Les députés imposent la mise en ligne de certaines rémunérations de fonctionnaires
Réforme opporthunes
Le 21 mai 2019 à 13h01
6 min
Droit
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L'Assemblée vient d’adopter un amendement qui obligera de nombreuses administrations à dévoiler le montant cumulé des dix meilleures rémunérations versées à leurs agents. En revanche, il n’y aura pas de mise en ligne des agendas de certains hauts fonctionnaires, l'exécutif s'étant opposé à cette proposition portée par Matthieu Orphelin.
« Les très hauts fonctionnaires en charge de la préparation des projets de loi et des décisions publiques sont amenés à rencontrer des représentants d’intérêts. De telles rencontres, qui sont utiles à la « fabrique » des décisions publiques, doivent devenir plus transparentes » a répété le député du Maine-et-Loire, vendredi dernier dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale.
Reprenant l’argumentaire de l’association Transparency International France, l’élu (ex-LREM) a surtout fait valoir que les citoyens étaient en droit de « comprendre comment se font les interactions entre la société civile et les responsables publics, afin d’appréhender de façon plus juste l’empreinte normative et législative des lobbies ».
Au travers d’un amendement au projet de loi sur la fonction publique, Matthieu Orphelin proposait ainsi que les directeurs d’administrations centrales soient tenus de « publier en ligne leurs réunions avec des représentants d’intérêts » : porte-paroles d'associations ou d'entreprises, etc.
Une transparence « pas nécessairement opportune » aux yeux du gouvernement
Le député a toutefois essuyé un avis défavorable de la rapporteure, Émilie Chalas (LREM), ainsi que du gouvernement. « Il ne nous semble pas opportun de créer une règle spécifique pour les directeurs d’administration centrale » s’est tout d’abord justifié Olivier Dussopt.
Le secrétaire d’État en charge de la fonction publique a ainsi souligné que la législation relative au lobbying visait notamment les relations entre représentants d’intérêts et « membres du gouvernement, ceux des cabinets ministériels, les parlementaires et leurs collaborateurs, les présidents et membres des AAI – autorités administratives indépendantes – et des API – autorités publiques indépendantes –, et les fonctionnaires « nommés dans l’un des emplois dont le niveau hiérarchique ou la nature des fonctions le justifient », dont les directeurs d’administration centrale ».
Le représentant du gouvernement a ensuite objecté que les « réunions » visées par Matthieu Orphelin étaient « généralement préparatoires, et donc souvent, sinon même la plupart du temps, légitimes ». Elles relèvent en ce sens « d’un travail de réflexion dont la publication ou la publicité automatiques ne nous paraît pas nécessairement opportune », a soutenu Olivier Dussopt.
Face à ces explications, Matthieu Orphelin a préféré retirer son amendement. Ce dernier n’a donc pas été soumis au vote de l’Assemblée.
La Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) aurait peut-être rétorqué, comme elle l’affirmait dans son dernier rapport d’activité, que la publication de ces agendas « fournirait aux citoyens une compréhension inédite de l’action quotidienne de leurs responsables publics ». Mieux encore : cela pourrait « modifier certaines idées reçues » sur la charge de travail des décideurs, « et ainsi contribuer à renforcer la confiance ».
Des rémunérations plus transparentes
Les députés ont revanche adopté les amendements, soutenus par le groupe majoritaire, destinés à améliorer la transparence sur les traitements des fonctionnaires. Il est ainsi prévu que certaines administrations diffusent chaque année, sur leur site Internet, « la somme des dix rémunérations les plus élevées des agents relevant de leur périmètre, en précisant également le nombre de femmes et d’hommes figurant parmi ces dix rémunérations les plus élevées ».
Sont ainsi concernés :
- Les « départements ministériels »
- Les régions
- Les départements
- Les villes de plus de 80 000 habitants
- Les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre de plus de 80 000 habitants
- Les établissements publics hospitaliers dotés d’un budget de plus de 200 millions d’euros
« S’il est nécessaire d’avoir une haute fonction publique compétente et mieux rémunérée pour attirer les talents il y a aussi une exigence citoyenne pour une plus grande transparence de ces rémunérations » se justifiaient notamment les porteurs de cette réforme.
Ces derniers ont reçu le soutien du gouvernement, qui a exprimé par la voix d’Olivier Dussopt sa « volonté d’améliorer la publicité et la transparence sur les plus hautes rémunérations ».
En commission, le secrétaire d’État avait néanmoins prévenu que l’exécutif s’opposerait à toute « publication de listes nominatives mentionnant la rémunération à l’euro près de ceux qui sont concernés ». Le dispositif retenu ne permettra donc pas de savoir combien gagne tel directeur d’hôpital (par exemple). Il sera simplement possible d’effectuer une moyenne pour avoir un ordre d’idée.
Du « name & shame » pour les récalcitrants
Sur les bancs de l’opposition, le député Olivier Marleix a toutefois mis en garde la majorité : « Votre amendement est formidable, mais si, d’ici à la deuxième lecture, vous n’y ajoutez pas la possibilité d’une sanction ou de substitution par le préfet, après mise en demeure, en cas de non-respect de cette nouvelle obligation légale par l’exécutif local, je pense malheureusement qu’il ne se passera rien ou presque ».
