Très haut débit fixe et mobile : l’État compte mieux contrôler le dossier
Very Bad TRIP
Le 07 avril 2016 à 07h30
9 min
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Ces derniers jours, représentants de Bercy et ARCEP ont annoncé de nombreuses mesures à venir. Emmanuel Macron a ainsi révélé les travaux de Bercy sur la couverture mobile et les réseaux publics, quand Axelle Lemaire compte réhausser les obligations d'Orange sur le service universel.
Le printemps commence, les arbres bourgeonnent et les ministres lancent annonce sur annonce sur l'internet fixe et mobile. Axelle Lemaire et Emmanuel Macron sont intervenus publiquement ces derniers jours pour dresser une feuille de route, plus ou moins formelle, des mesures qui seront prises ces prochains mois, dont certaines aux conséquences possiblement très importantes.
Ce début de semaine, s'est déroulé le TRIP, un colloque organisé par l'Association des Villes et Collectivités pour les Communications électroniques et l’Audiovisuel (AVICCA), l'un des principaux lobbies des collectivités en matière de numérique. Emmanuel Macron y est intervenu avant-hier, le 5 avril, pour rassurer le secteur et évoquer la suite, riche en nouveautés.
Faciliter la vie des réseaux publics
Mais avant tout, les chiffres. Pour Emmanuel Macron, le plan France THD « devient une réalité ». 97 départements sur 101 ont déposé une demande de financement, pour plus de 11 milliards d'euros d'investissement, dont 2,3 milliards d'euros de subvention de l'État (sur les 3,5 milliards prévus à la base). Concrètement, 46,2 % de la population était en très haut débit (plus de 30 Mb/s en débit descendant) à la fin 2015.
Les moyens de la mission très haut débit (qui pilote le plan) et de la Direction générale des entreprises (DGE) ont d'ailleurs été renforcés au quatrième trimestre 2015. Il faut dire que le directeur actuel de l'Agence du numérique, Antoine Darodes, aimait à vanter l'investissement de la quinzaine de membres de la mission, et rappeler leurs semaines de 60 heures.
#@EmmanuelMacron à l'#avicca : ne pas donner l'accès au #THD , c'est trahir la promesse républicaine pic.twitter.com/Sa7t5SAly5
— IDATE - Terr. Num. (@IDATE_TN) 5 avril 2016
D'autres mesures devraient aider les collectivités. Après les prix de référence de l'ARCEP pour les réseaux publics l'an dernier (et le tollé qu'ils ont d'abord provoqué), l'État doit fournir dans les prochaines semaines une grille tarifaire type pour les collectivités. L'idée étant, bien entendu, d'encore les aider à harmoniser leurs prix et aider les opérateurs à s'y retrouver, parmi les dizaines de réseaux publics qui vont émerger dans les prochains mois et années.
De plus, la loi Numérique inclut plusieurs améliorations, comme le groupement des syndicats mixtes départementaux (qui gèrent les RIP) en syndicats régionaux, pour une gestion plus aisée. De même, les problèmes de TVA facturée sur les investissements en fibre sont censés être un (mauvais) souvenir.
« Nous reverrons le mécanisme de zone fibrée pour les doter de mécanismes plus puissants pour faire migrer les réseaux cuivre vers la fibre » a aussi affirmé le ministre, alors que la Fédération des industriels des RIP prépare ses expérimentations sur le sujet (voir notre analyse). Le dispositif devrait entrer en vigueur avant la fin de l'année.
Bouygues-Orange : « préserver les intérêts du contribuable »
Macron est aussi revenu brièvement sur le rachat (avorté) de Bouygues Télécom par Orange. Il défend sa position, jugée trop raide par certains acteurs du deal, dont Bouygues, qui voulait prendre une part importante du capital de son concurrent, dont l'État détient 23 %. « En tant qu'actionnaire, l'État a regardé cette opération pour préserver les intérêts du contribuable, comme tous les actionnaires de l'opérateur historique l'ont fait. Ni plus, ni moins. Mais qu'on n'attende pas de l'État de la connivence ou l'exercice au second rang de ses responsabilités » a-t-il asséné.
« Ce n'est pas le cours de bourse quotidien qui nous dicte où se situe l'intérêt général » a ajouté Macron, en réaction à la chute vertigineuse des cours des principaux opérateurs français en ce début de semaine.
