Les questions soulevées par la découverte de 39 galaxies invisibles
1..2..3.. Soleil !
Le 14 août 2019 à 15h04
6 min
Sciences et espace
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La découverte de 39 galaxies invisibles ou « noires » chamboule un peu nos connaissances et « ouvre les portes de la compréhension des premiers milliards d’années de l’histoire de l’Univers ». Après la matière et l'énergie « noires », voici une nouvelle énigme à résoudre.
Une douzaine de chercheurs de plusieurs nationalités ont publié il y a quelques jours dans Nature un article intitulé : « A dominant population of optically invisible massive galaxies in the early Universe ». Ils y relatent la découverte de 39 galaxies invisibles aussi appelées galaxies « noires ».
Le CEA et le CNRS expliquent en chœur que cette nouvelle est surprenante et importante car ces galaxies « constituent le chaînon manquant de l’évolution entre deux populations de galaxies déjà connues : les nombreuses galaxies jeunes et visibles de l'univers lointain d’une part, et les galaxies "mortes" [ne formant donc plus d'étoiles, ndlr], très massives et moins lointaines d’autre part ».
Leur détection n'a pas été simple puisqu'elles sont complètement invisibles pour plusieurs télescopes, dont Hubble. Ce dernier était en effet déjà passé dans les portions du ciel où elles se trouvent sans rien remarquer, alors qu'il a fallu « moins de deux minutes » au télescope Alma une fois pointé dans la bonne direction. Explications.
Remise en cause d'une partie de nos connaissances
Pour mieux comprendre de quoi il est question, David Elbaz – astronome du CEA et coauteur de la publication scientifique – propose une analogie : « On voit des galaxies [mortes] qui sont très massives, un peu comme des squelettes de dinosaures, mais on n’a toujours pas trouvé les dinosaures. Et là, on a vu l'ère où les dinosaures vivaient. Grâce au fait que la lumière met du temps à nous arriver on voit le passé ; c'est comme si on pouvait voir les dinosaures en vie il y a 65 millions d'années ».
Ces galaxies « noires » constituent « probablement la première population de galaxies elliptiques massives formées dans l'univers jeune », une période se situant entre quelques centaines de millions à deux milliards d'années après le Big Bang. Elles « étaient adultes, mûres et massives, à une époque où les galaxies étaient censées être des bébés ».
Si leur existence n'est pas forcément une surprise, le fait qu'elles soient « étonnamment abondantes » en est une pour David Elbaz. Selon le CEA, « 90 % des galaxies massives datant du premier milliard d'années après le Big Bang formèrent leurs étoiles de manière totalement invisible au télescope Hubble ». Ce n'est pas tout : « l'abondance de poussière interstellaire très supérieure à ce que prévoient les modèles représente également un nouveau défi à expliquer pour les astrophysiciens ».
Pour l'astronome, cette découverte soulève des questions : « Nos modèles actuels sont-ils capables d'expliquer une si grande efficacité pour donner naissance en un milliard d'années à des galaxies aussi massives que la Voie lactée ? La réponse est non... Aujourd'hui avec les recettes qu'on utilise pour expliquer le reste des observations de l'univers on ne peut pas les expliquer. Il va falloir modifier un peu notre compréhension de la physique interne des galaxies ».
Il tente une conjecture « Notre idée, c'est que ces galaxies ne sont pas nées n'importe où. Elles sont nées dans des lieux privilégiés qui sont probablement ceux où vont naître les plus grandes structures de l'univers : les amas de galaxies ».
Galaxies « noires » : Hubble n'a absolument rien vu
Le satellite Hubble a scruté le ciel pendant des années, y compris les endroits où se trouvent les galaxies « noires », mais il n'avait rien remarqué. Ces galaxies sont en fait enveloppées de poussières interstellaires produisant « un effet d'écrantage en lumière visible » les rendant invisibles ; d'où la notion de « noire » en écho à la matière et l'énergie « noires ».
Les scientifiques sont en fait partis de « petites taches de lumière » sur des images du télescope spatial infrarouge Spitzer de la NASA. Leurs origines pouvaient être très variées, mais la faible résolution du télescope ne permettait pas de les identifier ou caractériser.
Oui, ils ont vérifié : au même endroit, « dans les clichés les plus profonds du télescope Hubble il n'y avait strictement rien ».
