SpaceX : récupération loupée de la coiffe, prémices du réseau Internet mondial Starlink
Coiffe à la mer !
Le 23 février 2018 à 13h00
8 min
Sciences et espace
Sciences
Hier, SpaceX lançait avec succès le satellite PAZ. Cette mission était également l'occasion de tenter une récupération d'une partie de la coiffe, et surtout d'envoyer dans l'espace deux satellites maison. Leur mission : préparer la mise en place de la constellation Starlink, devant comprendre près de 12 000 satellites.
SpaceX profite régulièrement de ses missions commerciales pour « expérimenter » de nouvelles technologies, la plus célèbre étant sans aucun doute la récupération du premier étage afin de le recycler pour d'autres lancements par la suite. Il s'agit d'objectifs « secondaires » à la mission principale : la mise en orbite de charges utiles pour le compte de ses clients.
Après le premier étage, une récupération de la coiffe ?
Une expérimentation grandeur nature a ainsi eu lieu hier avec le lancement du satellite d'observation espagnol SEOSAR/PAZ pour le compte de HisdeSAT et INTA. Il prenait place à bord d'une fusée Falcon 9 disposant d'un premier étage recyclé de la mission FORMSAT-5 d'août 2017, sans tentative de le récupérer une nouvelle fois.
Comme nous l'avions déjà expliqué, la fusée disposait d’une nouvelle coiffe (la partie supérieure protégeant le satellite durant le décollage) qui devait être récupérée pour la réutiliser lors de nouvelles missions, afin de réduire les coûts. Si le lancement s'est parfaitement déroulé (malgré deux reports), avec une mise en orbite réussie, la mission secondaire n'a pas rencontré le succès escompté.
Lors de la diffusion en direct du lancement, la tentative d'attraper la coiffe n'a pas été évoquée. Il faut se pencher sur le compte Twitter d'Elon Musk pour avoir des détails. Le PDG explique que la coiffe disposait d'un parachute pour freiner (elle revient de l'espace à environ huit fois la vitesse du son) et guider sa chute afin qu'elle puisse être récupérée par les filets d'un bateau baptisé M. Steven.
La récupération a été manquée de « quelques centaines de mètres » ajoute Musk, précisant que le carénage était néanmoins tombé avec douceur dans l'eau et qu'il était « intact ». Le dirigeant a bon espoir de le prendre dans ses filets la prochaine fois, avec un parachute de plus grande envergure. La tentative suivante devrait avoir lieu d'ici un mois environ.
Mais la mission PAZ réserve encore d'autres surprises : la mise en orbite de Microsat-2a et Microsat-2b de SpaceX (surnommés Tintin A & B par Elon Musk). Il s'agit des premières briques du réseau Starlink (une constellation de satellites en orbite basse) censé apporter Internet haut débit à l'ensemble de la population mondiale.
Microsat-2a et Microsat-2b prenaient part au voyage
Les deux microsatellites sont identiques : ils mesurent 1,1 x 0,7 x 0,7 m pour un poids de 400 kg environ. Ils sont équipés de deux panneaux solaires de 2 x 8 m. Leur principale mission est de tester et valider le principe de fonctionnement de la constellation et de la communication avec les stations de bases au sol. Tous les détails se trouvent par ici.
S’agissant d’une charge secondaire par rapport à la mission PAZ, les deux produits SpaceX ont dû se caler sur l'orbite demandée par son client espagnol : 511 km, au lieu des 514 km dans la missive initiale de SpaceX à la FCC. Un changement « mineur » de 3 km, sans conséquence pour le reste de la mission affirme la société. Une fois les vérifications d’usage effectuées, les deux petits satellites feront route vers une altitude de 1 125 km.
First two Starlink demo satellites, called Tintin A & B, deployed and communicating to Earth stations pic.twitter.com/TfI53wHEtz
— Elon Musk (@elonmusk) 22 février 2018
Microsat-2a et Microsat-2b sont importants pour SpaceX. Ce sont les prémices de la constellation Starlink, un projet lancé en 2015 et que nous avions déjà évoqué début 2017, lors d'une importante mise à jour de son principe de fonctionnement. Pour sa part, le nom Starlink a été déposé en août dernier.
Ce nouveau projet un peu fou d’Elon Musk veut exploiter des milliers de satellites. Ils se placeront tous sur des orbites basses. Ils seront donc plus proches de la Terre, mais pas à une position fixe, contrairement aux satellites de télécommunications que l’on retrouve généralement en orbite géostationnaire à 36 000 km d'altitude.
Starlink : latence réduite, complexité augmentée
Les chiffres dévoilés dans un document envoyé à la FCC ont de quoi donner le tournis : 4 425 satellites sur pas moins de 83 orbites (de 1 110 à 1 325 km d’altitude)... mais il ne s’agit là que de la première étape.
