[Édito] Apple entre greenwashing et renouvellement à marche forcée
It’s Greenwashingtime
D’une main, Apple promet une neutralité carbone sur l’ensemble de son empreinte en 2030. De l’autre, elle organise inlassablement chaque année une conférence de rentrée pour lancer de nouveaux iPhone, avec une gamme qui se resserre et des nouveautés qui s’amenuisent.
Le 16 septembre à 17h22
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Il y a tout juste une semaine, Apple a dévoilé ses nouveautés de la rentrée avec sa montre Watch Series 10, des AirPods 4 et bien évidemment les iPhone 16. Réglée comme du papier à musique, la marque sort au moins un nouveau modèle chaque année, sans parler des déclinaisons « Plus », « Pro », « Max », etc.
Le premier iPhone date de 2007. Depuis, il ne se passe pas une année sans un nouveau smartphone. iPhone 3G en 2008, 3GS en 2009, 4 en 2010, 4 s en 2011, 5 en 2012, 5c et 5 s en 2013, 6 (Plus) en 2014, 6 s (Plus) en 2015, 7 (Plus) en 2016, 8 (Plus) et X en 2017, XS (Max) et XR en 2018, la série des iPhone 11 en 2019, 12 en 2020, 13 en 2021, 14 en 2022, 15 en 2023 et enfin 16 cette année.
Et la suite ? « On s'autorise à penser dans les milieux autorisés » qu’un nouvel iPhone serait en préparation. Bien vu Sherlock ! Allez, prenons les paris : un iPhone 17, à la rentrée 2025 ?
Les iPhone 16 sont là, mais…
À la rédaction, le sentiment après la conférence était mitigé. On pourrait le résumer en trois mots : « oui, ok… bof ». Les nouveaux iPhone 16 et 16 Pro ne sont pas une révolution par rapport à la génération précédente, loin de là. Il s’agit surtout de la première génération à prendre en charge Apple Intelligence… qui n’est pas encore disponible et n’arrivera pas avant plusieurs mois en France.
Ce manque de nouveauté est d’autant plus visible avec les iPhone 15 Pro et Pro Max qui, pour rappel, auront aussi droit à Apple Intelligence. Les iPhone 16 Pro et Pro Max ont donc un écran un tout petit peu plus grand (0,2") et un bouton physique dédié à la photo comme « grosses » nouveautés. Quelques améliorations sur la partie photo, l’autonomie… Mais rien de révolutionnaire, c’est sûr.
Avec les iPhone 16 et 16 Plus, Apple resynchronise sa génération de puces avec les smartphones : A18 pour tous les iPhone 16, avec A18 Pro pour les iPhone 16 Pro. Nous avons déjà longuement détaillé les caractéristiques techniques. Depuis quelques années, les iPhone « n+1 » utilisent la puce des iPhone « n » Pro. Les iPhone 16 et 16 Plus se mettent donc à jour sur le NPU (35 TOPS) et la mémoire (8 Go).
On note aussi un resserrement de la gamme, avec des iPhone 16, 16 Plus, 16 Pro et 16 Pro Max alignés en termes de mémoire vive : 8 Go, pour profiter d’Apple Intelligence. Le bouton physique n’est pas la chasse gardée des modèles Pro, on le retrouve sur toute la gamme.
Bref, on a l’impression d’avoir des iPhone 16 et 16 Plus avec des limitations de plus en plus difficiles à comprendre en 2024 (écran 60 Hz, USB 2), pour des smartphones dont le tarif débute aux alentours de 1 000 euros. D’autant plus avec le rapprochement entre les SoC A18 et A18 Pro.
… la révolution attendra
Comme c’est le cas depuis quelques années, les derniers iPhone ne ciblent pas vraiment les clients qui disposent déjà de la génération d’avant ou même de la précédente (voire de l’antépénultième). Il y a bien sûr les aficionados de la marque qui vont rapidement sauter le pas, histoire de toujours avoir le dernier modèle. C’est l’occasion de citer le fameux mème « Shut up and take my money ».
Rien de neuf sous le Soleil, me direz-vous, et ce n’est pas faux. Mais alors pourquoi continuer à lancer sans cesse de nouveaux modèles chaque année, avec une conférence autour de la rentrée ? Certainement pour des questions économiques, pas écologiques. C’est pourtant le second tableau qu’Apple met largement en avant.
Apple n’a de cesse de rappeler son objectif de 2030
Depuis plus de quatre ans, la société répète inlassablement son engagement de garantir « que d’ici 2030, la fabrication des appareils Apple n’aura aucun impact sur le climat ». Une annonce faite en 2020, en pleine pandémie de Covid-19. D’autres géants comme Google et Facebook aussi se fixaient ce genre d’objectif.
