Disclose déplore la (cyber)surveillance hors norme d’une journaliste par la DGSI
Le 06 décembre à 10h51
3 min
Sécurité
Sécurité
Quinze mois après sa garde à vue de 39 heures et la perquisition de son domicile par la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), la journaliste Ariane Lavrilleux de l'ONG Disclose est convoquée, vendredi 17 janvier 2025, en vue d’une possible mise en examen pour « appropriation et divulgation d’un secret de la défense nationale ».
Elle avait contribué, avec trois autres journalistes, à révéler en 2021 qu'une opération militaire secrète menée par la France en Égypte, baptisée « opération Sirli », avait « conduit à l’exécution arbitraire de centaines de civils égyptiens, le tout sur fond de vente d’armes ». La journaliste encourt une peine de cinq ans de prison et 75 000 euros d’amende :
« Depuis 2018, année de la création de Disclose, quatre de nos journalistes ont été intimidés par les services de renseignement intérieur. Un triste record qui fait de notre rédaction à but non lucratif le média français le plus attaqué par la DGSI. Par ces procédures, les services de renseignement intérieur français ont systématiquement cherché à identifier les sources qui ont fourni à Disclose des informations d’intérêt général. Les enquêtes "Made in France", en 2019, puis "Egypt Papers", en 2021, ont mis en lumière les ventes d’armes de la France à des régimes autoritaires, qui les ont ensuite retournées contre des civils, au Yémen, en Égypte et en Libye. »
Disclose déplore en outre l’utilisation de moyens d’investigation « hors norme » contre la journaliste, ainsi que de « méthodes de surveillance ultra-intrusives visant à espionner ses faits et gestes ».
L'ONG a en effet découvert dans le dossier judiciaire que la journaliste avait fait l’objet de surveillances physiques lors de déplacements professionnels et privés, que son téléphone portable avait été géolocalisé en temps réel, ses comptes bancaires épluchés, « tout comme ses achats de billets SNCF ou ses communications privées sur le réseau social X », ainsi que tous ses déplacements en train sur une période de trois ans :
« En France, une journaliste peut être suivie par des policiers en civil à la sortie de son travail ou lors d’un week-end en Provence. Elle peut voir son téléphone portable espionné en direct, pendant des semaines. Elle peut même être prise en photo dans la rue ou pendant qu’elle fait ses courses au supermarché. »
Les enquêteurs de la DGSI ont aussi rédigé une note sur son « usage des réseaux de communication cryptée », sans pour autant préciser comment ils ont obtenu ces informations. Ils y précisent qu' « Ariane Lavrilleux utilise WhatsApp configuré avec effacement des messages au bout de 90 jours, elle utilise également Telegram et Signal. »
Un commissaire de la DGSI a également déclenché la géolocalisation de son smartphone, de sorte que l’ensemble de ses déplacements ont été suivis en temps réel et enregistrés pendant un mois. Motif invoqué, selon la procédure : « Déterminer ses habitudes de vie ainsi que d’éventuels lieux de résidence pour faciliter son interpellation ».
Le 06 décembre à 10h51
Commentaires (15)
Vous devez être abonné pour pouvoir commenter.
Déjà abonné ? Se connecter
Abonnez-vousModifié le 06/12/2024 à 11h06
On ne compte plus les dérives en la matière, pour surveiller des oppositions politiques et les contrôler, qu'il s'agisse de la politique intérieure ou internationale... Heureusement que Next ne dérange/bouscule pas grand monde...
Le 06/12/2024 à 11h16
Le 06/12/2024 à 12h57
Le 06/12/2024 à 11h52
Même si l’enquête de la DGSI peut paraitre disproportionné de premier abord, la recherche d'une taupe potentiel dans les services de l’état me semble pertinent. Rien ne dit que cette "taupe" ne vend pas nos secrets à d'autres pays, à des terroristes...
Le 06/12/2024 à 13h06
Pour moi, le problème de départ est que la position de la France est complètement hypocrite :
* d’un côté, pour l’image, elle explique qu’elle ne vend qu’à des « gentils ». D’ailleurs elle a signé un certains nombre de traités internationaux pour ça, et elle peut se retrouver devant la CEDH si elle le fait (complicité de torture et/ou de crime contre l’humanité, de mémoire).
* de l’autre, elle le fait quand même, et qualifie ça de « secret défense », parce que faudrait pas trop que ça se sache quand même.
