L'entreprise ferme officiellement son outil d'analyse de ses réseaux sociaux CrowdTangle. Cet outil, ouvert aux journalistes suite à l'affaire Cambridge Analytica et dont l'accès a été ensuite étendu aux chercheurs, permettait de suivre la façon dont étaient discutés les sujets d'actualité sur Facebook et Instagram, notamment les élections. La Commission européenne s'inquiète de cette fermeture et enjoint Meta de s'expliquer alors que le nouveau DSA oblige les réseaux sociaux à proposer ce genre d'outil.
Le 14 aout, Meta a fermé CrowdTangle. Cet outil d'analyse de données de réseaux sociaux a été racheté par Facebook en novembre 2016, quelques mois après la révélation du scandale de Cambridge Analytica.
Un outil laissé à l'abandon depuis quelque temps
Dès janvier 2017, l'entreprise annonçait ouvrir son accès aux médias après avoir recentré l'outil sur l'analyse des données des réseaux du groupe (Facebook et Instagram). Facebook ouvrait ensuite au compte-gouttes l'accès de cette plateforme d'analyse aux chercheurs qui la contactaient. Pendant la crise du Covid-19, l'entreprise permettait encore plus largement aux chercheurs d'accéder à l'outil.
Mais, comme nous l'expliquions l'année dernière, l'entreprise s'est désintéressée depuis du projet. Sa fermeture ce 14 aout n'est que la confirmation de ce qu'expliquait l'ancien PDG de CrowdTangle, Brandon Silverman, devant la Commission judiciaire du Sénat des États-Unis en 2022. « Cet outil est en train de mourir », affirmait-il.
Une fermeture qui a fait réagir
Réagissant à l’annonce publiée en mars par Meta de la fermeture de CrowdTangle, Mozilla avait publié une lettre ouverte demandant à Meta de garder l’« approche CrowdTangle ». Le texte affirmait que « la décision de Meta interdira effectivement au monde extérieur, y compris aux experts en intégrité électorale, de voir ce qui se passe sur Facebook et Instagram - au cours de la plus grande année électorale jamais enregistrée. Cela signifie que presque tous les efforts extérieurs visant à identifier et à prévenir la désinformation politique, les incitations à la violence et le harcèlement en ligne des femmes et des minorités seront réduits au silence. C'est une menace directe pour notre capacité à préserver l'intégrité des élections ».
De son côté, la Coalition for independent technology research a lancé, le jour de la fermeture de l’outil, le site RIP CrowdTangle. « Des milliers de personnes à travers le monde l'ont utilisé pour découvrir les ingérences étrangères dans les élections, traquer les extrémistes opérant en ligne, surveiller la diffusion de discours haineux, et bien plus encore » est-il expliqué. La coalition de chercheurs organise des funérailles symboliques le 30 septembre en visio-conférence sur Zoom et sur le campus de l’université Georgetown à Washington DC.
La Commission demande à Meta de garder des outils d'analyse conformes au DSA
Vendredi 16 aout, la Commission européenne réagissait à cette fermeture en réclamant à Meta des explications avant le 6 septembre sur « les mesures qu'elle a prises pour se conformer à ses obligations de donner aux chercheurs l'accès aux données qui sont publiquement accessibles sur l'interface en ligne de Facebook et d'Instagram », conformément à ce qu'exige le DSA.
L'institution européenne explique avoir ouvert une enquête pendant la campagne des élections européennes, fin avril. Celle-ci portait justement sur le manque d'outil efficace pour analyser en temps réel les discussions qui se déroulaient sur Facebook et Meta, « ainsi que sur les lacunes de Meta en ce qui concerne l'accès des chercheurs aux données accessibles au public », explique la Commission.
Elle ajoute que, suite à l'ouverture de cette enquête, Meta a déployé fin mai de nouvelles fonctionnalités dans CrowdTangle et notamment un tableau de bord par pays européen permettant l'analyse du discours citoyen en temps réel pendant ces élections. Mais l'accès a ces fonctionnalités étaient donc très temporaires puisque l'outil est maintenant inaccessible.
Après la réaction de la Commission, Meta a redirigé l'URL de CrowdTangle vers un message posté sur son Centre dédié à la Transparence de l'entreprise. Celui-ci répond à l'institution :
« La Bibliothèque de contenu Meta et l’API Content Library fournissent des données utiles et de haute qualité aux chercheurs et chercheuses. La Bibliothèque de contenu Meta a été conçue pour nous mettre en conformité avec les nouvelles exigences réglementaires en matière de partage des données et de transparence, tout en respectant les strictes normes de sécurité et de confidentialité de Meta ».
Reste à savoir si la Commission considérera que ces bibliothèques remplissent le rôle d'outils d'analyse pour les chercheurs exigé par le DSA.
Commentaires (12)
#1
"C'est la faute à CrowdStrike."
#1.1
#1.2
Ça ferait 8 milliards de $ pour le CA de 2023.
Historique des modifications :
Posté le 19/08/2024 à 12h59
L'amende pour violation du DSA peut atteindre 6 % du CA mondial. Je doute qu'ils n'en aient rien à carrer.
#1.3
8 milliards ça permet de financer pas mal de trucs (sur les 239 183.2 millions de dépense de l'UE en 2018 ça se prend).
#2
#2.1
#2.3
Tu penses que c'est une réduction budgétaire ?
#2.2
Voir https://www.ledevoir.com/economie/816686/silicon-valley-rival-trump-est-il-mark-zuckerberg par exemple
De là à dire que c'est un démocrate...
#3
#3.1
Alors oui, il y aura toujours des VPN utilisables, mais si 10% des utilisateurs Européens de ces sites en utilisent un après coup, c'est le bout du monde.
#3.2
#3.3