Copie privée : en cas de barème illicite, le ministère ne souhaite pas de remboursement
O temps! Suspends ton vol (Lamartine)
Le 31 octobre 2014 à 15h10
5 min
Droit
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Au Conseil d’État, un litige actuel sur le terrain de la copie privée pourrait entraîner, selon le sort, quelques douloureuses obligations de remboursements chez les ayants droit. Heureusement, le ministère de la Culture est là pour leur tendre la main.
Le contentieux en cours au Conseil d’État oppose une fois de plus les industriels d’un côté et les ayants droits et le ministère de la Culture de l’autre.
L’enjeu, plutôt technique, tient notamment au psychodrame qui a éclaté fin 2012 en Commission copie privée. En novembre, cinq des six industriels qui y siégeaient ont claqué la porte de cette instance. Ils entendaient manifester contre les règles de gouvernance et l’appétit des 12 ayants droit, surreprésentés autour de la table. On connait la suite : une Commission copie privée boiteuse a malgré tout mis à jour la quasi-totalité des tarifs de la redevance pour copie privée. Et sans surprise, une fois publiés au Journal officiel, ces barèmes votés au forceps ont été attaqués par plusieurs constructeurs et syndicats d’industriels.
C’est ce différend qui est actuellement ausculté par le Conseil d’État, dont le rapporteur public a déjà remis ses conclusions voilà une semaine. Les ayants droit bénéficiaires et le ministère peuvent avoir le sourire, elles leur sont favorables. Cependant, non liée, la haute juridiction administrative peut toujours annuler ces barèmes mal votés. Avec un effet douloureux : déclencher une obligation de remboursement pour Copie France, l’organisme collecteur des ayants droit.
Le ministère craint des demandes de remboursements généralisées
C’est théoriquement possible, mais le ministère de la Culture, solidaire dans la souffrance des ayants droit, a démultipliés les arguments pour éviter cette annulation, ou dans le cas contraire, ces remboursements.
Sur ce dernier point spécialement, dans le mémoire d’une vingtaine de pages déposé par la Rue de Valois au tout proche Conseil d’État, les services de Fleur Pellerin utilisent le bouclier d’une ancienne jurisprudence. Ils considèrent que l’annulation rétroactive des barèmes « pourrait provoquer des demandes de remboursement (…) dont la généralisation serait susceptible d’affecter profondément la continuité » du mécanisme de la redevance pour copie privée.
Impossible de rembourser des sommes consommées
Le ministère rappelle que 75 % des sommes collectées ont déjà été réparties entre les ayants droit, de même qu’un quart de ces flux ont subventionné « des festivals, évènements culturels et autres manifestations de la création artistique ». En outre, le remboursement serait impossible, dans la mesure où ces flux « sont répercutés dans le prix de vente des supports aux consommateurs ».
L’argument est un peu tiré par les cheveux puisque ce sont les importateurs et les fabricants qui collectent la copie privée et la reversent aux ayants droit. Ce sont donc eux qui en première ligne devraient être remboursés des prélèvements illicites, avant les consommateurs.
Trop d'annulation de barèmes empêchent une nouvelle annulation
Le service juridique de Fleur Pellerin estiment en outre que l’intérêt général serait menacé par cette annulation car celle-ci « aurait pour conséquence immédiate, eu égard aux précédentes annulations prononcées par le Conseil d’État à l’encontre des décisions antérieurs de la commission, et dans l’attente d’un rétablissement du dispositif, l’arrêt des perceptions sur une part substantielle des supports d’enregistrement soumis à rémunération pour copie privée ».
En clair : l’annulation rétroactive du barème 15 réactiverait des barèmes précédents mais il y a un gros souci : six d’entre eux ont déjà été déclarés illicites par le Conseil d’État ! C’est donc aussi en raison de ces lourdes casseroles que le ministère demande clémence au juge administratif pour l’avenir.
Le ministère suggère une annulation non rétroactive repoussée de 9 mois
L’astuce du chef du service des affaires juridiques de Fleur Pellerin consiste donc à réclamer du Conseil d’État une modulation dans le temps de son éventuelle décision d’annulation. L’idée serait qu’elle ne prenne effet « qu’à l’expiration d’un délai de neuf mois à compter de la date de sa notification ». Cette annulation serait donc décalée dans le temps, sans effet rétroactif et donc sans obligation de remboursement pour les ayants droit. Parfait !
Un machine à cash
Ce n’est pas la première fois que le Conseil d’État appliquerait une telle solution (puisée dans sa jurisprudence AC!) aux bénéficiaires. Il avait déjà offert ce joli cadeau notamment lorsqu’il a tapé sur les doigts de la Commission copie privée. Payées par les ayants droit, les études d’usage qui lui servent à jauger les pratiques de copie avaient bêtement oublié d’ignorer les copies illicites ou celles effectuées par les professionnels. Résultat : plus de copies constatées dans ces études entraînaient comme par magie des taux plus élevés dans les barèmes, et donc plus de redevance. Une pratique certes agréable pour ses bénéficiaires mais très brouillonne sur le terrain du droit : la directive et la jurisprudence européenne demandent aux États membres de ne lier la copie privée qu’aux copies licites effectuées par les particuliers pour leurs usages privés.
