Quand des réseaux Wi-Fi viennent perturber des prévisions météo
S’il ne pleut pas, il fera beau
Le 20 mars 2020 à 11h00
6 min
Sciences et espace
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Ce n’est pas une nouveauté, le Wi-Fi dans la bande des 5 GHz peut affecter les détections des radars météo. Récemment, deux cas ont été soumis à l’ANFR. Les fautifs ont été trouvés et ils ont apporté des changements à leurs équipements. C’est aussi l’occasion de rappeler l’importance de la gestion dynamique des fréquences (DFS).
Il y a peu, deux cas de brouillage de radars météorologiques ont été soumis à l’ANFR. L’un se trouvait dans la commune de Plabennec dans le Finistère, l’autre à Saint-Nizier-d'Azergues dans le Rhône. Deux lieux diamétralement opposés, deux origines évidemment différentes, mais une même cause : le Wi-Fi dans les 5 GHz.
Les radars météo exploitent également cette bande de fréquences pour détecter « dans un rayon de plus de 100 km les zones de précipitations (pluie, neige, grêle) », explique l’Agence nationale des fréquences. Une partie de cette bande leur est d’ailleurs réservée.
Pour le reste, une partie des 5 GHz est d’usage libre… « ce qui ne veut pas dire qu’il n’y a pas des règles à respecter » s’empresse de rappeler l’ANFR. Dans les deux cas du jour, c’est justement une utilisation non conforme qui était à l’origine des perturbations météo.
La vidéosurveillance d’une ville brouillait des prévisions météo
« Fin janvier, c’est le radar de Plabennec dans le Finistère qui a subi une perturbation importante affectant les échos relevés sur un large secteur d’observation allant de 350° à 10° », explique l’Agence. Dans ce genre de situation – avec des perturbations sur tous les azimuts ou presque – cela signifie souvent que la source responsable des émissions est proche du radar.
L’enquête a donc commencé « près du radar, mais seule une émission de faible amplitude a été détectée. Un autre point de mesure a donc été organisé dans le centre-ville près de l’église, sur laquelle des antennes de type RLAN [réseau local sans fil, ndlr] sont visibles. Ces mesures ont mis en évidence la présence de nombreuses liaisons Wi-Fi émettant dans la fréquence du radar météo ».
Le fautif est alors rapidement identifié : le système de vidéosurveillance qui utilisait des liaisons sans fil « de type Wi-Fi » installé par la commune. Il a été confirmé par une simple manipulation réalisée avec les prestataires de la mairie : une coupure physique des antennes, ce qui a immédiatement entraîné la fin des perturbations.
Un équipement Wi-Fi à 125 km perturbait un autre radar
Changeons de décor, direction Saint-Nizier-d'Azergues. Cette fois-ci, la source du signal perturbateur a été mesurée avec une puissance maximale dans l’azimut 74,5°. Les agents de l’ANFR ont alors remonté cette piste en voiture en effectuant régulièrement des mesures sur leur chemin. Finalement, « c’est finalement à 125 km du radar que le signal perturbateur est localisé ».
« Il s’agissait d’un équipement Wi-Fi fonctionnant sur le canal 121 [soit une fréquence de 5,605 GHz, ndlr] et utilisé par un opérateur d’Internet sans fil sur la commune de Mijoux dans l’Ain », qui est effectivement situé à un peu plus de 120 km à vol d’oiseau. Nous n’avons pas plus de détail sur le type d’équipement mis en cause.
Tout est rapidement rentré dans l’ordre
Dans les deux cas, l’ANFR a signalé aux responsables qu’ils étaient en infraction au titre de la réglementation des fréquences. L’Agence leur demande également de procéder aux modifications nécessaires afin de mettre fin au brouillage et de bien vérifier que le système de gestion dynamique des fréquences (DFS) soit activé sur les équipements.
Météo France n’a alors plus constaté de perturbation dans les deux communes. L’ANFR rappelle au passage que « le responsable d’un brouillage par manquement réglementaire encourt par ailleurs des sanctions pénales qui peuvent aller jusqu’à six mois d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende en application de l’article L39-1 du CPCE ».