Avec les iPhone 11 et 12 (lancés en 2019 et 2020), Apple explique sur la page des caractéristiques techniques : « dans le prolongement des efforts entrepris pour atteindre nos objectifs en matière de protection de l’environnement ». Avec les iPhone 13 à 15 (lancé à partir de 2021), Apple indique : « dans le prolongement des efforts entrepris pour atteindre la neutralité carbone d’ici 2030 ». Dans les deux cas, le smartphone est « livré sans adaptateur secteur ni écouteurs EarPods ».
Cachez cet autocollant que je ne saurais voir
Contenu identique dans la boite des iPhone 16 : un simple câble USB Type-C avec de la documentation. Mais, petite nouveauté, comme le relève 9To5Mac : il n’y aura plus d’autocollants dans la boîte. N'est-ce pas « amazing », pour reprendre le mot fétiche d’Apple ?
« Si vous achetez un iPhone 16 dans un Apple Store, vous pouvez demander un autocollant Apple au moment de l’achat […] Les détaillants tiers et les opérateurs partenaires n’ont pas d’autocollants Apple à distribuer, et vous ne pouvez pas non plus en obtenir si vous commandez un iPhone 16 avec livraison à domicile », expliquent nos confrères.
Ce n’est pas une grande surprise puisque le casque Apple Vision Pro et les nouveaux iPad Pro et Air sont déjà livrés sans autocollants. Dans tous les cas, le message de l’entreprise est le même : aller dans le sens de ses objectifs environnementaux pour 2030.
Réduction des emballages, recyclage : oui, mais…
Apple affirme aussi que, « pour la toute première fois, l’emballage de l’iPhone 16 Pro est composé à 100 % de fibres ». Une note de bas de page apporte des précisions sur ce point : « Les adhésifs, encres et revêtements sont exclus de nos calculs portant sur la teneur en plastique et le poids des emballages ». 100 % de fibre, si on exclut ce qui n’est pas en fibre, tout un concept.
Le fabricant ajoute que l’emballage est « plus fin, ce qui réduit l’empreinte carbone du transport ». Là encore, il y a un mais (et un gros) : « Cette augmentation du nombre de boîtes pouvant être placées sur une palette exclut les palettes acheminées vers les destinations suivantes : États‑Unis, Porto Rico, Îles Vierges des États-Unis, Guam et Canada ».
Apple ne précise pas pourquoi. Curieux, car avec 37,7 milliards de dollars de revenus aux États-Unis sur les 85,8 milliards au dernier trimestriel, le marché américain est de loin le plus important pour la société. L’Europe est deuxième avec 21,9 milliards de dollars, la Chine troisième avec 14,728 milliards.
Sur le recyclage, Apple explique que « l’iPhone 16 intègre plus de matériaux recyclés que jamais. Lithium 95 % recyclé dans la batterie [avec la précision « Selon l’imputation du bilan massique », ndlr]. Or 100 % recyclé dans le connecteur USB‑C et les câbles des caméras. Feuille de cuivre 100 % recyclé dans le chargeur à induction MagSafe ». Mais un smartphone comprend des dizaines de matériaux critiques/rares. Apple n'en aborde que trois.
Le greenwashing face au renouvellement forcé
Mais prenons la mesure des choses. D’un côté, nous avons donc des autocollants en moins (enfin disponibles uniquement sur demande, dans les Apple Store) et des emballages plus fins pour réduire l’empreinte du transport (sauf aux États-Unis, son plus gros marché). Même si ce n’est pas parfait, c’est toujours bon à prendre. Apple ne quantifie par contre pas les économies financières et écologiques qui en découlent.
De l’autre, nous avons la grand-messe d’Apple avec l’annonce en grande pompe d’une nouvelle gamme de smartphones iPhone 16, dont on a l’impression qu’elle n'existe que pour avoir quelque-chose à montrer cette année. Il faut bien dynamiser les ventes ma bonne dame.
Pour quelques milliards de plus
Pourtant, Apple ne se force pas à tenir un rythme aussi soutenu sur ses autres gammes de produits, notamment les ordinateurs fixes et portables.
Mais les sommes en jeu ne sont pas les mêmes : les iPhone rapportent plus de 39 milliards de dollars à Apple, sur les 85,8 milliards de son troisième trimestre. Les services sont deuxièmes avec 24 milliards de dollars et on tombe à 7 milliards de dollars pour les Mac et 7,1 milliards pour les iPad. Les enjeux financiers sur les smartphones sont plus de cinq fois plus importants que sur les autres produits.
