Loi Numérique : pas de recours « prioritaire » aux logiciels libres pour l’administration
L'encourage aux dents
Le 04 juillet 2016 à 07h30
5 min
Droit
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En dépit des avis émis par les participants à la consultation sur l'avant-projet de loi Numérique, le législateur n’a pas souhaité imposer aux administrations de recourir « en priorité » aux logiciels libres. Les fonctionnaires devront simplement s’en tenir à un vague « encouragement ».
La commission mixte paritaire chargée de trouver un compromis sur le projet de loi Numérique a abouti mercredi 29 juin à un accord qui ne surprendra personne : les administrations – au sens large (l’État, les collectivités territoriales, les personnes privées chargées d’une mission de service public...) – seront dorénavant tenues d’ « encourag[er] l'utilisation des logiciels libres et des formats ouverts lors du développement, de l'achat ou de l'utilisation, de tout ou partie, de [leurs] systèmes d'information ». C’est à la fois ce qu’avaient souhaité les députés et sénateurs, au terme de débats parfois mouvementés.
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Sauf qu’il est bien difficile de jauger sur un plan juridique comment doit se manifester un « encouragement »... D’où la déception de l’Association de promotion du logiciel libre (April) : « Cette disposition souffre d'un manque flagrant de portée politique, est dénuée de toute portée contraignante et n'est assurément pas à la hauteur des enjeux, regrette l’organisation dans un communiqué. Seule une réelle priorité au logiciel libre dans le secteur public [aurait été] à même de garantir l'indépendance technologique des administrations et leur souveraineté numérique. » Si le législateur avait accordé la « priorité » aux logiciels libres, on devine en effet que les administrations auraient dû privilégier de telles solutions en cas d’équivalence avec des logiciels propriétaires.
Une réforme aussi poussée suscitait toutefois de vives inquiétudes de la part de certains professionnels du secteur. Le gouvernement y était également défavorable. « Inscrire dans la loi un principe à caractère général, et donc forcément abstrait, visant à favoriser les logiciels libres – qui ne sont pas une caractéristique technique – par rapport à d'autres solutions, pourrait contrevenir [aux principes constitutionnels de liberté d’accès à la commande publique et d’égalité de traitement des candidats] et sans doute aussi au droit européen, notamment au principe de libre circulation des services » nous avait ainsi expliqué Axelle Lemaire (voir notre interview).
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En complément, le texte de la commission mixte paritaire demande aux administrations de « veille[r] à préserver la maîtrise, la pérennité et l'indépendance de leurs systèmes d'information » – comme avait souhaité le préciser le Sénat. Là aussi, la portée normative de ces dispositions risque d’être limitée...
Enfin, on notera l’introduction d’une petite surprise : les services de l’État devront encourager « la migration de l'ensemble des composants de [leurs] systèmes d'information vers le protocole IPV6, sous réserve de leur compatibilité, à compter du 1er janvier 2018 ». Cette mesure, qui n’avait été débattue ni à l’Assemblée nationale, ni au Sénat, est directement liée à l’article 20 bis A du projet de loi Numérique, en vertu duquel tout terminal vendu ou loué en France à partir du 1er janvier 2018 devra être compatible avec la norme IPv6. L’objectif ? Faire face à la pénurie d'adresses IPv4, qui se fait de plus en plus ressentir (voir notre article).
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Le compromis trouvé par le législateur sur l’utilisation des logiciels libres et des formats ouverts pourrait rester comme « le » point noir du projet de loi Numérique, tant les responsables politiques étaient attendus sur ce dossier. On se souvient en effet que les participants à la consultation en ligne organisée par le gouvernement avaient massivement réclamé une priorisation au sein de l’administration (deuxième et troisième demandes les plus importantes, après la reconnaissance du e-sport).
L’Observatoire des libertés et du numérique, qui compte parmi ses rangs la Ligue des droits de l’Homme ou La Quadrature du Net, a ainsi dénoncé il y a peu « l'hypocrisie du processus général utilisé pour l'élaboration de cette loi : consulter les citoyens, leur proposer d'amender et d'améliorer un texte, de le commenter, mais sans prendre en compte ces remarques et refuser finalement de réintégrer les propositions sur les Communs [par exemple, ndlr], massivement soutenues ». Certains auront néanmoins remarqué que les contributions laissées par les internautes ont permis aux parlementaires de porter avec davantage de légitimité certains amendements – notamment sur le logiciel libre. Chacun sera ensuite libre d'en juger les effets.
