MEV-1 : amarrage « historique » à 36 000 km d’altitude pour le remorqueur de l’espace
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Le 27 février 2020 à 11h28
6 min
Sciences et espace
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Un drôle de ballet vient de se dérouler au-dessus de nos têtes, au-delà de l’orbite géosynchrone : un satellite s’est arrimé à un autre. Pas d’espionnage, mais une opération de sauvetage pour remettre en piste le satellite 901 d’Intelsat. Northrop Grumman prévoit d’aller plus loin avec de la maintenance/réparation directement dans l’espace.
Dans l’espace, les satellites utilisent bien souvent des ergols pour ajuster leurs trajectoires (il existe aussi des moteurs électriques, mais ils sont coûteux, plus lents et donc peu utilisés pour le moment). Les engins spatiaux ont une durée de vie limitée qui dépend de la capacité de leurs réservoirs. Contrairement à la Station spatiale internationale, les satellites ne reçoivent pas de ravitaillement et, puisqu’il n’y a pas de station-service dans l’espace, une fois à sec c’est la panne.
Se placer sur une orbite cimetière avant la panne sèche
Cette dépendance peut poser des problèmes lorsque le lancement ne s’effectue pas comme prévu et que le satellite n’est pas placé sur la bonne orbite. Il brûle alors une partie de ses réserves pour rejoindre sa position finale, réduisant sa durée de vie. C’était par exemple arrivé à SES-14 et Al Yah 3.
Avant que leurs réserves ne soient complètement épuisées, les satellites en fin de vie se désorbitent et brûlent dans l’atmosphère ou bien rejoignent une orbite dite « cimetière » pour ne pas encombrer inutilement des zones utilisées par d‘autres satellites en service et éviter des collisions… avec la création de débris et le risque d’une réaction en chaîne (ceux qui ont vu le film Gravity savent de quoi on parle).
C’est ce qui est arrivé au satellite géosynchrone 901 d’Intelsat, encore parfaitement opérationnel pour la partie télécommunication, mais à court de carburant. Dans son cas, l’orbite cimetière se trouvait à 300 km au-dessus de celle géosynchrone (36 000 km, pour rappel). Il s’y est placé en décembre 2019… en attendant l’arrivée de MEV-1 et avec l’espoir de reprendre du service pour quelques années supplémentaires.
MEV-1 va « redonner vie » au satellite IS-901 d’Intelsat
Comme son nom l’indique, la Mission Extension Vehicle (MEV) de Northrop Grumman (une société appartenant à SpaceLogistics) vise à prolonger la durée de vie d’un satellite en venant lui porter assistance directement dans l’espace. Il ne s’agit pas de faire le plein de son réservoir, mais d’assurer la navigation dans l’espace à sa place.
La première mission du genre, MEV-1 a décollé début octobre 2019 afin de porter assistance à un satellite d’Intelsat. Il a rejoint sa cible quelques semaines plus tard et s’est finalement amarré à IS-901 le 25 février à 8h15 heure française, une opération qualifiée « d’historique » par les deux partenaires. Cette manœuvre a été effectuée sur l’orbite de cimetière (36 300 km) afin d’éviter d’endommager les autres satellites géosynchrone en cas de collision ou de problème lors de la manœuvre.
Il faut dire que cette opération n’était pas spécialement aisée, car IS-901 (qui a près de 19 ans) n’a pas du tout était conçu pour ce genre de mission sauvetage : aucun système d’accroche n’a été pensé lors de son développement. MEV-1 a donc été pensé afin de pouvoir s’arrimer à différents types de satellites via un « système mécanique à faible risque ». Dans le cas présent, MEV-1 s’est accroché sur la tuyère d’IS-901.
Retour aux opérations en mars, pour une durée de cinq ans
Maintenant que les deux satellites sont accrochés l’un à l’autre, des vérifications vont avoir lieu avant de commencer à les déplacer afin de retourner sur l’orbite géosynchrone de travail d’Intelsat 901. Ce dernier avait cessé ses opérations et transféré ses clients sur d’autres satellites, mais il devrait pouvoir reprendre ses opérations à partir du mois de mars pour une durée de cinq ans.
MEV-1 restera accroché à IS-901 tout le temps et s’occupera à sa place de toutes les modifications de trajectoire. IS-901 ne gérera donc plus que la partie télécommunication. Bref, le groupe MEV-1/IS-901 se comportera comme un système double, en espérant que les deux parties réussiront à parfaitement communiquer l’une avec l’autre.
MEV-1 pourra continuer sa mission, MEV-2 en approche
Une fois cette mission étendue terminée, MEV-1 ira (re)déposer IS-901 sur l’orbite de cimetière et il devrait cette fois-ci y rester. La mission de MEV-1 ne sera pas terminée pour autant : le vaisseau pourra aller chercher un autre satellite afin de lui permettre de reprendre ses opérations. En effet, les deux partenaires expliquent que « MEV est conçu pour plusieurs amarrages et désamarrages, et peut fournir une extension de la durée de vie des satellites de plus de quinze ans ».
