En ce mois de janvier 2024, deux anniversaires importants sont à fêter. Ce sont les 40 ans du premier Macintosh d’Apple (avec sa célèbre publicité diffusée durant le Super Bowl), une marque bien connue du grand public. Bien plus confidentiel, ce sont également les 80 ans (excusez du peu) de la machine Colossus. Cette fois-ci, on replonge en pleine Seconde Guerre mondiale.
Colossus, considéré comme le premier calculateur électronique fondé sur le langage binaire, a été créé en 1943. Il devait décrypter les messages chiffrés au moyen des machines de Lorenz destinées aux communications de haut niveau entre le quartier-général situé à Berlin et les quartiers-généraux des différents corps d'armées nazis. C’était par exemple le cas des communications entre Adolf Hitler et Erwin Rommel en Afrique du Nord.
« Six décennies de secret » autour de Colossus
Contrairement à la Bombe électromécanique, conçue par Alan Turing et Gordon Welchman pour casser les codes des machines Enigma, dont l'existence avait été révélée dans les années 70 et qui a fait l'objet de nombreuses œuvres de fiction, celle de Colossus n'a été reconnue qu'aux débuts des années 2000, « après six décennies de secret », précise le GCHQ (la NSA britannique). Ce qui explique pourquoi cette machine est bien moins connue.
Colossus fut pourtant « l'une des machines qui a contribué à confirmer l'information selon laquelle Hitler avait été convaincu que les Alliés lanceraient l'invasion à partir du Pas-de-Calais et non de la Normandie ».
« Le premier ordinateur numérique de l'histoire »
Pour fêter ses 80 ans, le GCHQ publie une série d'images inédites qui jettent un nouvel éclairage sur la genèse et le fonctionnement de Colossus, « qui mesurait plus de deux mètres de haut et que beaucoup considèrent comme le premier ordinateur numérique de l'histoire ».
Constitué de 1 500, puis 2 400 tubes à vide, il accomplissait 5 000 opérations par seconde et avait été conçu par une équipe dirigée par l'ingénieur britannique Thomas Flowers, qui l'avait construit en 11 mois, et mis en service en décembre 1943. Il a donc été développé avant l’ENIAC (Electronic Numerical Integrator And Computer) des États-Unis, souligne Crytomuseum.
Colossus en janvier 1944, le Mark II en juin 1944
Le secret entourant le projet était tel que de nombreux experts travaillant sur l'ordinateur, explique le GCHQ, « n'avaient aucune idée de ce qu'ils contribuaient à construire jusqu'à ce qu'il soit installé à Bletchley Park ». « Le premier Colossus fut livré à Bletchley Park le 18 janvier 1944 et délivra son premier message le 5 février de la même année », précise Cryptomuseum. Le Colossus Mark II est arrivé en juin 1944 (quelques jours avant le débarquement en Normandie) avec 2 400 tubes.
Si la planification du débarquement du jour J était déjà en cours au moment où la machine a été livrée à Bletchley Park, il semblerait que les interceptions fournies par Colossus aient été utiles pour donner le feu vert le 6 juin, souligne The Record, à qui le GCHQ a transmis d'autres photos.
Le 5 juin, Eisenhower rencontra ses généraux pour décider s'il devait partir le 6 juin. Un coursier, venu de Bletchley Park, lui remit un morceau de papier plié. Il s'agissait d'un message décrypté par Colossus quelques heures plus tôt, d'Hitler (Berlin) à Rommel, commandant des forces nazies sur le mur de l'Atlantique.
Hitler lui expliquait qu'il y aurait un débarquement en Normandie, mais que ce serait une diversion, que la véritable invasion aurait lieu cinq jours plus tard à Calais, et que Rommel n'avait donc pas la permission de déplacer ses divisions blindées de Calais vers la Normandie.
C'était le renseignement qu'Eisenhower attendait : la confirmation que le commandement nazi avait été trompé quant au moment et au lieu de l'attaque (via l'opération Fortitude).
Après la Seconde Guerre mondiale, huit des dix machines ont été détruites et tous ceux qui y avaient contribué tenus de garder le secret. Pour autant, sa technologie « était si efficace que nous avons continué à l'utiliser jusqu'au début des années 1960 », indique le GCHQ.
Un précurseur créé par des pionniers
« D'un point de vue technique, Colossus a été un précurseur important de l'ordinateur numérique électronique moderne, et beaucoup de ceux qui ont utilisé Colossus à Bletchley Park sont devenus des pionniers et des leaders importants de l'informatique britannique dans les décennies qui ont suivi la guerre, et ont souvent été à la pointe du progrès mondial dans leur travail », se félicite Andrew Herbert OBE FREng, président du conseil d'administration du musée national de l'informatique, situé à Bletchley Park et qui consacre plusieurs pages à Colossus.
Les experts ayant travaillé sur Colossus ont ensuite créé le Manchester Baby, ou Small-Scale Experimental Machine (SSEM, « machine expérimentale à petite échelle »), construit à l'université de Manchester en 1948, plaçant ainsi Manchester au centre d'une révolution informatique mondiale.
