Tesla : devant les risques, des sénateurs américains appellent à un nouveau rappel de véhicules
virage sur l'aile
Outre les problématiques logicielles qui ont provoqué des rappels de véhicules en Amérique du Nord mi-décembre, de nombreux modèles Tesla présentent des défaillances techniques connues du constructeur, ce qui alarme les législateurs.
Le 28 décembre 2023 à 15h30
8 min
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Mi-décembre, Tesla était contrainte de rappeler près de deux millions de véhicules aux États-Unis, puis 193 000 autres au Canada pour corriger son système Autopilot défectueux (la société pourra en réalité procéder à une mise à jour OTA, over the air, pour la grande majorité des voitures). Quelques semaines plus tard, deux sénateurs américains demandent au constructeur de rappeler tous les véhicules présents sur les routes dont les suspensions seraient défectueuses.
Les sénateurs Richard Blumenthal et Edward J. Markey se disent « extrêmement inquiets » et appellent Tesla à corriger les « déclarations apparemment fausses et trompeuses » qu’elle aurait faites à l'agence de sécurité routière américaine, la National Highway Traffic Safety Administration (NHTSA).
L’appel fait suite à une nouvelle enquête publiée par Reuters sur les fréquents défauts techniques des véhicules électriques. Non seulement ceux-ci ont présenté des dangers pour les conducteurs de modèles Y, S, 3 et X, mais l’entreprise dirigée par Elon Musk aurait, à de multiples reprises, refusé d’assumer les défauts de construction pour en rejeter la responsabilité sur ses clients.
Auprès de la NHTSA, Tesla a aussi adopté cette ligne de défense, déclarant que les problèmes de pièces défectueuses n’étaient que le résultat de « mésusages » de la part des conducteurs. Sur X (Twitter), Tesla a qualifié le travail de Reuters de « truffé d’informations incomplètes et visiblement incorrectes » et répété son objectif de construire « les voitures les plus sûres du monde », un élément récurrent de sa communication.
- Tesla rattrapé par ses promesses de sécurité et d’autonomie
- Après avoir exagéré l’autonomie de ses véhicules, Tesla a empêché ses clients de se plaindre
- Une fuite de 100 Go de documents entache la gestion de Tesla et le fonctionnement de son Autopilot
Défaillances de suspensions, de directions et d’essieux
L’analyse de milliers de documents internes à Tesla a permis à l’agence de presse de mettre au jour la récurrence de défauts matériels sur des véhicules relativement récents vendus par Tesla. Que ce soit en Chine, en Europe ou aux États-Unis, l’agence constate que les ingénieurs de l’entreprise suivent depuis au moins sept ans ce qu’ils qualifient de « défauts » et « défaillances » de différents éléments de ses véhicules.
Suspensions, essieux et directions des véhicules font partie des éléments les plus fréquemment touchés. De nombreux propriétaires de différents modèles de Tesla rapportent en particulier devoir remplacer la direction de leur voiture après des pannes soudaines de direction assistée. Entre 2018 et 2021, au moins 11 conducteurs ont alerté l’entreprise que ces défaillances avaient provoqué des accidents.
Et Reuters de rapporter ce cas d’un propriétaire de Modèle 3, qui s’est rendu dans un garage de Brooklyn avec seulement 24 000 km au compteur. Le résumé du technicien : « la roue avant est tombée en pleine conduite Autopilot, à 95 km/h ». Dans un autre cas, la roue avant est tombée à peine 24 h après l’achat – ce qui n’a pas empêché Tesla de réfuter toute responsabilité.
Selon ces documents et d’anciens employés de l’entreprise, celle-ci a, de manière récurrente, fait peser le poids des problématiques rencontrées sur les conducteurs. Sur X, Tesla déclare avoir « pris en charge la plupart des 120 000 réparations de véhicules sous garantie ».
L’enquête relevait ce même chiffre (pour l’année 2021), mais soulignait que les propriétaires de voitures plus anciennes avaient dû payer l’équivalent de 31 000 réparations dans la même période. Des propriétaires de voitures hors de garantie se sont ainsi vu facturer le remplacement de pièces qualifiées de défectueuses en interne.
Reuters constate que ces types de défaillances sont relevés par l’entreprise depuis 2016 au moins, notamment en Chine. L’entreprise a attendu quatre ans avant de rappeler les véhicules défectueux, sous la pression du régulateur chinois. En Europe et aux États-Unis, en revanche, elle n’a rien modifié.
