La fermeture des messageries dans les écoles est totale : ENT, Pronote, Pearltrees…
Comme dirait Gibert : Alerte générale !
Face à la vague importante de piratages des messageries, Nicole Belloubet annonce la fermeture de toutes les messageries des écoles. Cela concerne les ENT, mais également toutes les applications, comme Pronote. La ministre veut mettre en place « des mesures supplémentaires [...] à plus grande échelle » dès la rentrée prochaine.
Le 29 mars à 11h21
7 min
Société numérique
Société
Hier, Nicole Belloubet, ministre de l’Éducation nationale, a annoncé que, suite aux piratages et menaces, elle a « décidé de suspendre à titre préventif toutes les messageries des espaces numériques dans nos établissements scolaires. Avec les représentants des élus et les éditeurs, nous allons déployer un véritable bouclier numérique ».
Plus de 100 établissements ciblés
Cette semaine était effectivement chargée pour l’éducation nationale, avec des piratages en série contre les espaces de travail numérique, les fameux ENT. Ils sont différents en fonction des régions, des académies et des établissements ; il n’y pas d’uniformité.
Mais c’est quoi un ENT déjà ? Éduscol le définit comme « un ensemble intégré de services numériques choisis et mis à disposition de tous les acteurs de la communauté éducative d'une ou plusieurs écoles ou d'un ou plusieurs établissements scolaires dans un cadre de confiance défini par un schéma directeur des ENT et par ses annexes ». On y retrouve de nombreux outils et application, ainsi qu’une messagerie.
Lundi, le ministère s’est fendu d’un communiqué de presse pour faire le point : « Au total, près de 130 établissements scolaires ont été ciblés par des actes malveillants visant les environnements numériques de travail (ENT) depuis la semaine dernière ».
Hier, le ministère indiquait à l’AFP que « au total, 323 menaces, dans 44 départements et 20 académies, ont été lancées en France depuis le milieu de la semaine dernière ». Le parquet de Paris indique à nos confrères qu’un « jeune homme de 17 ans avait été interpellé et placé en garde à vue à Malakoff, dans les Hauts-de-Seine, dans l’enquête sur les menaces d’attentats envoyées à des établissements scolaires ».
Un point de situation avec les éléments marquants des derniers jours était mis en ligne :
Des attaques menées grâce à la récupération d’identifiants
En début de semaine, l’hypothèse la plus probable de la cause des piratages était « la publication sur internet de nouvelles bases de données d’identifiants volés, qui contiennent, entre autres, des identifiants d’accès à des ENT ». Et, « dans une moindre mesure, une partie des identifiants volés peut aussi être issue de campagnes d’hameçonnage réussies ». Pas de faille à proprement parler, mais une réutilisation d’identifiants récupérés. Nicole Belloubet a d’ailleurs assuré mercredi à l’Assemblée nationale qu'« à ce stade, il n'y a pas de fuite massive de données ou d'attaque en règle de nos systèmes d'information ».
Selon le ministère, la première vague d’attaques massives a débuté le jeudi 21 mars. Les menaces, notamment avec « une vidéo très violente », ont ciblé 74 lycées de la région Ile-de-France. Cette dernière « a ouvert une cellule de crise et décidé de l’arrêt de l’ENT ». La messagerie a de nouveau été ouverte le mercredi 27 mars matin.
On apprend au passage que la fermeture avait aussi été décidée pour que les messages malveillants « soient supprimés des boites et que chacun puisse accéder à son compte de manière sécurisée ». Les autorités ont été informées, des « plaintes pénales ont été déposées et la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) a été notifiée ».
Pendant une semaine, chacun mène son action dans son coin
Ce n’est pas la seule, la région Nouvelle-Aquitaine aussi a fermé les portes de sa messagerie dès la semaine dernière : « Suite à la diffusion de messages malveillants touchant plusieurs ENT dans toute la France, nous avons fermé à titre préventif le service de messagerie vendredi 22 mars au matin ».
La région confirme au passage que ces cyberattaques « viennent de cas d'usurpation d'identité. Celles-ci sont majoritairement commises soit par l'intermédiaire de logiciels espions installés sur des postes informatiques, soit par la constitution par des pirates de sites Internet miroir ». Elle rappelle donc à chaque utilisateur « de rester extrêmement attentif », une règle de base que l’on doit suivre en toute circonstance, pas seulement en période de crise.
