Espionnage : les ministères priés d’exclure les smartphones grand public
Pour éviter de jouer à Candy Crush ?
Le 11 septembre 2013 à 06h29
6 min
Logiciel
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Suite aux nombreuses affaires d'espionnage électronique, le premier ministre français Jean-Marc Ayrault a demandé aux cabinets de la plupart de ses ministres d'abandonner immédiatement leurs smartphones non agréés par l'agence nationale de la sécurité (ANSSI), y compris pour l'échange d'information non classifiée. Plus globalement, selon un document révélé par notre confrère L'Express, c'est l'usage général de l'informatique qui sera désormais plus resserré et contrôlé à la tête du gouvernement et de l'État.
Le Teorem de Thales
Depuis de nombreuses années, les ministères sensibles, tels que ceux de la Défense, de l'Intérieur, des Finances ou encore de la Justice, disposent d'outils spécifiques pour échanger des informations et des communications, ceci jusqu'au niveau secret-défense. Les téléphones Teorem (de Thales) sont ainsi disponibles depuis près de deux ans, et selon la Direction générale de l'armement, ils permettent « à ses utilisateurs de passer des communications claires et sécurisées jusqu’au niveau « secret défense », en France comme à l’étranger. Doté des dernières technologies, Teorem cumule les fonctions de téléphone mobile, téléphone fixe, et de modem chiffrant en le connectant à un ordinateur. Il fonctionne sur les réseaux de tous les opérateurs mobiles et sur les réseaux fixes, civils, interministériels et militaires. »
Ce téléphone nous avait été présenté l'an passé aux Assises de la Sécurité à Monaco, par Patrick Pailloux, numéro un de l’ANSSI. « Dans le domaine du secret défense, quand on veut protéger des informations essentielles à la survie de la nation, on s’adresse à des industriels pour exiger que la totalité du matériel soit sous contrôle national. Typiquement, on a un nouveau téléphone ‘secret défense’. Il s’appelle Teorem et a été conçu par Thales - je passe sur le jeu de mot. Il a été fabriqué 100% en France. Un tel téléphone ne coûte pas le même prix que celui que vous avez à la maison et est évidemment d’un degré de convivialité moindre… »
Suite aux dernières révélations qu'il est inutile de résumer, le gouvernement a souhaité passer la vitesse supérieure. Une note, datée du 19 août dernier et adressée aux directeurs de cabinet de tous les ministères français, rappelle ainsi que les informations classifiées (jusqu'à secret défense) ne doivent être transmises que via Teorem pour la téléphonie, ou encore par l’Intranet Sécurisé Interministériel pour la Synergie gouvernementale (ISIS) pour les ordinateurs.
Outre ces informations ultra-confidentielles, les données dites sensibles, sans pour autant être classées secret défense, sont aussi concernées par cette note. Il est ainsi demandé d'utiliser absolument du chiffrage en cas d'échange sur des réseaux non sécurisés ou encore sur des supports qui peuvent être aisément volés ou perdus (clés USB, etc.). Il est surtout imposé de ne plus utiliser de « smartphones du commerce sans dispositif de sécurité agréé par l'ANSSI » pour toute communication d'informations sensibles.
Toujours pour ce type d'informations, « l'usage d'équipement informatiques personnels est à proscrire » insiste le document. Cela concerne en particulier les messageries personnelles, les SMS, etc. La note indique même qu'en toute circonstance, mieux vaut privilégier l'utilisation d'une ligne fixe qu'une ligne mobile.
Des règles élémentaires rappelées
Enfin, diverses règles de bases sont rappelées aux cabinets ministériels, à savoir « de ne jamais laisser sans surveillance des documents sensibles, des ordinateurs et des téléphones portables », en particulier à l'étranger. Une règle de bon sens qui n'est pas la seule. Il est ainsi mentionné qu'il faut utiliser des mots de passe longs, de douze caractères minimum, et pas exclusivement avec des lettres. Des mots de passe qu'il faut changer au moins tous les six mois et qui ne doivent pas être les mêmes entre les outils professionnels et les équipements personnels.
Bien évidemment, il est interdit d'installer un logiciel sur un appareil professionnel sans autorisation du service informatique, ou encore de connecter un disque dur ou une clé USB à un ordinateur sans que la sécurité de ces produits n'ait été vérifiée au préalable. Et le B.A.-BA pour finir, il est demandé de se méfier des messages inhabituels, et en particulier de leurs liens et pièces jointes, et surtout de ne pas cliquer sur ces derniers sans vérification.
