Le gouvernement suspend le décret sur la mise en Open Data des données de transport
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Le 06 novembre 2017 à 08h19
5 min
Droit
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Voilà deux ans que le gouvernement aurait du prendre le décret d’application de l’article 4 de la loi Macron, celui-là même qui était censé conduire à l’ouverture des précieuses données détenues par les opérateurs de transports publics (SNCF, RATP, etc.). L’exécutif nous annonce toutefois que ce texte est désormais suspendu. Explications.
Qu’il s’agisse de « services réguliers de transport public de personnes » (train, métro, bus, avion...) ou de « services de mobilité » – de type vélos en libre-service ou covoiturage –, l'article 4 de la loi Macron oblige en théorie les acteurs du transport à diffuser « librement, immédiatement et gratuitement » leurs données relatives à :
- Leurs arrêts
- Leurs tarifs publics
- Leurs horaires planifiés
- Leurs horaires en temps réel
- L'accessibilité aux personnes handicapées
- La disponibilité de leurs services
- Les incidents constatés sur le réseau
Ces précieuses informations doivent être mises en ligne dans un « format ouvert », conformément aux principes de l’Open Data. L'idée : fournir de la « matière première » à des développeurs qui souhaiteraient par exemple proposer un site ou une application permettant de calculer un itinéraire, en prenant en compte tous les modes de transport disponibles.
Un dossier mis soigneusement au placard
Seulement voilà... Comme nous avons déjà eu l'occasion de le souligner, ces dispositions sont encore (très) loin d’être respectées. Même la Cour des comptes s'en était alarmée, en février 2016.
Pourquoi ? Parce que les principaux transporteurs profitent d’une sorte de flottement juridique, introduit d’ailleurs à l’époque sous l’impulsion d’Emmanuel Macron (voir notre enquête sur « Comment le gouvernement a reculé sur la mise en Open Data des données de transport »).
En pratique, les acteurs visés par la loi Macron peuvent échapper à leurs obligations législatives s’ils adoptent une sorte de charte sur l’Open Data. À ce jour, seuls deux « codes de conduite », élaborés par la RATP et Keolis-Rennes, ont ainsi été homologués par le gouvernement.
Tous les autres transporteurs devraient donc respecter à la lettre la loi Macron. Mais non : un décret est attendu pour compléter ces dispositions. Le législateur avait d’ailleurs ordonné qu’il soit publié le 6 novembre 2015 « au plus tard »... Soit il y a deux ans jour pour jour !
Bien que ce texte ne soit pas obligatoire pour que la loi devienne applicable, certains profitent visiblement de son absence pour prendre leur temps...
La nouvelle majorité préfère suspendre ce décret
L’histoire ne s’arrête pas là. Alors que nous relançons régulièrement l’exécutif sur ce dossier, le ministère chargé des Transports nous a annoncé la semaine dernière qu’il avait décidé de « suspendre la publication du décret d’application de l’article 4 de la loi du 6 août 2015 » !
Deux raisons à cela. D’un, le gouvernement a lancé à la rentrée ses Assises de la mobilité, « dans le but de préparer une loi d’orientation des mobilités ». De deux, un règlement délégué sur les « services d'informations sur les déplacements multimodaux » vient tout juste d’être publié au Journal officiel de l’Union européenne.
« Il est dorénavant indispensable d’assurer la bonne articulation entre le dispositif français et le dispositif européen », se justifie l’exécutif.
Deux nouvelles années à attendre pour que les obligations européennes s'appliquent...
S’il procède à une harmonisation des règlementations du Vieux continent, le règlement délégué 2017/1926 risque toutefois de susciter de la déception chez les « puristes » de l’Open Data. Des redevances peuvent notamment être instaurées – tant que cette compensation financière reste « raisonnable et proportionnée aux coûts légitimes encourus pour la fourniture et la diffusion des données pertinentes sur les déplacements et la circulation ». Le modèle du freemium, cher notamment à la SNCF, semble ainsi avoir de beaux jours devant lui.
Surtout, ce texte se révèle moins ambitieux que la loi Macron : il contraindra les États membres à créer un « point d'accès national », sorte de portail rassemblant les différentes données de transport, mais dont la matière première n’est pas près d’arriver... Les premières obligations (pour les données dites statiques, tels que les horaires théoriques et les arrêts) ne prévaudront qu’à partir du 1er décembre 2019, soit dans deux ans. Elles s’étofferont progressivement, notamment de données plus dynamiques, jusqu’en... 2023 !
Une start-up d’État pour lancer « transport.data.gouv.fr »
La France s’apprête toutefois à déployer assez rapidement son « point d'accès national ». Un peu avant l’été, le ministère chargé des Transports a confié à une start-up d’État (petite équipe de la Direction interministérielle du numérique) le soin de « rendre disponible, valoriser et améliorer les données de transport ».
