Des lois venues encadrer des pratiques alégales. Ainsi ont été « vendues » aux parlementaires les derniers textes sécuritaires. Hier, Reflets et Mediapart ont donné de nouvelles briques sur la situation antérieure aux lois de programmation militaire et sur le renseignement.
« IOL » pour Interceptions obligations légales. Voilà le doux acronyme détaillé hier par nos confrères, préparé en France dès 2005, généralisé en 2009 auprès de tous les opérateurs. Le principe ? Un système de « sondes » installées chez ces fournisseurs d’accès, spécialement sur les DSLAM, censé permettre le recueil en temps réel des données d’une personne déterminée.
Du massif potentiel
« L’interception est fondée sur une liste contenant les identifiants des cibles. L’application détermine l’adresse IP d’une cible, dont l’un au moins des identifiants a été reconnu dans le trafic analysé par la sonde, explique l'entreprise Qosmos dans une ébauche du guide dédié à ce type de surveillance. Une fois la cible fixée, le trafic remontait vers un « Mediation Device » pour être enfin adressé à un « Monitoring Center. »
« Selon un document interne de Qosmos, dimensionné pour permettre de l’interception sur 6 000 DSLAM, IOL, pour Interceptions Obligatoires [ndlr : lire plutôt obligations] Légales, pouvait analyser jusqu’à 80 000 paquets IP par seconde, éclaire Reflets. Un DSLAM pouvant accueillir à l’époque entre 384 et 1 008 lignes d’abonnés, c’est entre 2,3 et 6,04 millions de lignes qui étaient alors concernées par ce projet pour la seule société Qosmos. Du massif potentiel. »
De l'alégal à la loi Renseignement, via la loi de programmation militaire
Seul souci, la mise en place de ces mécanismes n’était en rien prévue par les textes qui n’autorisaient alors que le recueil a posteriori. Il aura en effet fallu attendre la loi de programmation militaire de 2013 et son décret d’application de décembre 2014 pour permettre aux services de recueillir en temps réel sur « sollicitation du réseau », tous les « documents » et « informations » détenus par les opérateurs, au titre des métadonnées.
Pour cela, il leur suffisait de suivre une procédure déterminée, tout en justifiant d’impératifs tenant à la sécurité nationale, la sauvegarde des éléments essentiels du potentiel scientifique et économique de la France, la prévention du terrorisme, la prévention de la criminalité et la prévention de la délinquance organisée et celle de la reconstitution ou du maintien de groupe dissous.
Avec la loi Renseignement de 2015, cette surveillance a gagné en nervosité, si l'on peut dire : l’article L851-2 du Code de la sécurité intérieure organise par exemple le recueil en temps réel des métadonnées visant une personne préalablement identifiée comme présentant une menace terroriste. Il n’est plus question d’une quelconque « sollicitation » préalable. Et préalablement, le mécanisme des boites noires est calibré pour renifler cette menace à partir d'une masse indéterminée de données de connexion.
En résumé, les textes sont passés d’un régime de recueil a posteriori à un système en temps réel sur sollicitation des opérateurs (LPM) pour aboutir à un recueil en temps réel en accès direct (loi Renseignement). Mais les éléments révélés hier montrent que les pratiques dites « alégales » avaient une belle course d'avance sur le juridique.
Quand IOL flirte avec LOL
Pour mieux contextualiser, il faut d'ailleurs revenir sur l’audition de Jean-Marie Delarue par la commission parlementaire sur le droit et les libertés à l’âge du numérique. En novembre 2014, celui alors président de la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité (CNCIS) avait regretté que la loi de prévention du terrorisme du 23 janvier 2006 ait permis « la saisine de métadonnées » sous autorisation d’une « personnalité qualifiée, placée auprès du ministre de l’intérieur, et sur l’indépendance de laquelle il y a lieu de s’interroger ». Ambiance. Il faut dire que la CNCIS, ancêtre de la CNCTR, était sur ce point reléguée à un simple contrôle a posteriori.
Toujours devant cette commission, le député Jean-Jacques Urvoas, futur rapporteur du projet de loi Renseignement devenu depuis ministre de la Justice, expliquait le même jour que « depuis que je suis président de la délégation parlementaire au renseignement, je n’ai jamais rencontré la structure Qosmos-Amesys et on ne me l’a jamais présentée comme un prestataire des organismes que nous rencontrons ».
Commentaires (77)
#1
Ça ne m’étonne même pas…
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Merci d’être un des seuls à relayer cette info !
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Un exemple de plus que les lois sont écrites et votées pour donner un cadre juridique a des pratiques déjà existantes.
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Qosmos/Amesys toujours dans les bons coups
Le fleuron français de la surveillance généralisée
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N’arrosez plus vos plantes, ça brouille les micros !!!
Ok elle est de Coluche celle-là.
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Je comprends pas, vu que c’était clairement illégal alégal y a personne pour engager des poursuites ?
