Fichier FSPRT : quand le secret défonce
(FSP)RT svp
Le 03 novembre 2015 à 14h30
5 min
Droit
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Comme signalé ce week-end sur notre fil Twitter, le ministère de l’Intérieur a publié au Journal officiel du 1er novembre un décret au contenu secret. Il modifie silencieusement un précédent texte confidentiel signé Manuel Valls et Bernard Cazeneuve créant « un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé FSPRT ».
Ce fichier sensible a été introduit dans notre droit le 4 mars 2015, soit en pleine préparation des débats autour du projet de loi sur le renseignement. Les informations étaient alors déjà laconiques : on apprenait simplement que ce fichier « FSPRT poursuit une finalité intéressant la sûreté de l'État, la défense et la sécurité publique », sans plus de détail, pas même sur la signification de l’acronyme (« Fichier de sûreté pour la recherche de terroristes », « Fichier spécial de prévention et de recherche du terrorisme »...?).
Le fichier FSPRT de mars 2015, tout comme sa modification du 1er novembre, sont bunkérisés par une des dispositions de la loi du 6 janvier 1978 dite Informatique et Libertés. Son article 26 dispense en effet de publication les traitements qui concernent « la sûreté de l’État, la défense et la sécurité publique ».
Puisqu’il vise des données personnelles, ce fameux fichier FSPRT a évidemment été soumis à l’examen de la CNIL. Le 11 décembre, celle-ci a exprimé un avis favorable à sa création, mais à l’occasion de sa récente modification, elle a exprimé un avis favorable avec réserve.
Des documents non publiés, non communicables
Quelle(s) réserve(s) ? Est-ce que le gouvernement en a tenue(s) compte ? Impossible à dire puisque seul le sens des deux avis a été révélé, non leur contenu.
Contactée, la CNIL nous a répondu que ce genre de délibération n’est pas publié en application précisément de l’article 26-III de la loi de 1978. Et suite à notre demande de communication de document administratif, elle a ajouté que « ce document n’est pas davantage communicable au titre de la loi CADA, car ce sont bien les caractéristiques du traitement mis en œuvre qui touchent à la sûreté de l’État et à la sécurité publique ». Et pour cause, l’article 6 de la loi CADA permet à n’importe quelle administration de garder secret tout élément touchant « à la défense nationale, à la sûreté de l'État, à la sécurité publique ou à la sécurité des personnes ».
Il faudra donc s’y faire : ces éléments sont exclus du périmètre du débat public, inaccessibles pour qui voudrait par exemple en contester la teneur, la portée ou simplement connaître ses dispositions. De fait, les seuls élements disponibles, épinglés par Numérama, ont été diffusés en avril dernier, dans le rapport de Jean-Pierre Sueur sur les filières djihadistes. Ce fichier devrait permettre à l’UCLAT (unité de coordination de la lutte antiterroriste « de centraliser toutes les informations résultant des signalements qui lui parviennent par le biais du Centre national d'assistance et de prévention de la radicalisation ». Selon les informations glanées alors par le sénateur, « il fera mention des suites données à chaque situation individuelle, en particulier du nom du service chargé du suivi du cas, ce qui permettra à l’UCLAT de s’assurer qu’aucune situation n’est laissée sans réponse ». Mais bien entendu, ce ne sont là que des données parcellaires puisqu’on n'a aucune connaissance du contenu exact de ce fichier.
Avec la PPL Surveillance, le gouvernement a été contraint de lever le secret
Dans un domaine très proche, rappelons que le gouvernement allait utiliser l'arme confortable du décret secret pour mettre en application une des dispositions de la loi sur le renseignement concernant la surveillance internationale. Seulement, cette fameuse disposition a été censuré le 23 juillet 2015 par le Conseil constitutionnel, le législateur ayant délégué trop de pouvoir au gouvernement dans sa mise en œuvre.
Par l'aiguillon constitutionnel, l’exécutif a donc été contraint de réintégrer au grand jour ce qu'il envisageait de cacher dans la nuit administrative. Cette exposition publique, c'est la proposition de loi (PPL) sur la surveillance internationale des communications électroniques portée par deux députés.
