Suivant l’avis du gouvernement, les députés ont (à nouveau) refusé d’alourdir la taxation des entrepôts des cybermarchands et autres « drives » de grandes surfaces. Un groupe de travail devrait néanmoins se mettre en place, sous l’égide de la commission des finances.
Les e-commerçants peuvent souffler. Cette année encore, l’Assemblée a repoussé toute extension de la fameuse « Taxe sur les surfaces commerciales » – également connue sous le nom de Tascom.
Pour l’heure, seuls les commerces de vente au détail de plus de 400 mètres carrés (supermarchés, etc.) sont concernés par ce prélèvement. Cette surface est calculée uniquement à partir des espaces « affectés à la circulation de la clientèle » ou à « l'exposition des marchandises » – ce qui exclut notamment les parties closes : entrepôts, couloirs dédiés à la circulation du personnel, etc.
La proposition, loin d’être nouvelle, consistait donc à étendre la Tascom aux « établissements de stockage et de logistique servant à la vente de biens à distance, fermés au public ». L’idée : cibler les grandes enseignes du e-commerce (Amazon, Cdiscount, etc.), mais aussi les « drives » des grandes surfaces traditionnelles, qui se sont fortement développés ces dernières années.
Une batterie d’amendements
« C’est une manière de rééquilibrer notre modèle fiscal qui pèse trop fortement sur les commerces physiques. Je trouve en effet anormal qu’une surface commerciale paie cette taxe alors qu’elle est en concurrence avec des « pure players », les distributeurs en ligne qui, eux, ne la paient pas », s’est justifié le député Benoit Potterie (LREM), vendredi 18 octobre, dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale.
La commission du développement durable s’était elle aussi montrée séduite par ce projet de réforme, susceptible de lutter contre l’étalement urbain : « Le commerce en ligne va à l’encontre de la lutte contre l’artificialisation, le e-commerce requérant en moyenne 3 fois plus d’espace de stockage que la distribution physique traditionnelle. En effet, le tri, l’emballage des produits, la gestion des retours, et le modèle du « dernier kilomètre » (être au plus près des consommateurs pour une livraison toujours plus rapide) nécessitant des centres de stockage et de triage locaux à proximité des grandes villes, sont fortement consommateurs de foncier. »
Si le sujet a mobilisé de nombreux députés, de bords différents, certains ont plaidé pour aller plus loin qu’une simple extension de la Tascom.
Benoit Potterie estimait ainsi que l’extension de la Tascom permettrait de baisser son montant de 25 % pour les seuls commerces physiques (voir son amendement). « La perte de recettes représenterait environ 240 millions d’euros », a fait valoir le parlementaire, suivi par une dizaine d’élus de la majorité, tout en promettant « une compensation de l’État pour les communes qui en bénéficient aujourd’hui ».
Autre piste alternative : introduire une déduction spécifique, pour protéger notamment les petits acteurs du e-commerce. « Concrètement, cela signifie que les distributeurs en ligne qui ont un certain volume de vente seraient désormais assujettis à la Tascom, que les PME qui se lancent dans le commerce en ligne en seront exclues et que les commerces omnicanaux qui ont une surface de vente supérieure à celle de leur entrepôt ne s’acquitteraient que de la TASCOM de leur magasin physique », a expliqué Benoit Potterie, en soutien à un second amendement.
Les députés (à nouveau) priés d'attendre l'année prochaine
Comme le laissaient présager les débats en commission (voir notre article), le rapporteur général du projet de loi de finances, Joël Giraud, a donné un avis défavorable à toutes ces pistes de réforme. « Ces amendements ont des conséquences sur les recettes des collectivités territoriales – conséquences qui, à ce stade, n’ont été mesurées par aucun des signataires des amendements », a mis en garde l’élu LREM, estimant que certaines villes auraient « beaucoup » à y perdre.
Une fois de plus, le rapporteur a invité les députés à attendre l’année prochaine pour légiférer sur ce dossier. « Suite à notre demande insistante, une mission de l’Inspection générale des finances est en ce moment même en train de faire le point sur la fiscalité locale pesant sur le commerce », a expliqué Joël Giraud. Des travaux censés « étudier les effets d’une fiscalité spécifique des entrepôts, sans nuire à la compétitivité des secteurs de la logistique et de la distribution en France ».