La seconde comprend en effet 7 518 satellites, sur des orbites encore plus basses de 335 à 346 km (l’ISS se trouve aux alentours des 400 km pour rappel). Cette nuée d’engins intermédiaires serait en charge du relai des communications entre les stations de bases au sol et les satellites, et pourrait proposer un débit plus important et une latence toujours plus faible de manière plus localisée.
Le placement en orbite basse n’est pas anodin : il permet de réduire la latence. En effet, un satellite géostationnaire se trouvant à 36 000 km, la lumière met 240 ms à cette distance pour faire un aller-retour, impossible donc d’avoir une latence plus faible.
À 1 350 km (pour l’orbite la plus éloignée), ce même trajet ne dure que 9 ms, soit quasiment un rapport de 1 à 30 (proportionnel à la distance entre les différentes orbites), contre seulement 2 ms à 335 km. Un avantage très intéressant, mais assorti d’un inconvénient : le satellite n’est pas toujours à la même place, il tourne autour de la Terre comme la Station spatiale internationnale.
Afin de proposer un service de connexion à Internet, le challenge est donc de réussir à gérer et synchroniser les milliers de satellites de la constellation. Ils tournent tous autour de la Terre en deux rangées de plusieurs orbites et passent d'une station de base à une autre. Idem pour les clients qui recevront des données d'un satellite, puis d'un autre, etc.
Microsat-2a et Microsat-2b doivent permettre à SpaceX de plonger de la théorie à la pratique. Il ne s’agit évidemment que d’une première étape symbolique, mais c'est une preuve que le projet est toujours en marche.
Des inquiétudes sur les risques de collision
Selon le dernier bilan de l'UCS (Union of Concerned Scientists), la Terre comptait 1 738 satellites artificiels au 31 août 2017. Un peu plus d'un millier en orbite basse (LEO), et près de 500 en géostationnaire à 36 000 km. Autant dire que les milliers de satellites que veut ajouter SpaceX feront très rapidement grimper ce total.
Certaines voix s'élèvent d'ailleurs contre cette course à l'échalote à laquelle SpaceX n'est pas le seul à participer. Comme l'explique le MIT Technology Review, Samsung réfléchit à l'envoi de 4 600 satellites, tandis qu'une idée à 3 000 satellites trotte dans la tête de Boeing.
Il existe des règles... mais assez souples
Même s'ils sont petits, la croissance exponentielle de leur nombre posera des problèmes à l'avenir, d'autant que les règles internationales actuelles sont relativement légères. Elles sont au nombre de cinq, expliquait le CNES fin 2017 :
- L’interdiction de générer volontairement des débris dans l’espace
- La mise en œuvre de tous les moyens possibles pour éviter l’explosion en orbite
- L’interdiction de rester plus de 25 ans en orbite basse ou rester sur l’orbite géostationnaire après la fin de mission
- La mise en œuvre de tous les moyens possibles pour éviter les collisions
- La protection des populations au sol. Dans les cas où l’on ne peut éviter un retour au sol des débris, privilégier la désorbitation contrôlée dans une zone non peuplée
Le risque de collision prend de l'importance avec l'augmentation du nombre de satellites (en activité ou non), d'autant qu'un effet domino n'est pas à exclure (idée exploitée dans le film Gravity). Une collision dégage de nombreux débris, devenant à leur tour des projectiles pouvant détruire des satellites, etc. Il faut donc faire en sorte que l'espace ne devienne pas une poubelle 2.0.
L'enjeu est important pour SpaceX : selon des informations du Wall Street Journal reprises par The Verge, SpaceX prévoirait 40 millions de clients à son service Starlink en 2025, ce qui représenterait des revenus de 30 milliards de dollards cette année-là ; des informations non confirmées par SpaceX.
Le 23 février 2018 à 13h00
SpaceX : récupération loupée de la coiffe, prémices du réseau Internet mondial Starlink
-
Après le premier étage, une récupération de la coiffe ?
-
Microsat-2a et Microsat-2b prenaient part au voyage
-
Starlink : latence réduite, complexité augmentée
-
Des inquiétudes sur les risques de collision
-
Il existe des règles... mais assez souples
Commentaires (29)
Vous devez être abonné pour pouvoir commenter.
Déjà abonné ? Se connecter
Abonnez-vousLe 23/02/2018 à 13h15
#1
ça serait donc un projet un peu fou pour un résultat non garanti… y’a peut-être moyen que ça soit une bonne idée, mais c’est pas super rassurant!
Le 23/02/2018 à 13h44
#2
Merci pour les news!! " />
Le 23/02/2018 à 13h50
#3
comment on change l’orbite d’un satellite déjà lancé ? " />
J’avoue aussi qu’à chaque news de ce style je pense au bazar que ça doit être avec tous ces objets (fin de la news), bientôt il faudra un Google Maps Espace pour éviter les machins au décollage " />
Le 23/02/2018 à 13h56
#4
Disons que de mon point de vue, il est beaucoup plus simple de modifier le NEG069 pour ramener la dernière date GL (RG304), que de créer un script pour corriger les lignes existantes (via API standard et tout).
