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Les disquettes font de la résistance dans des systèmes critiques

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Les disquettes font de la résistance dans des systèmes critiques

À San Francisco, la San Francisco Municipal Transportation Agency va débourser 212 millions de dollars pour se moderniser et se débarrasser des disquettes de 5,25 pouces. La lutte contre ce système de stockage du siècle dernier est menée un peu partout dans le monde : du Japon qui annonce avoir gagné sa « guerre », à la dissuasion nucléaire américaine, en passant par des frégates allemandes.

Le 25 octobre à 13h55

On ne pouvait pas passer à côté de cette actualité sans un petit rappel historique. La première disquette remonte au début des années 70, il y a donc maintenant plus de 50 ans.

Des bandes perforées aux bandes magnétiques

Son invention remonte à la fin des années 60 quand « une petite équipe d’ingénieurs sous la direction de David L. Noble a commencé à développer un système fiable et peu coûteux pour charger des instructions et installer des mises à jour logicielles dans les ordinateurs », explique IBM.

Le disque dur existant déjà, puisque le premier HDD associé à un ordinateur fut créé en 1956 et vendu l’année suivante, c’est une autre histoire que nous avons déjà longuement détaillée. Mais ils étaient très imposants et ne permettaient pas d’échanger des données ou de récupérer des mises à jour. Une autre solution existait déjà : de « nombreuses personnes utilisaient encore des cartes perforées en papier pour la saisie de données et la programmation de logiciels », rappelle IBM.

La première idée était de passer d’une bande perforée à une bande magnétique, mais le projet « Minnow » est venu changer la donne. L’équipe « a opté pour un disque souple en Mylar recouvert d’un matériau magnétique qui pouvait être inséré dans une fente d’un lecteur de disque pour ensuite tourner sur un axe ». Bref, la disquette était née en somme.

De 8 à 5,25 pouces dans les années 70

Un mécanisme de protection contre la poussière a été ajouté rapidement afin de protéger la partie magnétique. « IBM a commencé à vendre des lecteurs de disquettes en 1971 et a reçu des brevets américains pour le lecteur et la disquette en 1972 », ajoute l’entreprise. Comme souvent en pareille situation, Warren L. Dalziel (décrit par IBM comme l’inventeur principal du lecteur de disquette), n’avait pas prévu un tel engouement pour ce système de sauvegarde des données.

La première disquette était une version de 8 pouces (20,32 cm) et avait une capacité de 3 000 cartes perforées. Les disquettes de 5,25 pouces (13,34 cm) sont arrivées la même décennie : « En 1976, Jim Adkisson, un ingénieur de Shugart, déjeune avec un client qui se plaint que le lecteur de disquette de 8 pouces est trop grand pour l'ordinateur personnel. Lorsque Jim Adkisson lui demande quelle taille devrait avoir le lecteur, le client lui montre une serviette sur la table et lui répond : "À peu près cette taille". Adkisson revient au laboratoire de Shugart avec la serviette et conçoit le lecteur de disquette de 5,25 pouces », avec une capacité de 110 ko, explique Steven Schoenherr dans The History of Magnetic Recording.

Les disquettes de 3,5 pouces dans les années 80

La génération d'après est arrivée dans les années 80. Elle laisse le côté souple de son emballage pour passer à du plastique plus résistant. Plus compacte aussi, la disquette mesure alors 3,5 pouces. C’est le dernier format à connaitre un énorme succès. Il y a bien eu d’autres tentatives, notamment avec des modèles de 2,8 pouces, mais rien de probant. Les clés USB sont venues reléguer les disquettes dans des musées… du moins pour le grand public.

Avec l’avènement de l’informatique et des ordinateurs, les institutions et les gouvernements ont rapidement compris l’intérêt de la transition numérique pour certains de leurs services. Ils sont passés aux ordinateurs et ont développé des systèmes à partir de ce qui existait alors… des disquettes. Le Japon, par exemple, était embêté car le mot disquette est parfois écrit dans ses textes officiels (nous allons y revenir).

