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Face à de mauvais résultats, Intel licencie 15 000 personnes et dresse ses priorités

« Vents contraires »

Face à de mauvais résultats, Intel licencie 15 000 personnes et dresse ses priorités

Après avoir annoncé de mauvais résultats pour son deuxième trimestre financier, Intel confirme des licenciements massifs. 15 % du personnel va ainsi devoir partir. En situation de crise, la société présente ses priorités, qui doivent refaire d’elle une structure agile.

Le 02 août à 09h54

La rumeur était donc fondée. Dans une note envoyée hier à ses employés, le CEO de l’entreprise, Pat Gelsinger, annonce que l’entreprise va se séparer de 15 % d’entre eux. Soit environ 15 000 personnes. Ces licenciements participeraient au plan d’économies de 10 milliards de dollars en 2025. Un plan de départs volontaires va également être mis en place, pour alléger encore la masse salariale.

« Nos revenus n'ont pas augmenté comme prévu – et nous n'avons pas encore tiré pleinement parti de tendances puissantes, telles que l'IA. Nos coûts sont trop élevés et nos marges trop faibles. Nous devons prendre des mesures plus audacieuses pour remédier à ces deux problèmes », pointe Gelsinger. C’est surtout vrai, dit-il, au regard des résultats financiers et des perspectives pour le deuxième semestre 2024.

Intel, qui procèderait actuellement « à certains des changements les plus importants de [son] histoire », a effectivement connu des jours meilleurs.

De mauvais résultats

Selon Pat Gelsinger, le chiffre d’affaires d’Intel annuel a chuté de 24 milliards de dollars entre 2020 et 2023. Durant la même période, les effectifs de l’entreprise ont augmenté de 10 %. « Il y a de nombreuses raisons à cela, mais ce n'est pas une voie durable », constate le CEO.

Et ce ne sont pas les résultats du deuxième trimestre 2024 qui vont redresser la barre. Le chiffre d’affaires s’est en effet établi à 12,83 milliards de dollars, en baisse de 1 % par rapport à l’année précédente. La marge brute a baissé de 0,4 %, pour arriver à 35,4 %. Selon Gelsinger, ces marges ont été affectées par « l'accélération de la montée en puissance de notre produit AI PC, des charges plus élevées que d'habitude liées aux activités non essentielles et l'impact des capacités inutilisées ».

En un an, le bénéfice net de l’entreprise s’est effondré, passant de 1,5 milliard de dollars à une perte nette de 1,6 milliard. « Notre performance financière a été décevante au deuxième trimestre, même si nous avons franchi des étapes clés en matière de technologie », a ajouté Gelsinger.

Des « vents contraires »

L’entreprise serait en pleine mutation, mais les temps à venir sont jugés « difficiles ». Les deux prochains trimestres seront délicats et Intel s’attend à des résultats inférieurs à ceux initialement prévus.

Gelsinger a évoqué des « vents contraires » pour expliquer ces mauvais résultats, notamment sur la marge brute des produits PC IA. Intel a en effet du mal à réagir sur un marché où le fondeur est pourtant très attendu : des puces spécialisées dans l’entrainement des IA. Un domaine où NVIDIA brille, son chiffre d’affaires explosant sur les dernières années au point de faire du spécialiste des GPU l’une des plus importantes capitalisations boursières au monde.

Rappelons également que les États-Unis dépensent actuellement des dizaines de milliards de dollars pour relocaliser la production de semi-conducteurs. Intel est l’une des principales entreprises bénéficiaires et plusieurs projets sont en cours. La société est attendue dans ce domaine, car ses activités de fonderie font face au géant TSMC.

« Depuis l'introduction de notre nouveau modèle d'exploitation, nous avons fait le point sur notre activité et nous nous sommes évalués par rapport à des critères de référence pour les fonderies performantes, les entreprises de produits sans usine et les fonctions d'entreprise. Ce travail a clairement montré que notre structure de coûts n'était pas compétitive », juge Pat Gelsinger.

Une série de priorités pour redresser la barre

« Il y a trop de complexité, nous devons donc automatiser et simplifier les processus. Les décisions sont trop longues à prendre, nous devons donc éliminer la bureaucratie. Il y a trop d'inefficacité dans le système, nous devons donc accélérer les flux de travail », assène le patron d’Intel.

Des priorités ont donc été établies. La réduction des coûts opérationnels est en tête de liste. Les 15 000 licenciements s’inscrivent dans ce cadre. Intel veut également simplifier ses activités. Chaque unité opérationnelle procèderait actuellement à un examen de son portefeuille pour identifier les produits peu performants. Les activités d’incubation vont être recentrées « sur des projets moins nombreux et plus importants ».

Intel veut en outre « éliminer la complexité », en réduisant les niveaux et les chevauchements de responsabilités. La société parle de mettre fin aux tâches non essentielles et de favoriser « une culture d’appropriation et de responsabilisation ».

Les dépenses d’investissements vont être réduites de plus de 20 % en 2024. Sur 2025, Intel prévoit le coût non variable des marchandises vendues d’environ 1 milliard de dollars. Dès le prochain trimestre, le dividende versé aux actionnaires sera suspendu. En revanche, tous les investissements liés à la croissance (dont la R&D) seront maintenus.