//Question sincère//
#7
« depuis que je suis président de la délégation parlementaire au renseignement, je n’ai jamais rencontré la structure Qosmos-Amesys et on ne me l’a jamais présentée comme un prestataire des organismes que nous rencontrons ».
comment vous avez dit qu’elle s’appelait cette boite? Amesys? C’est pas amnésie? Bof de toute façon je m’en souviens plus
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#9
La FrenchTech " />
#10
Même dans le cadre de la loi actuelle, on peut tout de même s’interroger sur le dimensionnement du dispositif, jusqu’à 6 millions de lignes.
Actuellement on en est à: “le recueil en temps réel des métadonnées visant une personne préalablement identifiée comme présentant une menace terroriste.”
Le dimensionnement veut dire qu’on pense qu’il peut y avoir jusqu’à 6 millions de lignes de terroristes à surveiller.
Ou alors, qu’on va surveiller des gens qui ne présentent pas une menace terroriste mais qu’on va déclarer comme tel pour justifier la surveillance.
#11
qui? Urvoas? Cazeneuve?" />
un parlementaire qui proposerait une commission d’enquête parlementaire?
peut-être.
un groupe de parlementaires majoritaires qui voterait l’adoption de cette commission?
de droite? impossible ça date de Sarko/Fillon.
de gauche? impossible ça a été légalisé sous Hollande/Valls.
et puis tu n’y penses pas voyons, nous sommes sous état d’urgence et la menace terroriste n’a jamais été aussi importante.
voilà la réponse, sincère. " />
#12
« depuis que je suis président de la délégation parlementaire au renseignement, je n’ai jamais rencontré la structure Qosmos-Amesys et on ne me l’a jamais présentée comme un prestataire des organismes que nous
rencontrons ».
“on ne me l’a jamais présentée comme…” faut-il comprendre : je suis pas con, je sais bien ce qu’ils font, je n’ai jamais eu besoin qu’on me l’explique
EDIT : et la phrase commence avec “depuis que je suis …”. Donc on lui a peut-etre explique tout ca avant!
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#14
le premier truc alégale devenu légal qui sort, bientôt la suite
et dire qu’on va avoir droit à certains commentaires surpris de l’apprendre " />
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Ok, alors on parie combien que la reconnaissance faciale est deja active en France ?
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il faut attendre la lois voté en 20x pour avoir l’info en 20x+1 comme quoi c’est déjà actif dans certains lieux depuis 2015-2016
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Tout le monde ici s’en doutait.
Et tout le monde voit aujourd’hui qu’une personnalité politique en France peut mentir éhontément devant une commission nationale sur des pratiques illégales sans qu’il y ait la moindre sanction, ni la moindre réaction journalistique hors sites de presse spécialisés/indépendants.
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Ca fait pas longtemps que les gens savent que les politiques peuvent mentir sans problème et continuent pourtant a les réélire ? " /> On me dit dans l’oreillette que si " />
#21
@WereWindle
Si ce n’est pas explicitement légal, c’est illégale sur plusieurs points :
Je te fais pas la liste complète, (d’ailleurs je suis pas juriste, je peux me tromper), mais on n’est pas simplement dans un cas ou aucune lois ne dit que c’est légale ou illégale. On est plutôt dans le cas ou plusieurs lois interdisent ce qu’ils ont fait, et qu’aucune lois ne met une exception pour légaliser leurs actes.
Mais bon, faudrait en avoir une sacrée paire pour lancer des poursuites…
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#23
Je ne sais pas si c’est avoir une sacré paire ou plutot avoir le temps et l’argent pour ca " />
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#26
Et Jean-Jacques dans le cosmos
il fait parti des CosmoCapte mais chuuuuutttt ! il ne faut pas le dire " />
sinon ça n’a rien d’étonnant… je me demande combien va coûter ce bouzin …
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heeeeu, c’était de l’humour, foireux, certes, mais de l’humour " />
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#31
En soit, le tribunal administratif sert justement à ça.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Tribunal_administratif_(France)
Mais bon, s’attaquer à l’espionnage anti-terroriste, c’est autre chose que de contester le fait de devoir payer la redevance TV.
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Sérieusement?
a-légal? Vraiment a-légal? C’est quoi cette invention? Sématiquement, un a privatif implique que le mot qui suit ne l’est pas. Donc a-légal veut dire non légal, donc par définition illégal.
Contrairement à la morale, la loi trace une frontière assez stricte entre ce qui est légal et ce qui ne l’est pas. il n’y a pas de troisième catégorie d’actes qui ne sont ni l’un ni l’autre, “neutres légalement”.
D’autant que la limite de l’activité de l’Etat est bien sûr le droit. A l’opposé des privés, qui peuvent faire tout ce qui n’est pas illégal, le droit est la base et la limite de l’activité de l’Etat. Tout ce qui dépasse ce cadre et par définition illégal.
Ce genre de déclaration revient simplement à se moquer du monde en expliquant avec des mots inventés que l’Etat violait les droits fondamentaux des citoyens en toute connaissance de l’illégalité de son activité. il n’y avait (a?) donc tout simplement pas d’Etat de droit.
Ce comportement est proprement scandaleux, et j’espère que ça en fera réfléchir sur la nécessité des “besoins” en terme de sécurité (j’entends par là le sacrifice presque total d’un droit fondamental pour un hypothétique sentiment de sécurité).