Quand les ordres de lancement nucléaire passent des disquettes aux SSD

Partant du principe que « si ça marche, on ne touche pas », les systèmes sont restés en place parfois pendant plusieurs décennies. Les exemples ne manquent pas. C’est en 2019 seulement, par exemple, que l’armée américaine s’est débarrassé des disquettes de 8". Le Strategic Automated Command and Control System (SACCS) est alors passé à une « solution de stockage numérique hautement sécurisé SSD » pour des ordres de lancement nucléaire.

Dans le domaine militaire, la vieillesse n’est pas toujours un problème, parfois, ce serait même un avantage : « Vous ne pouvez pas pirater quelque chose qui n'a pas d'adresse IP. C'est un système tout à fait unique – il est vieux, mais très fiable » affirmait le lieutenant-colonel Jason Rossi.

Des émulateurs de disquettes pour des frégates allemandes ?

Les États-Unis ne sont pas les seuls. Cet été, nous apprenions que la Marine allemande cherchait à remplacer son système de disquettes, principalement pour les frégates de classe F123 Brandebourg mises en service dans le milieu des années 90.

« Le remplacement du système de disquettes ne sera pas une tâche facile. Ces disquettes contrôlent à peu près tout sur les vaisseaux, des systèmes de circulation d’air à la production d’énergie », explique Engadget. Selon Tom’s Hardware, qui se base sur des blogs allemands, l’appel d’offre expliquerait qu’il s’agit de laisser les disquettes pour passer à… des émulateurs de disquettes.

Après deux ans de lutte, le Japon gagne « sa guerre » contre les disquettes

Cette année, c’est le Japon qui annonçait fièrement avoir gagné sa « guerre » contre les disquettes, une bataille lancée deux ans auparavant pour supprimer les « CD-ROM » et les « disquettes » des textes officiels. L’annonce a été faite fin août par Taro Kono (ministre du Numérique) expliquait avoir « supprimé 1 034 réglementations régissant l’utilisation [des disquettes], à l'exception d'une restriction environnementale liée au recyclage des véhicules ».

À San Francisco, des disquettes pour charger le DOS dans les transports

Aujourd’hui, on apprend que le conseil d’administration du San Francisco Municipal Transportation Agency (SFMTA) va dépenser 212 millions de dollars pour mettre fin aux disquettes. Le système « utilise trois disquettes pour charger le logiciel DOS qui contrôle les serveurs centraux », explique Michael Roccaforte, porte-parole de la SFMTA, comme le rapporte Ars Technica.

Pourquoi une telle somme pour trois disquettes ? Le contrat de 212 millions de dollars comprend aussi « des services de maintenance d’Hitachi pour "20 à 25 ans" », ajoutent nos confrères. Il s’agit donc de la transition et du suivi pendant presque un quart de siècle.

Le montant de la mise à jour globale du système est encore plus élevé. La SFMTA prévoit, en effet, de dépenser 700 millions de dollars pour réviser l’ensemble de son système, notamment le remplacement de câbles qui sont fragiles et avec « moins de bande passante qu’un vieux modem RTC AOL ». Il faut également remplacer des ordinateurs, des serveurs… La date de fin des travaux est prévue pour 2033 ou 2034.

Des disquettes dans des Boeing 747 - 400

Et n’allez pas croire que les disquettes de 3,5 pouces ne sont pas concernées et que tout était déjà prévu à cette époque. The Register se faisait l’écho en 2020 d’une découverte de chercheurs en cybersécurité : « des Boeing 747 - 400 utilisent toujours des disquettes pour charger des bases de données critiques pour la navigation ».

Voici quelques exemples parmi certainement tant d’autres. Si vous en avez, n’hésitez pas à les partager avec la communauté dans les commentaires !

Commentaires (35)

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Alors c'est pas un exemple, mais ce qu'un prof d'informatique qui enseigne en licence m'a raconté il y a qqes années : il avait montré une disquette 3.5 à ses élèves, réaction de l'un d'entre eux "trop bien, vous avez fait une impression 3D du logo Enregistrer" :-D:-D
Cet élève est passé très près d'une punition pour raison de "coup de vieux" !