Gauche : quatre galaxies sur Hubble et Alma. Droite : cinq galaxies sur Hubble, Spitzer et Alma. Crédits : CEA/Nature
Le télescope Alma et sa cinquantaine d'antennes radio à la rescousse
Le télescope terrestre Alma (Atacama Large Millimeter/Submillimiter Array) a donc été appelé à la rescousse. Il se situe au Chili, dans le désert d'Atacama, à 5 000 mètres d'altitude. Le réseau principal d'Alma comprend une cinquantaine d'antennes de 12 m de diamètre, qui se comportent comme un unique télescope. On parle donc d'un interféromètre.
Alma est taillé sur mesure pour détecter les galaxies « noires » : « L'abondance de la poussière interstellaire est caractéristique de ces galaxies massives d'époques reculées. La poussière absorbe le rayonnement ultraviolet émis par les étoiles et réémet de la lumière dans l'infrarouge lointain qui est décalé jusqu'aux ondes submillimétriques par l'expansion de l'univers ». « On peut voir des étoiles naissantes dans des cocons de poussières dans des galaxies naissantes dans les deux premiers milliards d'années de l'univers », résume poétiquement David Elbaz.
En attendant le James Webb Space Telescope...
Pour l'astronome, cette découverte n'est que le début des travaux sur cette « mystérieuse » population de galaxies : « nous venons d'entrer dans l'ère du James Webb Space Telescope avant qu'il commence à travailler ». Le remplaçant de Hubble doit en effet être lancé en mars 2021 et couvrira une partie de l'infrarouge.
Les galaxies « noires » seront probablement l'un des enjeux majeurs pour ce satellite. Il permettra « très probablement de nous aider à réviser de façon majeure nos théories sur la formation des galaxies et donc sur l'histoire de la lumière dans l'univers ».
Les questions soulevées par la découverte de 39 galaxies invisibles
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Remise en cause d'une partie de nos connaissances
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Galaxies « noires » : Hubble n'a absolument rien vu
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Le télescope Alma et sa cinquantaine d'antennes radio à la rescousse
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En attendant le James Webb Space Telescope...
Commentaires (41)
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Abonnez-vousLe 16/08/2019 à 06h34
Dommage que l’était actuel de la publication scientifique pousse à l’utilisation de termes racoleurs.
Entre énergie noire, matière noire et maintenant galaxie noire, bonjour pour éviter la confusion chez les néophytes (d’autant plus qu’aucun des trois n’est noir…).
C’est encore pire pour ces galaxie puisqu’elle ne sont pas invisibles, seulement difficilement détectables avec nos moyens actuels car leurs rayonnements sont en partie masqués :/
Le 16/08/2019 à 07h13
Même pour des personnes qui s’y intéressent un peu comme moi. Ayant quelques notions ça reste déroutant et on en revient toujours à se dire “en fait, j’avais compris ?”.
Le 16/08/2019 à 08h03
Le 16/08/2019 à 08h11
Moi, ce que je vois, c’est qu’une partie de l’énergie noire ne l’est plus.
Et si on continue a chercher, il y en aura de moins en moins. " />
Le 16/08/2019 à 08h14
Le 16/08/2019 à 08h25
Pour le coup ça n’a rien à voir avec l’énergie noire ^^
(la confusion est donc totale, merci les dénominations racoleuses " />)
Le 16/08/2019 à 09h03
Tu as oublié les trous noirs …
Le 16/08/2019 à 13h57
Pour la peine, les trous noirs (ou singularités gravitationnelles si tu veux), c’est vraiment “des trous noirs” de la physique " />
Il y a a de plusieurs sortes, on comprend tout juste la formations de certains, et on ne sait pas ce qu’il s’y passe dépassé l’horizon des évènements.
Le 16/08/2019 à 19h27
Le 16/08/2019 à 21h32
Pourquoi incohérente? On parle de SF hein … on n’a pas dit qu’il serait posé par des humains :-)
Le 17/08/2019 à 08h10
Le 17/08/2019 à 11h02
Un sujet très intéressant, mais que je serais aller lire sur un autre média…
Le 17/08/2019 à 21h49
Le 18/08/2019 à 07h14
C’est bien avant que la lumière arrive sur le miroir qu’il faut le poser à la distance désiré. Mais il faut probablement le lancer avant que la lumière soit émise de la terre.
Admettons que tu veuille voir 5000 ans avant.
Il faut que tu place le miroir à 2500 années lumière et qu’il y soit présent 2500 ans avant maintenant (lancer en avance ou teleporter) pour que dans le présent tu vois des rayons qui ont fait l’aller retour entre le miroir et la terre en 5000 ans.