Colossus, the secret computer that helped to win #WWII, turns 80 today! 🤫
To celebrate we have released a series of rare and never-before-seen images of Colossus 📜#Colossus80
Read more here ⬇️https://t.co/7628rSQ1Cs pic.twitter.com/ILA2jy6l1T
— GCHQ (@GCHQ) January 18, 2024
Colossus deux fois plus vieux que le premier Mac
Pour se rendre compte de l’âge de Colossus, on peut citer un second anniversaire qui se déroule en ce moment : les 40 ans du premier… Macintosh. Colossus est donc deux fois plus vieux que le premier Mac.
Cette machine est en effet apparue en janvier 1984, un an après le Lisa d’Apple. Elle est animée par un Motorola 68000 (à 8 MHz) avec 128 ko de mémoire. L’ordinateur sera d’ailleurs renommé plus tard Macintosh 128K, mais c’est une autre histoire.
Pour lancer son Mac, Apple s’était payée un spot publicitaire réalisé par Ridley Scott (Alien, Blade Runner…), diffusé pendant le Super Bowl en 1984.
« Considéré comme un chef-d'œuvre en matière de publicité, il s'agirait même selon la presse spécialisée de la meilleure publicité de tous les temps. Dans ce film de 60 secondes, l'athlète Anya Major joue le rôle de l'héroïne inconnue et David Graham le Big Brother que l'on voit à l'écran », explique Wikipédia.
Le clip mélange des références à 1984, le célèbre roman de George Orwell et IBM comme Big Brother même si le nom de la société n’est jamais cité. L’athlète représente pour sa part le Macintosh venu casser les codes à grand coup de masse.
Selon l’AFP, Apple aurait déboursé 800 000 dollars (équivalent à 2,5 millions de dollars aujourd’hui) pour diffuser cette publicité d’une minute. Elle aurait été vue par 77,6 millions de téléspectateurs, selon Nielsen. Le résultat était très certainement à la hauteur des investissements.
Commentaires (18)
#1
Ce n'est pas ce que l'on peut voir ici ou là.
C'est plutôt le Zuse 3 allemand (1941) qui en plus est Turing-complet ce qui n'est pas le cas du Colossus.
#1.1
#1.2
#1.3
#1.5
#1.4
#2
J'ai vu mon premier Mac au lycée en 1984 ou 85, lors d'une présentation "nouvelle technos", un truc du genre, je ne me rappelle plus bien.
Un an et quelques plus tard, j'avais le mien !
Enfin, celui en mieux, un Atari ST !
Hé ! L'écran avait une meilleure définition : 640 x 400 ! Je l'ai encore d'ailleurs. Il marche encore aussi ...
#2.1
Les heures à s'exciter et gueuler entre potes pour réussir à exploser certains boss de fin de niveau...
Comme quoi ce n'est pas le 4K qui fait le game play...
#2.2
Ok, je sors
#2.4
#2.5
Sinon, pour l'info, le créateur de l'Amiga et de l'ATARI est le même, Jack Tramiel, qui après avoir piqué une grosse crise devant tout le monde en comité de direction devant le board et contre le CEO (Jack étant lui le Chairman et fondateur de la boite, Commodore, qu'il voulait appeler General au départ mais nom déjà pris), a racheté pour une bouchée de pain les droits de la marque d'une société US anciennement prestigieuse mais qui tombait en morceaux, société ayant par exemple enterré de nuit dans le désert du Nouveau Mexique des dizaines de milliers de cartouches de jeux E.T. (désigné pire jeu de toute l'histoire des jeux vidéos) et Jack a sorti des ordinateurs personnels sous la marque ATARI pour entre autre bien essayer de niquer son ancienne boite Commodore.
#2.3
#2.6
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Oh, aller, je continue ma séquence vieux con !
Mon premier ST était un ... ST ! Si, si. Un vrai ST tout court, pas STf, pas STe, rien.
Ça signifiait : un bloc d'alim pour le ST, un lecteur de disquettes pas intégré et un second bloc d'alim pour ce dernier. Pratique l'hiver pour se chauffer les deux pieds ...
Et tant qu'on y est : c'était un 1040 un peu bancal. J'ai jamais su si c'était un 1040 d'origine, ou un 520 gonflé. En tout cas, c'était l'époque du TOS sur disquette et des bugs de MMU.
10 fois, et c'est pas une façon de parler, qu'on est retourné à la boutique pour obtenir un truc qui marche !
Pour ceux qui ont connu, c'était Micropuce à Villeneuve d'Ascq !
Historique des modifications :
Posté le 28/02/2024 à 09h39
1040, siouplait m'sieur !
Oh, aller, je continue ma séquence vieux con !
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Ça signifiait : un bloc d'alim pour le ST, un lecteur de disquettes pas intégré et un second bloc d'alim pour ce dernier. Pratique l'hiver pour se chauffer les deux pieds ...
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Pour ceux qui ont connu, c'était Micropuce à Villeneuve d'Ascq !
#3
Et fait notable pour un film américain, il n'y a pas de Happy Ending ici, au contraire...
(facile à trouver en torrent)
#3.1
#3.2
Les panneaux de signalisation du main frame au début du film ont apparemment été récupérés de chez IBM juste avant qu'ils ne partent à la casse.
Et enfin, tristement, l'acteur principal du film, le Dr Forbin, deviendra plus tard, avec une moustache, l'acteur principal... Des Feux de l'Amour...
Le film est très très intéressant surtout quand en 2024, on parle tellement d'IA, pour un film tourné il y a plus de 50 ans maintenant.