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La grenouille plus forte que Popeye " />
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ça devient fatiguant de voir comme il est facile, courant voire systématique pour les politiques de violer les lois sans jamais avoir a rendre de comptes à la population.
La seule façon de répondre à ces gens là, c’est probablement par des actions toutes aussi illégales non ? –> Napalm
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et ce terme “a-légal”, dans le genre novlangue c’est vraiment digne d’Orwell
" />
#38
Bin même dans un état de droits, c’est soit légal soit illégal.
Si rien ne dis que c’est illégal, c’est légal. Sinon bin c’est illégal.
Je ne vois pas de situation ou quelque chose est alégale sans être illégale.
Et dans le cas présent, il y a une multitude de lois qui interdisent ce genre d’espionnage.
#39
Dans un Etat de droit, si l’Etat avait besoin de respirer alors il faudrait une loi pour le lui autoriser. Si l’Etat a besoin de surveiller, alors il faut une loi pour le lui autoriser. voici une définition de la notion.
Pour les particuliers la situation est inverse. Ils ont des droits fondamentaux et en principe l’Etat n’a pas à interférer dans la jouissance de ces droits. Donc pour les particuliers il faut une loi pour interdire.
Je le répète, dans un Etat de droit, le droit est la base et la limite de l’action de l’Etat. C’est comme ça qu’on garantit aux particuliers que l’Etat n’interférera pas hors cadre dans leur vie.
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De tous temps les systèmes ont surveillé leurs citoyens.
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Le système solaire, il est dans le système? " />
#45
T’avais raison d’être sur et certain tonton David
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Oui le préfixe à sens différent, et le mot peut exister pour parler d’autres constitutions que celle de la France.
Mais il a raison de dire qu’en droit Français utiliser ce mot n’a aucun sens puisque absolument tout est soit légale, soit illégale.
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Il existe tout de même ce qu’on appelle des “vides juridiques” qui peuvent provoquer des “pratiques alégales”.
Le problèmes ici vient du fait que l’Etat et son administration n’agit jamais sans qu’un texte réglementaire ne l’y autorise (contrairement à une personne civile envers qui le Droit pose des limites à sa liberté).
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En d’autres termes, un vide juridique dans le Droit administratif implique forcément une interdiction de faire. Car il faut forcément une loi, un décret, un arrêté, une circulaire, etc, qui détermine les actions d’un acteur de l’Etat. Par exemple, si un texte, comme la Constitution, demande à ce que ce soit une loi (du Parlement) qui doive réglementer les écoutes téléphoniques (par exemple), ce n’est pas un décret ou une circulaire de la Présidence de la République qui pourra le faire (ce serait donc illégal, et non alégale, de le faire par décret ou circulaire).
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Un terroriste ne passeras jamais par internet pour preparer un attentat.
Tout ce dispositif et meme pire au USA c’est pour espionner le peuple et rien d’autre.
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(version Ch’ti) Dans le temps on employait d’autres bites pour espionner les gens " /> (des bites chercheurs)
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Oui un des seuls à relayer cette info soulevée par Médiapart et Reflets :p
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Comme je disais donc : “un des seuls à relayer cette info de Mediapart et Reflets” ;)
#67
normal, l’un est un “journal” d’opinion gauchiste limite marxiste, et l’autre un dangereux repaire de crypto-anarchistes libertaires d’ultra gauche tendance teckels morts armés d’agitateurs d’intestins.
pas étonnant que la bonne presse objective de nos aïeux ne s’adonne pas à reprendre de telles fadaises, ses journalistes pourraient recevoir un sms du cabinet du PM (non, pas pistolet mitrailleur, quoique).
au pire on aura droit à un entrefilet dans l’Humanité, c’est dire.
" />
#68
de mauvais goût …. mais nordiste approved " />
#69
les “terroristes” font souvent partie du Peuple. En tout cas, un Etat démocratique (un Etat représentant le Peuple) n’existe que si des contre-pouvoirs et une séparation des pouvoirs existent. Et un élu cherchera toujours à se prémunir d’un éventuel danger ou à se protéger pour ne pas engager trop facilement sa responsabilité.
#70
#71
“Toujours devant cette commission, le député Jean-Jacques Urvoas, futur
rapporteur du projet de loi Renseignement devenu depuis ministre de la
Justice, expliquait le même jour que « depuis que je suis président
de la délégation parlementaire au renseignement, je n’ai jamais
rencontré la structure Qosmos-Amesys et on ne me l’a jamais présentée
comme un prestataire des organismes que nous rencontrons ».”
Et en plus, il a pris les parlementaires de la commission pour des buses, chapeau M. Urvoas ! " />
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#74
Perso, j’ai découvert ce mot quand j’étais marin, y’avait même une variante utilisée par les ch’tis qui navigaient avec moi : ch’tio biloute !
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“crypto-anarchistes libertaires d’ultra gauche tendance teckels morts armés d’agitateurs d’intestins”
you made my day ^^
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" />
#77
Déjà fait, mais avec encore quelques limites qui empêchent l’État de te protéger efficacement.