En justice, la liberté d’expression supplante parfois le droit à l’oubli
Ne l'oublions pas
Le 04 novembre 2014 à 09h31
5 min
Droit
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En 2014, des décisions sur le droit à l’oubli, ou plus exactement sur le droit à l’effacement, ont nourri la jurisprudence en France. On retiendra spécialement celle rendue par la cour d’appel de Paris, le 28 mai 2014, que nous avons pu consulter récemment.
Dans cette affaire examinée le 28 mai 2014, un magistrat s’est plaint de la diffusion par l’Express en mars 2000 d’un article le concernant, intitulé « Juge et partie au tribunal de commerce ». Ce qui l’embête particulièrement est que lorsqu’on tape son nom sur Google, l’article qui relate des poursuites exercées à son encontre pour des faits de corruption remontant à 1988, apparaît en premier résultat. Ce magistrat avait alors fait appel à Reputation Squad pour en obtenir le déréférencement. Mais nos confrères lui ont répondu « qu'aucune circonstance particulière ne commande de supprimer l'article visé ci-dessus qui fait partie des archives de L’Express. »
Un juge qui craint d’être stigmatisé, un média qui craint l’occultation
Condamné par les juges du fond en 2005 pour les faits relatés (deux ans de prison avec sursis, 30 000 euros d'amende et 80 000 euros de dommages et intérêts solidairement avec un autre juge) le magistrat a tenté devant la justice d’obtenir malgré tout gain de cause contre ce média.
Après avoir essuyé un refus du TGI de Paris, il a fait valoir devant la cour d’appel de Paris qu’en vertu de l'article 6, 5° de la loi du 6 janvier 1978, les données stockées dans la mémoire des ordinateurs ne peuvent « pas [être] conservées au-delà de la durée nécessaire aux finalités pour lesquelles elles sont collectées et traitées ». Après quoi, il estime qu’elles doivent être anonymisées. De même, selon lui, l'exercice du droit d'opposition « doit aboutir, pour des raisons légitimes et lorsqu'une liberté individuelle est menacée, à la désindexation d'un article, accessible sur le moteur de recherche Google », afin d’éviter la « stigmatisation » contre la personne en cause.
Dans le camp d’en face, l’Express fera valoir que l’article 6, 5° ne s’applique pas aux journalistes (article 67 loi CNIL). De même, si quiconque peut invoquer son droit d’opposition, le sujet ici est « d'intérêt général » puisqu’il met « en cause le fonctionnement des tribunaux de commerce » sans toucher à la vie privée. De plus, les faits ne sont pas contestés ni réhabilités ou amnistiés.
Devant la cour d’appel la question était donc simple : un juge qui a purgé sa peine pour des faits anciens peut-il obtenir effacement de son passé relaté dans un article en ligne ?
La liberté d’expression l'emporte ici sur le droit d’opposition
La cour d’appel va répondre par la négative, en protégeant la liberté d’information et d’expression. Elle considère que « lorsque les informations révélées par la presse sont relatives au fonctionnement des institutions fondamentales de l'État, une plus grande liberté d'expression est tolérée, ce qui est le cas en l'espèce s'agissant du comportement d'un magistrat » lequel fut accusé de corruption active. Pour les juges d’appel, c’est ici « un sujet d'intérêt général dont il doit être débattu librement dans une société démocratique, quelle que soit l'ancienneté des faits dénoncés. »
Plus significativement, la cour considère que « la suppression du référencement de l'article à partir des nom et prénom du demandeur, par suppression du lien sur le moteur de recherche de Google, porterait une atteinte grave à la liberté d'expression garantie par l'article 10 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ». Insistant dans cette voie, elle ajoute que « le simple maintien de l'article sur le site des archives de l'Express ou anonymé sur Google porterait atteinte de la même manière à la liberté d'accès à l'information. »
La justice confirmera donc le jugement du tribunal de grande instance de paris qui avait constaté l'absence de motif légitime à la désindexation ou à l’anonymisation. Elle condamnera en outre le magistrat à supporter les frais en justice engagés par l’Express.