Avant de pouvoir être promulgué, le projet de loi Numérique devra faire l’objet d’un dernier vote solennel à l’Assemblée nationale, le 20 juillet, puis au Sénat, probablement aux alentours de la mi-septembre.
Loi Numérique : pas de recours « prioritaire » aux logiciels libres pour l’administration
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L’April critique une simple « déclaration de bonnes intentions »
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Souveraineté numérique et transition vers l'IPV6
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Une casserole pour le gouvernement Valls ?
Commentaires (59)
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Abonnez-vousLe 04/07/2016 à 11h40
Le 04/07/2016 à 11h50
Il y a eu une consultation, il y a eu des décisions, le processus démocratique a été parfaitement respecté, une fois de plus une minorité d’intégristes (barbus comme par hasard) veut imposer sa vision archaïque à nos acteurs économiques. Il faut vraiment du courage pour arriver à diriger ce pays de conservateurs réactionnaires. " />
Le 04/07/2016 à 11h55
Le 04/07/2016 à 12h17
absolument. Et quand la secu réponds a mes question sur mon dossier santé depuis son téléphone android perso, je n’en suis pas jouasse !
Car j’estime que l’état ME/NOUS doit protection. c’est pas en mettant du libre que ça ira dans le bon sens même si je suis d’accord que l’utilisation de “propriétaire” privé mondialiste n’est pas meilleur….
La gestion de l’état et des administrés doit se faire a partir de logiciels propriétaires ET étatiques, uniques et non divulgués. Les codes devraient être aussi protégés que les planches a billet !
Tout le contraire du libre donc… (qui est la pire fumisterie qui existe ces 20 dernières années)
Le 04/07/2016 à 12h19
Le 04/07/2016 à 12h35
Le 04/07/2016 à 13h19
Le 04/07/2016 à 13h25
Le 04/07/2016 à 13h31
Rien a voir avec le libre ca… ce sont des couts de migrations suite à l’enfermement dans une techno non portable.
Le passage de MSOffice vers une autre suite proprio aurait le même problème.
Le 04/07/2016 à 13h33
Oui bien sur
Pas tout a fait “rien a voir”, je signalais simplement cet état de fait pour éviter l’analogie rapide de “libre = ca coute rien”. En fait non, ca a un cout, aussi, dans le monde du travail
Le 04/07/2016 à 13h49
J’insiste : ca n’a rien a voir.
Tu opposes les coût de migration avec les coûts de licence qui n’ont rien à voir.
Il est toujours plus facile et moins cher de ne rien faire que de migrer.
Tu pourrais à un moment avoir à comparer le prix d’un upgrade général (les licences MSO pour toute ta boite) par rapport au prix de migration.
Et même là, le coté “libre” n’aurait pas d’impact à court terme dans ces 2 prix.
Faudrait juste ne pas oublier de la comparaison les avantages/inconvénients à plus long terme…
Le 04/07/2016 à 13h59
Le 04/07/2016 à 14h02
Le 04/07/2016 à 14h12
Le 04/07/2016 à 14h15
Le 04/07/2016 à 14h18
Le 04/07/2016 à 14h25
Le 04/07/2016 à 14h29
Le 04/07/2016 à 14h33
Le 04/07/2016 à 14h34
Absolument, encore une fois :)
Mais, arrêtez moi si je me trompe, je n’ai jamais prétendu le contraire? J’ai juste, au passage, innocemment, souligné qu’effectivement une migration avait un cout, y compris pour le libre
Est ce faux? Attention, y a un piège et des mots soulignants une notion de nuance. Est ce que ca sera suffisant? " />
C’est pas faute d’avoir précisé “parfois” dans mon premier message aussi.
C’est pourtant assez large comme tournure de phrase. Sauf que dès que ca concerne… Disons certains sujets… on a beau prendre les précautions qu’on veut, ca sera jamais suffisant. Si vous voulez que je cite la totalité des cas de figure à chaque fois, ca risque de prendre un poil de temps " />
Le 04/07/2016 à 14h40
Disons que quand on te lit plus haut, on y trouve facilement un sous-entendu style
“Aller vers le libre, ca coute a cause de la migration”
bien plus que
“Changer de techno, ca coute a cause de la migration”
Ce qui fausse le reste de ton discours.
On ne va pas te lapider pour autant (enfin, moi en tout cas). Disons juste qu’on entend tellement de conneries pour justifier des trucs bidons autour de ce sujet que beaucoup sont devenus chatouilleux. " />
Le 04/07/2016 à 14h41
très cher, en passant sur les trolls, pour ta dernière demande
le législateur n’a pas souhaité imposer aux administrations de recourir « en priorité » aux logiciels libres.
oserais je rappeler que le commentaire vient d’un article plus haut, et que le terme “imposer” est cité noir sur blanc?
