La Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) a autorisé au début du mois l’URSSAF d’Ile-de-France à procéder à différents recoupements de données relatives aux employeurs ayant déjà eu des démêlés judiciaires pour des problèmes de travail illégal. Une solution qui semble aujourd’hui de plus en plus privilégiée par l’administration afin de lutter contre les fraudes en tout genre.
Afin de verser à l’État les différentes charges qui servent ensuite à alimenter la Sécurité sociale, l’Assurance chômage, ou bien encore les Allocations familiales, de nombreux employeurs français cotisent aujourd’hui auprès de l’URSSAF. Mais alors que la lutte contre la fraude apparaît de plus en plus comme une priorité, l’URSSAF d’Ile-de-France a demandé en 2008 à la CNIL de mettre en place, à titre expérimental, un traitement automatisé de données visant à prévenir et mieux détecter les tricheurs. Chose qu’a acceptée une première fois l’institution, avant de consentir il y a quelques jours à pérenniser le dispositif.
Au travers d’une délibération en date du 3 juillet dernier et mise récemment en ligne sur Légifrance (voir ici), la CNIL a en effet autorisé ce même établissement à généraliser ce système fonctionnant grâce au recoupement de nombreuses données. « Le dispositif mis en place par l’URSSAF consiste, dans un premier temps, à collecter des données à caractère personnel relatives aux personnes physiques dirigeants d’entreprises ayant fait l’objet d’un procès-verbal d’infraction ou d’une condamnation pénale pour infractions telles que le travail illégal, l’établissement de fausses déclarations de paiement des cotisations, ainsi que de condamnations civiles comme l’interdiction de gérer et la faillite personnelle », explique tout d’abord la Commission. « Ces données sont ensuite rapprochées de celles du fichier des entreprises nouvellement immatriculées sur la base du nom et du prénom des dirigeants, de leur date et lieu de naissance, et le cas échéant, de leur adresse professionnelle et personnelle. »
Une fois ces données réunies par l’URSSAF, l’organisme confie à sa cellule spécialisée dans la lutte contre la fraude le soin de constituer, suite à « une analyse au cas par cas », un fichier des employeurs « présentant un profil à risque ». Il s’agit en quelque sorte d’un grand répertoire susceptible d’aiguiller plus rapidement l’attention de ses services, par exemple en vue d’un contrôle...
Pour mieux vanter le dispositif auprès de la CNIL, l’établissement francilien a d’ailleurs fourni quelques chiffres relatifs aux deux dernières années d’expérimentation (2011-2013). Ainsi, on apprend que suite au traitement de « données relatives à 21 569 entreprises et 8 913 personnes physiques ayant fait l’objet d’un procès verbal de travail illégal, d’un faillite personnelle ou d’un interdiction de gérer » au 22 mars 2013, l’URSSAF d’Ile-de-France a constaté que 75 % des personnes répertoriées étaient à la tête d’une ou deux entreprises, voire davantage encore pour le dernier quart restant. « Une centaine de dirigeants gèrent plus de vingt entreprises, l’un deux se trouvant même responsable de quatre-vingts sociétés » est-il précisé.
Le recoupement de données, arme privilégiée contre la fraude
D’une manière plus générale, force est de constater que les services de l’État disposent de plus en plus d’outils pour croiser les différentes données et ainsi mieux lutter contre la fraude. La ministre de la Santé, Marisol Touraine, le clamait d’ailleurs haut et fort le mois dernier en réponse à la question écrite d’un parlementaire qui l’interrogeait à propos des prestations sociales :
« Les caisses d'allocations familiales (CAF) ont vu leurs actions de contrôle gagner en efficacité grâce au renforcement des outils juridiques et au développement des échanges d'informations avec l'administration fiscale et les autres organismes sociaux. Les CAF disposent de moyens d'investigation plus performants, tels que le droit de communication auprès de tiers - établissements financiers et opérateurs de téléphonie. Enfin, les CAF ont accès au fichier des comptes bancaires (FICOBA), au répertoire national des bénéficiaires (RNB) et peuvent s'appuyer sur le répertoire national commun de la protection sociale (RNCPS) pour procéder à des croisements de données ».