Une décision rendue après l’arrêt « droit à l’oubli » de la CJUE
L’affaire en question a été jugée après la fameuse décision Costeja de la Cour de justice de l’Union européenne. Le 13 mai 2014, celle-ci a considéré en substance que Google était responsable des données personnelles traitées par ses algorithmes et que quiconque pouvait réclamer d’une antenne nationale du moteur l’effacement de ces informations lorsqu’elles sont obsolètes, inopportunes ou ne sont plus pertinentes (voir cette actualité sur les critères complets). Selon le dernier décompte datant d’octobre 2014, Google a accueilli près de 29 000 demandes tendant à l’effacement de données personnelles dans son moteur. Sur les 90 000 URL en cause, le moteur en a supprimé environ la moitié (51,5 %) selon des critères pour le moins flous.
Ces demandes sont normalement indépendantes de celles exercées contre l’éditeur du site référencé (comme ici l’Express), cependant Google devrait pouvoir s’en inspirer à plein nez pour repousser ou accueillir favorablement celles tombant devant sa porte.
Le 04 novembre 2014 à 09h31
En justice, la liberté d’expression supplante parfois le droit à l’oubli
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Un juge qui craint d’être stigmatisé, un média qui craint l’occultation
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La liberté d’expression l'emporte ici sur le droit d’opposition
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Une décision rendue après l’arrêt « droit à l’oubli » de la CJUE
Commentaires (37)
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Abonnez-vousLe 04/11/2014 à 09h37
#1
C’est bien de savoir qu’il y ait un minimum de garde fous, pour le droit a l’oubli, même si ce n’est pas encore suffisant.
On risquerais de voir google crouler sous les demandes de politiques sinon.
Le 04/11/2014 à 09h38
#2
C’est plutôt une bonne pub de savoir qu’avec un peu d’argent on peut orienter ses choix :p
Le 04/11/2014 à 09h46
#3
Ouais mais la liberté d’expression ,‘est pas la même pour tout le monde …
Le 04/11/2014 à 09h48
#4
Le 04/11/2014 à 09h49
#5
Ah ?
Tu peux expliquer parce que la je ne vois pas ou tu veux en venir.
Le 04/11/2014 à 09h52
#6
Le 04/11/2014 à 09h54
#7
Rien ne t’empêche légalement parlant d’aller demander a TF1 ou France 2 d’aller parler de tes soucis avec la justice !
Le 04/11/2014 à 09h54
#8
Tu vois Christophe, pas besoin d’en venir aux méthodes chinoises pour réguler Internet " />
Le 04/11/2014 à 09h55
#9
Simple pourtant.
Certains ont une carte de presse ou une carte d’humoriste… et se permettent des choses que nous, citoyen lanbda payant ses impôts seront taxés d’extrémiste, de raciste, de féministe , de macho ou pire iront en procès car nous n’avons pas le droit de penser et de nous exprimer sur certaines personnes…alors que d’autres se cachant derrière leur origine , leur carte de presse etc… se permettent tout et n’importe quoi…
Nous pouvons rire de tout mais pas avec tout le monde etc… blah blah
Dire que qqun est un connard est notre droit mais non…
Le 04/11/2014 à 09h57
#10
Notre gouvernement s’en charge tout seul grâce à une minorité de” voteurs” fiers de leur opinion aux qi limité et se disant d’un parti sans y être membre…
Le 04/11/2014 à 09h57
#11
Le 04/11/2014 à 09h57
#12
Le 04/11/2014 à 10h00
#13
Le 04/11/2014 à 10h01
#14
Je ne sais même pas pourquoi on se pose la question de savoir , un juge qui à été condamné pour corruption ne devrait plus avoir le droit d’exercé son métier de juge.
Le 04/11/2014 à 10h02
#15
Je sais pas de quoi tu parles.
Il n’y a pas de carte d’humoriste déjà.