Ne serait-il pas temps d’arrêter ce rythme effréné ? La réponse serait facile s’il n’y avait pas de tels enjeux financiers. Apple n’est pas le seul fabricant dans ce cas. Samsung et Google, pour citer que ces deux-là, vivent également au rythme de leur conférence annuelle pour leurs nouveaux smartphones.
Les Pixel de Google ont débuté en 2016, puis une génération par an jusqu’en 2024, avec des séries « a » entre les deux pour occuper le terrain. Samsung en est à 15 générations de smartphones depuis son premier Galaxy S en 2010 jusqu’au Galaxy S24 cette année (le fabricant est passé du Galaxy S10 au S20). Comme Apple, lancer de nouveaux modèles permet de dynamiser les ventes et donc les revenus de l’entreprise.
L’empreinte écologique dépend de la durée de vie
Apple, et ses concurrents, se retrouvent ainsi à marteler leurs promesses écologiques et l’importance de réduire les émissions de manière générale, tout en multipliant les annonces matérielles et en poussant leurs clients à changer de terminal.
Or, on le sait déjà depuis longtemps, plus un smartphone est utilisé longtemps, plus son empreinte écologique globale diminue. L’Arcep s’était penchée sur la question, avec une analyse sur les équipements dans leur ensemble (tous les types confondus) : la fabrication représente 78 % de l’ensemble de l’empreinte carbone, contre 21 % pour la phase d’utilisation.
Heureusement, le marché d’occasion et du reconditionné prend de l’ampleur, permettant à un terminal d’avoir plusieurs vies et ainsi de réduire fortement son empreinte écologique. Mais les fabricants pourraient avoir une attitude plus forte, en arrêtant de renouveler leur gamme chaque année.
La vraie rupture serait de casser le rythme annuel
Revenons aux iPhone 16, le temps de la conclusion. Apple aurait certainement pu prolonger la durée de vie de ses iPhone 15, par exemple avec des iPhone 15 et 15 Plus avec 8 Go de mémoire si c’est vraiment indispensable pour Apple Intelligence. Apple aurait également pu revoir ses emballages sans lancer une nouvelle gamme.
En effet, le lancement des iPhone 16 a un coût en recherche et développement, en marketing, en logistique. Est-il contrebalancé par les gains annoncés ? Nous n’avons pas la réponse et Apple se garde bien de s’aventurer sur ce terrain.
Le gain écologique de prolonger la vie des iPhone 15 aurait certainement été bien plus important. En plus de cela, Apple aurait pu se présenter comme le chevalier blanc de l’écologie (bon, la marque le fait déjà) avec une vraie rupture dans les habitudes. On attend maintenant de voir qui sera le premier à casser ce rythme effréné.
[Édito] Apple entre greenwashing et renouvellement à marche forcée
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Les iPhone 16 sont là, mais…
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… la révolution attendra
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Apple n’a de cesse de rappeler son objectif de 2030
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Cachez cet autocollant que je ne saurais voir
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Réduction des emballages, recyclage : oui, mais…
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Le greenwashing face au renouvellement forcé
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Pour quelques milliards de plus
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L’empreinte écologique dépend de la durée de vie
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La vraie rupture serait de casser le rythme annuel
Commentaires (28)
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Abonnez-vousLe 16/09/2024 à 17h37
Le 16/09/2024 à 18h15
J'aurais préféré pouvoir continuer à utiliser mon tel, tout à fait fonctionnel. Je ne me suis pas lancé dans le changement d'OS par crainte du bricage et parce que mon tel va servir à un membre de ma famille limite pas comme smartphone donc la sécurité peut passer au second plan.
Proposer des nouveaux modèles, hélas tous le font dans tout les domaines, mais la vrai chose à faire serait surtout de sortir de l'obsolescence programmée.
Les dernières annonces de samsung sur ses TV et smartphones vont dans le bon sens mais ce serait bien que les autres constructeurs suivent, voir fassent mieux !
Le 16/09/2024 à 18h19
Le 16/09/2024 à 18h29
Le 17/09/2024 à 18h36
En attendant que Samsung réactive son projet de seconde vie pour ces machines qui en ont quand même beaucoup dans le ventre.
Petite dédicace à Sony pour les bootloader in-déverrouillables de certains modèles vendus chez les opérateurs [Merci Orange...] et les DRM pour les fonctions photos...