Une autre remarque, sur l'époque qui a bien trop changé, un déjeuner, une idée de concept, une réalisation dans la foulée par une personne. A notre époque faudrait que l'idée passe x comités de validation, puis une équipe de 12 personnes chacune spécialisé dans son domaine aurait proposé quelque chose 6 mois après.
Je noircis le tableau, mais vous voyez l'idée.
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Pour ton dernier point et les 6 mois d'attente après passage par "x" comités ... Il faut dire que la technologie partait de zéro, elle était aussi techniquement plus "simple" à mettre en place (même si déjà complexe). Maintenant, nous sommes arrivés à un point ou le moindre développement demande de la R&D (donc plus d'argent) ainsi que prendre en compte l'existant etc
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Floppy disks are like Jesus, they died to become the icon of saving
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Mode :troll:

des Boeing 747 - 400 utilisent toujours des disquettes pour charger des bases de données critiques pour la navigation


Vu la fiabilité des disquettes on comprend pourquoi des avions se casse la gueule !


:pastaper:
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Si j'ai bien suivi, avec Boing pas besoin de disquette pour être instable, même les rivets et les portes se barrent de l'avion en vol :troll:
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Ah, les fameux rivets pop ...
--> []
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En voyant l'intérieur du cockpit, j'ai eu l'odeur du mégot froid dans le nez tellement c'est rétro.
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Et pourtant, c'est la version moderne des 747. Dans les premiers, il n'y avait pas d'écrans.
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Le passage par des émulateurs de disquette ne me choque pas plus que çà... La solution est simple à mettre en place sans devoir changer toute l'infrastructure.
Un ptit Gotek et une clé usb et hop c'est reparti
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J'ai fait acheter ça récemment (plus en préventif qu'autre chose). Des machines industrielles un peu vielles mais qui font encore le boulot (un 486 en l'occurrence)
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Et en gardant le format, y'a eu le LS120. Y'a aussi eu les ZIP. Je suppose que leur succès moyen (oe tout le monde n'avait pas de ZIP ou de LS120 à l'époque) était lié au prix.
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j'en avait un de ZIP100 !
de mémoire, les premiers étaient chiants ET galère à installer car ils utilisaient le port COM (la version USB était sortie bien plus tard), et en général, les PC n'avaient qu'un seul port COM, souvent utilisé pour le scanner (et le port LPT pour l'imprimante)
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Le mien se branchait sur le port parallèle de mémoire. Mais je peux me gourrer.
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oui, port parallèle, pardon (dans tout les cas, série comme parallèle, les 2 étaient désignés comme ports COM sur le PC)
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Non, port LPT pour l'imprimante. Les ports COM étaient des ports série.
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my bad, j'ai mélangé les formats DB25 et CN36 et en avait fait 2 ports différents :x
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Et tu mélanges toujours, les ports parallèle c'était du DB25 côté PC et du CN36 côté imprimante, mais c'est le même port, le câble faisant la conversion.

Pour compliquer le tout, il y a aussi eu des ports séries en DB25, avec des adaptateurs DB25 vers DB9. Bon on était sur la fin du port série DB25 quand j'ai commencé à m'intéresser à l'informatique, quasiment tout était déjà en DB9 alors j'ai pas trop connu.

En DB25 restait plus que les ports parallèles qui n'ont fini par disparaître que dans les années 2000 avec l'adoption en masse de l'USB (qui est un port série d'ailleurs, comme le SATA qui a remplacé l'IDE parallèle, et le PCIe qui a remplacé le PCI parallèle). Après cette "sérialisation" générale il y a maintenant une tendance récente à "reparalléliser" les ports.
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J'en avais un qui se branchait sur le port SCSI avec la carte contrôleur qui allait avec. Une belle petite galère à installer quand même... Puis un autre - un peu plus tard - qui se connectait en USB.

