États-Unis : des règles secrètes pour alimenter la liste noire du terrorisme
Ni « faits concrets », ni « preuves irréfutables »
Le 25 juillet 2014 à 07h00
6 min
Internet
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Le site The Intercept a publié durant la nuit un important document : 166 pages, émanant du National Counterterrorism Center, qui expliquent comment un citoyen américain ou un étranger peuvent entrer sur la liste de surveillance du terrorisme. Datant de 2013, ce document montre à quel point les conditions pour y entrer sont arbitraires.
Un guide pour désigner les personnes qui doivent être surveillées
The Intercept est un journal en ligne créé en partie par Glenn Greenwald, le premier à avoir réalisé une interview complète d’Edward Snowden, avec l’aide de Laura Poitras. Le site s’est fait une spécialité des révélations issues des documents d’Edward Snowden, mais pas seulement. Car les journalistes ont d’autres sources pour travailler sur la surveillance opérée par les agences de sécurité américaines, et sur les liens avec la cause invoquée pour l’ensemble de ces programmes : la lutte contre le terrorisme.
Malgré les avertissements du gouvernement américain, pour qui la publication d’un tel document entraînerait fatalement des dommages irréversibles (l’argument n’est pas nouveau), Jeremy Scahill et Ryan Devereaux ont décidé de publier l’intégralité d’un document important : le guide définissant qui doit être placé sous surveillance pour ses possibles implications dans le monde terroriste. 166 pages d’explications réunissant un travail fourni par 19 agences américaines, dont la NSA bien sûr, mais également le FBI, la CIA ou bien encore le Pentagone.
Une procédure floue basée sur la « suspicion raisonnable »
The Intercept donne une foule de détails sur ces pages, d’ailleurs totalement accessibles à la lecture. Mais ce que ce rapport nous apprend surtout, c’est que l’ajout d’une personne dans la liste obéit à un processus secret qui ne réclame ni « faits concrets » ni « preuves irréfutables ». Selon Scahill et Devereaux, la Maison Blanche jouit d’une « autorité unilatérale » dans ce domaine, le gouvernement pouvant placer des catégories entières de personnes sous surveillance. Or, ces dernières ne peuvent plus prendre l’avion dès qu’elles sont dans le collimateur, ce qui a donc un impact concret.
Pour The Intercept, ces 166 pages révèlent surtout « un système déconcertant et tordu, rempli d’exceptions à ses propres règles ». On retrouve ici un concept déjà abordé dans des actualités précédentes : celui de « suspicion raisonnable », quand une cible semble assez intéressante à un analyste pour qu’elle soit placée sous surveillance. Et comme nous l’avions déjà vu, les critères d’entrée peuvent se montrer particulièrement élastiques et flous, la certitude du caractère étranger pouvant se baser sur le fait que la langue utilisée dans des emails n’est pas l’anglais.
Terroristes reconnus ou suspectés, du pareil au même
La liste sert à la fois à rassembler les personnes convaincues de terrorisme et celles qui sont simplement suspectées. C’est ce que dénonce justement Hina Shamsi, qui dirige le National Security Project de l’ACLU (American Civil Liberties Union) : « Au lieu d’une liste de surveillance limitée aux terroristes connus et réels, le gouvernement a construit un vaste système, basé sur le postulat erroné et sans preuve qu’il peut prédire qu’une personne commettra un acte terroriste dans le futur. Sur la base de cette dangereuse théorie, le gouvernement place en secret les gens sur liste noire en tant que terroristes suspects, en leur donnant la mission impossible de prouver par eux-mêmes qu’ils sont innocents d’une menace qu’ils ne représentent pas ».
Que faire pour atterrir pour cette fameuse liste ? Certains critères sont évidents : le fait de poser une bombe ou de pirater une institution de l’État, l’assassinat, la prise d’otages, etc. Toute destruction, même partielle, d’une propriété de l’État, tout endommagement d’un ordinateur utilisé par une institution financière fédérale, et c’est un aller simple pour la liste noire. David Gomez, un ancien agent du FBI, parle à ce sujet de « mauvaise pente », parce que le gouvernement peut « marquer qui il veut ».