Les lecteurs attentifs ont ainsi pu découvrir le mécanisme de la « boîte noire », où la voilure de la surveillance automatisé gagne en nervosité, en amplitude : à l’international, ce traitement par algorithme sera en effet calibré pour aspirer des montagnes de données de connexion à des fins de surveillance, sans être limité comme en France à la seule détection des menaces terroristes.
C’est dans ce contexte que les partisans de cette PPL en dernière ligne droite au Parlement tentent d’en minimiser la portée. Ils expliquent que le Conseil constitutionnel n’a finalement censuré que la forme, non le fond de la surveillance internationale que programmait le projet de loi avant censure. Une affirmation totalement inexacte puisque le juge n’a pu contrôler en juillet que le projet de loi, non ce qui allait être glissé en douce dans un décret secret.
Fichier FSPRT : quand le secret défonce
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Des documents non publiés, non communicables
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Avec la PPL Surveillance, le gouvernement a été contraint de lever le secret
Commentaires (42)
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Abonnez-vousLe 03/11/2015 à 14h44
“Deux députées veulent couper les bourses aux jeux vidéo sexistes”
“Fichier FSPRT : quand le secret défonce”
C’est quoi votre recette ? Car là on est même pas vendredi !
Pour en revenir à l’article. C’est normal, on ne peut pas exiger transparence totale et sécurité, mais certains détails ne devraient pas à être déclaré “secret défense”. Le problème est bien dans le positionnement du curseur “vous pouvez connaître, ou c’est secret”. La tendance est de pousser à dévoiler le plus de chose possibles.
Le 03/11/2015 à 14h47
après Xavier, Marc s’y met aussi… la compétition est rude!
Donc, sous couvert de sureté d’état, on va encore nous surveiller sans que l’on sache ni qui, ni quoi, ni comment, ni pourquoi et sans possibilité de changer cet état de fait. c’est engageant, cette République “démocratique”.
Le 03/11/2015 à 14h48
« ce document n’est pas davantage communicable au titre de la loi CADA, car ce sont bien les caractéristiques du traitement mis en œuvre qui touchent à la sûreté de l’État et à la sécurité publique ».
A force connaisse les demandes des habitués." />
Le 03/11/2015 à 15h04
Le 03/11/2015 à 15h04
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Le 03/11/2015 à 15h05
L’argument “Nul n’est censé ignoré la loi” n’est donc plus valable dans le cas de décret non divulguable ? " />
Le 03/11/2015 à 15h10
Pauvres barbus pédiatres terrorisés par ce qui se passe dans une scierie… cette loi est pour vous.
Le 03/11/2015 à 15h11
my2cents:
“FSPRT : Fichier de Sécurisation des Personnes à Risque Terroriste”
Le 03/11/2015 à 15h13
il fait peur le monsieur de la photo… :‘(
Sinon, c’était une évidence que l’on serait tous fiché.
Le 03/11/2015 à 15h14
Sous En silence dans les rangs ! " />
Le 03/11/2015 à 15h20
Le 03/11/2015 à 15h21
Le 03/11/2015 à 15h29
Je pensais plus à Equilibrium (un de mes films préférés) mais ne connaissant pas Gataca, je vais m’empresser de corriger cette erreur.
Le 03/11/2015 à 15h33
Le 03/11/2015 à 15h42
Toi et moi on s’en souviendra mais dans 2-3 générations ils trouveront ça normal, voir même indispensable. Et bientôt on devra se cacher pour faire des enfant non connecté " /> (c’est pas un film ça ? )
Le 03/11/2015 à 15h56
L’adage n’a de toute façon jamais eu force de loi.
Le 03/11/2015 à 14h38
On vous l’a montré dans retour vers le futur, en 2015 on sera tous fiché " />
Le 03/11/2015 à 14h39
Vous êtes en forme sur les titres aujourd’hui !! " />
Le 03/11/2015 à 14h42
L’intérêt de l’usage du secret est vraiment proche du néant. Les gens qui se pensent terroristes savent qu’ils sont fichés, l’existence d’un fichier ne changera rien.