Est-ce que des entreprises ont utilisé ce support ? Car rétrospectivement, je trouve que ce n'était vraiment pas fiable, bien pire que les disquettes 3"1/2. Donc je comprends tout à fait la longévité de ces dernières...
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Mon lecteur ZIP100 est en pata et je ne peux plus m'en servir car les convertisseurs SATA vers PATA ne gèrent pas ATAPI. Mais il fonctionnait encore bien en 2019.
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Oui plutôt le port LPT car débit bien meilleur.
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Je confirme! En 2004, je me retrouve au travail avec un lecteur zip Iomega, et des disquettes de 750 mb!! Comparé au cd réinscriptible, je trouvais ça génial, et je voulais en prendre un pour moi… Jusqu'à ce que je vois le prix!
D'ailleurs, ce lecteur doit toujours trainer au fond d'un des tiroirs de mon bureau, avec également un lecteur de disque Iomega REV! :-D
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Le REV n'avait plus grand chose à voire avec les disquettes :)
35 Go (j'ai eu la 1ère version) pour les backups c'était le... Rêve ;) Un peu cher mais largement plus abordable qu'un lecteur de bande. J'ai lu des commentaires sur divers soucis, jamais eu avec les miens.
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J'en ai parlé car il traine dans un de mes tiroirs avec le lecteur zip 750...
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On a beaucoup utilisé les format zip et Jaz pour l'édition & PAO vu leur capacité de stockage (et je ne parle pas de la lenteur) mais l'arrivé des clefs usb les a condamné.
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110ko les 1ères 5"1/4?
pas 360ko (et 1.2Mo en double densité)?
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Oui, 110. Mais elles n'ont pas duré longtemps, vite remplacées par les 160 puis les 360 et 1,2Mo.
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Poke l’équipe de Next
J’ai envoyé un mail y’a deux semaines mais ça commence à faire long… et cet article m’intéresse terriblement
Mon abonnement a prix réduit s’est terminé plus tôt que la normale, vous pouvez vérifier ? Thanks!
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Hello !
Je n'ai pas eu ton mail mais je t'envoie un mail depuis mon adresse dans un instant :)
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Dans l'industrie, les disquettes sont encore bien utilisées : sauvegrades de paramètres de production sur les machines. Même si les récentes (2016) possèdent un disque ou une carte sd en interne.
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J'ai toujours un lecteur et des disquettes de boot, et le son dans les oreilles 😍
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Le nucléaire en France fonctionne encore avec de la disquette.
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C'est a cause de ça le retard pour l'EPR, ils ne trouvaient plus de lecteur de disquette a brancher dedans :D
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J'en ai un, je dois pouvoir les dépanner alors... chèrement ! :D

En fait je l'ai toujours pour une raison bête, c'est que j'ai plus le cache assorti à mon boîtier pour mettre à la place et je veux pas me retrouver avec un trou. Et hormis ça mon boîtier me convient très bien, j'ai pas envie de le changer.
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J’avais le même problème et j’ai trouvé une autre solution : le remplacer par un lecteur multi-cartes (CompactFlash, SD/micro-SD, MemoryStick, ExtremeDigital, SIM, SmartCard) avec en prime un port USB en façade (ça se branche sur un port USB interne sur la carte-mère).

MemoryStick et ExtremeDigital (je ne connaissais même pas ce dernier format) ne m’ont jamais servi mais de manière générale, ç’a plus de chance de dépanner qu’un lecteur de disquettes.
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Je ne vois que 4 tranche nucléaires susceptibles de reccourir à des disquettes pour la partie contrôle commande ou la sûreté. Pas de quoi en faire une généralité.

Les disquettes font de la résistance dans des systèmes critiques

  • Des bandes perforées aux bandes magnétiques

  • De 8 à 5,25 pouces dans les années 70

  • Les disquettes de 3,5 pouces dans les années 80

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  • Après deux ans de lutte, le Japon gagne « sa guerre » contre les disquettes

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