Fedora 36 arrive en bêta, notre analyse d’une modernisation générale

Fedora 36 arrive en bêta, notre analyse d’une modernisation générale

Bye bye DejaVu

Avatar de l'auteur
Vincent Hermann

Publié dans

Logiciel

18/03/2022 9 minutes
7

Fedora 36 arrive en bêta, notre analyse d’une modernisation générale

En attendant la bêta publique de Fedora 36 prévue pour le 22 mars, des préversions sont disponibles. Nous en avons installé une : c’est une bonne occasion quand même d’observer ce que réserve la prochaine mouture de cette distribution Linux, souvent première sur les nouveautés.

Fedora est l’une des distributions les plus importantes. Elle sert de laboratoire à Red Hat, qui y teste les derniers développements logiciels avant de les intégrer éventuellement dans RHEL, parfois plusieurs années après.

Cet aspect laboratoire fait du système une plateforme peu adaptée aux personnes cherchant la stabilité maximale et qui se tourneront davantage vers Debian par exemple. Pour les autres, le système est au minimum très intéressant à suivre, car il lui est souvent arrivé de donner le « La » en matière d’évolutions logicielles.

Fedora fut ainsi la première distribution Linux à basculer sa session utilisateur par défaut sous Wayland, longtemps avant les autres : en novembre 2016, avec Fedora 25. Bien sûr, il y a parfois des pots cassés, mais en dehors de retards récurrents sur le planning, le système s’en est toujours bien sorti sur le terrain de la stabilité.

L’arrivée de Fedora 36, dont la version finale est prévue le 19 avril, se caractérisera cette fois davantage par un renouvellement graphique que d’impressionnantes nouveautés techniques, même si certaines sont importantes comme nous le verrons. Bon nombre d’apports sont dus à GNOME 42, mais pas seulement.

Un renouvellement esthétique important

Fedora 36 passe à GNOME 42, dont nous avions pris en main la bêta il y a quelques semaines. On y retrouve logiquement l’ensemble des améliorations décrites alors, dans une forme neutre : Fedora ne propose pas de thème personnalisé, la version de GNOME fournie étant considérée comme « stock ».

On y retrouve notamment le thème sombre à l’échelle du système. La plupart des applications sont concernées, le réglage se trouvant dans Paramètres > Apparence. Ce n’est pas la première fois qu’un thème sombre apparaît dans une distribution Linux, mais il s’agit cette fois d’une option affectant l’ensemble de la session. Toutes les applications compatibles – soit la quasi-totalité de celles fournies avec GNOME – suivent le choix de l’utilisateur. De nouveaux fonds d’écran adaptables sont d’ailleurs fournis par Fedora 36.

Fedora 36Fedora 36

Les autres améliorations de GNOME 42 sont présentes. Par exemple, une modernisation de nombreuses interfaces suivant la transition vers GTK4 et libadwaita. Cette évolution se repère à de nombreux petits changements çà et là. Par exemple, des onglets prenant toute la hauteur de la barre de titre ou encore des zones de sélections aux coins arrondis, ces derniers étant généralisés à presque tous les cadres et fenêtres.

Parmi les autres modifications, signalons les boutons plats, de nouvelles animations, de nouveaux panneaux drop-down ou encore ceux de notifications. On remarque pour ces derniers qu’ils ont perdus la petite flèche les reliant à leur base de départ, par exemple lorsque l’on clique sur l’heure pour afficher les notifications et le calendrier.

Signalons également deux nouvelles applications. D’abord un utilitaire de capture d’écran complètement revu et plus en phase avec les outils modernes. On retrouve les classiques du genre, avec capture de tout l’écran, d’une fenêtre ou d’une zone spécifique. L’application demande ensuite si on souhaite envoyer le résultat dans le presse-papier ou le sauvegarder en PNG.

Ensuite, Text Editor, qui remplace Gedit. Il s’agit là aussi d’une application entièrement neuve, avec une interface plus moderne, une adaptation au thème sombre et bon nombre de fonctions.