Les journalistes, avec ou sans carte, ne sont clairement pas mieux lotis. Tenir des propos raciste, xénophobe, homophobe etc les exposent tout autant a des poursuite judiciaire il me semble.
Pareil pour les humoriste d’ailleurs suffis de voir les procès que les humoristes et les journalistes maison d’édition ont sur le dos.
Le 04/11/2014 à 10h05
#16
Le 04/11/2014 à 10h26
#17
Comprend pas pourquoi un magistrat condamné pour des faits aussi grave puisse conserver son diplome.
Je vais aller voir qui est ce magistrat corrompu.
Le 04/11/2014 à 10h26
#18
Si certains ont un problème avec la modération, ils m’envoient un email et on en parle. Je ne veux pas de sous-entendus dans les commentaires. Si ce genre de chose continue, c’est moi qui me chargerai de faire le ménage, et ce ne sera pas avec le dos de la cuillère.
Le 04/11/2014 à 10h30
#19
Le 04/11/2014 à 10h31
#20
Il a eu raison Mr Jacques Rivalland d’essayer de se blanchir dans les tribunaux, l’effet Stressant va le remettre à sa place … tout en haut du moteur de recherche des escrocs et autres corrompus.
ps : d’autant plus que j’ai l’impression que ca ne soit pas le seul proces qui l’ai comdamné. LIEN Et dans cet article il parle d’un ex-juge … peu etre n’a t’il plus le droit d’exercer ?
Le 04/11/2014 à 10h34
#21
Le jugement me semble satisfaisant, bien que la justification passe partout “d’intérêt général” soit risible.
Ce qui est en jeu est plutôt la mémoire de l’information de corruption active à l’encontre de l’individu condamné, surtout quand on est juge de ses pairs. Payer sa peine ne signifie pas effacer la mémoire des faits.
Le 04/11/2014 à 10h38
#22
Elle condamnera en outre le magistrat à supporter les frais en justice engagés par l’Express.
Outch….." />
Le 04/11/2014 à 10h47
#23
Le 04/11/2014 à 10h55
#24
Ce n’est pas lui.
(le nom importe peu)
Le 04/11/2014 à 11h07
#25
Ha ? Il a été condamné ?
Le 04/11/2014 à 11h09
#26
Le 04/11/2014 à 11h21
#27
Le nom importe car les escrocs profitent très largement de l’absence de mémoire de notre société.
Et si en plus, les escrocs obtiennent le pouvoir de faire disparaitre leurs noms des affaires dans lesquelles ils ont plongés ils peuvent recommencer.
Ce qui etait le but poursuivit par le magistrat en question qui voudrait nous faire oublier qu’il a DEJA été malhonnete. Ca l’emmerde ??? il n’avait qu’a reflechir AVANT . Avec le niveau d’étude qu’il a, il avait l’intelligence suffisante pour comprendre la porté de ses actes et les éventuelles conséquences.
Le 04/11/2014 à 11h43
#28
Et il est toujours juge après avoir été condamné pour corruption active? " />
Le 04/11/2014 à 11h53
#29
peut-être qu’en fait c’est « une corruption assez active pour ne pas être radié » ? " /> " />
Le 04/11/2014 à 12h09
#30
Le 04/11/2014 à 12h29
#31
C’est dans l’article :
“Condamné par les juges du fond en 2005 pour les faits relatés (deux ans
de prison avec sursis, 30 000 euros d’amende et 80 000 euros de dommages
et intérêts solidairement avec un autre juge)”.
Oui il a été condamné. Et si on avait une vrai justice on ne le laisserais plus exercé.
Le 04/11/2014 à 12h43
#32
Comme tout politicien condamné si on avait là aussi une vraie justice
Le 04/11/2014 à 12h47
#33
Le 04/11/2014 à 12h50
#34
Le 04/11/2014 à 13h36
#35
N’importe quoi :/
Le 04/11/2014 à 17h37
#36
Cette actualité décrit très bien ce que je crains de ce “droit à l’oubli”.
Le 04/11/2014 à 17h48
#37