Gelsinger, dans sa note au personnel, indique qu’Intel a « reconstruit un moteur d'innovation durable, en grande partie en place et sur la bonne voie » ces dernières années. Le patron se tourne maintenant vers le moteur financier, affirmant qu’Intel doit maintenant s’adapter « aux nouvelles réalités du marché » et fonctionner « comme une entreprise plus agile ». Le patron n’hésite pas à parler de « refondation » de l’entreprise.

En attendant un avenir plus brillant, les mois à venir seront complexes. Hier, en clôture de la bourse, le titre chutait de 18 %.

Commentaires (19)

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Bientôt, ils se feront racheter par Nvidia :mrgreen:
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Je trouverais bien plus amusant si c'était AMD :)
Même si ce n'est pas réalisable, il est loin le temps où Intel donnait de l'argent à AMD pour éviter d'être en position de monopole.
Surtout comme tu le dis, avec des acteurs comme NVIDIA, ARM,... qui sont bien sorties du bois.
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Ils auraient surtout dû prendre le virage ARM en même temps que tout le monde pour en proposer.
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Il y avait eu StrongArm racheté à DEC à la fin des années 90... Enterré depuis. Le business model d'Arm de vente de propriété intellectuelle ne faisait guère de sens pour qui est déjà un concepteur de microprocesseur.
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Certes, mais l'un n'empêchait pas l'autre, et même si ca ne faisait pas de sens à l'époque, ca en fait déjà un peu plus de nos jours je pense. Car le concurrent d'Intel n'est plus vraiment uniquement AMD, mais Apple, Qualcomm, bientôt Mediatek et peut-être Nvidia... Ils veulent conserver leur souveraineté, je veux bien, mais ca peut aussi leur couter cher.
Et AMD est bien concepteur de microprocesseur également, ils devraient bien nous sortir de l'ARM malgré tout.
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Si le monde se résumait au monde des laptops, Apple ferait effectivement concurrence (féroce) à Intel et AMD, mais si on prend en compte les postes de travail, les serveurs, les plateformes cloud, edge, les fermes de calcule intensif, les consoles de Jeu, ... Apple n'existe quasi nulle part sur ces segments...
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J'ai donné 4 exemples sur ARM, car le sujet du message précédent c'était ARM, donc je ne résume rien aux laptops... Il faut lire les trois autres et voir les trois petits point plutôt que de focus sur l'un 😉.

Mais même sur le laptop, sans résumer a Apple, on parle quand même de dizaines de millions de Mac qui ne sont plus équipés Intel, ce n'est pas négligeable non plus.
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Tous les problèmes de fiabilité ont du faire baisser les ventes aussi mais ils n'en parlent pas.
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Intel qui a d'ailleurs reconnu les problèmes de chauffe/tension sur les générations 13/14 est sous la menace d'une éventuelle class action de consommateurs américains. Ils viennent d'annoncer +2 ans de garantie sur ces générations (3ans > 5ans) pour "rassurer".

Le correctif d'instabilité sur ces générations devrait quant à lui arriver à la mi-août. Et si votre CPU a été endommagé il est possible de le retourner en RMA.
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Ils reviennent donc à leur effectif de 2019.
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Dès le prochain trimestre, le dividende versé aux actionnaires sera suspendu. En revanche, tous les investissements liés à la croissance (dont la R&D) seront maintenus.
Bon, dans le lot il y a quand même des aspects positifs.
Mais 15% de la masse salariale... wahou ! (même si oui, +10% en peu de temps, ce qui revient à effacer ces embauches + 5%)

Le soucis d'Intel c'est qu'ils ont trop longtemps navigué à vue, profitant de leur position dominante avant qu'AMD ne revienne dans la course, qu'ARM leur grignote de plus en plus de parts, etc. Les gains technologiques n'étant pas au rdv qui plus est.
Et dans ce type d'entreprise l'inertie semble très importante. Donc les changements prennent du temps à porter leurs fruits, sauf que le secteur lui continue d'évoluer (rapidement).

Après, en terme purement techno, je ne vois pas comment ils pourront faire face à ARM (pour le secteur portable) et aux GPU (pour l'IA) dans le temps. Le x86 me semblant être un _boulet_ face à la demande. Peut-être que tout cela fera évoluer rapidement cette architecture dans les années à venir (sujet abordé par (trop) petites touches pour la compatibilité ascendante) ? Peut-être que la solution est là : assumer de casser la compatibilité sur une prochaine génération pour moderniser fortement l'architecture.
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Quand on regarde la réponse d'AMD à Qualcomm avec le hx370, on peut se dire que le x86 n'est pas forcément un si gros boulet à traîner. Pour rappel, un jeu d'instruction n'est plus, depuis longtemps, synonyme de l'architecture interne d'un CPU, ça décrit juste le langage du front-end du cpu. C'est derrière le front-end que tout se passe.