Ce lundi, la plateforme ENT Lycée Connecté de Nouvelle Aquitaine expliquait avoir été « jusqu'à présent épargnée par cette cyberattaque » et a donc décidé de rouvrir sa messagerie. Ce matin, elle est encore fonctionnelle, malgré l’annonce de la fermeture par Nicole Belloubet.
La fermeture concerne toutes les messageries
En effet, la ministre annonçait hier « suspendre à titre préventif toutes les messageries des espaces numériques dans nos établissements scolaires ». Elle précisait que cela durerait « jusqu’aux vacances de printemps sans doute ». Elles débuteront dans une à trois semaines en fonction des zones et dureront deux semaines.
Contacté, le service presse du ministère nous confirme que la décision concerne bien tous les ENT de France, sans exception. Pour les messageries encore ouvertes, la fermeture va donc se faire progressivement, ajoute le service presse. Elle est déjà effective en Île-de-France, mais pas encore en Nouvelle-Aquitaine ; n’hésitez pas à nous signaler ce qu’il en est dans votre région via les commentaires.
Nous avons aussi demandé des précisions au ministère sur le périmètre d’action de cette fermeture : la mesure concerne-t-elle uniquement les messageries dans les ENT au sens propre ou toutes les applications avec une messagerie, comme Pronote et Pearltrees, pour ne citer que ces deux-là. Réponse du ministère : ce sont bien toutes les messageries qui vont fermer. Là encore, la coupure est progressive, sans indication sur le délai nécessaire.
De son côté, le site Monlycee.net de la région Île-de-France va plus loin et impose un changement de mot de passe, de manière urgente : « le renouvellement obligatoire de votre mot de passe Monlycee.net est prévu le vendredi 29 mars 2024 à partir de 17 h 00. À la suite de ce renouvellement, vous devrez réinitialiser votre mot de passe ».
Des cyberattaques tous azimuts contre les institutions
Ce n’est pas la première fois que l’éducation nationale fait face à une vague de cyberattaques. On se souvient, par exemple, des classes virtuelles durant les confinements. Elles ont été confrontées à leur lot d’intrusions, d’insultes et de menaces, face à des enseignants parfois démunis et laissés pour compte par leur administration. Citons également la plateforme Ma classe à la maison du CNED ciblée par des pirates en avril 2021.
De manière générale, on l’a vu avec la continuité pédagogique, les moyens alloués au numérique, à la cybersécurité et la cyberrésilience sont insuffisants en France. La ministre annonce qu’à partir de la rentrée 2024, « des mesures supplémentaires seront prises à plus grande échelle, académie par académie et en lien avec les collectivités, notamment pour renforcer les modalités d’authentification sur les outils numériques relevant de l’Éducation nationale ».
À plus court terme, elle souhaite « restreindre les droits d’envoi de message au sein de l’ENT au strict nécessaire, puisque seuls les personnels administratifs et de direction de l’EPLE [Établissement public local d'enseignement, ndlr] peuvent envoyer des messages à l’ensemble des élèves et parents d’élèves ».
Il faudrait mettre cette politique en place dans de nombreux services publics, en témoignent les vagues de cyberattaques réussies contre diverses institutions ces derniers mois. Comme expliqué dans un édito, Internet devient un annuaire à ciel ouvert des Français avec toutes les fuites successives.
La fermeture des messageries dans les écoles est totale : ENT, Pronote, Pearltrees…
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Plus de 100 établissements ciblés
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Des attaques menées grâce à la récupération d’identifiants
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Pendant une semaine, chacun mène son action dans son coin
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La fermeture concerne toutes les messageries
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Des cyberattaques tous azimuts contre les institutions
Commentaires (33)
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Abonnez-vousLe 29/03/2024 à 12h05
Le 29/03/2024 à 14h20
Ici il s'agit simplement de mettre le boxon à l'Education Nationale.
Le 29/03/2024 à 14h38
Sinon, c'est vrai: on s'attribue l'attentat après, pas avant.
Le 29/03/2024 à 15h01
Le 29/03/2024 à 15h18
Le 29/03/2024 à 15h47
Et puis bon, les mailing-lists ont le même problème : soit elles sont modérées, et tu te retrouves avec le problème habituel des messages qui mettent une semaine à passer ; soit elles sont ouvertes, et le problème de départ revient.
Le 29/03/2024 à 14h51
Faire ça par e-mail ou courrier c’est pas la même histoire.
Le 29/03/2024 à 15h03
Le 29/03/2024 à 15h22
Modifié le 29/03/2024 à 16h06
Le 29/03/2024 à 12h25
C'est bon moyen pour éviter la compromission de compte.