Et les conséquences pour les personnes visées peuvent être réellement problématiques, car le marquage résonne de la même manière dans les 19 agences concernées : un terroriste potentiel est considéré comme un terroriste. Non seulement la personne ne pourra plus prendre l’avion, mais elle sera potentiellement dans l’impossibilité d’obtenir un emploi, tout en étant interrogée fréquemment par les forces de l’ordre. Parfois pour la seule raison que son nom était dans le répertoire d’une personne qui était elle-même sous surveillance.
Tous les moyens sont bons
Le fonctionnement de la liste noire est d’autant plus un problème qu’elle est, comme nous l’indiquions, assujettie aux critères des analystes. Plus la surveillance informatisée augmente, plus le nombre de suspects potentiels augmente en même temps. Cette inflation se retrouve dans les chiffres publiés la semaine dernière par le gouvernement américain : en septembre 2009, il y avait 227 932 nominations pour sur la liste, un chiffre qui est passé à 250 847 en 2010, puis 336 712 en 2012, et enfin 468 749 l’année dernière. Sur ce dernier cas, The Intercept précise que seules 4 915 demandes ont été rejetées.
Et pour déclencher la surveillance active d’une personne, tous les moyens sont bons. Car les 166 pages du guide recommandent de récupérer tout ce qui peut l’être : empreintes digitales, itinéraires de voyages, pièces d’identité, licences de port d’armes, assurances santé, prescriptions médicales, toute carte comportant une bande magnétique, smartphones, adresses email, numéros de comptes bancaires, tickets de parking, clés USB, iPod, Kindle, appareils photo, jusqu’à la liste complète des livres empruntés à une bibliothèque ainsi que la condition de ces livres (jamais ouvert, annoté, neuf, ancien, etc.). Des éléments si nombreux qu'ils ne peuvent que concourir à faire grimper les chiffres.
Jeremy Scahill, dans un email envoyé au Huffington Post, explique les raisons qui ont poussé à la publication du guide complet : « Ce système se moque totalement du concept même de procédure officielle et du droit de faire face à votre accusateur. Le gouvernement ne vous dira pas si vous êtes sur la liste, mais il partagera son étiquette de « Terroriste reconnu ou suspect » avec d’autres gouvernements et des prestataires privés. Ces politiques font qu’il vous est presque impossible de contester cette désignation ».
États-Unis : des règles secrètes pour alimenter la liste noire du terrorisme
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Un guide pour désigner les personnes qui doivent être surveillées
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Une procédure floue basée sur la « suspicion raisonnable »
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Terroristes reconnus ou suspectés, du pareil au même
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Tous les moyens sont bons
Commentaires (40)
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Abonnez-vousLe 25/07/2014 à 07h34
Le 25/07/2014 à 07h51
Les terroristes, ce ne sont pas ceux qui font des règles secrètes ? " />
Le 25/07/2014 à 08h00
Le 25/07/2014 à 08h04
« Au lieu d’une liste de surveillance limitée aux terroristes connus et réels, le gouvernement a construit un vaste système, basé sur le postulat erroné et sans preuve qu’il peut prédire qu’une personne commettra un acte terroriste dans le futur. Sur la base de cette dangereuse théorie, le gouvernement place en secret les gens sur liste noire en tant que terroristes suspects, en leur donnant la mission impossible de prouver par eux-mêmes qu’ils sont innocents d’une menace qu’ils ne représentent pas ».
YEAAAAAHH, no limits " />
Le 25/07/2014 à 08h04
Le 25/07/2014 à 08h12
Le 25/07/2014 à 08h19
Le 25/07/2014 à 08h22
Comme ca m’étonne de leur part … " />
Envoyer un mail disant que l’on va faire sauter la maison blanche et on est inscrit sur cette liste ? " />
Le 25/07/2014 à 08h26
Le 25/07/2014 à 08h34
Le 25/07/2014 à 09h15
il manque des trucs, il n’y a rien sur les pirates, ou les dangereux présumés terroristes qui lisent linux journal et téléchargent Tail et Truecrypt.
