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Artemis : le retour des humains sur la Lune en 2024 compromis

Down in Kokomo

Artemis : le retour des humains sur la Lune en 2024 compromis

Le 17 août 2021 à 08h05

Selon le Bureau de l’inspecteur général de la NASA, l’Agence spatiale américaine ne sera finalement pas en mesure d’envoyer des humains sur la Lune en 2024. Une des raisons invoquées : il faudrait attendre le second trimestre 2025 pour que les indispensables combinaisons spatiales soient prêtes. 

Début 2019, Donald Trump chamboulait les plans de la NASA et de ses partenaires (notamment l’Agence spatiale européenne). Alors qu’il était prévu de renvoyer des humains sur la Lune en 2028, celui qui était alors président des États-Unis ramenait l’échéance à 2024. Le programme Artemis doit permettre de réaliser cette ambitieuse mission.

SLS, Orion et les combinaisons : le trio indispensable

Plusieurs composants sont nécessaires pour y parvenir. La fusée Space Launch System (SLS) tout d’abord. Elle est « conçue pour évoluer afin de pouvoir accomplir une variété de missions. D'abord sur la Lune pour les missions Artemis, puis sur Mars et d'autres destinations lointaines ». Viennent ensuite se poser sur le dessus du lanceur le module de service européen (avec des réserves d’air, d’eau et d’électricité) ainsi que la capsule habitable Orion.

Mais un élément important doit aussi être pris en considération : les combinaisons des astronautes. Elles doivent non seulement les protéger dans l’espace, mais aussi leur donner de l’oxygène nécessaire pour respirer et communiquer. Il existe actuellement deux modèles utilisés par les astronautes dans la Station Spatiale Internationale (ISS) lors de sorties extravéhiculaires : Orlan (russes) et EMU (Extravehicular Mobility Unit, américaines), mais elles ne sont pas adaptées pour une mission telle qu'Artemis. 

Après les vieillissantes combinaisons EMU, voici xEMU

Les combinaisons EMU ont été « conçues il y a 45 ans pour le programme de la navette spatiale », rappelle le Bureau de l’inspecteur général (OIG) de la NASA. De nouvelles versions sont donc en cours de développement, c’est « un élément essentiel pour atteindre les objectifs », ajoute le Bureau.

Problème, leur mise au point prend du retard, risquant de compromettre davantage les ambitions de la NASA pour 2024. Tel un « chevalier blanc », Elon Musk est venu proposer son aide. SpaceX dispose déjà de combinaisons pour les vols dans sa capsule Crew Dragon, mais elles ne sont pas adaptées à des astronautes allant sur la Lune.

« Un atterrissage lunaire à la fin de 2024, comme le prévoit actuellement la NASA, n'est pas réalisable », affirme donc sans détour l’OIG. Ce dernier plante le décor : « Au cours des quatorze dernières années, la NASA a développé une technologie de combinaison spatiale de nouvelle génération, qui a conduit il y a cinq ans à la création du projet connu sous le nom d’Exploration Extravehicular Mobility Units (xEMU) ». Elles pourront, en théorie, être utilisées aussi bien pour les sorties extravéhiculaires de l’ISS, la future mission Artemis… et d’autres à venir.

Selon le Bureau de l’inspecteur général, xEMU trainerait en longueur : « Nous avons signalé en 2017 que, malgré des dépenses de près de 200 millions de dollars pour le développement des combinaisons spatiales extravéhiculaires au cours des neuf années précédentes, l'Agence est encore à des années de disposer d'une combinaison spatiale prête à être utilisée lors de missions d'exploration ».

L’OIG reconnait que la NASA a depuis déboursé 220 millions de dollars supplémentaires, pour un total de 420 millions, mais ce n’est toujours pas suffisant.

NASA OIG xEMUNASA OIG xEMU

Un « alunissage » en 2024 « n'est pas réalisable »

Dans le compte rendu de son audit, le Bureau explique avoir examiné en détail la manière dont l’Agence spatiale américaine « relève les défis liés au coût, au calendrier et aux performances du système de combinaison spatiale de nouvelle génération ». On y apprend que le calendrier initial prévoyait que deux combinaisons spatiales soient prêtes et qualifiées pour le vol en novembre 2024, juste à temps pour renvoyer des humains sur la Lune.

Problème, des obstacles sont venus contrarier ces plans : une baisse des financements, l’impact de la crise sanitaire ainsi que des « défis techniques ». Résultat des courses, et « compte tenu des exigences d'intégration, les combinaisons ne seraient pas prêtes pour le vol avant avril 2025, au plus tôt ».

Les coûts vont également plus que doubler selon le Bureau : « au moment où les deux xEMU prêtes pour le vol seront disponibles, la NASA aura dépensé plus d'un milliard de dollars pour le développement et l'assemblage des combinaisons spatiales », contre 420 millions actuellement.

Précision importante : « l'incapacité de la NASA à achever le développement de xEMU pour un alunissage en 2024 n'est en aucun cas le seul facteur ayant une incidence sur la viabilité du calendrier actuel ». Durant d’autres audits, des retards sur des éléments essentiels pour Artemis avaient été identifiés : la fusée SLS et la capsule Orion. 