Enfin, on note un changement de police par défaut, ce qui est assez rare pour être signalé. La famille DejaVu laisse ainsi sa place à Noto, avec l’objectif de rendre plus cohérent le rendu du texte dans tout le système. DejaVu ne couvrait pas certains scripts linguistiques, ce qui avait nécessité d’autres polices.

Fedora 36

Linux 5.17 et sessions Wayland avec pilote NVIDIA propriétaire

Fedora embarque toujours le noyau Linux le plus récent. Dans la bêta, on trouve pour l’instant la Release Candidate 8 du noyau 5.17, qui n’est pas encore disponible en version finale. Comme toujours, il apporte de nombreuses améliorations sur le support matériel. Plusieurs nouveautés majeures font également leur apparition, comme le Kernel Concurrency Sanitizer pour arm64, la prise en charge de nombreux SoC (dont le Snapdragon 8 Gen 1 et les plateformes X65), l’arrivée d’un pilote pour le P-State d’AMD (meilleur contrôle de la consommation) ou encore le support de sv48 pour RISC-V.

Autre gros changement, Wayland peut enfin fonctionner sur les machines équipées d’un GPU NVIDIA et du pilote propriétaire. La société n’est guère partageuse sur les informations techniques de ses GPU, seul son pilote débloquant réellement toutes les fonctionnalités des cartes, en particulier tout ce qui touche à la gestion de l’énergie.

De nombreuses personnes étaient concernées depuis plus de cinq ans que Wayland était arrivé dans Fedora. Ce n’est pas un problème spécifique à cette distribution d’ailleurs. La bascule vers Wayland est censée se faire automatiquement dès que le pilote propriétaire est détecté. X.org reste bien sûr disponible en option à l’écran de connexion ou comme « fallback » en cas d’erreur avec le serveur d’affichage.

Et puisque l’on parle de Wayland, Fedora 36 lui permet d’être utilisé par défaut avec les variantes du système basées sur SDDM, notamment Kinoite, le « spin » KDE de Fedora.

Fedora 36

Autres évolutions techniques

Plusieurs autres changements intéressants sont présents dans cette Fedora 36. Par exemple, seuls les paquets de dépendance recommandés sont désormais installés. Traduction : lors d’une mise à jour, si une dépendance n’était pas installée, elle ne le sera pas davantage pendant l’opération. Un changement tout « bête », mais qui peut avoir un impact important en termes de stockage.

Fedora 36 modifie également l’emplacement de sa base de données pour les paquets RPM. Elle était jusqu’ici stockée dans /var. Désormais, elle réside dans /usr. La raison ? Une question de cohérence, car la plupart des distributions RPM font de même, y compris au sein de la propre famille Fedora, comme dans Kinoite et Silverblue.

Systemd présente pour sa part une modification de la manière dont les descriptions d’unités sont affichées dans ses messages. Actuellement, seule la description de l’unité est indiquée. Dans Fedora 36, le nom apparaît également. Par exemple, « Network Manager » devient « NetworkManager.service ». Une augmentation de la granularité rendant les messages plus précis.

Signalons aussi un changement dans Anaconda, l’installeur de Fedora. L’équipe de développement s’est rendu compte que les installations à un seul utilisateur étaient de loin plus nombreuses que les installations partagées ou en entreprise. Pour fluidifier le processus, Anaconda bascule par défaut cet utilisateur en administrateur.

Nouvelle version du système oblige, tous les paquets ou presque sont mis à jour. GNOME 42 accompagne par exemple la distribution Fedora classique, mais d’autres environnements peuvent être installés, disponibles dans leurs dernières révisions : KDE Plasma 5.24, Xfce 4.16, LxQt 1.0.0…

Côté applications et développements, on retrouve – pour l’instant, la situation peut évoluer d’ici la sortie - PHP 8.1, Ruby on Rails 7.0, Django 4.0, gcc 12, glibc 2.35, Golang 1.18, OpenSSL 3.0, Ruby 3.1, Ansible 5, Firefox 98 ou encore LibreOffice 7.3. La version d’OpenJDK fait un énorme bond en passant de la 11 à la 17.

