#LoiRenseignement : des députés et magistrats craignent une surveillance généralisée
La vérité si le renseignement !
Le 02 avril 2015 à 09h30
7 min
Droit
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Alors que le projet de loi sur le renseignement s’apprête à être discuté en séance publique par les députés, le Syndicat de la magistrature et la « Commission numérique » de l’Assemblée nationale viennent de rendre deux avis pour le moins inquiétants à l’égard du texte élaboré par l’exécutif. Tour d’horizon.
La crainte d'une marche progressive vers une surveillance généralisée
Le socialiste Christian Paul, co-président de la « Commission numérique », composée pour moitié de députés et de personnalités de la société civile (Edwy Plenel, Philippe Aigrain, Henri Verdier...), avait promis que la recommandation de l’institution serait présentée avant le début des débats dans l’hémicycle, le 13 avril. Destiné à aiguiller les parlementaires, le texte présenté hier soir ne remet pas en cause la nécessité d’actualiser la législation applicable au renseignement, mais estime que la copie du gouvernement mériterait d’être revue à de nombreux égards.
D’entrée, les membres de la commission tiennent à « mettre en garde contre le risque d’aller, pas à pas, d’une surveillance ciblée à une surveillance généralisée ». Le ton est donné. « La légalisation de pratiques de surveillance jusqu’alors peu encadrées ne doit pas être l’occasion d’étendre à l’excès le périmètre de cette surveillance, sauf à remettre en cause l’équilibre entre les libertés fondamentales à protéger » poursuit l’avis.
De son analyse du texte, l’institution formule différentes préconisations, dont voici quelques morceaux choisis :
- Que le droit à la protection des données à caractère personnel figure expressément parmi la liste de ceux garantis par la loi dans le cadre des activités de renseignement.
- Que l’article prévoyant l’installation de « boîtes noires » sur les infrastructures des opérateurs (tuyaux, DSLAM, serveurs, etc.) soit purement et simplement supprimé. La Commission considère en effet que ces dispositions « ouvre[nt] la possibilité, à des fins de prévention du terrorisme, d’une collecte massive et d’un traitement généralisé de données. L’argument selon lequel cette surveillance porte initialement sur des données anonymes, traitées de façon automatique et algorithmique, ne saurait offrir de garanties suffisantes » insiste-t-elle. Il est également expliqué qu’il convient d’ « éviter des « effets de brèche » qui conduiraient à l’élargissement de ce dispositif à d’autres finalités que la prévention du terrorisme ».
- Que la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR), qui devrait remplacer l’actuelle Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité (CNCIS), bénéficie « des moyens budgétaires et humains nécessaires à l’exercice de l’ensemble de ses missions et à garantir son indépendance dans le mode de désignation de ses membres comme de ses services ». Faute de pouvoir préciser ceci dans le projet de loi sur le renseignement, la Commission numérique espère avoir des gages de la part du gouvernement durant les débats parlementaires.
- Que la CNCTR se voit dotée des moyens juridiques lui permettant « de procéder, à tout moment de la mise en œuvre de la technique de recueil du renseignement, à tous les contrôles, sur pièce et sur place, utiles ». L’institution co-présidée par Christian Paul souligne qu’il est « crucial de doter la CNCTR de pouvoirs d’enquête suffisants », et regrette surtout « que cette dernière soit simplement informée de l’autorisation donnée par le Premier ministre de procéder à une géolocalisation ou à la mise en place d’un « dispositif de proximité » pour appréhender des données de connexion en cas « d’urgence absolue ». »
- Qu’une « personnalité qualifiée pour sa connaissance en matière de droit de la protection de la vie privée et des données à caractère personnel » siège au sein de la CNCTR, sur proposition du président de la CNIL.
- Que soit débattue devant le Parlement « l’opportunité d’instaurer un canal d’information sécurisé pour les agents des services de renseignement, par la création d’un statut protecteur des lanceurs d’alerte dans le domaine sensible des activités de surveillance administrative ou par l’aménagement de dispositifs administratifs internes à chaque service concerné ».
