Le législateur s’apprête à encadrer l’usage des « caméras-piétons » par les forces de l’ordre
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Le 15 février 2016 à 14h02
4 min
Droit
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Utilisées depuis 2013 à titre expérimental, l’usage de « caméras-piétons » par les policiers et gendarmes devrait (enfin) être spécifiquement encadré par le législateur. Le gouvernement prévoit d’y allouer plus d’un million d’euros par an, afin que chaque patrouille en soit équipée « à moyen terme ».
Ce n’est finalement pas au travers du projet de loi « Égalité et citoyenneté » que le gouvernement compte lever les zones de flou juridique entourant l’utilisation de ces appareils embarqués par les forces de l’ordre, mais grâce au dernier texte sécuritaire porté par le nouveau Garde des sceaux, Jean-Jacques Urvoas. Habituellement installées au niveau de la poitrine, ces caméras posent effectivement question... Les vidéos réalisées dans des lieux privés sont elles licites ? Quid du consentement des personnes filmées par les policiers et gendarmes (qui sont les seuls à décider de lancer l’enregistrement) ? Qu’en est-il de la durée de conservation des données capturées – images et sons ?
L’article 32 du projet de loi « renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l’efficacité et les garanties de la procédure pénale » vient répondre à toutes ces questions. Les agents de la police nationale et les militaires de la gendarmerie nationale sont expressément autorisés à « procéder en tous lieux, au moyen de caméras individuelles, à un enregistrement audiovisuel de leurs interventions ».
L’enregistrement ne devant pas être permanent, un « signal visuel spécifique » devra indiquer que la caméra fonctionne. « Le déclenchement de l’enregistrement fait l’objet d’une information des personnes enregistrées, sauf si les circonstances l’interdisent » ajoute le projet de loi, sans préciser comment se matérialisera cette « information ». Les forces de l’ordre pourront quoi qu’il en soit choisir d’activer leur caméra-piéton quand bon leur semble, dès lors qu’un « incident se produit ou, eu égard aux circonstances de l’intervention ou du comportement des personnes concernées, est susceptible de se produire ».
Les images seront conservées pendant six mois avant d’être effacées (sauf si elles doivent être utilisées dans le cadre d’une procédure judiciaire, administrative ou disciplinaire). L’agent qui a réalisé un enregistrement ne pourra en aucun cas y avoir « accès directement ».
Les vidéos sont censées servir à :
- Constater des infractions et poursuivre leurs auteurs.
- Prévenir des incidents pouvant survenir au cours des interventions des forces de l’ordre.
- S’assurer du respect, par les gendarmes et policiers, « des obligations leur incombant ».
- Améliorer la formation des agents.
Une généralisation à plus d'un million d’euros par an
L’objectif du gouvernement est clair : équiper à terme « chaque patrouille intervenant sur le terrain de ce dispositif ». Mais de l’aveu même de l’exécutif, la généralisation des caméras-piétons aura « des conséquences financières importantes ». L’étude d’impact annexée au projet de loi indique en effet que « le coût d’une caméra est actuellement de 1 200 euros, avec des tarifs préférentiels en cas de commande de masse ». À la fin de l’année 2015, poursuit le document, les services de la direction générale de la police nationale et de la préfecture de police étaient dotés de 1 584 caméras-piétons. « En 2016, 373 caméras supplémentaires seront livrées. »
On apprend au passage que la « généralisation du déploiement pour les agents de la police nationale dès 2016 peut être estimée à 1,2 million d’euros par an en cas de maintien du rythme initialement prévu de 1 000 caméras par an, avec au surplus un coût de 150 000 euros annuels pour les serveurs de stockage ».
Les bénéfices à attendre de ces caméras-piétons ne sont quant à eux pas précisément mesurés, le gouvernement se contentant d’affirmer que « l’effet modérateur du dispositif a été constaté par les forces de l’ordre : il permet souvent d’apaiser une situation tendue ou tendant à se dégrader ». Et l'étude d'impact d'ajouter, toujours sans avancer de chiffre : « D’une manière générale, la captation d’images et de sons tend à dissuader les mauvais comportements et les écarts de langage des personnes contrôlées. Enfin, les caméras piétons représentent un outil utile pour l’identification de mis en cause et permet d’accréditer les propos des policiers lors des interpellations, notamment pour les faits d’outrage et rébellion. »
Le législateur s’apprête à encadrer l’usage des « caméras-piétons » par les forces de l’ordre
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Une généralisation à plus d'un million d’euros par an
Commentaires (40)
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Abonnez-vousLe 15/02/2016 à 15h25
Le 15/02/2016 à 15h35
Parce que toi t’es normal (je crois ?).
Le délinquant de base, lui, il sait que si tu sors la matraque il aura des marques qui prouveront qu’il a subit des violences. Et avec ça, il pourra essayer d’entuber le système en te provocant puis en faisant croire qu’il n’avait rien fait, et que t’as juste abusé de la force, ce qui lui vaudra de bonnes grosses indemnités.