Le 31 octobre 2014 à 15h10
Copie privée : en cas de barème illicite, le ministère ne souhaite pas de remboursement
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Le ministère craint des demandes de remboursements généralisées
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Impossible de rembourser des sommes consommées
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Trop d'annulation de barèmes empêchent une nouvelle annulation
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Le ministère suggère une annulation non rétroactive repoussée de 9 mois
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Un machine à cash
Commentaires (49)
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Abonnez-vousLe 31/10/2014 à 15h20
#1
ok si ce n’est pas possible de rembourser alors pourquoi pas un gel des prélèvements jusqu’à épuisement de la “dette”?
Le 31/10/2014 à 15h24
#2
+1 la grenouile
Ca embeterrait ses grands copains d’ayants droit…
Le 31/10/2014 à 15h26
#3
Le 31/10/2014 à 15h31
#4
surtout qu’on peut considérer qu’il y a récidive sur les barèmes problématiques….
une décision équitable serait à mon sens du genre :
“annulation non rétroactive avec effet immédiat, en revanche les futurs barèmes ne pourront entrer en vigueur que un an après la présente annulation , pour compenser l’absence de remboursement et étaler ainsi une sorte de remboursement du préjudice”
ca éviterait un certain sentiment d’impunité qu’une annulation de prélèvement abusif déclencherait…( et en prime effet pervers, ca fait apparaitre au grand jour le montant de la copie priver puisque les prix devraient baisser mécaniquement de façon temporaire)
edit: burned ^^!
Le 31/10/2014 à 15h36
#5
En attendant, personne n’est sanctionné pour avoir fait des barèmes “non conforme”.
Et les gens qui achètent en France des supports de stockage se font toujours avoir…
Le 31/10/2014 à 15h38
#6
C’est un feuilleton qui n’en finit jamais. D’ailleurs je me demande si les lecteurs qui ne suivent pas depuis quelques années comprennent quelque chose à cette histoire.
Le 31/10/2014 à 15h40
#7
Le 31/10/2014 à 15h43
#8
Le 31/10/2014 à 15h43
#9
Le 31/10/2014 à 15h45
#10
S’ils veulent trouvé de quoi remboursé, ils on cas moins sur payer les conseillers ministériels.
Le 31/10/2014 à 15h53
#11
quelques douloureuses obligations de remboursements chez les ayants droit. Heureusement, le ministère de la Culture est là pour leur tendre la main.
Il y aurait encore des gens qui seraient étonnés par la main-mise des ayants droits sur le gouvernement ? " />
Le 31/10/2014 à 15h55
#12
La prise de position du ministère est quand même culottée et hallucinante…
Un décision de justice pourrait rendre invalide un barème donc les prélèvements effectués illicites et ça leur parait normal qu’on ne rembourse pas les personnes ayant payés pour rien.
J’ai peu de foi en l’humanité mais là, ils font vraiment fort…
PS : d’ailleurs, y a t-il moyen de contester au niveau européen la décision du CC ?
Le 31/10/2014 à 15h57
#13
Ouais enfin c’est toujours pareil quoi : on sait qu’on est dans l’illégalité/en dehors des règles, on s’en fout, on continue de ponctionner le fric et de se le distribuer (et on finance un peu les festivals etc… pour que les élus locaux soient contents et donc les députés et ministres) => comme ça tout le monde est content (y a bien la justice qui essaie de faire un peu chier, mais nos amis politiques veillent au grain pour te donner sursis sur sursis et au final rien ne change). C’est une mécanique bien huilée.
Le 31/10/2014 à 16h01
#14
Personnellement je pense que le sujet est au contraire HYPER SIMPLE.
Les Ayant droits veulent du pognon, ils ont leurs entrées aux endroits stratégiques pour s’assurer leur rente !
Point Final…
Plusieurs Années/Gouvernements/Décision du Conseil d’état sont passés, ils n’ont jamais été sanctionné !
En France les juristes s’accordent pour dire que sans sanction il n’y a pas de délit, on peut toujours attaquer ad vitam eternam, tant qu’il n’y a pas sanction il est peu probable que le coupable ne récidive pas, il y est pour ainsi dire encouragé !
Le 31/10/2014 à 16h15
#15
Donc demain, si je vole de l’argent à un tiers et que je le dépense, je pourrais arguer que je suis dans l’incapacité de rembourser et demander donc à ne pas être condamné ?
Ben voyons… " />
Le 31/10/2014 à 16h16
#16
Le 31/10/2014 à 16h22
#17
“le ministère de la Culture, solidaire dans la souffrance des ayants droit”
Une petit pièce siou plait pour payer mon impôt sur la fortune
Le 31/10/2014 à 16h32
#18
Le 31/10/2014 à 17h08
#19
Impossible de rembourser des sommes consommées
Tiens donc ?
Pourtant, l’état n’hésite pas à poursuivre un RMIste qui a perçu quelques euros de trop.
Et qu’il les ait consommé ou pas ne change rien.