Un autre sujet du moment était en tête : les conventions entre opérateurs et collectivités pour le déploiement de la fibre. Dans les zones denses (dont les grandes agglomérations), les opérateurs privés déploient la fibre sur leurs deniers, en signant des conventions avec les collectivités pour s'engager sur un calendrier. Seule la moitié des zones concernées auraient actuellement une convention conclue, alors qu'elles devaient toutes l'être fin 2015.
Surtout, Bercy a constaté vendredi le gel des déploiements FTTH de SFR sur la métropole lilloise (voir notre analyse), un « constat de défaillance » dans le jargon. Lille Métropole est ainsi désormais libre de monter un réseau public sur ses 70 communes, même si elle semble plutôt partie pour les confier à Orange. Ce constat de carence est une première et, selon Emmanuel Macron, un coup de semonce pour les opérateurs qui ne respectent pas leurs engagements.
« Nous prendrons toutes nos responsabilités, et jusqu'au bout. Lorsqu'à Lille, les engagements ne sont pas tenus, ils doivent pouvoir être dénoncés » a encore tonné le résident de Bercy, réaffirmant sa vigilance sur le sujet. Ces conventions seront d'ailleurs intégrées à l'observatoire des déploiements de la mission France THD, qui doit permettre le suivi précis de chaque engagement.
Amener les opérateurs sur les réseaux publics
Pourtant, le sujet central avant-hier était l'arrivée des fournisseurs d'accès Internet nationaux sur les réseaux publics, qui ressemble désormais presque à une arlésienne. Alors qu'ils commencent à être déployés, ces réseaux attirent pour l'instant de petits opérateurs, en qui les habitants ont une confiance moindre qu'aux marques nationales. C'est le sujet d'alertes répétées des industriels des RIP et des collectivités locales, dernièrement à l'occasion de la tentative de rachat de Bouygues Telecom par Orange.
Le constat est d'ailleurs simple, pour Patrick Vuitton, directeur général de l'AVICCA. Selon ses calculs, aucun FAI national n'est venu fournir ses offres sur un réseau public qu'il ne construit pas lui-même depuis le colloque d'avril 2015. Un an mais zéro prise. Une inquiétude partagée par Bercy, affirme Macron aux collectivités.
P Vuitton sait compter .... pic.twitter.com/p1LklKTM3b
— Jean-Louis CHAUVIN (@Chauvin_JL) 5 avril 2016
« Il peut y avoir une certaine frustration s'il n'y a rien derrière la prise » construite par une collectivité, note le ministre, qui rappelle que le taux de pénétration de la fibre est meilleur en zones peu denses qu'en zones denses (30 % contre 20 %). Le ministère dit travailler avec les opérateurs et collectivités sur le sujet, notamment par une harmonisation technique des réseaux, le principal frein déclaré par les FAI. Investir et revoir un système d'information pour chaque réseau, avec quelques dizaines de milliers de clients potentiels à chaque fois, n'intéresse pas aujourd'hui ces sociétés.
« Nous mettons les FAI face à leurs responsabilités. Dès lors que nous ne disposons pas de toutes les garanties qu'ils répondront présents, nous entendons avancer dans la mise en place d'un groupement d'intérêt économique » pour assurer l'interopérabilité des systèmes d'information (éligibilité, commandes, SAV), a-t-il annoncé. C'est une demande historique de Free, aujourd'hui absent des RIP.
Une mission de préfiguration doit être constituée dans les prochaines semaines. De son côté, l'ARCEP a annoncé, par la voix de son directeur général Benoit Loutrel, l'arrivée de l'observatoire de la commercialisation des réseaux publics, avec une première étape prévue pour juin. Sur le marché de la fibre pour entreprises, une consultation publique a aussi été évoquée pour mai, dans l'idée d'en améliorer la concurrence.
Couverture mobile et service universel
Côté couverture mobile, le dossier des zones blanches avance également. Le premier observatoire des zones peu denses a été publié le mois dernier, alors que les opérateurs doivent couvrir toute la population en 2G d'ici fin 2016 et en 3G d'ici la mi-2017. De même, la répartition des centres-bourgs entre opérateurs et la répartition des coûts a été fixée. À l'AVICCA, Macron a annoncé un nouveau recensement pour s'assurer qu'aucune commune n'a été oubliée sur le dossier 2G, après les deux vagues de l'an dernier.