L’importance du Dynamic Frequency Selection (DFS)
Cette histoire est l’occasion de revenir sur les règles à respecter dans la bande des 5 GHz et sur la fonctionnalité DFS évoquée par l’ANFR. Comme son nom l’indique – Dynamic Frequency Selection – il s’agit d’un système dynamique de sélection de fréquences.
Dans la pratique, cela consiste à n'utiliser des fréquences libres qu'à la seule condition qu'aucun signal prioritaire – radar, station météo, usage militaire – ne soit détecté. Depuis 2005, la mise en place de cette fonctionnalité est obligatoire dans les bandes de 5 250 à 5 350 MHz (limitées à une utilisation en intérieur) et de 5 470 à 5 725 MHz (autorisé en extérieur). Pour les produits grand public en vente c’est automatiquement le cas, vous n’avez rien à faire.
Dans ces plages de fréquences, une puissance à ne pas dépasser est également définie. Dans le premier cas, la PIRE (Puissance Isotrope Rayonnée Équivalente) est de 100 mW maximum, contre 500 mW dans le second. Ces valeurs peuvent grimper jusqu’à 200 mW et 1 W avec l’utilisation d’un TPC (Transmitter Power Control) qui permet de réguler la puissance.
Le précédent de la borne à selfie sur la Tour Montparnasse
Rappelons que c’est loin d’être le premier cas du genre. Mi-2019, l’ANFR expliquait comment une borne à « selfie » installée sur la terrasse panoramique de la Tour Montparnasse brouillait les prévisions météo d’un radar installé à Trappes, une commune des Yvelines.
L’Agence nationale des fréquences avait alors notifié le propriétaire de la borne « d'une taxe de 450 euros pour frais d'intervention ». Rien de tel n’est précisé pour les deux cas du jour.
Dans ce document il est néanmoins indiqué que « l’utilisateur responsable du brouillage est redevable d’une taxe de 450 euros pour frais d’intervention (Art. 45, chapitre II de la loi de finances pour 1987, modifié par l’article 90 de la loi de finances rectificative pour 2003) ». Nous avons demandé ce qu’il en était à l’Agence et si des suites pénales étaient en cours. Nous mettrons à jour l'article quand nous aurons les réponses.
Notez enfin que d’autres systèmes peuvent perturber les prévisions météo, notamment la 5G sur la bande des 26 GHz, mais c’est une autre histoire liée à une décision des États-Unis.
Quand des réseaux Wi-Fi viennent perturber des prévisions météo
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La vidéosurveillance d’une ville brouillait des prévisions météo
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Un équipement Wi-Fi à 125 km perturbait un autre radar
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Tout est rapidement rentré dans l’ordre
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L’importance du Dynamic Frequency Selection (DFS)
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Le précédent de la borne à selfie sur la Tour Montparnasse
Commentaires (43)
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Abonnez-vousLe 21/03/2020 à 13h31
Faisons un petit calcul sur le cas du brouilleur à 125 km :
La puissance due au WiFi reçue par le radar est : Pr = PeGeGr(lambda/(4Pi*R))^2
ce qui donne en dB : Pr = 0dbW + 45dBi + 10log10((0.06/(4pi*125000))^2) = -103.4 dBW que l’on peut arrondir à -105 dBW si on prend les pertes atmosphériques. En linéaire, cela donne 3.1623e-11 W, c’est à dire une trentaine de picowatts : c’est très faible mais il faut le comparer au niveau de sensibilité du radar.
Calculons maintenant le niveau de bruit thermique du radar. Ce bruit est du la température des circuits RF du radar qui provoque un déplacement d’électrons et donc un très faible courant électrique. Ce courant crée un plancher de sensibilité minimum en dessous le radar ne peut rien détecter.
Ce niveau de bruit est égal = kTB*NF où k est la constante de Blotzman, T est la température du circuit en Kelvin, B est la bande de réception, et NF est le facteur de bruit du système.
Pour une température de 20°c, k*T ~ 4·10-21 Watts/Hz, NF est donné par la fiche technique du radar NF = 1,5dB. Pour la bande, ce n’est pas directement indiqué mais on la déduire de la résolution distance qui est de 15m, ce qui donne 10MHz (c’est tout de même étrange d’échantillonner à 180MHz pour 10Mhz de bande). Cela donne :
P_bth = -132.5 dBWIl y a donc presque 20dB entre le niveau de bruit thermique et le niveau de brouillage d’un WiFi ayant une PIRE de 1W. En d’autres termes, lorsque l’antenne passe dans la direction du WiFi, le radar voit le niveau de puissance augmenter d’un facteur presque 100, ce qui est sans doute très gênant.