Sinon, “de quelle étude parles tu”, je parle du fonctionnement d’un projet. Je prêche surement dans le vide, mais pas grave. Quand tu veux migrer, modifier le fonctionnement de ton SI, tu fais quoi? Hop, on débranche les serveurs et on change? Ou tu lances ce qu’on appelle une “étude”, dans le langage professionnel, terme que j’ai donc utilisé, non pour citer une étude qui existerait - sur laquelle j’aurais donné un lien le cas échéant - mais bien un terme générique dans le cadre de la gestion d’un projet informatique ?
Le problème c’est qu’en défendant ton sujet, sachant qu”en plus dans l’immense majorité des cas vous avez raison, vous sautez à la gorge des gens qui osent partager leur expérience professionnelle. Alors ton exemple concret, non, parceque je ne me mettrais pas en danger pour un troll : citer exactement mon ancien client, ou ceux de mes collègues, je vais éviter. tu ne me crois pas, c’est pas concret pour toi? Tant mieux ! J’en dormirais pas moins bien cette nuit
Si j’avais su j’aurais carrément vraiment trollé, ca aurait été mérité au moins " />
Le 04/07/2016 à 14h42
Le 04/07/2016 à 14h43
Le 04/07/2016 à 14h45
Le 04/07/2016 à 14h50
Le 04/07/2016 à 14h55
Le 04/07/2016 à 14h58
Très franchement, je suis retourné lire ton 1er commentaire (#31) et je te confirme avoir entendu exactement le même discours comme argumentaire un paquet de fois avec comme sous-entendu la conclusion “ca vaut (quasi) jamais le coup”.
Désolé mais entre les mauvaises tournures de phrases et les convaincus bidons, il est parfois difficile de faire la différence.
Le 04/07/2016 à 14h58
Le 04/07/2016 à 15h02
Comme quoi avec tes deux collègues on est arrivé à un accord en comprenant qu’il y avait quiproquo mais toi tu continues à troll dans ton coin. T’as même pas du lire nos messages, trop occupé a essayer de me citer
Bah, continues bien hein " />
Le 04/07/2016 à 15h21
Le 04/07/2016 à 15h35
Ah mais j’étais très content de jouer les calimeros, mais faut penser à être un poil moins agressif d’entrée de jeu aussi. Je n’ai jamais parlé de “libriste”, c’est ce que vous en avez compris, pour moi y a pas de sujet ni de clash libre / propriétaire : j’ai bossé dans les deux, c’est mon métier d’aider à l’implémentation de logiciel - je suis AMOA, assistant à maitrise d’ouvrage
mais si deux personnes (/troll je ne te compte pas dedans, navré /troll) qui ont par ailleurs fait montre, une fois les premiers échances houleux passés, d’une certaine compréhension, ont déterminé que mon premier message portait à confusion, c’est qu’elles ont raison.
J’en suis le premier surpris, mais c’est bien de ma faute, je ne me dédouane pas, d’avoir a priori mal exprimé ma pensée. Prochaine fois quitte a faire un pavé, je prendrais plus de précautions
Mais si, à l’avenir, tu veux arriver plus vite à une compréhension de ton interlocuteur, c’est pas en étant agressif que tu vas y arriver. Si un type dans la rue commence à te hurler dessus, tu lui répond poliment?
Choix 1 : c’était bien un troll et tu peux te défouler
Choix 2 : c’est quelqu’un qui a un avis différent, et il en a le droit, c’est tout le principe du débat
Choix 3 : c’est quelqu’un qui a le même avis mais l’a exprimé différemment " />
Le 04/07/2016 à 15h49
Le 05/07/2016 à 06h26
De toute manière, dès que l’on fait rentrer l’émotionnel et l’idéologie dans un débat qui devrait être rationnel, ça partira en vrille.
Et un peu comme garn, je n’ai pas de parti pris. J’utilise les deux “mondes” et je conçois/gère/vends/design des solutions qui sont basés sur les deux. Le jour où une solution libre permettra de faire avec autant de simplicité un combo exchange/SP/Office Web Apps dans le cas d’un intranet collaboratif d’entreprise, je serai à la retraite.