Fedora 36

Un état encore un peu brut, à tester avec prudence

La bêta publique n’est prévue que le 22 mars, mais rien n’empêche de tester tous ces apports dès maintenant. Il faut passer par une préversion disponible depuis cette page. La dernière est datée du 11 mars. Elle n’est pas forcément fournie dans tous les formats habituels et pour toutes les plateformes, mais l’essentiel est couvert, notamment le système Live pour x86_64.

L’image ISO récupérée fonctionne exactement comme pour une bêta publique ou même une version finale. Seule différence, l’état général de stabilité du système. Il nous est arrivé de croiser certains problèmes, notamment des petits « freezes » d’une ou deux secondes, ou encore des plantages avec Logiciels. En machine virtuelle, il arrivait même que le système ne soit plus réceptif aux entrées clavier/souris.

Ces problèmes disparaîtront sans doute dans les semaines à venir, la phase suivant la bêta étant comme toujours dédiée aux corrections. La décision « Go/No Go » sera prise le 14 avril. Rappelons que Fedora est souvent en retard et ne tiendra peut-être pas son délai d’arrivée finale le 19 avril. L’équipe a déjà prévu le 26 avril si un problème bloquant était trouvé.

Cette version s'annonce dans tous les cas cohérente et agréable à utiliser. GNOME 42 y joue pour beaucoup, mais les personnes ayant absorbé les gros changements de GNOME 40 ne s'en plaindront pas. On a moins cette fois l'impression que la distribution fonce à tout allure. Une petite baisse de cadence ? Uniquement en apparence, car les efforts se sont concentrés sur la cohérence de l'ensemble, ce qui ne sera pas pour déplaire.

Écrit par Vincent Hermann

Tiens, en parlant de ça :

Sommaire de l'article

Introduction

Un renouvellement esthétique important

Linux 5.17 et sessions Wayland avec pilote NVIDIA propriétaire

Autres évolutions techniques

Un état encore un peu brut, à tester avec prudence

Fermer

Commentaires (7)


La meilleure distro que j’ai utilisé en 15 ans ! Les mises à niveau se passent toujours bien (j’attends toujours un peu après la sortie de les faire).



Je l’utilise avec KDE Plasma qui est un plaisir à utilise Franchement, elle est stable à utiliser au quotidien, même en environnement professionnel.



Là où ça coinçait il y a quelques années (je sais pas si c’est toujours le cas) c’est que parfois le noyau était trop récent et pas immédiatement compatible avec le driver Nvidia propriétaire. J’ai plus de GPU Nvidia donc je ne sais dire ce qu’il en est aujourd’hui



Merci pour l’article très instructif


Je confirme elle est top !! Je l’utilise depuis plusieurs années aussi, sans aucun problème pour la version GNOME de mon côté. Je vais par contre attendre la version stable pour tester les nouveautés :8


@husimo Oui KDE Plasma est top perso sur KDE Neon (au top aussi) cette mouture (si je compare à ce que j’ai) n’apporte pas grand chose.


Merci pour cette série d’articles complets sur Fedora - j’utilise Ubuntu au quotidien, mais c’est toujours intéressant de suivre l’évolution de cette autre distrib’ phare, avec les nouveautés de RedHat et Gnome !


Pareil que vous autres, c’est mon outil de travail depuis 4 ans maintenant, après avoir passé la majorité de la vie de Linuxien sur Ubuntu.



Avec Manjaro en parallèle sur d’autres machines.


Han! c’est devenu plutôt joli gnome :bravo:


Eh bah, content de voir qu’il continuent d’être bien en avance sur pas mal de monde! Curieux de voir comment ça se passe avec les drivers Nvidia.



Fedora serait juste parfaite s’il y avait snapper par défaut d’installé. Du coup, je reste sur OpenSuse pour le moment.