Par contre, faire un fichier contenant tout les acteurs de la vie publique (journalistes, syndicalistes, bénévoles, militants politique, geek ou hacker…) a un sacré intérêt pour le gouvernement. Et surtout que personne ne sache qu’il existe.
Mais on s’en souviendra…
Le 03/11/2015 à 16h03
“Fichier de Surveillance des Populations Résidant sur le Territoire”
Le 03/11/2015 à 16h09
“De fait, les seuls élements disponibles, épinglés par Numérama, ont été diffusés en avril dernier, dans le rapport de Jean-Pierre sur les filières djihadistes”
Sacré Jipé! " />
[sinon question technique: on fait comment pour quoter une news?]
Le 03/11/2015 à 16h10
Vivement les Régionales.
Au revoir le PS " />
Le 03/11/2015 à 16h15
Fichier de Suivi des Personnes à Risque Terroriste?
Le 03/11/2015 à 16h15
Le 03/11/2015 à 16h34
Au passage, à quoi de faire un système démocratique si c’est pour autoriser de pareilles dérogations au débat démocratique ?
D’ailleurs, est ce que le risque terroriste est si grave que cela justifie pareilles mesures ?
Le terrorisme ne fait que quelques dizaines de morts par an. Même si c’est triste, ce n’est rien à côté des 10000 à 20000 morts par an (selon une étude de l’inserm) causés par le chômage.
Le 03/11/2015 à 16h38
J’ai pensé peu ou prou la même chose en lisant l’article " />
Le 03/11/2015 à 16h40
Le 03/11/2015 à 16h42
Le 03/11/2015 à 16h42
merci, j’utilisais les <>, et forcément ça marchait pas. ^^
Le 03/11/2015 à 16h44
On doit pas être loin à mon avis. ^^
Le 03/11/2015 à 17h11
” le ministère de l’Intérieur a publié au Journal officiel du 1er novembre un décret au contenu secret.”
Non.
“Publier” un décret “secret”… il y a une contradiction.
En fait, le JO mentionne le décret pour dire… qu’il n’est pas publié.
Certes, ça revient au même, mais, ô inpactitude…
Le 03/11/2015 à 18h02
C’est pas une campagne sur les déviances politiques ? Bah oui : Fisitiniere, Ses Pratiques : Réel Traumatismes ? 😂
Je suis déjà loin —>[]
Le 03/11/2015 à 18h14
Si c’était pour le terrorisme, ils auraient crié haut et for qu’ils veulent nous protéger…
Donc, c’est le Fond de Surveillance Pour le Reluquage de Tétons.
C’est du pron, c’est censuré, et ils ne voudraient pas qu’on sache qu’ils dépensent nos impôts pour se rincer l’œil.
Le 03/11/2015 à 18h44
Le 03/11/2015 à 18h58
Le 03/11/2015 à 20h23
Finalement pourquoi en parle-t-il ?
C’est un truc je ne peux pas vous dire ce que c’est mais on vient de le faire …
Le 03/11/2015 à 21h48
Le 04/11/2015 à 05h53
Le 04/11/2015 à 15h11
Les terroristes n’ont plus qu’à utiliser la poste, jusqu’à preuve du contraire, le gouvernement ne décachète pas les lettres.
Le 04/11/2015 à 16h39
Le 04/11/2015 à 17h13
Il faudrait lire le contenu des liens !
Il est écrit dans les 2 alinéas “ hors les cas prévus par la loi,”.
Et il s’agit dans le premier alinéa effectivement du courrier “papier” de La Poste (ou tout autre service de transport de courrier) et dans le second, de communications électroniques ou de télécommunications.
On est justement dans des cas prévus par la loi quand il s’agit de récupérer les échanges de supposés terroristes.
Le 06/11/2015 à 09h05
Je te rassure, j’avais bien lu le lien que j’ai posté.
Et il dit qu’il ne voit pas le rapport.
Quels sont les cas prévus par la loi permettant d’ouvrir le courrier postal?
Source?
Est-ce appliqué?
Source?
….
bref.