Elon Musk propose son « aide »

Suite à la publication de ce rapport, Elon Musk en a profité pour positionner SpaceX, en expliquant que sa société pourrait aider à la réalisation des combinaisons, « si besoin ».

L’entreprise devait pour rappel travailler avec la NASA sur le programme Artemis, mais l’accord a été mis en pause suite à une contestation de Blue Origin. Elon Musk en profite pour tacler le programme des nouvelles combinaisons xEMU. Il prévoyait en 2017 que pas moins de 27 sous-traitants se partagent le gâteau : « On dirait qu'il y a trop de cuisiniers dans la cuisine ».

NASA OIG xEMU

La NASA ne sait pas sur quel pied danser

Le Bureau pointe aussi du doigt la NASA pour son apparente incertitude sur certains points. En octobre 2019, une Request for Information (RFI) était publiée pour déterminer les capacités de l’industrie à proposer une combinaison répondant au cahier des charges : Exploration Extravehicular Activity Production and Services (xEVAPS).

18 mois plus tard, en avril 2021 donc, la RFI devenait Exploration Extravehicular Activity Services (xEVAS) ; elle perdait son « P » pour Production. La NASA chercherait à acheter des services, pas des équipements. Autre potentiel problème : xEVAS « ne stipule pas que la combinaison soit compatible à la fois avec les programmes ISS et Artemis ». Étant donnée la durée de vie limitée de l’ISS (encore quelques années a priori), développer une combinaison uniquement pour cette Station serait un non-sens économique pour l’OIG. 

Quatre recommandations, acceptées par la NASA

Comme de coutume en pareille situation, le Bureau formule quatre recommandations :

  • ajuster le calendrier afin de « réduire les risques de développement »
  • aligner la livraison de matériel avec les besoins en formation des astronautes, 
  • s’assurer que les exigences techniques soient consolidées avant de définir la stratégie d'acquisition des combinaisons spatiales, 
  • mettre en place une « stratégie d'acquisition […] qui réponde aux besoins des programmes de l’ISS et d’Artemis ».

Kathy Lueders, administratrice associée à la NASA en charge du Human Exploration and Operations Mission Directorate, s’est fendue d’une réponse suite à la publication de ce rapport et de ses recommandations. Elle explique être sur la même longueur d’onde, et donne quelques détails supplémentaires.

Concernant la première recommandation, la NASA a bien « l'intention de redéfinir le calendrier », ce qui devrait être fait aux alentours de juin 2022. En octobre 2021, les exigences techniques seront finalisées. Elle confirme, sans surprise, que les combinaisons devront être prévues pour l’ISS et Artemis, mais aussi pour d’autres missions à venir ; le mot d’ordre est « flexibilité ». Quitte à dépenser un milliard de dollars, autant s’en resservir un maximum.

Comme Boeing en a fait la douloureuse expérience avec sa capsule habitable Starliner ou comme en atteste le carottage loupé de Perseverance sur Mars, tout ne se passe pas forcément selon le plan initial… loin de là. Le travail continue néanmoins sur les combinaisons spatiales afin de pouvoir renvoyer des humains sur la Lune au plus vite… et en sécurité.

Commentaires (29)

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… ben au moins quand Trump reviendra en 2024, il pourra avancer le calendrier en 2026 :D

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27 sous-traitants pour faire la combinaison ? :eeek2:



Tu m’étonnes qu’il y ait du retard :transpi:

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C’est une usine a subvention hein. Comme pour le SLS
Faut donner de l’argent dans plusieurs états pour donner de l’emploi et satisfaire l’électorat

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Et encore c’est sûrement sans compter sur leurs propres sous-traitants :)

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Ouais, je comprends un peu SpaceX qui se fou de leur gueule :transpi:



C’est limite un sous traitant par doigt de chaque gant XD

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Je doute que SpaceX ait un nombre de sous-traitants significativement différent. Sauf s’ils filent, tissent, fabriquent eux-mêmes tous les composants jusqu’aux semi-conducteurs…

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ça doit aussi dépendre de la différence qu’on peut faire entre sous-traitant et fournisseur.
au pif je dirai que le fournisseur fabriqque qqch, et comme les specs conviennent pour le produit final le donneur d’ordre achète la piece
quand le sous traitant va répondre à un appel d’offre et fabriquer qqch spécialement pour le donneur d’ordre selon un cahier des charges fourni par le donneur d’ordre



peut-être que spacex fait fabriquer moins de trucs spécifiques et utilise plus de pièces existantes

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Après les vieillissantes combinaisons EMU, voici xEMU


Et bientôt les combinaisons qEMU pour un alunissage virtuel afin de remplacer le vieillissant fond vert.

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eglyn a dit:


Ouais, je comprends un peu SpaceX qui se fou de leur gueule :transpi:



C’est limite un sous traitant par doigt de chaque gant XD


Quand tu regardes l’infographie: il y a une dizaine de sous traitants pour la réalisation de la combinaison en elle même, ce qui n’est pas illogique vue la complexité.
Le reste ce sont des sous traitants de tests, de dev logiciels et de com’ + quelques unités de recherche.