Quoi qu’il en soit, une mission MEV-2 est déjà programmée pour cette année. Elle aura pour but d’aller prolonger la vie d’un autre satellite d’Intelsat. La date de lancement, la durée de la mission et le nom du satellite n’ont pas été précisés pour le moment.
L’approche d’IS-901 vue depuis MEV-1, avec la terre dans le fond, puis l’accrochage avec la tuyère. Crédits : Northrop Grumman
La première étape d’un « vaste plan »
Northrop Grumman précise que cette opération MEV-1 n’est que « la première étape d'un vaste plan de développement technologique. La vision de la société est non seulement de mettre en place une flotte de vaisseaux permettant de prolonger la durée de vie des satellites, mais aussi de fournir d'autres services tels que des changements d'inclinaison, des inspections des engins spatiaux et l'utilisation d'une technologie robotique avancée pour effectuer des opérations supplémentaires telles que la réparation et l'assemblage en orbite ».
Plusieurs questions restent en suspens, notamment le coup de la mission MEV-1, du remorquage et de la prolongation de cinq ans pour IS-901. Reste aussi la question de ce qu’il adviendra de MEV-1 quand il arrivera en fin de vie. Dans tous les cas, Northrop Grumman n’est pas la seule société à s’intéresser à ce sujet, d’autres travaillent aussi sur des vaisseaux capables de porter assistance à des satellites.
Plusieurs entreprises et agences spatiales planchent aussi sur la question de la pollution de l’espace et la récupération des débits. C’est notamment le cas de l’Agence spatiale européenne avec ClearSpace-1, qualifié de dépanneuse de l’espace.
MEV-1 : amarrage « historique » à 36 000 km d’altitude pour le remorqueur de l’espace
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Se placer sur une orbite cimetière avant la panne sèche
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MEV-1 va « redonner vie » au satellite IS-901 d’Intelsat
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Retour aux opérations en mars, pour une durée de cinq ans
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MEV-1 pourra continuer sa mission, MEV-2 en approche
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La première étape d’un « vaste plan »
Commentaires (28)
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Abonnez-vousLe 27/02/2020 à 11h49
Pas mal.
Le 27/02/2020 à 12h15
C’est une technologie et n savoir-faire qui vont intéresser bien des militaires, surtout que l’on parle d’arsenalisation de l’espace (déjà militarisé mais absence d’armement), d’espionnage/piratage de satellites ou de destruction de satellite.
Pour rappel Northrop Grumman
est une industrie importante du système militaro-industriel américain!!
Le 27/02/2020 à 12h30
Super intéressant, merci pour cet article !
Le 27/02/2020 à 12h49
merci pour ces articles qui nous changent des actus classiques " /> (sans les dénigrer bien sûr)
“Reste aussi la question de ce qu’il adviendra de MEV-1 quand il arrivera en fin de vie”
ben on envoie MEV-2 sauver MEV-1 ? " />
Le 27/02/2020 à 13h14
Aah, on va enfin pouvoir enfermer Gary Goodspeed avec Hue, pour avoir des réparateurs spatiaux à pas cher (cf Final Space) !
Le 27/02/2020 à 13h56
Autant je suis admiratif devant l’exploit technique, autant je suis dubitatif devant l’intérêt économique de cette mission.
Le 27/02/2020 à 13h56
Beaucoup supposent que le Boeing X-37 serait apte à réaliser ce genre de choses, le contenu de sa soute étant top secret.
Le 27/02/2020 à 15h54
Génial !
À terme, ce genre d’engin deviendra courant pour réorbiter correctement des satellites mal installés, puis nous aurons des ateliers de recyclage de satellites en orbite pour récupérer les composants en état de marche dans un premier temps pour les utiliser sur d’autres satellites. Puis des usines de recyclage des matériaux spatiaux avec refabrication de pièces de satellites à partir de débris spatiaux ou d’engins recyclés…
Oui, je suis aussi auteur de SF. " />" />" />" />" />
Sinon, des unités autonomes de désorbitage d’engins morts, ça sera la prochaine étape à mon avis. À suivre !
Le 27/02/2020 à 17h03
Effectivement on peut supposer que le coût total de cette mission est au moins équivalent au lancement d’un nouveau satellite de télécommunication Intelsat. Mais à mon avis il est surtout question d’une démonstration de faisabilité : à l’avenir ça pourra avoir du sens pour d’autres satellites bien plus chers, comme les télescopes spatiaux.
Le 27/02/2020 à 17h05
(il existe aussi des moteurs électriques, mais ils sont coûteux, plus lents et donc peu utilisés pour le moment)
En fait, non. Cette technologie est seulement récente et c’est pour cela que peu de satellites l’utilisent encore.
Tout les derniers satellites géosynchrones sont équipés de moteurs électriques, plasmiques ou ioniques.