Ça peut être utile pour savoir si on aura le droit de revenir des US en avion.
Le 25/07/2014 à 09h16
Le 25/07/2014 à 09h38
Un petit “M-x spook” et hop, on peut faire partit d’un club très select. :P
Le 25/07/2014 à 10h25
la certitude du caractère étranger pouvant se baser sur le fait que la langue utilisée dans des emails n’est pas l’anglais.
argh " /> Je suis terroriste.
Le 25/07/2014 à 10h35
Barack Obama 44e empereur des États-Unis " />
Le 25/07/2014 à 12h30
Le 25/07/2014 à 07h11
" />
Finalement, j’aurai peut-être pas du envoyer cet email bourré de mots clés y a quelques années quand j’ai entendu parler d’Echelon pour la 1ère fois…
Le 25/07/2014 à 07h16
Si vous voulez télécharger le PDF:
https://s3.amazonaws.com/s3.documentcloud.org/documents/1227228/2013-watchlist-g…
Bon, je suis dorénavant un terroriste :P
Le 25/07/2014 à 07h16
Quelle bande de paranoïaques " />
Le 25/07/2014 à 07h19
C’est beau l’Amérique !!!! Même Sardou commence à s’inquiéter … si si
Enfin chez nous en France, nous avons un slogan qui nous tranquillise et nous permet de dormir sur nos deux oreilles ….
Liberté Égalité Fraternité " />
Le 25/07/2014 à 07h21
Le 25/07/2014 à 07h24
Ah tout s’explique.
Donc, un type du Hamas a balancé une roquette sur Tel Aviv.
Il a ensuite téléphoné à son cousin pour lui demander à quelle heure ouvrait le cinéma. au cinéma ils ont payé le parking Vinci et les tickets avec leur carte bancaire Visa.
Le fils du cousin a ensuite tweeté à un copain que le film était bien, et que la salle était bien insonorisée, et que le bruit des bombes et des roquettes était bien étouffé.
Le lendemain le copain va à l’école.
Les USA, qui ont bien entendu tout enregistré, ont classé le copain du fils du cousin du lanceur de roquettes comme terroriste potentiel, et ont transmis immédiatement l’info à Israël (et leurs autres alliés).
Le missile sur l’école n’était donc pas une erreur.
Le 25/07/2014 à 07h25
tout endommagement d’un ordinateur utilisé par une institution financière fédérale
Oh " /> tous les fonctionnaires qui renversent leur café sur le clavier !
Le 25/07/2014 à 07h27
en septembre 2009, il y avait 227 932 nominations pour sur la liste, un chiffre qui est passé à 250 847 en 2010, puis 336 712 en 2012, et enfin 468 749 l’année dernière
C’est le nombre de nomination par an ou le cumul ?
Parce que si c’est par an, il y a l’équivalent des populations de Marseille et Lyon qui sont devenus terroristes depuis 2009 " />" />
Il serait temps de rappeler au peuple américain les vertus du second amendement de leur constitution " />
Le 25/07/2014 à 07h32
Le 25/07/2014 à 07h34
tous ceux qui post sur se sujet sont des terroristes ou extremiste sutout ceux qui postent pas en anglais ….
ça explique pourquoi dans les series americaine il y a de si nombreux terroristes (si il se fait à cette liste ….)
Le 25/07/2014 à 12h35
Le 25/07/2014 à 13h25
en fait les 468 749 terroristes potentiels sont soit les barbus qui fréquentent des forums informatiques soit les arabes qui ont internet…
Modifié le 09/12/2024 à 20h32
Le 25/07/2014 à 13h58
Le 25/07/2014 à 13h59
Je vois déjà des petits malins créer le prochain virus informatique.