Si tu le lance a 99% de la vitesse de la lumière la oui il faut bien le lancer avant que la lumière parte, mais ça permettrais pas d’avoir une vue sur le passer, mais plutôt une rediffusion à partir du moment où ça a été lancer.
Si tu a la capacité de voyage plus rapide que la lumière (ou teleportation) tu place le miroir à la distance de 2500 année lumière et dans 2500 ans tu aura des images datant s’il y a 5000 ans (ou 2500 ans après que le miroir ait été poser)
Maintenant si tu a la capacité d’envoyer des objets dans le temps, tu a juste à mettre le miroir a 2500 années lumière 2500 ans avant et pouf tu a un live feed de a quoi on ressemblait il y a 5000 ans
Le 18/08/2019 à 08h57
C’est pas de l’énergie noire , c’est de la matière noire ( ou matière manquante ) et ce n’est qu’une hypothèse
Cette matière est déduite de la différence entre ce qui est observable et ce qu’on calcule dans les effets des forces gravitationelles .
Je ne suis pas un expert mais j’ai la chance d’avoir un vrai expert comme voisin.
Hélas il est à Paranal ( en train de bosser sur Sagitarius A avec le VLT) cette semaine et ne revient que dans quelques jours.
PS: je ne sais pas du tout d’ou viennent tes 45 milliards , puisque pour moi le temps n’a commencé qu’au bigbang .
edit : je viens de lire sur les 45 milliards , " />
Le 18/08/2019 à 09h44
Non pas du tout.
L’énergie noire et la matière noire sont une façon de designer une forme d’énergie ou de matière hypothétique dont on ignore la nature (et que l’on ne peut détecter, on sait juste qu’il y a quelque chose car on en détecte certaines conséquences).
Pour la “matière noire”, c’est le nom donné à environ 80% de la masse manquante de l’univers (par rapport à ce que l’on peut observer / détecter). On sait juste qu’elle déforme l’espace temps, mais n’interfère pas avec la lumière. Et ce n’est pas de la matière classique (peut être même pas de la matière tout cour), c’est juste que l’on arrive pas à expliquer le fonctionnement actuel de l’univers sans ces “80% de matière noire”.
En gros on ne sait pas ce que c’est, juste que ça interfère avec l’espace temps comme la matière, c’est tout.
Pour l’énergie noire, c’est le nom donné à l’énergie manquante pour expliquer l’expansion de l’univers que l’on observe (sans ça, d’après nos modèles actuels l’univers devrait ralentir sont expansion jusqu’à repartir en sens inverse). Même en ajoutant la matière noire, il manque encore énormément d’énergie pour coller à nos théories et observations, d’où le concept de “matière noire”.
Si tu es intéressé, voici une petite vidéo qui résume assez bien la chose :
https://www.youtube.com/watch?v=UVk3_e7xSz4
Ce sont donc des concepts théoriques actuellement utilisés pour désigner quelque chose dont on ignore presque tout mais qui est nécessaire pour faire fonctionner notre modélisation actuelle de l’univers :)
Rien à voir avec les “Galaxies noires” donc, qui sont juste des galaxies que l’on avait pas réussi à observer jusque là car notre matériel n’était pas apte à les détecter (et qu’on ne savait pas que des galaxies pouvaient être masquées de cette façon).
Le 18/08/2019 à 09h56
C’est bien ce que je critique : le fait qu’on soit obligé de faire du “putaclic” pour être financé :/
Le vrai titre aurait pu être :
“39 galaxies de l’univers primitif découvertes par une équipe de chercheurs”
Avec en sous titre :
“Jusque là passée inaperçue car invisibles à nos télescopes classiques.
Cette découverte ouvre la voie à de nouvelles techniques de détection des galaxies”
Cela éviterai toute les confusion comme le titre que tu propose (toi aussi tu as été piégé malgré toi) :
“galaxie n’émettant pas de lumière dans le spectre visible”.
C’est faux : elles émettent bien dans le spectre visible (comme des galaxies plus agées), mais cette lumière est masquées par les amas de poussières qui les entourent.
On peut parfaitement faire un titre clair et un intéressant sans tomber dans la publicité mensongère ^^
C’est dommage que la science en soit réduite à faire des réclame comme s’il s’agissait d’un produit commercial :/
Le 18/08/2019 à 11h55
Le 18/08/2019 à 13h45
Un poil moins que 13,8 milliards car les premiers temps de l’univers, j’ai cru comprendre qu’il n’y avait pas d’étoiles et que les gaz empêchaient toute lumière de passer. Il a fallu attendre plusieurs millions d’années pour que les étoiles fassent des trous dedans.
