpi
Le 15/11/2013 à 09h29
Le 15/11/2013 à 09h28
À voir dans la suite. Mais dans l’idée c’est vraiment pas con.
Après j’ai peur que ça passe pas au conseil constitutionnel c’est pour cause de discrimination (et non à cause de la corruption).
Affaire à suivre de près…
Mais si ce genre de loi passe, pourquoi ne pas les appliquer aux application de smartphone ? Genre une interoperabilité iOS android ? J’en rigole d’avance le gros bordel !
Le 15/11/2013 à 10h34
Le 15/11/2013 à 10h41
Le 15/11/2013 à 10h42
Le 15/11/2013 à 10h49
Le 15/11/2013 à 10h50
Le 15/11/2013 à 10h53
Le 15/11/2013 à 10h53
Le 15/11/2013 à 10h56
Le 15/11/2013 à 10h56
Le 15/11/2013 à 10h57
Le 15/11/2013 à 10h59
quand vous achetez un livre numérique chez Amazon ou chez Apple, vous ne pouvez le lire que sur un appareil autorisé par cette entreprise
On notera qu’amazon (comme kobo) a des ebooks sans drm, ils laissent le choix à l’éditeur. D’ailleurs amazon s’en fiche un peu d’où on peut lire les ebooks, tant qu’on les achette chez eux. C’est plus sur leur politique de cassage des prix qu’il faudrait se poser des questions.
Le 15/11/2013 à 11h03
Le 15/11/2013 à 11h53
J’aimerai bien que nos chère député fassent preuve d’autant de bon sens sur de nombreux autres sujet, mais vu que c’est pas le cas je pense donc qu’ils y a eu un miracle et que ce serait donc le preuve que Dieu existe.
Pardon je m’égare, mais bref c’est voté au parlement, très bien d’ici à ce que ca passe le sénat on en reparle !
Le 15/11/2013 à 12h20
Le 15/11/2013 à 12h25
Le 15/11/2013 à 12h29
A quand la même lecture pour le jeu vidéo ?! " />
Un jeu vidéo avec un DRM qui vous enferme dans un écosystème privateur et spoliateur n’est pas un jeu, mais un service (n’est-ce pas valve). " />
Du coup vendre un service, sur support physique ou en démat, à 40,50€ voir plus avec ce type de DRM et bien m’est d’avis que c’est de la pure escroquerie. " />
Le 15/11/2013 à 12h41
Le 15/11/2013 à 13h08
Le 15/11/2013 à 13h29
Le 15/11/2013 à 13h48
Le 15/11/2013 à 13h57
Le 15/11/2013 à 15h35
A mon avis, pour un gros lecteur, une liseuse (e-ink donc, pas tablette) est bien moins polluante que des bouquins papiers. La consommation énergétique de ces engins est ridiculement basse (on fait des semaines de lecture sans recharger) et, fait rare dans le domaine des gadgets électroniques, il n’y a pas vraiment d’obsolescence programmée. Le coût écologique du téléchargement d’un bouquin est très faible également : c’est une poignée de secondes de téléchargement, et on peut le faire via un téléphone qui pompe une poignée de watts à peine si on veut pas démarrer son gros PC.
Un bouquin papier, faut le fabriquer, et surtout le transporter. Multipliez ça par des dizaines de bouquins par an, ça doit vite faire des kg de CO2. La liseuse pollue manifestement plus à la fabrication, et se recycle moins bien, mais elle n’est transportée qu’une fois. Si on peut la conserver quelques années, ça me semble compenser…
Et la solution bibliothèque, c’est évidemment parfait si on habite pas loin. Mais si comme moi on vit à la campagne, sortir la voiture pour passer prendre un bouquin papier c’est pas terrible !
Le 15/11/2013 à 15h37
Le 15/11/2013 à 15h40
Le 15/11/2013 à 15h49
Le 15/11/2013 à 15h52
Le 15/11/2013 à 16h08
Le 15/11/2013 à 16h16
Ah, tiens, j’avais oublié : les trois premiers postes de dépense des Français sont le logement, le transport et l’énergie. Et bien les mesures des Verts visent avant tout à renchérir le logement, le transport et l’énergie. Avec leur programme ces mecs pourraient s’appeler “mort aux pauvres”.
Le 15/11/2013 à 20h32
« la France se bat pour que la TVA à taux réduit puisse s’appliquer aux livres électroniques. Or, vous proposez de faire de ce principe une exception. Je comprends votre intention, mais cela risque de fragiliser la position de la France dans les négociations en cours, où nous espérons obtenir une généralisation du taux réduit de TVA à tous les livres, quel que soit leur support. »
Alors ne faisons rien : il vaut mieux ne rien faire que faire un petit pas " />
Le 17/11/2013 à 11h08
L’amendement a été annulé.
Une pétition est en ligne, signez là et faites là circuler si vous êtes d’accord !
https://secure.avaaz.org/fr/petition/Le_livre_un_amendement_quil_faut_sauver_Liberte_dexpression_diversite_culturelle_et_respect_des_lecteurs/