Les PC infectés enverront des E-Mails avec les mots bombe, etc …, pour essayer de saturer cette base de données.
En tout cas, si la liste continue à s’allonger à cette vitesse, plus aucun ricains ne pourra sortir du pays ou y retourner.
Le 25/07/2014 à 16h55
Le 25/07/2014 à 19h11
C’est comme sur le crash du MH17 quoi, pas besoin de preuve.
Le 25/07/2014 à 19h13
Le 25/07/2014 à 19h25
Le 25/07/2014 à 20h06
Cela doit faire un bon paquet d’ Archibald Buttle suspecté de terrorisme pour rien…
Le 26/07/2014 à 08h02
Le 26/07/2014 à 11h37
Le 26/07/2014 à 15h47
http://s3.documentcloud.org/documents/1227228/2013-watchlist-guidance.pdf
https://firstlook.org/theintercept/article/2014/07/23/blacklisted/
Le 28/07/2014 à 20h50
http://www.2012un-nouveau-paradigme.com/2014/07/quand-l-europe-contourne-la-loi-pour-s-offrir-les-services-de-la-nsa.html
27 Juillet 2014 - Aux Pays-Bas, un tribunal a jugé qu’il était légal pour l’Etat de recevoir de la part de la NSA des données qu’il n’aurait pas pu collecter lui-même légalement au regard des règles locales de protection de la vie privée.
Quasiment dès que l’affaire des écoutes de la NSA a explosé, en juin 2013, nous avions expliqué que les Français étaients concernés au premier chef, du fait des accords de coopération internationale en matière de lutte contre le terrorisme. Ainsi dès 2004, un rapport parlementaire avait constaté que les Etats-Unis « ont des capacités en matière de renseignement technique qui sont sans commune mesure avec celles des Européens« , mais que « le partage des renseignements « captés » par les capacités techniques américaines (…) semble très satisfaisant« .
Dit autrement, et en forçant à peine le trait ; la NSA n’a pas le droit d’espionner les Américains sur son propre sol, les Européens n’ont pas le droit d’espionner les Européens sur leur propre sol… mais chacun a le droit d’envoyer à l’autre les informations qui les intéressent. D’où les réactions relativement timides (voir déconcertantes) des pouvoirs publics européens contre la NSA, qui ne visent pas seulement pas à dissimuler le fait que les Européens ont aussi leurs programmes de surveillance. L’Europe a un intérêt direct à ce que la NSA surveille pour elle ses propres concitoyens.
C’est toute l’hypocrisie résumée dans une décision de justice d’un tribunal de La Haye, aux Pays-Bas. Selon ITWorld, la justice néerlandaise a jugé que le gouvernement des Pays-Bas pouvait en toute légalité obtenir de la part de la NSA des informations qu’il n’aurait pas pu collecter lui-même légalement.
Les USA présumés respectueux des droits
Plusieurs parties civiles, des avocats, des associations de protection de la vie privée et des journalistes avaient porté plainte contre l’Etat néerlandais, en demandant que les agences de renseignement du pays, AIVD et MIVD, ne puissent plus obtenir par coopération internationales des informations qui ont été collectées sans respecter les règles européennes et néerlandaises de protection de la vie privée.
Mais le tribunal a jugé que cette coopération était légale, et qu’elle permettait au gouvernement d’obtenir des données collectées en vertu du droit américain, lequel est réputé respecter lui-même les conventions internationales de protection des droits de l’Homme. Prière de ne pas rire.
Pire, la cour aurait jugé que la réception de données collectées « en masse » était plus respectueuse des droits de l’homme que si ces données étaient envoyées en visant spécifiquement certains individus. Un jugement jugé « incompréhensible » par les plaignants, qui ont déjà annoncé leur intention de faire appel.
Source : Numérama
Rédigé par David Jarry - Webmaster
Publié dans #Nouvel ordre mondial
http://www.2012un-nouveau-paradigme.com/tag/nouvel%20ordre%20mondial