L’autre avis présenté hier est signé du Syndicat de la magistrature, qui a émis de longues « observations » sur le projet de loi élaboré par le gouvernement. Aux yeux de l’organisation, ce texte consiste en une « extension dangereuse du champ d’action et des pouvoirs du renseignement ». Dans son collimateur, se trouve notamment la définition jugée trop large des finalités permettant aux services de déployer des mesures intrusives, à l’image des vagues « intérêts économiques et scientifiques essentiels de la France ». Le syndicat déplore à cet égard que « le projet de loi adopte une vision dangereusement extensive, par l’adjonction de motifs supplémentaires et de rédactions nouvelles de missions anciennes ».
Le Syndicat de la magistrature inquiet face aux IMSI-catcher et aux « boîtes noires »
Au travers de mots bien moins policés que ceux de la Commission numérique, le SM marque expressément « son opposition » à ce qu’il perçoit comme des « formes de surveillance généralisée » : l’utilisation des fameux IMSI-catcher, ces fausses antennes-relais capables d’aspirer toutes les données placées dans son spectre, ainsi que l’installation de « boîtes noires » dans les tuyaux des opérateurs. « Nombreux sont les commentateurs spécialisés qui identifient dans ce procédé un mode opératoire proche de la surveillance de masse opérée par la NSA, consistant à placer sous contrôle une large partie du trafic internet à la recherche de comportements « suspects » ou de marqueurs faibles » s’inquiète l’institution.
Le syndicat poursuit en regrettant lui aussi le contrôle jugé « très insuffisant » de la CNCTR, dans la mesure où le Premier ministre n’est avec ce projet de loi « aucunement tenu de suivre l’avis purement consultatif » de la remplaçante de la Commission, si celle-ci venait à émettre une « recommandation » quant à une mesure de surveillance injustifiée. De même, le contrôle juridictionnel instauré par le texte (la remplaçante de la CNCIS pourra saisir le Conseil d’État en bout de course) est jugé « largement illusoire ». « Quand à la possibilité offerte au requérant d’obtenir réparation du préjudice subi du fait d’une mesure de surveillance illégale, elle est de pur affichage » soutient le SM. Pourquoi ? Aux yeux de l’organisation de magistrats, il ne fait « nul doute » que le citoyen ne parviendra pas à être dûment indemnisé d’une mesure de surveillance injustifiée, puisqu’il faudrait pour cela qu’il démontre « souffrir ou avoir souffert du fait d’une mesure de surveillance ».
- Consulter la recommandation de la « Commission numérique » de l’Assemblée nationale (PDF).
- Consulter les observations du Syndicat de la magistrature (PDF).
En attendant que les débats commencent, rappelons que la Commission des lois de l’Assemblée nationale a adopté hier le projet de loi sur le renseignement, votant pour l’occasion plusieurs amendements n’allant pas vraiment dans le sens de ces recommandations (pour en savoir plus, voir notre article)...
#LoiRenseignement : des députés et magistrats craignent une surveillance généralisée
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La crainte d'une marche progressive vers une surveillance généralisée
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Le Syndicat de la magistrature inquiet face aux IMSI-catcher et aux « boîtes noires »
Commentaires (34)
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Abonnez-vousLe 02/04/2015 à 09h32
c’était couru d’avance après la loi de programmation militaire. L’événement “Charlie” n’a fait que l’effet d’un catalyseur… " />
Le 02/04/2015 à 09h35
Le 02/04/2015 à 09h36
Bon, les paris sont ouverts….
Dans combien de temps le “anéfé, rejeté” ?
Le 02/04/2015 à 09h39
Dommage que ce ne soit pas médiatisé.
Le 02/04/2015 à 09h39
Même les ricains la trouvent liberticide cette loi :  Le Monde
Le 02/04/2015 à 09h40
C’est une constatation un peu paranoïaque, ou les législateurs font des lois volontairement évasives pour étendre leur champ d’application comme bon leur semble ?