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Oui, effectivement c’est réparti comme tu le dis, mais ça reste quand même un frein d’avoir autant d’intervenants, que ce soit du dev, du test, etc…

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(reply:1891353:Zone démilitarisée)


:neuf:

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fry a dit:


ça doit aussi dépendre de la différence qu’on peut faire entre sous-traitant et fournisseur. au pif je dirai que le fournisseur fabriqque qqch, et comme les specs conviennent pour le produit final le donneur d’ordre achète la piece quand le sous traitant va répondre à un appel d’offre et fabriquer qqch spécialement pour le donneur d’ordre selon un cahier des charges fourni par le donneur d’ordre



peut-être que spacex fait fabriquer moins de trucs spécifiques et utilise plus de pièces existantes


Même dans le secteur de l’automobile, les constructeurs développent d’abord des pièces avec pour objectif leur réutilisation dans d’autres modèles.
Mais il faut bien un début: ici on est dans la conception d’une combinaison entièrement nouvelle avec pour objectif un amortissement sur des dizaines d’année.

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eglyn a dit:


Oui, effectivement c’est réparti comme tu le dis, mais ça reste quand même un frein d’avoir autant d’intervenants, que ce soit du dev, du test, etc…


Tu es dans le même ordre de grandeur que pour toute conception dans l’aéronautique et le spatial.
On ne parle pas de production ici, mais bien de conception.

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(reply:1891353:Zone démilitarisée)


Tu a oublié les combinaison KVM, :francais:

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imrage a dit:


Tu a oublié les combinaison KVM, :francais:


Ce ne sont pas celles pour aller sur XEN (HL2) ?

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Et dans la combinaison, une étiquette “Made In China” :D

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et l’étiquette elle-même “made in Bangladesh” ?

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Je pense que c’est bien parti pour que seule l’échéance initiale de 2028 soit respectée…



Les seuls éléments actuels qui ont été testés en grandeur réelle, c’est le SLS et la capsule Orion. Le reste est à faire.

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Le SLS et Orion ont effectué leurs vols tests ?



La quantité d’énergie que tu dépenses et de CO2 que tu émets pour ce commentaire quand il y a tant de gens qui n’ont même pas accès à l’eau potable… tu vois où je veux en venir ?
Sinon, pour parler chiffres, le budget de la NASA aux USA c’est 0,48% du budget fédéral en 2020. Tu crois vraiment que c’est là qu’il y a des économies à faire pour sauver la planète ? Sachant qu’une bonne partie de ce budget est dédiée à l’observation de la Terre, la gestion des crises et à la compréhension des phénomènes naturels qui nous impactent/que nous causons ?

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Cela me rend malade de voir tout ce fric dépensé pour une idiotie (aller sur une autre planète à distance lilliputienne de la terre par rapport aux dimensions de notre galaxie - ne parlons pas de l’univers …) alors qu’il y a tant de personnes sur la terre qui ne peuvent même pas avoir une vie “décente” 🤣🤣🤣🤣

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(reply:1891353:Zone démilitarisée)


:sept:



Le progrès et la compréhension de ce qui nous entoure ne se fait pas tout seul.
Il y aura toujours plus pauvre et, comme dans le sport automobile, ces dépenses “inutiles” peuvent finir par se retrouver dans ta bagnole, dans ton avion, etc …

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Laissez : on lui a déjà expliqué plusieurs fois et il persiste à ne rien vouloir entendre. Filtrez juste ses commentaires, c’est la seule chose à faire, avec lui.

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Tu sais que si tu peux poster ce commentaire, c’est que plein de personnes avant ont dépensé beaucoup de temps et d’argent pour que la technologie te permette de le faire ?



Sans compter que l’exploration spatiale nous permet de mieux comprendre l’environnement dans lequel on vit.



A moins que tu sois blasé de la vie au point de n’avoir aucune curiosité sur les grandes questions que se pose l’humanité depuis qu’elle existe…

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eglyn a dit:


Tu sais que si tu peux poster ce commentaire, c’est que plein de personnes avant ont dépensé beaucoup de temps et d’argent pour que la technologie te permette de le faire ?


Pour ajouter un exemple concret de technologie moderne issue de la recherche spatiale et très employée : OpenStack ça vient de la NASA à la base.

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Et si on construisait une base sur la lune ?
Et si on y stockait des déchets nucléaire ?



“Aigle 1 à commandant Koenig”

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Si c’est pour prendre le risque d’une pluie de déchets radioactifs si la fusée explose, autant les balancer dans le soleil que les stocker, non ?

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Je crois que c’est une référence à Cosmos 1999 :).

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Ah ouééééé :chinois:

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Lasout a dit:


Le SLS et Orion ont effectué leurs vols tests ?


Orion, un vol test à vide fin 2014.



SLS n’a pas volé, anéfé, c’est ARES 1 quia volé en octobre 2009, et c’était le précurseur de SLS. Errare Humanum Est…

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