Je ne vois pas au nom de quel droit les ayant droit devraient bénéficier de conditions particulières.
C’est plus le pays des droits de l’homme, c’est le pays des droits du capital.
Le 31/10/2014 à 17h09
#20
Quelle bande de pirates ces ayants droit
Le 31/10/2014 à 17h19
#21
L’État “joue” avec la loi, et après ce demande pourquoi plus personne ne lui fait confiance " />
Le 31/10/2014 à 17h31
#22
Ah que les lambris des ministères sentent bon le 18ème siècle et l’aristocratie. Comme le disait Voltaire, “L’esprit d’une nation réside toujours dans le petit nombre qui fait travailler le grand, est nourri par lui, et le gouverne”.
Le 31/10/2014 à 17h35
#23
D’ailleurs ils en sont ou des remboursement des FAI par rapport à l’hadopi ^^
Le 31/10/2014 à 17h38
#24
J’allais déverser ma bile, mais je vois que d’autres l’ont fait avant moi, et mieux.
Je vais donc résumer ma pensée " />
Le 31/10/2014 à 18h21
#25
Le 31/10/2014 à 18h56
#26
Le 31/10/2014 à 19h13
#27
Si l’on fraude le fisc ou la sécu, on a le droit d’utiliser le même argumentaire ?
Finalement, la zone de non-droit n’est celle que l’on croyait. Elle se situe plutôt au 11 bis rue Ballu à Paris " />
Le 31/10/2014 à 19h25
#28
Le 31/10/2014 à 19h38
#29
Le 31/10/2014 à 19h45
#30
Vol caractérisé, prouvé et reconnu, mais approuvé par le ministère: " />
La crise mais pas pour tous " />
Le 31/10/2014 à 19h52
#31
et si on remplacer la RCP (rémunération copie privée) par la RPP (Rémunération proportionnel du Partage) que proposait la Hadopi !
Le 31/10/2014 à 19h56
#32
ainsi les copies serait dans légalité si ya plus de sources illicite c’est pour ça que la Hadopi a proposer la RPP
Le 31/10/2014 à 19h58
#33
vu que les baramères sont basé sur des copies illicité, si on taxer les copies illicite, les copies deviendrais licites grâce a la RPP (rémunération proportionnel du partage)
Le 31/10/2014 à 20h31
#34
plus c’est gros et mieux ca passe?
à ce niveau, ils ne vont quand même pas essayer de faire croire qu’il n’y a pas eu qques valises de billets (ou équivalents en nature) qui ont circulé…
Le 31/10/2014 à 21h19
#35
Ne dites pas “avantages en nature”
mais plutôt “viol en groupe”.
" />
Le 31/10/2014 à 21h22
#36
Le 31/10/2014 à 21h57
#37
Le 01/11/2014 à 00h46
#38
Le 01/11/2014 à 07h56
#39
Le 01/11/2014 à 08h59
#40
Si je comprends bien, le gouvernement ne souhaite pas que les sommes indûment perçues soit remboursées à leurs propriétaires légitimes ?
Et on ose encore se demander si le gouvernement est indépendant ?
Comme dit plus haut, lorsque le quidam percoit le moindre centime de trop, on lui fait la guerre…ah la la, que j’aimerais appartenir a la caste Zayandroy, ils ont l’air d’avoir pas mal de facilités tout de même.
Le 01/11/2014 à 11h02
#41
Dicton de voleur radin:
voler c’est voler, reprendre c’est donner…
Le 01/11/2014 à 11h16
#42
Le 01/11/2014 à 20h07
#43
On flirte quand même sérieusement avec le 432-10 du code pénal…
Le 01/11/2014 à 22h37
#44
Le 01/11/2014 à 23h30
#45
Le 03/11/2014 à 12h30
#46
100% d’accord avec toi.
Et en plus Ce n’est pas comme si c’était la 1er fois…
Le 03/11/2014 à 12h31
#47
Bien que je sois d’accord sur le fond.
Le pb n’est pas le capital.
C’est un vol ni plus ni moins.
Le 03/11/2014 à 12h58
#48
Les gars se font prendre en flagrant délit d’escroquerie en bande organisée, sont en plus multi récidivistes, et il y a encore une ministre pour prendre leur défense genre “faut les comprendre les pauvres, c’est pas de leur faute, ils n’ont pratiquement plus le sou” moi je dis un tel niveau dans le foutage de gueule et le flagrant délit de copinage(pour ne pas employer le mot corruption) c’est beau, que dis je magnifique " />
Bon après le fait que n’importe qui à leur place (politiques, leur familles, et amis exclus bien sur) qui se ferait gauler de la sorte, avec un passif pareil qui plus est, se retrouverait au minimum en détention provisoire avant d’avoir eu le temps de comprendre ce qui lui arrive voir aurait déjà écopé d’une peine de prison ferme depuis longtemps ça c’est juste un léger détail sans intérêt, “laissez tomber vous voulez bien” " />
Le 03/11/2014 à 15h42
#49
Comment avoir confiance dans la politique encore de nos jours… Plus de corruptions, de moins en moins de frontière entre justice et décisionnaire, pathétique.