Bon, tant qu’à faire, pour prévenir des épidémies de gastro on va mettre des caméra dans les chiottes." />
Le 02/04/2015 à 09h40
Je crois que le pire dans tout ça, c’est que quand j’évoque le sujet avec mes collègues par exemple, ça ne semble pas les choquer plus que ça, une surveillance généralisée.
Je pense que beaucoup auraient besoin de faire un tour dans des pays dotés de système de surveillance de ce type pour voir les dérives et les atteintes à la liberté d’expression.
Bref, c’est triste.
Le 02/04/2015 à 09h41
Le 02/04/2015 à 09h50
Le 02/04/2015 à 09h55
Pffff même pas en plus, les gens sont tellement amorphes et prets à accepter tout et n’importe quoi, que ne de pas pouvoir aborder tel ou tel sujet en public car cela pourrait choquer / blesser autrui / être illégal ne les dérangerai qu’a peine ….
Le 02/04/2015 à 10h05
j’admets que cette version est plus proche de la réalité " />
Le 02/04/2015 à 10h53
Ou bien ils font le plus large possible pour que l’on accepte ce qu’il voulaient initialement.
C’est connu tu demandes la lune, on te la refuse et ensuite ta seconde demande est généralement acceptée.
Le 02/04/2015 à 11h00
oué bon vu les godillot à la botte de valls j’ai des doutes sur l’assiduité de la majorité des députés toutes tendances confondue aux dérives de cette loi quand aux sénateurs vu les amendements (élargissement de la loi à d’autres domaines) proposés j’ai bien peur qu”ils ne serviront à rien voir même qu’ils enfonceront le clou….
N’empêche cela me fait bien rire , il y a eu un véritable tolé quand Sarko voulait supprimer les juges d’instruction mais là avec cette loi on fait bien pire…..
Je ne me fais aucune illusion si ça ne passe pas maintenant , ça ressortira sous une autre forme bien plus insidieuse…
Comme je l’ai dit dans un autre topic , on a les politiques que l’on mérite , ils ne sont pas venu par hasard là où ils sont , simplement parce que la porte était ouverte et qu’il y avait de la lumière…Ils sont là parce que NOUS les avons élus…
Nous sommes donc responsables par notre passivité (merci Tf1 et consorts) et notre dédain d’utiliser notre droit de vote à cette décadence liberticide
Le 02/04/2015 à 11h07
Le 02/04/2015 à 11h07
La vérité si le renseignement !
Mais comment traduire ça ? " />
Le 02/04/2015 à 11h15
Le 02/04/2015 à 11h17
Le 02/04/2015 à 11h25
Le 02/04/2015 à 11h30
« Quand à la possibilité offerte au requérant d’obtenir réparation du préjudice subi du fait d’une mesure de surveillance illégale, elle est de pur affichage » soutient le SM. Pourquoi ? Aux yeux de l’organisation de magistrats, il ne fait « nul doute » que le citoyen ne parviendra pas à être dûment indemnisé d’une mesure de surveillance injustifiée, puisqu’il faudrait pour cela qu’il démontre « souffrir ou avoir souffert du fait d’une mesure de surveillance ».
Et même avant de pouvoir prouver quoi que ce soit, qui va se lancer dans une telle procédure face à une institution qui connaît tes moindres secrets et sera sûrement prête à menacer de les divulguer pour obtenir le silence ?
Le 02/04/2015 à 11h36
Le 02/04/2015 à 11h37
A part me prendre une baffe, ca menera à rien ton truc " />.
Le plus incroyable, c’est que les gens qui passenet leur temps à dire que l’état ne fait que de la merde en économie, laisse ce même état faire n’importe quoi en matière de sécurité, parce qu’ils savent bien ce qu’ils font. " />
Le 02/04/2015 à 11h44
Le 02/04/2015 à 11h45
Le 02/04/2015 à 12h01
Les députés et magistrats adoptent une posture outrée de circonstance. Si la menace des libertés est bien réelle, peu importe. La sécurité aura raison de tout, elle est hors champ démocratique.
Projet suivant ?
Rien ?
Séance terminée, merci.