Par contre, avec une caméra qui tourne, c’est une autre histoire !
Le 15/02/2016 à 15h43
Attendu de pieds fermes en Belgique, surtout pendant les alertes lvl 4
Le 15/02/2016 à 15h51
D’un côté, sortir la matraque (et l’utiliser) sur une personne qui t’a uniquement insulté, ça me semble être la parfaite définition de l’usage excessif de la force.
Le 15/02/2016 à 15h59
C’est sûr qu’Alliance va faire la gueule.
Le 15/02/2016 à 16h08
Le citoyen sera-t-il en droit d’exiger que l’échange avec les policiers soit enregistré ? Du genre “je me ferai un plaisir de vous répondre dès que je verrai la petite lumière verte sur votre torse, en attendant je vous prie de bien vouloir me laisser circuler”.
A force de bavures, les flics finiront par y parvenir.
Le 15/02/2016 à 16h24
Ah enfin, ça évitera les fameux abus de délit d’“outrage à agent” complètement pipo (et organiser en douce entre les agents des forces de l’ordre pour se protéger eux-mêmes) avancés pour justifier des arrestations et des gàv musclées, parfois qui ont mené à la bavure.
“Vous comprenez ce monsieur est mort d’un AVC en gàv, mais on a eu du mal à l’interpeller après un délit d’outrage à agent” " />
Le 15/02/2016 à 17h07
S’est très mal connaître leur boulot et les conditions d’interpellations de certains individus.
Des mecs complémentent bourré ou sous influence de produits, insultants, crachant au visage et j’en passe faut bien les calmer et les interpeller et un problème de santé du à la consommation de certains produits ça arrivent
Tu es le genre à dire bavure policière en regardant les 10 secondes d’une vidéos ne montrant que la fin de la scène ou 4 policiers ou gendarmes arrêtent un peu brutalement un type qui hurle qu’il n’a rien fait.
Étrangement lors de contrôle je n’ai jamais eu affaire à un policier vulgaire ou zélé, à croire que le sort s’acharne sur certains…
Le 15/02/2016 à 20h15
Bientôt de la vidéoprotection mobile." />
Le 15/02/2016 à 20h35
Euh, moi j’appellerais ça de la vidéo-surveillance plutôt … ils ne sont pas censés te protéger avec ces caméras
" />
Le 15/02/2016 à 20h43
Le 15/02/2016 à 20h44
Je le sais, mais c’est sous le terme de vidéoprotection que le gouvernement fait passer la vidéo-surveillance, car cela passe plus facilement auprès de l’usager moyen.
Le Monde
Le 15/02/2016 à 22h09
Tu as intérêt à marcher droit, citoyen ! " />
Le 15/02/2016 à 22h40
ca existe depuis des années aux uk et us
pourquoi on se pose autant de questions ?
de toute facon on est déjà filmé dans les lieux publics, donc ^^
par contre ils auraient pu faire un partenariat avec GoPro…..pas l’air trop minimaliste leur cam’ ^^
Le 16/02/2016 à 09h13
Les cameras piétons ont entre 1minutes et 30 secondes de temporisation.
Elles filment en mauvaise qualité 720p.
Et le coup pour une camera est de plus de 700€, prix spécial administration
Le 16/02/2016 à 10h52
Tout à fait !
Je faisais allusion à l’utilisation juridique de ces images. Tout comme pour les policiers.
Pour être plus précis, tu dois demander une autorisation à la CNIL pour filmer un point fixe d’un lieu public (cas typique des caméras de sécurité braquées devant ta porte d’entrée, et qui prennent aussi un morceau de trottoir)
Pour filmer un point non fixe (donc dashcams et autres), tu es libre de le faire.
Ces images, tu as le droit de les diffuser dans un cadre strictement privé et détouré (famille, amis) mais pas de leur donner le fichier vidéo.
Ça c’est pour l’aspect général.
Maintenant, le flou dont je parle, c’est quand tu veux utiliser la vidéo de ta dashcam (ou de ta GoPro en pendentif si t’es piéton) pour prouver ton innocence ou ta bonne foi, ou pour disculper quelqu’un, ou accuser, si tu as été témoin d’un acte de violence ou d’un truc qui va en justice.
C’est du “problème” de ces 3 points que je parle. C’est illogique. Quand on poursuit quelqu’un en justice, si un vidéo existe, qu’elle soit prise par une caméra de sécurité ou par ta gopro-pendentif, c’est une preuve indiscutable ! Une fois qu’une expertise atteste l’authenticité de la vidéo, ça devrait pouvoir être pris en compte. Je crois que beaucoup d’affaires pourraient se régler avec ça.
Le 15/02/2016 à 14h05
Un petit oeil sans paupière " />
Le 15/02/2016 à 14h12
“Améliorer la formation des agents.”
Tu vois Paulo, ça, t’avais pas le droit de le faire. Que je ne t’y reprenne plus. Et vas lui rendre visite, ils l’ont sorti du bloc opératoire à cette heure.