Le 16/09/2024 à 18h21
Mais devinez quoi ? Ça n'est de toutes façons par de leur responsabilité.
Le 16/09/2024 à 18h26
Le 16/09/2024 à 19h09
Le 17/09/2024 à 17h50
Le 16/09/2024 à 19h11
@SébastienGavois , avoue, t'as utilisé à cracker un truc et utiliser Apple Intelligence en avant-première (/NDA ? ;) ) pour combler toute cette vacuité !
Le 16/09/2024 à 19h17
Et hop : Lorem ipsum dolor sit amet, consectetur adipiscing elit, sed do eiusmod tempor incididunt ut labore et dolore magna aliqua. Ut enim ad minim veniam, quis nostrud exercitation ullamco laboris nisi ut aliquip ex ea commodo consequat. Duis aute irure dolor in reprehenderit in voluptate velit esse cillum dolore eu fugiat nulla pariatur. Excepteur sint occaecat cupidatat non proident, sunt in culpa qui officia deserunt mollit anim id est laborum
Le 16/09/2024 à 20h20
Le 16/09/2024 à 22h37
Geb hupadgh ep throdagl hrii ehye shogg shagg vulgtlagln, Dagon Chaugnar Faugnoth ftaghu nglui n'gha chtenff y'hah n'gha h'zhro, Cthulhu f'vulgtm ftaghu Hastur hafh'drn shugg Dagon. N'ghft shogg y'hahor zhro sll'ha shogg uh'e nnngnaiih 'bthnk, 'ai hafh'drn zhroog nashogg nahai stell'bsnaoth grah'n Hastur ch', ep nilgh'ri ooboshu shtungglinyth shugg vulgtlagln bug.
Le 17/09/2024 à 09h21
Le 17/09/2024 à 11h30
Le 17/09/2024 à 13h42
Le 17/09/2024 à 15h11
=rand(25,25)
Chez moi, ça me genère un texte de 54200 caractères (en incluant les espaces), pas mal pour la paie !
Ce texte n'est apparemment pas encore généré par Copilot, mais j'imagine que ça finira par venir.
Le 16/09/2024 à 20h38
Si Apple ne sort pas un modèle par an, y vont se faire bouffer par la concurrence qui ne se privera pas
Et y ne visent plus à vendre un nouveau téléphone par an à leurs clients, mais à proposer des changements incrémentaux, ce qui fait que comparer un modèle et son précédent/suivant direct n’est pas incroyable, mais si on change d’iPhone tous les 5 ou 6 ans c’est très bien, et cette stratégie est tout à fait cohérente avec une volonté de faire mieux écologiquement
CQFD hein…
C’est assez osé de vouloir des iPhones innovants à chaque génération ET une approche écologique ET de ne sortir moins d’un modèle par an, le tout dans un marché mûr et saturé
Pour moi l’approche de Apple est justifiée et pertinente et devrait être un modèle pour le reste de l’industrie IT (améliorations itératives, ne pas chercher un renouvellement rapide, support logiciel long)
Et puis c’est vraiment un délire de gros nerds de glorifier l’innovation (téléphones pliants…), le grand public s’en tape totalement (y compris du 120 Hz d’ailleurs, en passant)
Le 17/09/2024 à 13h07
Ou alors seulement s'ils espacent les générations de plusieurs années.
Le 17/09/2024 à 08h36
Rien ne nous oblige à acheter le dernier modèle à la mode, il faut être un peu responsable, non ?
Perso, j'utilise un iPhone 7 Plus de 2016 qui reçoit encore des mise à jour de sécurité (iOS 15.8.3 il y a quelques semaines) et ça me va très bien.
Le 17/09/2024 à 08h55
D'ailleurs pour d'autres produits les premiers "nous" sont tout autant influencés que les second "nous" ... bref. Quand rien ne sera fait pour éviter le matraquage de la pub, rien ne changera.
Le 17/09/2024 à 09h12
Le 17/09/2024 à 09h14
Le 19/09/2024 à 09h04
Le 19/09/2024 à 10h06
Modifié le 17/09/2024 à 13h36
iOS est évidemment d'une complexité inouïe, le hardware qui le supporte aussi.
Quelle serait la solution économique pour conserver une innovation forte sans occuper l'espace médiatique annuellement et sans retombées économique associées ?
La réponse à cette question est une remise en cause du capitalisme à mon avis
Le 17/09/2024 à 14h09
Donc oui, Apple peut très bien sortir tous les ans une nouvelle itération "révolutionnaire" de son gadget inutile et hors de prix tout en étant quand même net carbone.
Le 17/09/2024 à 22h46