Bercy procède également à des croisements de ce type, par exemple pour épingler ceux qui ne paient pas leur redevance télé (voir notre article).
Sachez enfin qu’en matière de condamnations pour travail au noir, la loi du 10 juillet dernier « contre la concurrence sociale déloyale » va permettre aux juges d’inscrire les entreprises reconnues coupables de travail illégal (prêt illicite de main d’œuvre, travail dissimulé, marchandage, emploi d’étrangers sans titre de travail, fraudes aux revenus complémentaires) sur une sorte de « liste noire » qui sera diffusée sur un site dédié. Cette mise à l’index, qui pourra être prononcée pour une durée maximale de deux ans, attend cependant qu’un décret en Conseil d’État vienne en préciser ses modalités.
Commentaires (30)
Le lobbying de “Commentaire Supprimé” a fini par payer.
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Enfin !!!
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si en plus ils interdisent à chaque assurré de ne plus avoir 18 apendicites comme cela est déja arrivé, on pourra peut-être moin payer d’impots ?
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quoique …
Dites, c’est pas pile pour cette raison que la CNIL avait été créée ?
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En même temps, devoir demander l’autorisation de la CNIL pour ce genre de choses, c’est une perte considérable de temps et d’argent pour des conneries.
6 ans pour voir un truc pareil se pérenniser, c’est vraiment n’importe quoi.
ainsi que de condamnations civiles comme l’interdiction de gérer et la faillite personnelle
…?? Pourquoi ??
si la personne, le chef d’entreprise, paye ces fameuses extortions cotisations
le reste c’est au tribunal administratif ou au tribunal de commerce de prendre/rendre une decision ..??
Bonne chose, les fraudes sont le cancer des comptes publics.
quatre-vingts sociétés
Ce qui m’étonne c’est que ca a pas été déjà fait !
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sympa la présomption de récidive… combien te temps les recoupments sont possibles?
méfiance car partant d’une bonne intention le procédé est dangereux
car si il s’agit de marquer au fer rouge une personne à vie, on interdit le droit à l’erreur
je me demande combien d’entre vous n’a jamais fait aucune erreur quelle qu’elle soit et si il souhaiterais être surveillé à vie au motif d’être un futur récidiviste potentiel
scénario: tu t’es fait chopé avec du shit sur toi pour un contôle de routine? Donc fouille systématique à chaque fois que tu passe pres d’un policier car tu es “un profil a risque” avec inscription de ton nom sur un site de personnes à risque, (nickel pour une recherche de CV)
autant un regroupement pour les peines en cours je comprends, mais pour des peines ayant été purgées j’ai du mal
Si c’est contre la fraude, j’adhère entièrement à l’idée.
Une centaine de dirigeants gèrent plus de vingt entreprises, l’un deux se trouvant même responsable de quatre-vingts sociétés
On arrête pourtant pas de nous expliquer que c’est un travail monstre d’en diriger une seule…va comprendre.
Bien.
Il reste plus qu’à embaucher 50 000 contrôleurs URSAFF/SS/Fisc, sévériser violemment les sanctions et on finira peut-être par tuer la fraude.
Et alors on verra peut-être que bon nombre de lois/taxes/impôts sont inutiles.
Plus qu’à tirer sur la corde … .
Mais vous êtes des extrémistes ou quoi ?
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Ils expliquent qu’après avoir regardé les fausses factures, les mensonges,les procès verbaux d’infraction les condamanations pénales,les infractions au travail illégal, les fausses déclarations de paiements de cotisations,les condamanation du droit d’exercer etc …
ils feront une étude je cite:
« une analyse au cas par cas »
Alors le mec qui a merdé dans son budget d’internet café à 20 ans , va quand même réussir à se relancer à 40 ans
faut pas exagérer quand même
Cela peut aussi s’appliquer aux détournements de fonds publics, caisses noires, dessous de table des politiques ? Ah non ? Dommage…