Par contre, il est urgent qu'Intel regarde ses forces et faiblesses tant technologiques que commerciales et commence à oser réinventer. Par le passé, Intel a su réinventer le Pentium III pour ouvrir une nouvelle voie alors que l'architecture Netburst s"était transformé en cul de sac technologique, permettant à Intel de conserver sa position dominante. Ici, Intel est occupé à rater plusieurs virages (IA, GPGPU, laptop, HPC, ...) qui risquent de lui coûter cher, mais rien n'est encore gravé dans le marbre.
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Et d'ailleurs pour le renouveau du Pentium III et les débuts de l'architecture "Core", le renouveau et l'innovation n'étaient pas venus d'Intel US mais d'une petite filiale d'Intel, filiale basée en... Israël.
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Mais les choses devrait changer pour eux puisqu'il a été décidé par Microsoft qu'un NPU serait obligatoire pour certaines tâches bien qu'une Geforce sache faire de l'IA.
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Ils effacent donc peu ou prou le bénéfice net de l'année passée en "creusant" la trésorerie de $100M, ce qui en regard des ordres de grandeur en jeu (~$1MM pour le compte de résultats, ~$10MM pour le chiffre d'affaire), est une paille.

Le chiffre d'affaire est relativement stable, et il ne me semble pas avoir lu des embauches massives par Intel durant l'année écoulée.
La dégradation des revenus et/ou des coûts ne semble donc pas être structurellement lié à la main d'oeuvre… et pourtant c'est elle qui trinque. Je serais cynique, je dirais que c'est un prétexte. Fort heureusement, les grandes entreprises capitalistes ne sont, elles, pas cyniques.

Il reste à évaluer le matelas de financement, au premier lieu desquels la trésorerie, de vérifier le BFR, mais quelque chose me dit que ce n'étaient pas ces 15k employés sur le total des 100k, qui changeait la donne sur la viabilité de l'entreprise.

Ceci n'est bien évidemment qu'une vision comptable sur la base des informations éparses à ma disposition, et mon analyse est volontairement déconnectée du bullshit émotionnel appelé "bourse", qui n'est pas très intéressant.
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"La société parle de mettre fin aux tâches non essentielles et de favoriser « une culture d’appropriation et de responsabilisation »."

Bon, la chasse aux bullshit jobs va s'ouvrir chez Intel... Mais parler d'agile pour induire une culture d'appropriation (cela peut être le cas, mais en pratique la finesse du découpage et le métronome des jalons trop fréquents font que cela fonctionne d'autant plus mal que les tâches sont complexes) et de responsabilisation (là c'est tout l'inverse! Comme dans toute organisation qui éclate trop les choses sans attribuer un sous-ensemble cohérent de manière nominative)! Ouille...
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C'est pas une première pour Intel: strongarm, les atom, Xeon phi, le wifi, plein de produit ont été coupé un peu tôt, souvent avec un décalage entre la stabilisation du produit et le marketing.
Des produits qui auraient pu avoir un avenir (les tel et tablettes en Intel étaient pas dégueux en fait)
C'est le problème avec Intel: ils ont de bonnes choses, mais n'en font pas une pub suffisante, on les découvre quand ils les arrêtent.
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Intel a embauché à tout va pour tester plusieurs pistes et maintenant s'allège sur ce qui est le moins rentable.

Avec l'arrivée de Windows 12 qui tarde pour relancer à nouveau la machine à changer les PC, ça se tient.
Je suis pret à parier qu'au final, soit à la sortie de W12, Intel aura dégagé toutes les compétences qui ont été rendues inutiles par l'IA & W12 pour s'être pourvu en compétences exactement correspondantes aux spécificités de W12.

Principe de destruction créatrice ...
Au détriment des devs kleenex. Reste à savoir dans quelle mesure cela aurait coûté moins cher de reconvertir les ressources existantes plutôt que de les changer.
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On est pas vraiment dans une situation d'une simple expansion exploratoire suivie d'une contraction pour optimisation. On est pas face à une approche "business as usual" mais face à une crise existentielle pour une entreprise en position dominante mais qui enchaîne les dysfonctionnements et qui n'arrive pas à redresser la barre pour atteindre ses objectifs sur son cœur de métier. Si le sauveur est vraiment Windows 12, alors il est probable qu'Intel continue encore à se déliter d'ici la sortie de cet OS l'an prochain.

Après les années Swan, la confiance en Gelsinger pour redresser l'entreprise est occupée à fon-dre, et la chute violente de l'action Intel est un signe assez visible de cette perte de confiance, peut-être à tort (une entreprise comme Intel a une manœuvrabilité qui nécessite 5-8 ans pour voir des résultats), peut-être à raison (les problèmes de l'entreprise sont peut-être trop profonds pour redresser la barre à temps, surtout si les problèmes émanent de la culture d'entreprise)

L'annonce d'un licenciement de masse aurait dû faire remonter l'action de manière significative mais il n'en a rien été, ce qui veut dire que la crise de confiance est profonde et que les investisseurs ne parient pas sur la capacité de l'entreprise à corriger le cap rapidement.

Face à de mauvais résultats, Intel licencie 15 000 personnes et dresse ses priorités

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  • Une série de priorités pour redresser la barre

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