« Le rapport de l’IGF sera manifestement remis au gouvernement d’ici à la fin de l’année », a précisé le rapporteur. « J’estime qu’il est préférable que nous demandions aux ministres concernés d’être transparents et de diffuser ce rapport, de façon que la commission des finances puisse se saisir pleinement du sujet. Ainsi, elle sera en mesure, lors de l’examen du prochain projet de loi de finances, de proposer des dispositions fondées sur des éléments étayés, et de disposer d’études complémentaires sur leur impact sur les collectivités locales. »
« Je m’engage bien évidemment à ce que ce rapport soit transmis au Parlement de manière que nous puissions travailler ensemble sur les bases de ce document », a embrayé le secrétaire d’État Olivier Dussopt, sur le banc du gouvernement. « Nous pourrons ainsi trouver un système dont nous aurons parfaitement anticipé les effets. »
Le locataire de Bercy a ajouté que les amendements débattus, tels que rédigés, lui semblaient « assez faciles à contourner en termes de localisation des zones de stockage ». Les députés ont ainsi été invités à retirer leurs missives.
Bientôt un groupe de travail au sein de la commission des finances
« À un moment, il faut aussi trancher. On ne peut pas se contenter d’attendre la prochaine loi, énorme, qui révolutionnera tout », a cependant objecté le président de la commission des finances, Éric Woerth (LR), visiblement agacé d'entendre le même refrain que l'année dernière.
Benoit Potterie a également préféré maintenir son amendement : « Le commerce en ligne progresse depuis des années alors que le commerce physique régresse. Les plans sociaux se sont multipliés ces dernières semaines dans ce secteur. Si nous ne faisons rien, les recettes des collectivités baisseront puisque les magasins fermeront les uns après les autres. »
Même son de cloche sur les bancs socialistes, où Jean-Louis Bricout a rétorqué qu’une simple extension de la Tascom n’aurait selon lui « pas d’effet négatif sur les collectivités ». Une telle réforme n’aurait pu apporter « que des revenus supplémentaires », a-t-il fait valoir.
Sans grande surprise, la majorité a suivi le gouvernement et le rapporteur.
Le président de la commission des finances, Éric Woerth, a néanmoins invité ses collègues à créer un groupe de travail, afin de « trouver une solution solide sur le plan juridique » :
« Composé des députés de la commission des finances qui souhaiteraient vraiment s’y associer, ce groupe de travail permettrait d’aboutir à des propositions solides sur le plan juridique afin de parvenir à l’équité. En effet, les entrepôts de commerce en ligne, qui sont, au fond, le dernier maillon avant le consommateur, ne sont que la face émergée d’un iceberg commercial. En tout état de cause, cette face émergée de l’iceberg doit être taxée comme le sont les magasins physiques. »
Commentaires (63)
#1
L’ancien monde qui tente de survivre en grattant…
#2
C’est plutôt comment financer notre “nouveau monde”.
Car ces nouveaux Marchands profite a fond des infrastructures sans en supporter le coût.
Le fond du problème est que les marchands “physiques”, qui disparaissent, payaient des taxes et notamment locales.
Hors les routes et infrastructures ont un coût…
Quand je vois les gens se pavaner sur des “bon plans” ali-express, je me dis qu’ils n’ont rien compris au fonctionnement d’une société.
A ne pas vouloir regarder plus loin que le bout de son nez, on finit par se manger le mur.
#3
Le jour où le transport sera facturé à son juste prix, les imports massifs de “déchets Chinois” (les produits qui sont quasiment à usage unique voir directement non fonctionnels ou simplement de très mauvaise qualité), diminueront mécaniquement.
Mais il faudrait commencer par expliquer aux bonnets rouges qu’ils se sont fait avoir en beauté par les géants du transport routier quand ils ont exigé l’abandon de l’éco taxe.
#4
Taxons enfin le carburant des avions de fret et régulons les transport en utilitaires (les bolides 3,5 T chargés raz la geule qui roulent 12h mini sur 24 sans pause et conduits par des travailleurs détachés Polonais: merci Norbert).
#5
Pour mettre tout monde au même niveau, les députés ont le choix entre bidouiller une taxe pour imposer les stocks et supprimer une taxe existante qui coute cher à tout le monde.
Mais comme maintenant la mode est à la taxe, ils bidouillent.
#6
Le problème c’est qu’une telle taxe n’as de sens qu’au niveau européen… Ils mettront les hangars à la frontière et des petits bâtiments un peu partout pour diminuer leur surface.
De plus je ne sais pas ce qu’on appel surface de stockage ? La hauteur des rayonnages est gérée comment ?
Enfin Quid des entreprises qui ont des magasins physique ET des hangars de stockage ? S’ils doivent payer les 2 taxes on a rien gagné… Pas simple pas simple..