Selon notre confrère, le gouvernement français, qui avait misé il y a quelques années sur des appareils sous Windows, travaille désormais sur SecDroid, une version modifiée d'Android par la France. Des appareils de plusieurs marques, eux aussi modifiés, sont utilisés. Le problème, selon L'Express, est que si les ministères sensibles sont généralement bien équipés, de nombreux responsables d'autres ministères sont bien moins rigoureux et exploitent des appareils, des systèmes d'exploitation et des services loin d'être sécurisés. Certains font même suivre leurs correspondances professionnelles sur leur Gmail ou Yahoo! Mail personnel. Un transfert désormais prohibé. Mais la note sera-t-elle suivie de fait ? Rien n'est moins sûr.
On se rappellera qu'il y a quelques années, de nombreux pays ont boycotté ou demandé des informations confidentielles à RIM (BlackBerry), alors l'un des acteurs majeurs du monde des smartphones. En 2010, l'Autorité de Régulation des Télécoms (TRA) des Émirats Arabes Unis a par exemple décidé d'interdire de messagerie instantanée, d'emails et de navigation web les BlackBerry, ceci dans tout le pays, et non au sein des ministères. La même année, l'Inde menaçait à son tour de bloquer certains services de BlackBerry si RIM ne lui fournissait pas certaines informations confidentielles sur son système. Plus récemment, en Corée du Sud, le ministère de la Défense a décidé de bloquer l'accès à internet des smartphones de tous ses employés. Et bien d'autres exemples similaires ont émaillé l'actualité ces dernières années.
Espionnage : les ministères priés d’exclure les smartphones grand public
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Le Teorem de Thales
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Des règles élémentaires rappelées
Commentaires (43)
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Abonnez-vousLe 11/09/2013 à 06h36
Quid des énarques qui prendront la peine d’aller dans un bureau où se trouve ce TEOREM, alors qu’ils ont de beaux téléphones classiques posés juste devant eux ?
Pour avoir travaillé en ambassade, quand on voit les papiers qui trainent parfois sur les bureaux à portée de tous (personnel de ménage etc…) et qu’ils demandent du wifi juste pour tweeter…
Certains “hauts-fonctionnaires” sont bien trop importants à leur propres yeux pour se soucier de la sécurité " />
L’ANSII c’est cool, leurs conseils aussi, mais donnez leur un pouvoir de contrôle et d’inspection et on rira bien… " />
Le 11/09/2013 à 06h39
Du bon sens.
Le 11/09/2013 à 06h41
Une bonne base mais il faut auditer régulièrement sinon ….
Le 11/09/2013 à 07h04
Le 11/09/2013 à 07h23
SecDroid c’est une version d’android ou ça a à voir avec l’application android ?
Si c’est une version modifiée, il doit y avoir les sources à un endroit non ?
Le 11/09/2013 à 07h29
Pas besoin de smartphone pour faire de l’espionnage politique.
http://www.lesechos.fr/economie-politique/monde/actu/0202993558552-quand-david-c…
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Le 11/09/2013 à 07h39
« de ne jamais laisser sans surveillance des documents sensibles, des ordinateurs et des téléphones portables »
Humm en même temps un ordinateur qui tourne sous windows même en étant devant il doit y avoir des backdoors NSA :)
Le 11/09/2013 à 07h43
Le 11/09/2013 à 07h47
Pour ce qu’ils ont à dire, les signaux de fumée feraient aussi bien l’affaire…
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Le 11/09/2013 à 07h47
Le 11/09/2013 à 07h52
En matière de sécurité, quelque soit le blindage des maillons les plus solides, la chaîne se casse toujours sur le maillon le plus faible.
Dans le cas ici présent, même avec du matos archi blindé, ce sont les habitudes des bisounours qui utilisent ce matos qui font péter cette chaîne de sécurité.
Le 11/09/2013 à 08h01
Bah, en plus c’est qu’il faut qu’ils puissent Twitter (durant les séances de l’Assemblée Nationale…), Facebooker, SMSer… en tout quiétude nos chers ENArques et puis c’est serrage de ceinture niveau budget donc les téléphones du marché avec un prix marché public c’est toujours ça d’économiser " />
Le 11/09/2013 à 08h05
Le 11/09/2013 à 08h09
Le 11/09/2013 à 08h10
Le 11/09/2013 à 08h15
Le 11/09/2013 à 08h23
« à ses utilisateurs de passer des communications claires et sécurisées jusqu’au niveau « secret défense », en France comme à l’étranger
Du SD dans un environnement public/non contrôlé?" />
AMHA, si JMA publie ce genre de note, c’est que les Chinois ont dû faire une visite chez eux, et pas de courtoisie" />
Le 11/09/2013 à 08h39
Le 11/09/2013 à 08h43
Le 11/09/2013 à 08h50
Le 11/09/2013 à 08h54
C’est vrai qu’il a l’air sacrément sexy ce Teorem… " />
http://www.lepoint.fr/actualites-technologie-internet/2010-01-06/nicolas-sarkozy…
Le 11/09/2013 à 08h55
Le 11/09/2013 à 08h58
Le 11/09/2013 à 09h19
A quoi ça sert d’avoir des téléphones sécurisés, quand hollande prend ses ordres directement d’Obama (Jackadi : tu bombarderas la Syrie)…
Le 11/09/2013 à 09h36
Le 11/09/2013 à 09h49
Vu les mauvaises pratiques au sein du gouvernement, j’ai BEAUCOUP de mal a croire que DGSE/DST ont une puissance de renseignement équivalente a la NSA " /> (comme l’avançait a la va-vite le Monde en Juillet)
Je m’explique : si je suis responsable d’un service d’espionnage, je commence par espionner chez le voisin pour determiner ce qui fuite sur les projet de MON gouvernement. Pour boucher les fuites.