ça fait 62,5€ par mois. visiblement c’est pas la population mondiale qui va en profiter. ^^
Le 23/02/2018 à 14h03
#5
Hé be, 2 par 2 ils ne sont pas rendus les types.
Ils en ont peut-être mis quelques uns dans le coffre de la bagnole aussi.
Le 23/02/2018 à 14h03
#6
Le 23/02/2018 à 14h04
#7
Les satellites ont des petits propulseurs. Cela leur permet de corriger régulièrement leur orbite. Mais normalement, il est fait en sorte qu’ils conservent assez de carburant en fin de mission pour être désorbité. Généralement, il suffit de ralentir un peu pour entrer dans l’atmosphère et finir en étoile filante.
Sinon, pour les satellites en orbite basse, généralement ils y a toujours un peu d’atmosphère qui les ralentit.
Le 23/02/2018 à 14h06
#8
" />" />
Le 23/02/2018 à 14h36
#9
J’aurais aimé qu’ils osent appeler ça Skynet, parce que pour le coup c’est exactement ce que c’est…
Elon Musk, ce dégonflé " />
Le 23/02/2018 à 14h37
#10
Le 23/02/2018 à 14h52
#11
Le 23/02/2018 à 15h29
#12
Moi je dis petit joueur… il aurait du l’appeler SkyNet ! :)
Le 23/02/2018 à 15h37
#13
12000 + 4600 + 3000 + tous les autres satellites qui vont êtres lancé par les pays émergents ( c’est leurs droits ).
J’imagine le souk pour l’astronomie optique terrestre, sans compter les astronomes amateurs, ça va être le feux d’artifice tous les soirs.
Le 23/02/2018 à 15h51
#14
Le 23/02/2018 à 16h10
#15
Une video qu’elle est bien sur le sujet des satellites, les collisions etc… :
https://youtu.be/6UEJ7p4S1Ww
Le 23/02/2018 à 16h10
#16
Le 23/02/2018 à 16h49
#17
On est quand même sur des surfaces extrêmement grandes, et par rapport au bordel que c’est là haut à l’état naturel avec tous les débris…C’est pas 12 000 satellites en plus qui vont boucher la vue je pense " />
Mais bon, y’a du business à se faire, les éboueurs de l’espace à la Planètes seront bientôt une réalité. En plus il me semble que la JAXA a déjà étudié le sujet.
Le 23/02/2018 à 17h14
#18
@RICARD
Ah zut, je pensais qu’il y avait un guidon tout chromé comme pour les motocyclettes … " />
Le 23/02/2018 à 17h46
#19
" />
Le 23/02/2018 à 18h30
#20
Plus ou moins le cas dans Cowboy Bebop." />
Le 23/02/2018 à 21h01
#21
30 milliards / 40 millions = 750$ par client.
Le 23/02/2018 à 22h35
#22
Le 24/02/2018 à 07h13
#23
Le 25/02/2018 à 16h34
#24
Surtout si ces mêmes japonais sont dans leur petits appartements :)
Le 25/02/2018 à 20h16
#25
Est-ce Starlink sera un Internet Intergalactique nous permettant enfin de communiquer entre les différentes nations de l’Univers ?
That is the question.
" />
Le 26/02/2018 à 09h38
#26
Le 26/02/2018 à 09h48
#27
> “Ils seront donc plus proches de la Terre, mais pas à une position fixe,
contrairement aux satellites de télécommunications que l’on retrouve
généralement en orbite géostationnaire à 36 000 km d’altitude”
La phrase, mal interprétée, pourrait laisser penser qu’un satellite “à une position fixe” pourrait éventuellement se trouver sur une autre orbite qu’une orbite géostationnaire. Ce qui serait faux.
Si l’on veut qu’un satellite reste à une position apparemment fixe pour un observateur placé sur terre, alors il n’y a pas le choix :
Avec tout autre altitude, le satellite n’apparaitrait pas rester à une position fixe. Plus bas, il tournerait plus vite que la terre ; plus loin, il tournerait moins vite que la terre (exemple : la lune, placée à plus de 380 000 km, période orbitale d’environ 27 jours).
(my two cents un peu pédant ; mais j’avais envie)
Le 01/03/2018 à 15h48
#28
https://fr.wikipedia.org/wiki/Skynet_(satellite)
Opéré par Airbus Defence & Space pour les militaires britanniques. Skynet 6 est dans les cartons.
Le 01/03/2018 à 15h48
#29
https://fr.wikipedia.org/wiki/Skynet_(satellite)
Opéré par Airbus Defence & Space pour les militaires britanniques. Skynet 6 est dans les cartons.