Le 21/03/2020 à 13h41
Merci pour ce petit cours de physique amusante.
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Le 21/03/2020 à 13h46
Je n’arrive pas à éditer mon post alors voici une petit correction pour le dernier paragraphe :
P_bth = -132.5 dBW Il y a donc presque 30 dB (27,5dB) entre le niveau de bruit thermique et le niveau de brouillage d’un WiFi ayant une PIRE de 1W. En d’autres termes, lorsque l’antenne passe dans la direction du WiFi, le radar voit le niveau de puissance augmenter d’un facteur presque 1000. Sachant qu’en radar les seuils de détection sont généralement fixés autour de 10dB pour garantir un faible taux de fausse alarme; c’est d’ailleurs probablement moins que ça sur un radar météo puisque le taux de fausse alarme n’est pas critique; 30dB c’est vraiment beaucoup !!
Le 21/03/2020 à 15h43
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Merci beaucoup je comprend mieux le soucis !
Le 21/03/2020 à 18h54
Le 21/03/2020 à 21h03
Avec plaisir !
Le 22/03/2020 à 01h37
Le 22/03/2020 à 01h48
Le 22/03/2020 à 13h03
Désolé OB, j’ai passé 30 min à répondre à ton post et quand j’ai appuyé sur Envoyer ça a merdé :(
Pour résumer rapidement :
Le 22/03/2020 à 18h26
Le 22/03/2020 à 19h10
Si c’est pas indiscret, tu fais ça pour le boulot ou pour des applications perso ?
Le 23/03/2020 à 21h05
Le 24/03/2020 à 11h13
Le 20/03/2020 à 14h51
Les antennes des radars font plus de 3 metres de diametre et l’electronique de reception est super sensible. Les radars météo mesurent les reflets radio des gouttes d’eau :).
La puissance rayonnée instantanée des radars météo est aussi énorme (en MegaWatt) mais la durée de l’impulsion radar est très courte d’ou une puissance moyenne faible.
Le 20/03/2020 à 15h02
par son action propre, une porte d’entrée empêche l’entrée quand elle est fermée
par son action propre, un gilet pare-balle réduit l’effet deletere d’une balle
par son action propre, un airbag empêche ta tête de d’écraser comme une m…. sur le volant/pare-brise
par son action propre, un masque FFP2 empêche certaines particules d’être inhalé
A part transmettre des images, explique moi comment agit une camera pour participer effectivement et indépendamment a une quelconque protection ?
Le 20/03/2020 à 15h05
Le 20/03/2020 à 15h10
Et en quoi la mémé a été protégée ?
Le 20/03/2020 à 15h28
Le 20/03/2020 à 15h29
Le 20/03/2020 à 15h34
Le 20/03/2020 à 15h44
On parle de vidéoprotection vs vidéosurveillance.
La vidéoprotection c’est de la novlangue pour ne pas utiliser le terme vidéosurveillance a connotation négative.
La vidéo ne protège de rien, elle ne permet que de réduire le nombre de policiers dans les rues.
Elle permet aussi des surveillances qui n’ont rien a voir avec la protection des citoyens.
Le 20/03/2020 à 17h19
Le 20/03/2020 à 18h34
détendez-vous sur le termes employés, ils sont écrits dans le Code de la Sécurité Intérieure : autant les employer correctement. Vidéo surveillance pour les lieux non accessible ou ne recevant pas du public, vidéo protection pour les locaux accueillant ou recevant du public. ça permet de dire, certes insidieusement, que l’on surveille des endroits et que l’on protège les gens sans les surveiller.
si le vocabulaire ne plaît pas c’est une chose, mais le sens étant un peu différent j’apprécie que le bon mot soit employé pour savoir de quoi on parle.
sinon, dans la même bande de fréquence, on n’a pas aussi les vidéos de drones ? ^^
Le 20/03/2020 à 19h21
Le 20/03/2020 à 19h22
Le 20/03/2020 à 22h06
Le 21/03/2020 à 03h59
Même pas.