« Les deux appels à projets pour la couverture des 268 communes en zones blanches et le lancement du guichet de 800 sites prioritaires ont été publiés ce matin » a déclaré le ministre, en rappelant que 300 de ces sites prioritaires (économiques, touristiques...) hors centres-bourgs devront être couverts en 2G dans l'année. L'État avait d'ailleurs décidé de sortir 80 millions d'euros supplémentaires de sa poche pour soutenir les collectivités.
De son côté, Axelle Lemaire s'est rendue mardi 5 avril à la commission des lois du Sénat pour présenter son projet de loi Numérique. Parmi les nombreux sujets évoqués, elle est revenue sur la validation du plan France THD par l'Europe, qui traine depuis plus d'un an et qui place les projets locaux dans une insécurité juridique, avec un effet notable sur les subventions. Pour rappel, comme nous le révélions, c'est la montée en débit sur le réseau téléphonique d'Orange qui poserait le plus de problèmes à l'Europe.
Face aux sénateurs, Lemaire explique que « les services juridiques, et pas forcément la direction générale de la concurrence [à la Commission], sont très regardants sur ce mécanisme au regard du droit européen ». Sans s'avancer sur un calendrier de validation, déjà manqué plusieurs fois, elle a réaffirmé sa confiance dans le processus. « Nous n'aurions pas relancé les réunions mensuelles [de validation des dossiers de RIP] sans l'assurance de la validation européenne » a-t-elle ajouté.
Elle s'est enfin exprimée sur un autre dossier : le service universel, soit l'entretien du réseau téléphonique par Orange, compensé par les autres opérateurs (avec quelques difficultés dernièrement). Il faut dire que les engagements seraient loin d'être tenus partout, affirme-t-elle, en réponse à un sénateur inquiet de la question. La secrétaire d'État veut plus de garanties de l'opérateur historique à ce sujet, à l'occasion de la révision du cahier des charges du service universel cette année, avec une enquête de l'ARCEP.
Très haut débit fixe et mobile : l’État compte mieux contrôler le dossier
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Bouygues-Orange : « préserver les intérêts du contribuable »
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Amener les opérateurs sur les réseaux publics
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Couverture mobile et service universel
Commentaires (35)
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Abonnez-vousLe 07/04/2016 à 16h12
Le 07/04/2016 à 16h23
Le 07/04/2016 à 17h06
La France avance dasn la destruction du net…
Le 07/04/2016 à 20h50
Le 07/04/2016 à 21h46
Même avec une volonté étatique de très haut débit, la volonté de faire des économies est toujours manifeste. Ce n’est pas l’apanage des opé privés.
Dans mon département essentiellement rural, un syndicat mixte ouvert (Eure-et-Loir numérique ) s’est créé il y a plusieurs années et plusieurs options ont été retenues pour le très haut débit jusqu’à 2030 :
Zones rurales (cad les villages parmi les nombreux champs de blés) :
Perso, je suis dans la deuxième option, actuellement ligne à 2Mbits. La fibre arrive bientôt au sous-répartiteur dans le village voisin et je me contenterai des miettes du dsl amélioré (à tout casser 3-4 Mbits supplémentaires, je ne suis pas dans les premiers mètres de l’armoire).
J’ai l’impression qu’avec une plus forte volonté, la véritable fibre aurait été possible pour tout le monde ; en l’état la situation reste bloquée (année 2030 minimum au vu des plans du schéma directeur) car les financements auront déjà été effectués.
Plan THD = fibre à l’abonné pour tout le monde, préjugé qui a la vie dure. Certains de mes voisins croient qu’ils vont avoir la fibre. Num-SFR a de l’avenir dans sa communication. " />
Le 08/04/2016 à 16h00
Le 08/04/2016 à 16h56
Le 08/04/2016 à 17h06
Le 09/04/2016 à 05h39
Ok, la réponse est globalement satisfaisante…
Mais ce que tu voudrais relève un peu de l’utopie, des politiciens qui disent la vérité, qui tiennent leurs promesses et qui ne soient pas des carriéristes ça n’existe pas, ni à gauche ni à droite, ni chez les libéraux ni chez les “collectivos”, on est dans l’humain là… " />
Le 09/04/2016 à 07h40
Le 09/04/2016 à 08h17
Le 09/04/2016 à 08h45
Le 09/04/2016 à 12h51
Le 09/04/2016 à 14h54
Cet exemple étaie bien mon propos en montrant à quel point des millions de gens sont prêts à suivre n’importe qui (là je devrais même dire “n’importe quoi”) pourvu qu’il gueule plus fort que les autres.