(Même si un alfresco ou un Umbraco fait très bien son boulot tout seul face à SP par exemple)
Le 05/07/2016 à 13h47
Le 04/07/2016 à 08h28
J’imagine les sites de l’administration échangeant sous cryptage libre et gratuit avec une clef privée dupliquée x fois et revendue en bitcoins …
Alors les voir utiliser des logiciels ou n’importe qui peut mettre la main dedans… (y compris hors contrôle de la fameuse “communauté” et hors diffusion…)
Déjà qu’ils laissent les fonctionnaire utiliser leurs smartphone perso pour traites des dossiers , donc contenir des données perso de vous et moi ! Tout ça sur de l’android ou chaque appli s’arroge tous les droits sinon ne marchent pas…
Le 04/07/2016 à 08h33
Le 04/07/2016 à 08h34
Je suis tout à fait d’accord.
Certains ici crient aux arrangements officieux, mais oublient que dans bien des cas les solutions libres ne sont juste pas retenues car peu ergonomiques, peu ou pas de support technique, ou simplement nécessiteraient de former le personnel qui n’est pas habitué.
Le 04/07/2016 à 08h42
Le 04/07/2016 à 08h52
Le 04/07/2016 à 08h54
Je ne comprends même pas qu’on puisse autoriser des solutions propriétaires dont le code n’est pas ouvert. M’enfin, je suppose que ca va dans le sens de la trahison qui consiste à vendre la France en pièces détachées.
Le 04/07/2016 à 08h58
je suis sûr qu’une administration utilise un service Google.
donc tes données sont potentiellement parties aux Etats Unis.
Le 04/07/2016 à 09h02
Le 04/07/2016 à 09h13
Le 04/07/2016 à 09h26
Le 04/07/2016 à 09h29
Le 04/07/2016 à 09h34
Le 04/07/2016 à 09h49
Microsoft Rulez Da World….
Le 04/07/2016 à 10h09
Autant, l’aspect libre devrait être un critère pesant dans la balance du choix, autant ce ne doit pas être éliminatoire. Cependant, si il y a un critère que moi je considère clé c’est le format/protocole utilisé. Celui ci doit être libre et le logiciel doit le respecter (en tout cas, faire au mieux).
Le 04/07/2016 à 10h37
Le 04/07/2016 à 11h26
A mon avis la priorité c’est surtout le format des données qui devrait être libre et de préférence standardisé. C’est le point central. Si on se retrouve avec des format ferme et exclusive a un programme on s’enferme dans une solution d’un éditeur. Avec des formats ouvert cela permet d’avoir des portes de sorties.
Le 04/07/2016 à 07h49
Quelques remarques ou petitions faites par les electeurs n’auront jamais autant de poids qu’une jolie valise de billets deposee (et oubliee) lors d’une reunion informelle avec qqs parlementaires.
Le 04/07/2016 à 07h55
Ce mois-ci, je me suis débarrassé de Office 365 que je traînais depuis le début, et ça fait du bien ! " />
Le 04/07/2016 à 08h03
Je bosse dans une ESN pour le compte de l’administration. Nous utilisions un soft libre pour le ticketing.
Rapide simple efficace. Un jour le logiciel a été remplacé par un truc proprio bien chère, usine à gaz, lent et pas du tout ergonomique.
Exemple typique de petit arrengement entre “amis” au détriment du bon sens et de l’argent publique.
Le 04/07/2016 à 08h06
En même temps la logique voudrait qu’il y ai un cahier des charges et que le meilleur rapport qualité/prix remporte la donne. Après donner la priorité à tel ou tel, ça ne va pas vers une concurrence saine.
Le 04/07/2016 à 08h08
les logiciels libres – qui ne sont pas une caractéristique technique –
C’est clairement une caractéristique technique si l’on prend en compte la maintenance et l’évolution.
Mais bon, on voit bien que le lobbying dans ce secteur fait bien son travail. Les marchés publics sont tellement juteux pour les éditeurs…
On se souvient en effet que les participants à la consultation en ligne organisée par le gouvernement avaient massivement réclamé une priorisation au sein de l’administration (deuxième et troisième demandes les plus importantes, après la reconnaissance du e-sport).
Ça valait le coup de donner son avis…
Certains auront néanmoins remarqué que les contributions laissées par les internautes ont permis aux parlementaires de porter avec davantage de légitimité certains amendements – notamment sur le logiciel libre. Chacun sera ensuite libre d’en juger les effets.
C’est tout de même dommage qu’il faille attendre une consultation publique, au vu du nombre de voix qui portaient cette demande, pour que les parlementaires se penchent réellement sur leur argumentaire…
Le 04/07/2016 à 08h16
Le 04/07/2016 à 08h21
On peut donner la priorité à des critéres tels que :
etc…
… et ce dans le parfait respect d’une concurrence saine et non faussée !
Le 04/07/2016 à 08h23