#7
Là c’est différent :
Seul l’ancien monde est taxé…
Habituellement, on a le droit à une taxe sur un truc nouveau que les partisans de l’ancien modèle n’auront pas à payer. Voire à une ponction sur un truc vaguement en rapport pour renflouer un secteur qui pleure au lieu de s’adapter.
#8
C’est une manière de rééquilibrer notre modèle fiscal qui pèse trop fortement sur les commerces physiques.
Penser à diminuer la charge fiscale sur les commerces physique n’est pas venu à l’esprit de ces tocards.
#9
Sans sous comment veux tu exiger une route sans nid de poule? des ponts ou autres infra routière? Des services publique, police, pompiers éducation.
Le jour où les gens comprendront que les taxes c’est pas juste pour nous emmerder on aura avancé…
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ça aurait été une très bonne mesure dans un contexte de dé -carbonisation de l’Europe. Il faut favoriser les circuits courts et la production locale, donc si on peut éviter de voir pulluler ces gros “hub” qui importent un tas de produit inutiles, ça serait une très bonne chose.
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Quels postes de dépenses ?
L’Éducation, c’est fait et ça privilégie les gens qui ont les moyens de payer des établissements d’enseignement privés. La Justice, c’est fait et ça pose d’énormes (et coûteux) problèmes à tout le monde sauf à la délinquance en col blanc qui peut profiter d’un temps très long de traitement des affaires dehors. La Santé, c’est fait et ça impacte tout le monde, sauf les personnes qui ont les moyens de se payer des cliniques très privées (et encore…). L’Environnement, c’est fait et ça impacte absolument tout le monde sans distinction (je sais, c’est difficile à croire). La Sécurité, c’est fait et ça pose aussi des problèmes. La Recherche, c’est fait et ça ne garantit pas un avenir radieux (et même sur le plan économique). Les Transports, ça se fait de plus en plus.
Donc quels postes de dépenses diminuer ? Le seul ministère qui voit sa dotation réellement augmenter est celui de la Défense. Avons-nous envie de réellement mettre de l’argent dans des trucs faits pour tuer ?
C’est bien de parler de diminution des dépenses façon banquier, encore faut-il voir à quoi elles servent. dans l’ensemble, elles servent au pacte social. Un pays n’est pas une entreprise.
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pour l’ensemble de ton commentaire.
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comment font les communes qui n’ont pas de commerçant assujetti à la TASCOM ?
Elles n’ont pas de route en dur ni d’école ?
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C’est toi qui dit “Mais comme maintenant la mode est à la taxe, ils bidouillent.” Mais j’aurais peut être du cité la partie qui me faisait tiquer..
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On attend les sources pour toutes tes affirmations.
Je rappelle que les routiers font le plein à la même pompe que tout le monde, et ensuite seulement se font rembourser, uniquement une partie des taxes. Donc le reste du prix est exactement le même.
Cette exemption fiscale sert surtout à la compétitivité de la route française par rapport au reste de l’Europe, qui est encore moins chère.
Puisque tu parles en pourcentage, ça fait environ 11 % ou 13 % juste sur les taxes, le reste du prix étant identique. Donc sur le prix total, on doit être à un différentiel de 6-7 % quoi ? Ce n’est pas un avantage scandaleux, c’est remboursé 10 mois après donc niveau trésorerie ce n’est pas super, et en plus ça a vocation à disparaître.
Il faut vraiment avoir les yeux grand fermés pour y voir un cadeau inique fait aux routiers.
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La LOI!!!! Article 265et article 265 septies du Code des douanes.
Et les articles suivants le 265 sont un florilège d’exceptions fiscales pour les pros.
Quant à la compétitivité de la route française…
Tu sais qu’on a pas besoin d’attirer tous les pollueurs du monde juste pour éviter quelques chômeurs et se retrouver avec des travailleurs précaires….
Et oui, c’est un cadeaux aux grandes entreprises de la route.
Ce n’est certainement pas le conducteur qui en bénéficie de ces réductions.
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Alors mon opinion personnelle, vu qu’à l’époque ils ont cotisé un montant dérisoire, qu’ils sont partis à la retraite super tôt, et qu’en plus ce sont souvent eux les (multi-)propriétaires qui bloquent le marché du logement, je serais assez pour les presser comme des citrons.
De façon plus réaliste, il va falloir augmenter l’âge de départ , faire sauter les privilèges et régimes spéciaux, et pour les existants diminuer les pensions les plus élevées.