Le 29/03/2024 à 12h30
Le 29/03/2024 à 12h45
Le 29/03/2024 à 12h44
Le 29/03/2024 à 13h45
Le 29/03/2024 à 13h04
Le 29/03/2024 à 14h15
Le 01/04/2024 à 15h36
Modifié le 29/03/2024 à 14h17
édit : arf, grilled :P
Le 29/03/2024 à 15h06
Le 29/03/2024 à 14h40
Pour les alertes via cet ENT, j'ai vu une capture d'écran: l'email n'avait pas d'expéditeur. Donc grosse faille, pas de compromission de compte j'imagine.
Le 29/03/2024 à 17h21
Le gouvernement : « Pas de soucis, on est prêt ! »
157 attaques réussies et vols de données plus tard
Le gouvernement : « Bah en fait, il va falloir qu'on durcisse tout ça. On va allouer des fonds après la rentrée. »
Fières d'être amateurs…
Le 29/03/2024 à 17h51
Le 29/03/2024 à 17h52
Quelques exemples aberrants :
Dans mon collège, le mot de passe admin de Pronote est le nom du collège. Le Principal trouve ça plus simple.
Mes collègues ont refusé la confirmation de première connexion Pronote sur un nouvel appareil par code Pin. Trop compliqué.
Dans le collège de ma fille, ils obligent les élèves à avoir tous la même structure de mot de passe (nom+ddn). Le prof de techno trouve ça plus simple.
Ça peut évoluer, mais il faudrait une formation rigoureuse. Depuis 20 ans que je bosse, la DSI n'a jamais sensibilisé les personnels sur la sécurité informatique alors que les usages ont explosé.
Le 30/03/2024 à 07h45
Le 30/03/2024 à 10h49
Le 30/03/2024 à 14h39
Potentiellement on a des millions de dossiers scolaires prêts à diffuser parce qu'on a pas une politique solide de sécurité.
Le problème, par rapport au privé, c'est que les usagers ont pas le choix de nous confier leurs données. Et je trouve que certains effectivement (mais nombreux quand-même) de mes collègues ne prennent pas la mesure de cela.
Le 29/03/2024 à 20h59
Les utilisateurs ayant des permissions de diffusion larges au niveau des destinataires des messages qu'ils peuvent envoyer (l'ensemble d'un établissement par exemple) et plus généralement pouvant avoir accès à des fonctions sensibles devraient être obligés de configurer une authentification multi-facteurs pour que ces possibilités soient ouvertes.
Problème : la majorité des ENT ne supportent même pas l'authentification multi-facteurs.
Pourtant, le SecurID de RSA (OTP matériel) est déjà déployé au sein de l'Education Nationale pour les personnels de direction pour l'accès aux applications de gestion des données des élèves SIECLE (2nd degré) et ONDE (1er degré) ; donc ils ont quand même un peu conscience de la nécessité de ce type d'authentification renforcée.
Maintenant, avec l'arrivée des clés d'accès/passkeys logicielles standardisées par la FIDO Alliance, ajouter une authentification multi-facteurs ne devrait plus être aussi coûteux et compliqué qu'avant.
Il faut juste une volonté et une impulsion politique derrière quoi ...
Modifié le 30/03/2024 à 09h59
Le 29/03/2024 à 23h47
Ce sont effectivement des comptes usurpés suite à de précédentes campagnes de phishing qui sont utilisés pour continuer à faire tourner des mails de phishing (notamment un qui proposait aux élèves de pouvoir changer leurs notes en se connectant).
Au final, les comptes de tous les enseignants ont été réinitialisés le lundi soir directement.
Ceux des élèves et parents sont en cours de réinitialisation.
Le 30/03/2024 à 09h50
Le 31/03/2024 à 17h54
Modifié le 10/04/2024 à 14h39
Il faut dire qu'on est passé au numérique plus tôt que les lycées. On a déjà commis les erreurs à une époque où c'était moins critique. Je me souviens qu'il y a une quinzaine d'années, voire un peu moins, les hashs des mots de passe stockés étaient accessibles depuis le réseau interne via le LDAP. 🤣
Et c'était du sha1 ou du md5, je ne me souviens plus.
Mais je m'étais amusé à faire un peu de force brute et j'avais en moins de deux minutes trouvé un mot de passe équivalent au miens (il y a beaucoup de collisions sur ces algorithmes obsolètes). Je l'avais testé, ça marchait.
L'information remontée, ça avait été très rapidement corrigé.