Le 02/04/2015 à 12h02
Le 02/04/2015 à 12h16
Pareil, “c’est bien de tout surveiller et puis de toute façons je n’ai rien a cacher”
Le 02/04/2015 à 12h16
Le 02/04/2015 à 12h56
Vous inquiétez pas, c’est pour le 13 il me semble le vote de cette loi… dans 11 jours elle sera voté!
Le 02/04/2015 à 13h19
Le 02/04/2015 à 13h21
Le 02/04/2015 à 13h24
Le 02/04/2015 à 13h27
Le 02/04/2015 à 22h38
Certains de nos voisins (les Suisses en particulier et pour d’évidentes raisons) ont compris que la protection de leurs flux d’information numériques étaient depuis (très) longtemps “écoutées” et “enregistrées” par de multiples outils plus (ou surtout moins) légaux de leurs prétendus “alliés” !
De ce fait, ils ont mis au point plusieurs systèmes de protection (entre autre de cryptographies - ce qui a été prouvé depuis plus de 50 ans entre autre par les travaux de Shanon) mathématiquement démontrés comme inviolables, quelque soit la puissance et les temps de calcul utilisés (y compris par les systèmes quantiques de la NSA qui soit-disant n’existent pas alors qu’elle les utilise depuis plus de 20 ans) !
Il me semble qu’à ce jour, le plus bel exemple de ce genre d’outil de cryptologie soit proposé par la société Trustleap http://www.trustleap.ch) dont le système permet de protéger tout type d’échanges numériques, que ce soit des e-mails, des fichiers, des télécopies, de la vidéo-conférence ou même des conversations téléphoniques) en utilisant son système de cloud privatif créé à l’aide de boitiers d’interface spécifiques connectables à n’importe quel système informatique.
Un petit chalenge audacieux et très provocateur est même lancé sur la toile par cette société, d’ailleurs d’origine purement française et émigrée en Suisse après que la DRM (Direction de la Recherche Militaire) l’ait faite chanter et menacé pour obtenir son code gratuitement.
Il suffit de déchiffrer une petite phrase secrète introduite au hasard dans un très long texte dont il est fourni l’original en clair (sans la phrase secrète à découvrir) et le cypher (le texte crypté incluant la phrase secrète dont il faut trouver l’emplacement et déchiffrer le contenu).
Vu la taille du texte en clair, les corniauds et incapables prétendus spécialistes de cryptographie de l’ANSSI et des différentes officines de barbouzeries de ce beau pays devraient être en mesure de localiser et de décrypter cette phrase en quelques minutes (plus le texte de référence en clair est long, plus c’est “à priori” facile à décrypter le cypher).
Que néni !
A ce jour, plus de 150.000 téléchargements de ce défit ont déjà été faits, y compris par de très nombreuses agences gouvernementales de différentes nations et la solution n’a toujours pas été trouvée malgré une récompense de 10.000,00 USD au premier qui trouvera la solution.
Si vous voulez tenter votre chance, le lien pour télécharger le texte en clair et le cypher est ici :http://www.as2.com/linux/crypto/challenge.zip
Personnellement, cela fait plusieurs mois que j’essaye avec de très nombreux outils (y compris des softs de brute force attaque d’origine Russe) mais sans aucun succès.
Si vous avez un peur de temps, alors bon courage. " />
Le 03/04/2015 à 12h36
Je veux pas dire, mais si un type de la NSA ou de n’importe qu’elle autre officine du genre casse le code, la dernière chose qu’il fera sera de l’annoncer…
Pour ce qui est de la crypto, pour discuter avec des chercheurs du domaine, les choses ne sont pas aussi simple.. l’un m’avouait l’autre jour que pas mal de recherches actuelles reposent sur un papier qui une très forte chance d’être tout simplement faux… pourtant ca fait une dizaine d’années que les gens utilisent ce papiers comme argument pour valider de leurs résultat…
Ne pas oublier qu’il y a un gap gigantesque entre la science officielle et la science militaire… la validité des méthodes de cryptho actuelles dépend de quel coté tu te place…