Le 27/02/2020 à 17h11
Super, un article bien écrit sur ce sujet. On en veut plus ! :)
Le 27/02/2020 à 18h16
quel nom pourri, j’ai passé l’article à lire ISO-9001 " />
mais à part ça, article top :)
Le 27/02/2020 à 19h44
Le 28/02/2020 à 09h34
jb18v a écrit :
“Reste aussi la question de ce qu’il adviendra de MEV-1 quand il arrivera en fin de vie”
Faudra un coup de balai !
Le 28/02/2020 à 11h38
les software testers ont été un peu plus pro que ceux du Starliner
" />
https://spacenews.com/starliner-investigation-finds-numerous-problems-in-boeing-…
Le 28/02/2020 à 12h04
Ca ressemble à une mission de Kerbal Space Program.
Le 28/02/2020 à 12h10
Le 28/02/2020 à 12h29
Le 28/02/2020 à 12h37
Je l’ai signalée hier… Pas de nouvelles… (Le plus réactif dans l’équipe est Vincent H. mais aussi Marc R.)
Mais Le Figaro, ou même Le Monde, font d’énormes fautes d’orthographe, y compris dans les titres, et elles restent des mois, alors que des dizaines de commentaires des abonnés les signalent…
Pire, le Figaro refuse des commentaires, même respectueux et polis, signalant une faute de frappe ou d’orthographe, alors qu’il accepte des commentaires injurieux pour les rédacteurs (qui n’ont pas la tâche facile, je le reconnais) signalant la même faute…
Le 28/02/2020 à 13h40
Je me pose la question du coût également. MEV-1 est visiblement prévu pour assister d’autres satellites dans le futur, mais pendant 5 ans il sera arrimé à IS-901 pour le prolonger de 5 ans.
N’aurait-il pas été plus simple (plus rapide, et moins coûteux également) de lancer un satellite remplaçant IS-901 directement ? Il faudra de toute façon y songer dans 5 ans, non ?
Dans tous les cas, ce système de “satellites assistants” ne devrait pas faire de mal pour nettoyer un peu les orbites saturés (de débris ou satellites zombies) à l’avenir, j’imagine.
Merci pour l’article " />
Le 28/02/2020 à 13h48
Le 28/02/2020 à 13h52
C’est possible,
Mais il aussi envisagable que la technologie MEV-1 soit moins cher qu’un satellite de communication. Potentiellement : une propulsion, de la commande à distance et le système d’arrimage. Alors que pour les autre satellite tu rajoute les système de communication et/ou mesure.
Et comme il pourra aider encore 3⁄4 satellite, tu ne repaye pas le lancement.
Le 28/02/2020 à 13h59
Juste pour précision, SES-14 n’a quasiment pas perdu en durée de vie grâce à sa propulsion électrique justement (la mise en orbite GEO à simplement pris plus de temps), à l’inverse de son co-passager qui lui n’avait qu’une propulsion chimique et qui a perdu plus de la moitié de durée de vie suite à cet incident.
Le 28/02/2020 à 13h59
Le cout d’un satellite en orbite géostationnaire est de l’ordre de 150 Millions de \(. Intelsat pèse dans les 4,7 Tonnes. Sur ces 4,7 tonnes environ 50% sont de l'ergol. Amener un kilo en géostationnaire coute dans les 15-20 k€/kg. Donc a peu près dans les 90 millions de \) le lancement en orbite.
Ca fait 240 millions pour 20 ans de durée de vie => 12 Millions par an
Le MEV fait 2,4 T et doit fournir 15 années de durée de vie supplémentaire (En théorie) donc le poids est probablement constitué majoritairement d’ergol.
Un lancement de MEV coute donc dans les 50 Millions de \( à mettre en orbite. Même à 50 Millions \) par MEV ca sera rentable.
240 M\( pour le satt + 100 M\) pour le MEV sur 35 Ans ca donne moins de 10 m\( par an. Sur 35 ans l'économie est de 70M\)
Le 28/02/2020 à 16h19
Nan mais sérieux, vous prenez en compte les fautes d’orthographes quand on vous signale une erreur ?
Parce que cet article est catastrophique de ce point de vue là…
“[il] n’a pas du tout était conçu pour ce genre de mission” ?
“Plusieurs questions restent en suspens, notamment le coup de la mission MEV-1” ?
Le 29/02/2020 à 09h15
Non mais
Le 03/03/2020 à 09h58
“notamment le coup de la mission MEV-1”
coup, cou, ou coût ? Telle est la question :)
Le 04/03/2020 à 20h34
Après est ce qu’un satellite de communication vieux de 15 ou 20 ans vaux encore 10 millions d’euro par ans ?
Si un satellite est toujours rentable après 15 ans est ce qu’il ne sera pas plus simple de prévoir dés le début de la mission suffisamment d’ergol pour durée 35 ans ? De cette façon on s’éviterait pas mal de problème notamment et surtout celui de polluer une orbite utile en cas de collision.