Olivier Dussopt a alors rétorqué que le gouvernement pourrait rendre publique la liste des collectivités qui n’auront pas satisfait à leur obligation, dans le cadre d’un rapport annuel au Parlement, plus largement consacré aux rémunérations dans la fonction publique (et prévu par le projet de loi débattu à l’Assemblée). « Ce ne sera pas une sanction pécuniaire ou en droit, mais être cité en exemple pour son opacité me paraît susceptible d’avoir un impact assez fort, car il faut avoir la capacité de l’assumer », a fait valoir le secrétaire d’État.
Une fois adopté par les députés, le projet de loi de « transformation de la fonction publique » sera transmis au Sénat, pour une première lecture.
Les députés imposent la mise en ligne de certaines rémunérations de fonctionnaires
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Une transparence « pas nécessairement opportune » aux yeux du gouvernement
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Des rémunérations plus transparentes
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Du « name & shame » pour les récalcitrants
Commentaires (30)
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Abonnez-vousLe 21/05/2019 à 13h11
En gros, on ne sait toujours pas qui gagne quoi ni qui ils voient alors qu’ils prennent des décisions impliquant la collectivité et sont rémunérés par les contribuables. En gros, rien de change sur le fond.
Le 22/05/2019 à 18h03
Le 22/05/2019 à 18h18
Le 22/05/2019 à 18h24
Le 22/05/2019 à 19h52
Le 23/05/2019 à 07h06
Le 23/05/2019 à 08h37
Le 23/05/2019 à 10h01
Le 23/05/2019 à 10h01
Non, relis-toi.
Le 23/05/2019 à 18h01
Le 24/05/2019 à 09h15
Si je suis pour la transparence sur les salaires (ça évite les copinages).
Sur les agendas je voit pas l’ apport : on peux rencontrer des gens sans se faire acheter ou convaincre, c’est la moindre des choses en démocratie de rencontrer tout le monde avant de proposer ou décider.
Je suis peut-être naïf mais je trouve que ça va dans le bon sens, après que ça n’aille pas assez loin peut-être mais faut pas oublier qu’en France changer les choses c’est plus dur qu’un commentaire derrière son écran.
Le 24/05/2019 à 16h19
Le 24/05/2019 à 16h21
Le 25/05/2019 à 12h36
Ah… les commentaires de NextInpact m’avaient manqué…
Une avancée, un chialage. Ainsi que ses “lol, c’est la faute à LREM, tu vois pas ça c’est qu’t’es aveugle nanmého”.
Le 21/05/2019 à 13h36
Heureusement que LREM fait « de la politique autrement » pour changer de l’ancien monde. Bon, faudrait quand même pas non plus que du lobbying se voit trop — déjà qu’ils en ont installés directement au gouvernement.
Le 21/05/2019 à 14h14
Le 21/05/2019 à 14h52
Le 21/05/2019 à 16h38
Je suis plutôt d’accord avec ton commentaire.
Par contre, on peut justifier la demande de transparence (peut-être pas “à tout prix) par l’article 15 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 qui fait partie de nos textes constitutionnels :
Art. 15. La Société a le droit de demander compte à tout Agent public de son administration.
C’est d’ailleurs la justification donnée par vie publique au besoin d’une transparence de l’administration.
Remarque : je suis tombé dessus en cherchant des pages citant cet article de la DDHC, donc, j’ai eu la même idée de justification.
Le 21/05/2019 à 17h03
Le 21/05/2019 à 17h29
depuis 40 ans , l’endettement a doublé, donc effectivement le résultat est plutôt médiocre d’ou l’intérêt de savoir le salaire de tous ce beau monde qui prennent des décision qui coute un bras (avec notre argent) et qui sont mal adapté.
au hasard : l’hôpital de carcassonne
et il y en a des centaine de milliers de ce genre d’exemple
concernant le bulletin de vote je rappel que récemment l’élection au Venezuela a été mis en doute de manière international à cause du peu de participation. Si tu veux faire bouger les ligne ne vote pas ! les autre pays s’occuperont de nous
Le 21/05/2019 à 18h07
J’aime bien l’attitude actuelle du gouvernement de dénoncer le “haut fonctionnaire” comme coupable de tout.
Je rappelle à toute fin utile que les chefs des administrations sont des ministres qui donnent directives et ordres aux directeurs. Si ceux-ci n’executent pas ils sont expulsés manu militari dans une réserve quelquonque de la république.
Mais c’est plus facile de trouver des boucs émissaires que de changer réellement les choses…
Bref !
Le 21/05/2019 à 20h44
Le 22/05/2019 à 07h13
Le 22/05/2019 à 08h27
Le 22/05/2019 à 08h44
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Le 22/05/2019 à 09h03
Le 22/05/2019 à 09h37
Le problème est que les ministres ne sont pas omniscient et ce sont les hauts fonctionnaires qui assurent le rôle d’expert.
Le soucis c’est qu’ils finissent par avoir plus de pouvoir que les politiques élus.
Ils font en général parti du Siècle
Le 22/05/2019 à 09h44
Le 22/05/2019 à 17h15
Le 22/05/2019 à 17h54