Le 18/08/2019 à 14h03
c’est le discount de 380000 ans que tu veux ?
" />
Le 19/08/2019 à 06h53
Dans ce cas là je n’ai rien à dire! C’est vrai que j’étais resté sur les humains " />
Le 19/08/2019 à 08h17
Mais rassure toi, tu as aussi les trous blancs (ou fontaines blanches) dans l’univers….
Le 19/08/2019 à 09h17
Peut-être, on en a pas encore trouvé et on ne voit pas comment ils pourraient se former…
Le 19/08/2019 à 09h58
J’ai des images pas très catholiques qui me viennent en tête.
Je sais, je suis un gosse. " />
" />
Le 19/08/2019 à 10h09
Le 19/08/2019 à 10h41
Woah, impressionnant l’interféromètre… 12 mètres de diamètre, et une cinquantaine ainsi " />
Le 19/08/2019 à 12h36
Entre les trous noirs et ceux faits par les étoiles, l’univers c’est du gruyère.
Où se trouve la croute?
Le 19/08/2019 à 13h25
Le 14/08/2019 à 16h19
Matière noire, énergie noire, galaxies noires…
On va bien finir par expliquer pourquoi les nuits sont noires et non pas éclairées par des myriades d’étoiles. :-)
En espérant que le James Webb Space puisse détecter les sphères de Dyson des extraterrestres…
Le 14/08/2019 à 16h38
C’est déjà assez bien expliqué le paradoxe d’Olbers.
Le 14/08/2019 à 19h53
Je me rappelle avoir vu un documentaire super intéressant sur le sujet de la matière de l’univers, et que pour certains chercheurs la seule solution était qu’il existe des tas de galaxies “invisibles”, genre 4 ou 5 fois plus en masse (je crois qu’on parlait de masse) que la matière visible, notamment pour expliquer la formation de l’univers.
Toutefois, dans un esprit d’équité, de tolérance, d’ouverture, d’harmonie, et afin d’éviter un mouvement du type “gilets jaunes dans l’espace” ou tout autre type de contestation, et afin de ne blesser aucune susceptibilité ni aucune croyance, je suggère de soumettre cette découverte au vote des internautes. On nous a déjà caché tellement de trucs que c’est sûrement la CIA qui a planqué cette matière hors de portée de nos petits yeux incrédules. Y a du complot là dessous.
" />
Le 14/08/2019 à 22h39
“c’est comme si on pouvait voir les dinosaures en vie il y a 65 millions d’années”
Bon, même sans croire à ces théories scientistes, techniquement ça veut donc dire que si on trouve un miroir dans l’espace quelque part, et qu’on vise bien, il pourrait nous renvoyer le reflet de la Terre d’il y a longtemps, et on pourrait regarder le direct de ce qu’il se passait à l’époque du départ des rayons lumineux qu’on reçoit à nouveau. Cool non ? Ou alors il faudrait demander à Francis, qui habite à quelques millions d’années-lumières, ce qu’il voit chez nous en ce moment. Vegetto, tu nous emmènes voir Francis stp ?
Le 15/08/2019 à 05h43
mhh….
" />
Il faudrait juste poser la question, attendre quelques millions d’années-lumières que ça lui parvienne, et attendre quelques millions d’années-lumières sa réponse?
" />
Le 15/08/2019 à 07h24
Pas con le coup du miroir, je suis sûr que ça pourrait faire partie d’un bon scenar de SF
Le 15/08/2019 à 12h38
Il faut qu’il soit poser avant que la lumière parte…
Le 15/08/2019 à 14h01
Et la vitesse subliminique :)
Le 15/08/2019 à 14h27
Attendre des distances ?
(Pas bien réveillé avant 8h? " />)
Le 15/08/2019 à 14h34
Idée à peut prés similaire exploiter dans Les petits hommes Tome 16. La planète Ranxérox .
Le 15/08/2019 à 15h27
J’ai supposé qu’on communiquait à la vitesse de la lumière, donc pour “demander à Francis, qui habite à quelques millions d’années-lumières”, j’ai imaginé que ça durerai quelques millions d’années-lumières ok corrigé
Le 15/08/2019 à 15h32
Le 15/08/2019 à 18h07
techniquement oui, mais bon courage pour trouver une surface suffisamment réfléchissante et parfaitement orientée pour qu’un faisceau de lumière provenant de la Terre et se réfléchissant dessus revienne exactement au niveau d’un télescope ici-même. (et accessoirement, je sens que le miroir devra être fachement gros pour qu’on y voit quelque chose..! )