En 2023, l’agence de presse recense plus de 260 plaintes auprès de la NHTSA pour des problèmes de suspensions et de direction, contre 750 pour General Motors et 230 pour Toyota. Rapporté aux parts de marché de chaque marque sur le sol américain (1% pour Tesla, 21 % pour General Motors et 15 % pour Toyota), cela représente un taux de plaintes beaucoup plus haut que ses concurrents.
En Norvège, le pays qui compte « le plus de Tesla par tête », d’anciens employés et des techniciens se déclarent « inondés » de plaintes de clients insatisfaits.
L’Autopilot, autre sujet d’inquiétude
Ces problématiques techniques viennent s’ajouter à diverses défaillances logicielles. Fin octobre, Tesla a remporté une victoire judiciaire sur la question de l’Autopilot. Poursuivi par les passagers sérieusement blessés d’un trajet qui avait aussi tué son conducteur, en 2019, l’entreprise a été blanchie par un jury populaire de Californie du Sud.
Celui-ci a considéré que, malgré le nom du système, les véhicules ne sont pas totalement autonomes. Quand bien même le conducteur aurait activé le mode « Full-Self Driving », le jury a par ailleurs indiqué que l’humain reste l’ultime responsable du véhicule.
L’entreprise n’est pas pour autant hors de cause : c’est dans le sillage des multiples accidents impliquant l’utilisation de Tesla Autopilot que la NHTSA a lancé une enquête, puis convaincu Tesla d’opérer le rappel (ou la mise à jour) des modèles Y, S, 3 et X qu’elle a produits entre le 5 octobre 2012 et le 7 décembre 2023 et vendus sur le territoire américain.
Considéré défectueux, le système était censé garantir l’attention des conducteurs lorsque ceux-ci recouraient au système Autopilot de leur voiture. Les contrôles et alertes qui seront ajoutés « encourageront le conducteur à adhérer à sa responsabilité de conduite continue », agrée l’enquête de la NHTSA citée par Radio Canada.
Pour autant, ses experts estiment que les modifications et mises à jour logicielles ne régleront pas le problème principal, c’est-à-dire le fait que les systèmes déployés par Tesla peinent à repérer les obstacles et à s’y arrêter. Au moins une autre affaire impliquant l’Autopilot devrait être jugée courant 2024, selon l’AFP.
Musk et la sécurité, un enjeu à part entière ?
Outre le fait que Tesla ait à de multiples reprises nié toutes problématiques de sécurité dans ses véhicules, Reuters relève que l’approche cavalière de ce type d’enjeux se retrouve dans chacune des entreprises dirigées par Elon Musk.
En novembre, les employés de SpaceX témoignaient ainsi d’une culture de l’urgence qui a mené à des centaines de blessures et problématiques qui auraient pu être évitées, au fil des ans, dont un décès.
De même, du côté de X (Twitter). Après son rachat, outre le licenciement des trois quarts de ses effectifs au fil de l’année écoulée, l’entrepreneur a en effet pris diverses décisions aggravant l’état de la discussion sur la plateforme et les risques de cyberviolence pour certains de ses utilisateurs.
Le manque de modération est tel que la Commission Européenne a ouvert une procédure formelle d’infraction contre la société.
Du côté de Tesla, cela dit, Wired souligne un improbable effet secondaire aux multiples défaillances des véhicules sur les territoires nord-américains : les mécaniciens de la région considérant les véhicules électriques comme plus complexes à réparer, ils ont tendance à les envoyer à l’étranger, notamment en Europe de l’Est.
Les voitures abimées font ainsi le bonheur de nombreux réparateurs ukrainiens. Plusieurs se sont en effet spécialisés dans leur remise en état, au point que la part des véhicules électriques ait récemment grimpé à 9 % dans le pays en guerre. C’est deux fois plus que dans les pays avoisinants, et un taux proche de celui constaté aux États-Unis.
Tesla : devant les risques, des sénateurs américains appellent à un nouveau rappel de véhicules
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L’Autopilot, autre sujet d’inquiétude
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Musk et la sécurité, un enjeu à part entière ?
Commentaires (27)
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Abonnez-vousLe 28/12/2023 à 15h58
Le 28/12/2023 à 16h16
Le 28/12/2023 à 16h13
Modifié le 28/12/2023 à 16h19
Le 28/12/2023 à 16h59
Le 28/12/2023 à 17h38
Le 29/12/2023 à 02h40
Je suis profondément partagé sur le fait que la marque mette en production une option si sensible pour la sécurité. Une erreur d'interprétation du système et on peut décéder pour si peu.