“S’assurer du respect, par les gendarmes et policiers, « des obligations leur incombant »”
Qui leur décombe. " />
Le 15/02/2016 à 14h12
L’enregistrement ne devant pas être permanent, un « signal visuel spécifique » devra indiquer que la caméra fonctionne. « Le déclenchement de l’enregistrement fait l’objet d’une information des personnes enregistrées, sauf si les circonstances l’interdisent » ajoute le projet de loi, sans préciser comment se matérialisera cette « information ».
Ça va, on pourra toujours taper et allumer la caméra ensuite " />
Le 15/02/2016 à 14h12
Bon faut dire que la majorité des interventions se passent dans des lieux publics non? Là où la captation sans consentement n’est pas interdite mais juste sa diffusion. Au final le soucis se posent bien réellement pour les interventions à domicile où là effectivement la loi interdit la captation d’image sans le consentement des personnes.
“Police dans 3 secondes on va défoncer votre porte et vous interpeller mais avant ça on voudrait votre autorisation pour filmer l’interpellation?” lol
Mais au final comment ça se passe dans les reportages à la con de W9 et compagnie? On a régulièrement des interventions filmés à 6h du matin chez Akim le dealer des hauts de Seine. Pourtant je doute qu’ils ont demandé son avis pour le filmer?
D’ailleurs je comprend même pas qui donne l’autorisation de diffusion? Parce que même si le visage est flouté j’espère bien que la personne à son mot à dire même si c’est un “criminel”. Je vois pas ce qui justifierai de perdre son droit à l’image lors d’une arrestation pour un délit n’ayant rien à voir avec.
Le 15/02/2016 à 14h15
Le 15/02/2016 à 14h17
Le 15/02/2016 à 14h17
Le 15/02/2016 à 14h23
« procéder en tous lieux, au moyen de caméras individuelles, à un enregistrement audiovisuel de leurs interventions »
Donc ils auront le droit de filmer des lieux privés ? Tant qu’il y a un voyant qui l’indique, on ne peut s’y opposer ? " />
Encore mieux que le télécran " />
Le 15/02/2016 à 14h27
« D’une manière générale, la captation d’images et de sons tend à dissuader les mauvais comportements et les écarts de langage des personnes contrôlées. »
Je sais pas vous, mais moi c’est plus la matraque qui me dissuade !
Le 15/02/2016 à 14h29
perso avoir des flics qui patrouillent avec des caméras ou des flics qui reste au poste en surveillant les caméras de rue …. j’ai une préférence pour les patrouilles lol
Le 15/02/2016 à 14h50
Et à quand un encadrement législatif ou juridique sur les dashcam pour le citoyen ? Et pourquoi pas la caméra piéton pour le citoyen également… Ya pas de raison !
Le 15/02/2016 à 14h56
Le 15/02/2016 à 14h57
" />
" />
Le 15/02/2016 à 14h59
Le 15/02/2016 à 15h00
Pour moi ca devrait enregistrer en permanence que ce soit pour limiter les abus des 2 bords en amont ( “ oups j ai oublié d activer la camera et monsieur est tombé sur ma matraque ” ou les insultes/lancers de pierre non anticipés …liste non exhaustive) et ensuite si il y a procédure derrière pour une procédure + expéditive derrière car il n y aura ps besoin de semaines pour essayer de prouver ou non ce qui s’est passé….
Après oui il y a des difficultés techniques , mais pas insurmontables ( recharger toutes les 2-4 heures avec transfert des images en même temps , des heures de démarrage d’enregistrement en décalé entre membres du même groupe etc….)
Le 15/02/2016 à 15h05
Le 15/02/2016 à 15h07
Tu payes le stockage et toute sa logistique avec tes impôts ?
2000 caméras h24, et c’est le début.
Le 15/02/2016 à 15h09
Je suis à la recherche d’un bon filtre Instagram pour éclaircir les visages. Que me conseillez-vous.
Le 15/02/2016 à 15h11
L’article 9 est plus large que ça, il s’oppose à la captation simple sans consentement, pas qu’à la diffusion. Le consentement tacite est en revanche admis donc faut il faut s’y opposer directement. Et le préjudice est constitué par la simple captation sans consentement (exemple récent avec Le Pen).
Pour revenir à ton premier commentaire, si les criminels sont floutés, la question de leur consentement pour la diffusion ne se pose pas vu qu’on ne peut pas les reconnaître.
Le 15/02/2016 à 15h17
Le 16/02/2016 à 10h57
720p c’est pourtant bien assez pour identifier clairement plusieurs individus sur une seule image !
Le 16/02/2016 à 11h52
Le 16/02/2016 à 12h08
Le 18/02/2016 à 13h57
Je ne vois pas bien le rapport avec mon commentaire ou avec celui auquel je réponds…
On compare l’effet dissuasif d’une caméra et d’une matraque ici.