Ce type qui a dit qu’il n’excluait rien dans sa politique, y-compris d’utiliser l’arme nucléaire contre l’Europe si il y voyait un quelconque intérêt… " />
Et mine de rien il y a un réel risque que cette “chose” devienne le président des U.S., ce qui confirme bien à quel point les choses ne font qu’empirer. " />
Le 09/04/2016 à 15h27
ce qui m’inquiète c’est ce rétropédalage de sa part..ses conseillés l’avaient averti (après ces, nb, dérapages sue : les homo…les musulmans …les hispanios …les femmes, etc …) il n’avait AUCUNE chance d’être élu !
après “avoir dit tout”, voilà qu’il dit son contraire (et, les gens oublient vite…y-a qu’a voir comment ça se
passe en France) !
Le 09/04/2016 à 16h16
Ben oui mais ça marche et ça a toujours marché…
Des gens dangereux, responsables de nombreux carnages et pourtant adulés y’en a plein dans les “invalides” et trucs du même genre dans tous les pays… " />
Le 07/04/2016 à 09h41
Le 07/04/2016 à 09h47
#@EmmanuelMacron à l’#avicca : ne pas donner l’accès au #THD , c’est trahir la promesse républicaine pic.twitter.com/Sa7t5SAly5
Ok donc on ne l’aura jamais " />
Mon ennemi c’est le bas débit !
" />
Le 07/04/2016 à 10h09
Le 07/04/2016 à 10h10
Le 07/04/2016 à 10h17
Le 07/04/2016 à 11h57
Mais dans notre cas on s’en branle des réalités économiques. Il s’agit de fibrer le territoire et c’est essentiel pour l’avenir. Donc l’état reprend les choses en main et ils ont raison. Malheureusement trop tardivement.
Le 07/04/2016 à 12h14
Le 07/04/2016 à 12h15
toute la population en 2G d’ici fin 2016 et en 3G d’ici la mi-2017
Mon village en 3G pour les élections 2017 ?
Ah, ils veulent cet argument politique là pour se faire réélire ?
Mais pourquoi ai-je des doutes sur la faisabilité ?
Le 07/04/2016 à 12h27
Le 07/04/2016 à 12h32
Le 07/04/2016 à 12h36
Le 07/04/2016 à 13h40
Le 07/04/2016 à 13h52
Le 07/04/2016 à 14h04
Le 07/04/2016 à 14h12
Le 07/04/2016 à 14h20
Le 07/04/2016 à 07h56
Planisme douteux à la soviétique, subventions miraculeuses, quasi-contrôle des prix, millefeuille administratif de rigueur, calendrier intenable, hontectomie, hypocrisie et langue de bois habituelle, etc.
Pas de doute, nous sommes en France.
Les réalités du marché ont été prises en compte à la 7ème décimales par les ingénieurs sociaux au plus haut niveau et les RIP portent bien leur nom. Tout va bien se passer pour le contribuable.
Le 07/04/2016 à 08h15
RIP, quel nom bien choisi pour une initiative qui semble ne tenir aucun compte des réalités économiques et techniques!
Le 07/04/2016 à 08h50
En attendant, dans les zones peu denses, même en IDF, on peut se taper des débits dignes du début des années 2000. Et ce n’est pas prêt de changer, en 2008 ils disaient « la fibre à l’horizon 2011 ». En 2011 ils disaient « la fibre à l’horizon 2015 ». Aux dernières nouvelles, nous avons la promesse d’une fibre à l’horizon 2020. " />
J’habite au nord du Val d’Oise, proche de Persan (pas loin de Chantilly). Je suis à 5,3km du NRA. Oh, il y en a un plus proche, mais nous ne sommes pas raccordé à ce dernier…
Impossible de vraiment profiter des services modernes dans ces conditions, c’est aussi un frein à l’emploi.