De toutes façons on va dans le mur sinon, il va falloir faire de gros efforts. Beaucoup de gens de mon âge pensent qu’ils n’auront pas de retraite.
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Ils sont à genoux et le personnel des hôpitaux est à l’os. C’est compliqué à comprendre ? À Paris, alors que la population n’a pas baissé, on va fermer 900 lits parce qu’il n’y a pas assez de personnel et il n’y en a pas assez parce que la volonté est de faire des économies sur le dos des gens qui travaillent.
Alors oui tout le monde connaît soit-disant quelqu’un qui, vu de son court nez sait que. Mais bon. Même des médecins pas forcément marqués à gauche trouvent que ça va dans le mur. Et c’est valable pour tout.
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J’ai moi-même posté certains des liens que tu présentes, encore faut-il savoir les interpréter." />
Ce qu’on appelle taux de pauvreté est en réalité un ratio : tu prends le revenu médian (la moitié des gens gagne plus, la moitié gagne moins), et tu comptes le nombre de gens qui gagnent moins de 60 % de ce revenu.
Cet indicateur mesure en réalité les inégalités, pas la situation de pauvreté. La pauvreté « en conditions de vie » diminue bien.
Le problème d’un indicateur en rapport au revenu médian, c’est que taxer fortement les classes moyennes fait mécaniquement baisser ce taux là, et au contraire une reprise de l’activité économique qui leur profite principalement le fera augmenter.
D’un pays à l’autre (au hasard l’Allemagne qui est souvent utilisée pour comparer), le seuil pourra être ainsi différent malgré un niveau de vie pas franchement différent, et il vaut mieux être pauvre dans un pays que non pauvre dans l’autre. Cela montre les limites de l’indicateur.
Par ailleurs, et c’est le problème de l’article du Monde, les inégalités sont de deux sortes : au sein d’un même pays, et au niveau mondial.
Finalement, au sein d’un même pays, celles-ci sont relativement faibles. Par contre, d’un pays à l’autre elles sont monstrueuses. Un SMIC français est un salaire de nabab au Venezuela. Beaucoup de retraités passent leurs vieux jours à l’étranger car même une petite pension permet un train de vie élevé en Asie du Sud-Est, au Maghreb, voire même au Portugal.
Les pays en développement sortent de la misère dans laquelle ils sont tous égaux, pour s’enrichir. Mais à partir de là, forcément, les inégalités augmentent. Forcément.
En janvier 2019, les prix à la consommation augmentent de 1,2 % sur un an, pas forcément celui des revenus.
Tous les indicateurs faits par des gens d’un niveau supérieur au stage de troisième font leurs calculs en « dollars constants » i.e. ajusté de l’inflation, ça n’aurait pas de sens d’oublier l’inflation.
Pas quand la tendance des grandes entreprises est à virer des gens par centaine.
C’est assez largement un mythe de l’extrême-gauche. La plupart des destructions d’emploi sont des CDD/intérim non renouvelés, pas des licenciements.
Mais on ne peut balayer d’une main sur ces bases les 3 à 5 millions de chômeurs.
On divise généralement le chômage en « chômage structurel » et « chômage conjoncturel ». Même si c’est difficile à mesurer, le premier semble être particulièrement haut en France, probablement en raison des charges et du coût du travail élevé.
https://bfmbusiness.bfmtv.com/monde/salaires-cout-de-la-vie-la-france-est-tres-m...
Le niveau de vie des Français baisse, ce qui signifie qu’il n’augmente pas, je précise.
Ton lien ne dit rien de l’évolution, mais tout de la comparaison par rapport à d’autres pays. Conclusion : arrêtez de tout taxer comme des malades.
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Très bien, tout va bien. Je suis une cruche et les gens qui ont vu leur niveau de vie sacrément baisser des crétins. Quant aux pauvres, c’est une simple illusion d’optique statisticienne. Les pauvres milliardaires français qui voient leur fortune exploser ne sont pas si riche set c’est pire ailleurs.
Vous vivez dans quel monde ? Pas dans le mien ni dans mon quartier.
Bravo pour la condescendance, ça mérite un accessit, pour le réalisme un zéro pointé.
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Bon allez on est vendredi
L’échantillonnage au décile n’est pas représentatif il faut aller jusqu’au centile (la trompe de l’éléphant de Branko Milanovic).
Lu dans Marianne
[godwin]Tout est dans l’économie et rien d’humain ni de spirituel n’existe en dehors de l’économie[/godwin]
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