Le 29/12/2023 à 07h09
Le switch auto feu de route plein phare est une vraie saloperie, combien on en croise en plein phare en agglo ... 🙄
Le 29/12/2023 à 10h33
Le 04/01/2024 à 16h48
Le 05/01/2024 à 16h12
Le 08/01/2024 à 09h14
Oui, j'ai eu l'avertissement mais la reprise de contrôle à l'autopilot engendre un contrebraquage léger et c'est ça qui a terrifié mes passagers. Par temps de grosse pluie, c'était vraiment catastrophique. Je n'avais pas non plus l'expérience des autres manières de sortir de ce mode.
Le 29/12/2023 à 10h51
Ce n'est jamais du 100%, il existe souvent de nombreux cas ou ça ne marche pas/mal.
Or le problème de ces aides c'est qu'elles diminuent l'attention de l'utilisateur qui s'y repose encore plus.
En gros au lieu d'être là en supplément du conducteur soit des aides pour rattraper ses erreurs, on essaie de le remplacer en agissant pour lui (assistanat), tout en lui disant que non en fait il doit rester attentif.
Mais si dans 80% des cas il n'y a rien à faire, forcément que sur les 20% restant l'utilisateur ne sera jamais en condition de réagir...
En gros de nos jours le "a peut près" c'est ok ça ne choque personne.
Autre exemple, les solutions de phares automatiques c'est vraiment affreux, tu t'en prends TOUJOURS plein la gueule en sortie de virage ou sommet de côte le temps que le bordel réagisse (alors qu'en manuel, normalement si on est intelligent on coupe ses pleins phare juste avant), ou le bordel qui met les pleins phare sur autoroute alors que t'arrives en face etc.
Franchement merci pour toutes ces aides géniales.
Le 29/12/2023 à 17h21
Ceci dit en passant, c'est une prouesse qui sera de série dans quelques années sur les véhicules mais peut être pas en Europe.
Le 29/12/2023 à 19h19
Je provoque, la qualité des logiciels (malgré quelques malencontreuses erreurs entre autre chez Boeing) est autrement meilleure et prouvée que de l'IA embarquée sur Tesla.
En fait, j'avais dit sur un autre article parlant de conduite autonome que je ne ferai pas confiance tant que c'est de l'IA, donc des statistiques qui prennent les décisions. Je préfère nettement un logiciel déterministe, même avec quelques bugs restants.
Modifié le 30/12/2023 à 07h19
Le 30/12/2023 à 18h58
S'il y a un spécialiste du sujet, je suis intéressé.
Le 31/12/2023 à 07h28
Le 31/12/2023 à 09h22
Le 31/12/2023 à 15h39
Le 31/12/2023 à 19h44
Elle pile à des moments où elle ne devrait pas et son maintien de trajectoire est approximatif dès que les conditions se tendent (petite route par grande pluie par exemple).
Quand je pense à ceux qui attendent depuis plusieurs années l’activation d’un vrai fsd qu’ils ont payé…
De grandes marques allemandes font mieux sur ce point aujourd’hui et leur cours n’en est pas aussi valorisé.
Ca reste d’excellentes propositions en électrique mais leur leadership est menacé à quelques années.
Le 31/12/2023 à 20h02
Le 31/12/2023 à 10h47
J'avoue que j'ignore si les modèles utilisés pour la conduite autonome sont aussi adaptables (j'imagine que oui, ne serait-ce que pour leur développement et amélioration continue). D'ailleurs ça me donne aussi envie de réagir sur un autre propos que tu avais tenu (je crois sur l'article 5G) où tu pointais la dépendance aux réseaux de ces véhicules. Je suis d'accord aussi sur ce point que l'expression en français "véhicule autonome" est mal venue car il ne l'est pas. Je préfère l'anglais "self-driving cars" qui est moins ambiguë que le français sur ce point. "Véhicule à conduite automatique" me semble être plus précis dans ce cas de figure.
Pour faire un parallèle, à titre personnel je préfère toujours dire que je suis freelance et non "indep", car il est difficile de contractualiser en direct avec les grands comptes qui référencent leurs fournisseurs sur des critères qui excluent cette catégorie (CA minimum, nombre de clients minimum, etc). Donc obligé de passer par une société de portage, donc pas vraiment "indépendant".
Le 29/12/2023 à 11h06
Le 29/12/2023 à 11h38
Modifié le 30/12/2023 à 08h53
Ceci dit, les ventes mondiales de Tesla sont (en volumes) du même ordre que les constructeurs européens maintenant (~1M/an), donc ce n'est plus un petit constructeur.
Le 30/12/2023 à 15h09