Si le gouvernement ne réalise qu’aujourd’hui les problèmes de confidentialité dans les ministères, c’est qu’on ne sait pas identifier et tracer les informations.
Mais mettons les choses au point : si le gouvernement garde Microsoft dans les administrations, c’est qu’ils n’ont aucune stratégie de rétention de l’information.
Le 11/09/2013 à 11h49
Le 11/09/2013 à 11h56
Je me souviens de la risée générale il y a six ans quand la DGSE avait interdit à Sarkozy de conserver son blackberry. Ah, tous ceux qui nous expliquaient que c’était n’importe quoi, etcétéra, que la DGSE était parano…
Le 11/09/2013 à 12h06
Le 11/09/2013 à 12h50
Le 11/09/2013 à 13h17
Le 11/09/2013 à 14h01
On peut supposer qu’ il existe plusieurs “étages” à leur sécurité.
Si un poste représente un risque via son utilisateur ou sa bécane, il devrait y avoir une sécurité ou surveillance un échelon au dessus qui surveille et piste le transit de données.
Le degré parfait en secure n existe pas, c est la multiplication des
étages de sécurité qui fait la sécurité… ou pas…
Le 11/09/2013 à 14h07
Le 11/09/2013 à 14h18
Ils sont beaux les ministères avec leurs directives et leur beaux téléphones secrets défense.
Alors que Microsoft a remporté le marché de la Défense Nationale.
Ils doivent bien rigoler les ricains, ils n’ont qu’à se servir.
Y a rien à faire, en france, quoi qu’on fasse, on passera toujours pour des banquingols " />
PC INpact
Le 11/09/2013 à 15h15
Concernant les sources de windows : il faudrait avoir l’ensemble des source, en faire l’audit complete, et les compiler soi-même pour espérer en maîtriser le fonctionnement et être sur que ton PC n’exécute rien de nocif.
Il y a un décennie de cela, j’aimais bien suivre un concours international qui consistait à cacher un code nocif dans un bout de code anodin. Le gagnant était le code le plus nocif caché dans le moins possible de lignes de C.
Auditer du code existant pour la sécurité, c’est quasi-impossible.
Concernant le filtrage/blocage du flux réseau nocif : comment faire? Avec de la deep-pocket inspection?
Port-filtering et connection-tracking ne font qu’effleurer l’écume du problème. Il faut créer des profils d’activité pour chaque application, chaque poste et chaque utilisateur pour débusquer les éventuelles activités inhabituelles. Va-t-on le faire pour chaque poste?
Le 11/09/2013 à 15h24
Le 11/09/2013 à 15h53
Ouf!!!! Blackberry n’étant plus grand public, tout revient dans l’ordre " />
Le 11/09/2013 à 17h16
Je cite l’article ci-dessus :
Selon notre confrère, le gouvernement français, qui avait misé il y a quelques années sur des appareils sous Windows, travaille désormais sur SecDroid, une version modifiée d’Android par la France.
Il serait peut-être temps de se passer de Windows. C’est comme à la grande époque des failles Outlook (années 2000), quand je pense aux nombres de boîtes qui ont continué à s’en servir, c’est dingue (idem I.E.). C’est comme quand je lis les conseils sur les clés USB : on est en 2013 et on peut encore infecter un ordinateur Windows juste en y mettant une clé USB ? " />
Le 11/09/2013 à 17h27
Oulala, mais que fait la HADOPI ? C’est pas un défaut caractérisé de sécurisation de ligne ça ? " />
Le 11/09/2013 à 19h45
Le 11/09/2013 à 20h02
Le 12/09/2013 à 07h02
“Mais la note sera-t-elle suivie d’effet ? Rien n’est moins sûr.”
réponse : oui, la note sera suivie d’effet mais juste quelques mois seulement.
Le 12/09/2013 à 12h12