Un œil (sur)veille, une épée frappe, un bouclier protège.
Ta Gatling est une épée, pas un bouclier.
Le 21/03/2020 à 07h19
Le 21/03/2020 à 08h59
Le 20/03/2020 à 11h50
Les radars météo fonctionnent , pour ceux que j’ai vu entre 5600 et 5700Mhz (il en existe ptet d’autres , genre militaires, non officiels).
=> Ce que je fait c’est que je m’assure que ces fréquences ne soient pas utilisés, ni même approchée, par mes antennes.
Le DFS est souvent implémenté n’importe comment par les constructeurs, et dans certains cas peuvent provoquer des pannes irrégulières de + de 30mn . Comme ces antennes servent souvent à fournir du net à des gens isolés, (et en ce moment, confinés), des pannes sporadique de ce types sont difficilement supportable.
Sur les airfiber tu peux choisir une liste de fréquences à essayer tour à tour sur les 2 antennes, ce qui permet au moins de ne pas laisser les gens derrière dans le noir.
Quand la promesse du gouvernement sera tenu ( " /> ) et que la fibre (et la 5G) sera partout…. ce sera sans doute moins problématique. Il y a le 60GHz qui arrive également.
(Débit ++ mais portée moindre et surtout atténuation très forte en LOS, donc difficilement plus que 2km - ce qui est souvent le type de liens effectué en directionnel avec du 5Ghz capable, lui, de monter des liens à 10km facile).
125km ça me parait énorme comme distance, donc ça implique que l’équipement déjà patatais très fort, _et_ était sur une antenne à fort gain.
Le 20/03/2020 à 11h53
La vidéoprotection d’une ville brouillait des prévisions météo
" /> Pff, on avait pas besoin du service météo pour savoir que la vidéoprotection, c’est le mal." />
Le 20/03/2020 à 11h57
Le DFS est une purge, il détecte tout et n’importe-quoi comme un signal DFS et coupe le signal entre 5 et 15 minutes à chaque changement de configuration d’un AP. Super pratique quand on fait du support avec le gars en haut de la nacelle…
Le 20/03/2020 à 11h59
La vidéoprotection d’une ville
Vraiment? Vidéoprotection? Sur NextInpact?
Le 20/03/2020 à 12h24
Le 20/03/2020 à 12h58
Elles sont bien pratique ces bandes quand le spectre est un peu chargé.
et souvent quand tu veux faire de l’aggrégation > 80 MHz t’es obligé de taper dans les bandes DFS… et comme dis plus haut c’est assez instable. Au final c’est souvent le client (quand c’est des équipements pro) qui désactivent eux même le DFS pour être tranquille
Le 20/03/2020 à 13h09
je pensais pas que ça pouvait perturber d’aussi loin !
Le 20/03/2020 à 13h21
les bandes publiques: 5500-5700 (approx)
les box publiques bouffent souvent entre 5500 et 5600
DFS: entre 5625 et 5675
il nous reste les miettes entre 5500 et 5620 et une bande de 20Mb entre 5680 et 5700
Mais même sans être dans les bandes DFS, on se tape quand-même du detecting radar à chaque changement de conf
Le 20/03/2020 à 13h33
125Km " />, celui qui habite près de l’antenne doit avoir un super signal… et le cerveau grillé " />
Le 20/03/2020 à 13h38
Vidéosurveillance, bordel !
Pardon de gueuler, mais ce terme me hérisse !
Quelqu’un a déjà vu une caméra courir après un agresseur ?
Le 20/03/2020 à 13h41
C’est pas l’antenne qui bombarde mais le radar météo " />
le radar météo fonctionne comme une chauve-souris: qui décharge en puissance et attends les retours de l’onde radio
Le 20/03/2020 à 13h46
Comme signalé par d’autres, merci de ne pas utiliser la novlangue qu’on tente inlassablement de nous imposer à ce sujet : Vidéosurveillance et pas Vidéoprotection
Le 20/03/2020 à 14h17
Le 20/03/2020 à 14h17
Certes mais 125Km faut un gain massif pour qu’il illumine le radar en retour non ?