« On voit que la loi ne fonctionne pas. Si on attend, on va perdre du temps », nous explique un acteur impliqué dans ce projet. « Du coup, on essaie de voir comment remettre les acteurs autour de la table, pour avancer. »
Dommage néanmoins que dans ce dossier-là, aucune indemnité de retard ne soit prévue pour les voyageurs...
Le gouvernement suspend le décret sur la mise en Open Data des données de transport
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Un dossier mis soigneusement au placard
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La nouvelle majorité préfère suspendre ce décret
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Deux nouvelles années à attendre pour que les obligations européennes s'appliquent...
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Une start-up d’État pour lancer « transport.data.gouv.fr »
Commentaires (28)
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Abonnez-vousLe 06/11/2017 à 09h34
C’est amusant de voir comment une loi votée l’année dernière, n’est toujours pas appliquée par le gouvernement (”Oh putain, 2 ans” comme aurait dit Les Guignols de Canal).
Le 06/11/2017 à 09h35
ha ben zut…
Faut de la neutralité mais faut aussi donner son analyse personnelle…" />
La schizophrénie n’est pas loin.
Pour te répondre sérieusement: l’article est neutre, c’est juste toi qui voit le mal là où il n’y en a pas (le coup du titre impartial est une belle blague quand même).
Attention quand même: être partisan politiquement déforme la vision du monde, ton message en est un bel exemple.
Le 06/11/2017 à 09h57
En fait, le titre est faux. Puisque l’on ne peut suspendre quelque chose qui n’existe pas encore. Il laisse donc croire à tort que l’on a suspendu des dispositions réglementaires. C’est bien de la désinformation.
Je n’ai pas demandé une analyse “personnelle” mais un regard critique. Celui-ci peut tout à fait dire que les arguments du gouvernement sont des sottises, cela ne me gênerait pas. Je suis moi-même critique sur certaines décisions de ce gouvernement, en particulier dans la loi contre le terrorisme.
Quant au manque de neutralité, je l’ai souligné uniquement dans le titre, le reste de l’article n’apportant pas grand chose sur la décision du gouvernement.
Le 06/11/2017 à 09h57
Le 06/11/2017 à 10h07
Le 06/11/2017 à 10h09
Le 06/11/2017 à 10h10
C’est assez courant en fait…
Le 06/11/2017 à 10h15
En fait c’est le même problème que celui de l’accessibilité des bâtiments aux personnes à mobilité réduite : on reporte, on reporte, et du coup rien ne se fait ou en tout cas, pas suffisamment (on a le temps. et pas les moyens, ni l’envie, ni…). c’est un cercle vieux car comme on reporte, on a le temps et donc on ne fait pas, ne budgétise pas parce qu’on a le temps et ainsi de suite.
Je sais que les implications dans les deux cas sont différentes cela dit.
Le 06/11/2017 à 10h19
Merci de ta réponse.
Par contre, est-ce que le règlement européen oblige à ne pas être plus ambitieux que lui ou est-il un niveau minimum à atteindre ?
Je comprends que l’on se pose des questions pour éviter de publier quelque chose qui serait remis en question par ce nouveau texte. Il faut au minimum étudier la compatibilité.
Le 06/11/2017 à 10h20
Le 06/11/2017 à 10h26
Ah oui, zut. Bon mais c’est aussi un vieux problème récurrents " />
Le 06/11/2017 à 10h31
Le 06/11/2017 à 10h52
C’est bien ça le problème : le marketing politique vante les lois votées, mais quand on s’intéresse au sujet, on voit bien que même le vote d’une loi peut ne pas être prise en compte par l’administration pendant des années (voire jamais).
Et on ne parle même pas de l’application des lois tant vantées (même après les décrets d’application) : il faut encore voir les budgets et la logistique (“les moyens) qui sont mis en place sur la durée et qui ne suffisent bien souvent pas (le ministère de la justice en est un parfait exemple).
Le 06/11/2017 à 11h02
Le 06/11/2017 à 11h14
« L’analyse de fond suivra quand M. Mahjoubi répondra de façon approfondie à Xavier.(et sur autre chose que les futurs css des sites officiels). »
Effectivement, c’est un peu ça le problème. Une réponse clair et précise, ça permet de calmer le journaliste et le citoyen qui se pose des questions.
Le 06/11/2017 à 12h59
C’est dans des moments comme cela que j’envie le système américain. Une action en justice peut obliger les Etats-Unis à rendre publics des dossiers contenant parfois des données sensibles.
Mais en France… c’est tout le contraire qui se passe… Et ca ne me fait pas rire. Faut-il être étonné que les opérateurs de transports publics ne soient pas motivés à l’idée de transmettre au grand public certaines données ? Elles pourraient révéler beaucoup de failles, ou plutôt de manquements, même si le grand public en a déjà connaissance par toutes les problèmes qu’il peut rencontrer.