Le problème est que pour que ça ne se sache pas trop (parce que ça finit toujours par se savoir), ça commence à être l’artillerie sacrément lourde qui est déployée. Artillerie qui a été présentée comme s’appliquant aux vrais problèmes de trahison / menaces, pas pour embêter des journalistes un peu trop curieux et bavards…
Le 06/12/2024 à 14h09
Le 06/12/2024 à 15h25
Le 08/12/2024 à 23h10
Le 07/12/2024 à 07h21
(apparemment la vidéo n’est plus disponible en ce moment, mais ça revient souvent)
Modifié le 06/12/2024 à 13h22
Mais aussi dans un état de droit, un appareil d'état ne peut non plus tout faire et tout s'autoriser.
Il y a des lois, que ce soit pour l'utilisation de nos armes et nos moyens humain millitaires.
Nous sommes signataires de convention internationales.
Dans le sujet en question, la manisfestation de la vérité n'est pas à la charge de la journaliste, elle ne rend compte que de faits, mais bien de l'état.
Si celui-ci à les mains sales, il doit l'assumer et ne peut user de moyens de baillonement envers un journaliste et un média. La liberté de la presse ne s'use qui si l'on s'en sert.
De plus la DGSI opère en dehors d'un contrô'e judiciaire car il ne s'agit pas d'une enquête de justice.
On suit et surveille un individu et on ne cherche même pas à s'en cacher puisquils ne semble pas émus de se faire prendre.
De mon souvenir, l'enquête de disclose n'était que factuel et n'incriminait pas nominativement d'opérateur ou de personnes dont l'identité devait demeurer secrète, puisque l'on avait fournie une aide via des opérateurs de drones et des vols de surveillance pour la désignation de cibles au sol au bénéfice du pouvoir Egyptien.
Ces actions que l'on en soit outré ou pas relèvent d'une information utile au peuple.
La journaliste ne risque pas de peine car elle n'est pas autrice des documents classifié mais récipendiaire. Elle ne les a pas produit. Elle les a bien sûr utilisé pour produire un article d'information
avec le droit afférent à cet usage.
Pour le coup si les services de l'état cherchent la source c'est que c'est bien elle qui risque gros pour avoir transmis des documents classifés. La je n'ai rien à redire sur ce point si ce n'est que de manière étonnante cette source ne semble pas avoir demandé de statut de lanceur d'alerte.
Ce qui peut, là, interpeler sur la relative protection qu'offre cette modalité de statut en droit français.
Autre sujet...
Modifié le 06/12/2024 à 13h20
Il y a de sérieuses questions à se poser quand au motif de la sécurité, nationale ou non, on surveille des gens qui ont permis l'exposition de décisions au moins discutables, voire carrément inacceptables, sans que ces révélations ne posent un risque autre que celui sur les sources (accepté par les sources, clé de voûte du secret des sources que les journalistes cherchent à protéger à tout prix) ou sur l'ego des dirigeants.
C'est tout le principe de la "pente glissante" de dispositifs réglementaires permettant ce genre de choses, quand les contours de leurs emplois sont flous et/ou sans contrôle a priori d'une tierce partie indépendante (par exemple un autre pouvoir).
C'est toute la logique derrière le combat que les citoyens devraient mener fasse à la rhétorique sécuritaire et aux lois d'exceptions banalisées, sans contre-pouvoirs, qui en découlent.
Le 06/12/2024 à 15h19
Les journalistes n'ont pas interdiction de filature ou prise de vue dans le cadre de leurs enquêtes, pourquoi cela devrait-il être le cas dans le camp d'en face? Certes, il y a des moyens en plus comme la possibilité de demander la géolocalisation aux opérateurs de téléphonie... voir de secouer le cocotier en GAV. Mais j'ose espérer qu'ils sont formés à rendre l'affaire aléatoire et au droit qu'on ne peut pas retirer: La fermer! S'offusquer aussi de ce que l'on fait soit-même cela fait un peu Lou-Ravi quand même!
Côté Egypte, les trafics financent très probablement encore plus directement le terrorisme que chez nous. Taper les trafiquants n'est donc pas totalement hors sujet non plus.
Modifié le 06/12/2024 à 20h41
Modifié le 06/12/2024 à 20h23
Affaires sensibles (France inter)
Publié le dimanche 1 décembre 2024 (première diffusion le mardi 5 septembre 2023)
Aujourd’hui dans Affaires Sensibles les armes françaises de l’apartheid. Sur ce marché, le catalogue français est l'un des plus complets. Parmi nos clients, des démocraties et des dictatures, aujourd'hui comme hier auprès du régime ségrégationniste blanc d'Afrique du Sud.
https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/affaires-sensibles/affaires-sensibles-du-mardi-05-septembre-2023-3287585 à écouter également en podcast sur toutes les plateformes
Le 07/12/2024 à 10h49