Quand à l’Union Européenne, je vois qu’elle est très frileuse en matière d’Open data. Il ne faudra pas compter sur elle…
Ah… l’Open data… j’en reviens au début de mon commentaire. Si, aux Etats-Unis, c’est une réalité depuis le 4 juillet 1966 grâce au Freedom of Information Act, c’est encore loin d’être le cas sur le continent européen. Les espoirs des Européens, et notamment des Français, sont en train de tomber à l’eau.
Le 06/11/2017 à 14h41
Sur ma ligne SNCF transilienne, ces derniers jours, les incidents ne sont même plus (systématiquement) publiquement recensés et des trains sont purement et simplement supprimés sans même apparaître dans les différents fils de suivi d’incidents (mention : trafic normal). /My2¢
Alors l’open data, sûrement pas, ce serait catastrophique. La méthode Coué, c’est mieux. " />
Le 06/11/2017 à 15h28
La mousse qui aura été faite sur l’opendata pour au final n’aboutir à rien; là où sur les données de transports il y aurait, bien plus que dans d’autres domaines, des choses utiles à développer le tout sans avoir les difficultés liées à l’anonymisation par exemple.
Avoir les trajets, horaires, nombre de validations de tickets, positions GPS des véhicules et disponibilités des vélos/autos en commun, semblent pas le truc insurmontable si l’état met en place la plateforme hébergeant les infos, éventuellement avec un coût de licence modéré pour financer le bouzin.
Le 06/11/2017 à 18h10
C’est beau l’ignorance…
Les transporteurs sont soumis à une forte concurrence d’autres “opérateurs” pour rentabiliser les données (demandes à ton Opérateur mobile de libérer les données de géoloc… tu verras ce qu’il va te répondre). Tu serais étonné de ce qu’il en fait… tout comme ton banquier de tes achats CB :).
Les entreprises ayant besoin de ces données les payent (cher).. et je trouve ça normal. Ouvrir n’importe comment, c’est donner toute la matière première aux Big 4 pour faire encore plus de blé… sur le dos des utilisateurs et contribuables.
Je suis plutôt d’accord sur le fait d’ouvrir les données mais de limiter le nombre de requêtes possibles pour laisser les bidouilleurs et chercheurs s’amuser mais empêcher les entreprises commerciales de s’enrichir sans redistribuer / participer.
Quant au dernier paragraphe, c’est oublier totalement comment sont organisés les transports en île de France. Le prix des transports n’est pas fixé par les entreprises de transport mais par l’autorité organisatrice. Les effectifs et autres données de la RATP sont déjà publiées (chaque année… faut juste savoir se servir d’un moteur de recherche). Taper 20 lignes dans un tableur n’est pas trop compliqué.
Bref, le sujet n’est pas simple et il faut prendre connaissance de l’ensemble des paramètres avant de pouvoir prendre une position éclairée sur la question.
Le 06/11/2017 à 18h42
Pour les données non temps réel, il s’agit d’exporter en CSV le contenu partiel d’une base de données… trop dur…
Le 06/11/2017 à 20h44
“Une start-up d’Etat” " />
Bah, on peut comprendre la SNCF & Co…
Qui aimerait rendre des comptes au contribuable et etaler au grand jour son incompetence et sa totale inefficacite ?
Le 06/11/2017 à 08h29
Moonwalk.
Le 06/11/2017 à 08h33
Il y a eu un appel d’offre j’espère " />
Le 06/11/2017 à 08h36
Un moyen comme un autre serait de pouvoir couper la poire en deux et qu’a partir d’un certain nombre de requête le service deviennent payant. Car si le bousin fonctionne comme une api à un moment donné un serveur c’est loin d’être gratuit.
Sinon j’aurais aussi tendance à dire qu’avec une bonne moulinette il est déjà possible de récupérer toutes ces informations de manière automatisée pour les grandes villes et que quasiment tous les service de cartographie style google map et leur api ne sont pas gratuite ( et complexe à coder ).
Dans l’absolu ce qui serais vraiment top c’est d’avoir un historique sur 20 ans ( pour voir le prix de l’évolution d’un ticket ), des statistique sur les voyageurs et aussi du nombre d’employés.
Le 06/11/2017 à 08h46
On va encore me dire qu’il n’y a pas assez de place dans le titre, mais c’est différent de dire :
Un peu plus de neutralité serait de mise plutôt que de choisir soigneusement ses expressions !
Plutôt que la moitié de l’article à rabâcher et rappeler ce dont il s’agit, il aurait mieux valu dire si les arguments du gouvernement sont valables ou non. Il est toujours délicat d’ajuster les réglementations nationales et européennes. Donc un regard critique là-dessus aurait apporté plus à l’analyse.
Quant à la dernière phrase, comment dire ? …
Le 06/11/2017 à 08h54
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Le 06/11/2017 à 09h05
" />
Le 06/11/2017 à 09h25
C’est assez ennuyant, car j’attendais l’Open Data pour calculer l’utilisation par chemin de fer en vu des etudes de danger qu’on fait dans ma boite, ils bloquent tout le monde là " />