Le lobbying bruxellois des géants américains du numérique est « alarmant »
Le 28 septembre 2020 à 08h51
3 min
Droit
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Sans surprise, Amazon, Apple, Facebook, Google et Microsoft font partie des entreprises les plus dépensières en matière de lobbying à Bruxelles, d'après l'ONG Corporate Europe. Elle estime que « cette frénésie de dépenses est un signe avant-coureur de batailles à venir liées à la régulation des technologies dans l'UE qui pourraient façonner l'avenir de l'industrie ».
Google a les dépenses les plus élevées avec un budget d'au moins 8 millions d'euros, suivie de Microsoft avec 5 millions d'euros. Les seules entreprises non technologiques actuellement dans le top 5 des lobbyistes bruxellois sont le géant pétrolier Shell et le poids lourd pharmaceutique Bayer.
Ayant tous deux dépensé plus de 4,29 millions d'euros, ils arrivent en troisième et quatrième places, juste devant Facebook avec au moins 4,25 millions d'euros. Apple et Amazon sont quant à eux classés 16e (avec plus de 2 millions d'euros) et 23e (plus de 1,75 million d'euros) des 30 premiers du classement.
Au total, les « GAFAM » ont dépensé 21 millions d'euros en lobbying en 2019 (les chiffres de Google datent, eux, de 2018). En comparaison, les sept plus grands constructeurs automobiles européens (Volkswagen, Daimler, BMW, Renault, Ford, Fiat Chrysler et Peugeot) ont déboursé un total de 7,9 millions d'euros en lobbying en 2019, soit moins de la moitié.
De plus, ces chiffres n'incluent pas l'argent que les associations professionnelles dépensent en lobbying, alors que plusieurs d'entres elles représentent les intérêts des entreprises numériques. Quatre comptent au moins quatre des cinq GAFAM parmi leurs membres et disposent ainsi d'un budget total de 2,15 millions d'euros.
Les GAFAM ont en outre parfois tendance à cacher les liens qu'elles tissent avec certains think tanks. Si Microsoft joue le jeu de la transparence en affichant sa participation dans cinq d'entre eux, Facebook, a contrario, avait tu être membre de six groupes. Ces derniers cachent eux aussi parfois être affiliés aux GAFAM, poussant l'ONG à porter plainte auprès du secrétariat du registre de transparence de l'UE.
Pour Corporate Europe, leur puissance de feu est « alarmante », et leurs refus de divulgations des liens qu'ils tissent avec certains think tanks « inacceptables ».
Le 28 septembre 2020 à 08h51
Commentaires (19)
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Abonnez-vousLe 28/09/2020 à 09h26
Un pétrolier, un pharma et les GAFAM. Génial.
Je n’ai toujours pas compris pourquoi le lobbying n’était pas rigoureusement interdit et réprimandé ni à quoi cela sert que l’on paie des élus si des lobbyistes le font pour nous.
Le 28/09/2020 à 09h37
ça n’est pas interdit parce que ce serait une mauvaise chose de l’interdire. Ça permet aux députés d’être informés de certains sujets par les personnes les plus concernées par ledit sujet. Ça me semble important de ne pas être “hors sol” quand on vote une loi.
La chose qui est nettement plus critiquable, c’est lorsque le lobbying met face à face un organisme à intérêt particulier et à gros moyens et un organisme à intérêt général et, généralement, associatif et sans moyen.
A la limite, il faudrait une règle qui dit “chaque € dépensé par un lobbyiste doit donner 1€ à une association luttant pour l’intérêt général”)
Le 28/09/2020 à 09h45
Non ce ne sont pas les plus concernées par ledit sujet qui viennent t’informer mais ceux ayant l’argent, le temps et les contacts pour informer les députés.
Ce n’est ni plus ni moins que de la publicité envers les députés.
Et si les députés veulent être informés rien n’empêche d’aller chercher eux-même ceux en capacités de le faire. Ils ont d’ailleurs un budget et une équipe pour les aider.
Le 28/09/2020 à 09h53
Entièrement d’accord. Il faut interdire d’urgence “La Quadrature du Net” et “L’Electronic Frontier Foundation” d’influencer les décisions sages et éclairées de nos élus.
Ah… C’est comme les chasseurs ? Y a les bons et les mauvais lobbies ? Et c’est toi qui choisit ?
Le 28/09/2020 à 10h25
Il y a l’intérêt général et celui des sociétés privées.
Ces dernières ne devraient pas avoir droit de cité dans les instances gouvernementales.
Maintenant, s’il faut choisir entre autoriser toutes ces dérives ou interdire strictement tous les lobbies, je prêche pour cette dernière solution.
Comme cela a été dit, les députés disposent d’une enveloppe leur servant à faire des recherches ou des consultations et, au moins, ils seraient tenus pour responsables de leurs décisions.
Aujourd’hui, plus t’as de fric, plus tu dictes ta loi.
Il serait temps de passer à autre chose.
Le 28/09/2020 à 09h53
J’aimerais bien être ciblé par la “publicité” comme le sont selon toi les députés : déjeuners dans de très grands restaurants, séminaires dans des endroits paradisiaques, …
Le 28/09/2020 à 09h54
On ne touche pas à la galinette cendrée !
Le 28/09/2020 à 10h04
Si l’Europe ne sait pas (ou plus) dans quoi investir, j’ai des suggestions dont :
https://www.lesnumeriques.com/vie-du-net/daniel-ek-fondateur-de-spotify-va-investir-1-milliard-d-euros-dans-des-start-up-europeennes-n154951.html
Je trouve regrettable, pour ne pas dire lamentable, que ce type d’initiative soit financée par des fonds personnels et non Européens.
Oui, ça donnerait naissance à un GAFAM Européen mais ça sera toujours mieux que de se faire sucer les os par les ‘Ricains.
Le 28/09/2020 à 10h13
Il n’y a pas que les grosses boîtes qui viennent faire du lobbyisme à l’UE, il y a aussi des assos, des acteurs publics, etc. Si LQDN vient expliquer au parlement européen que l’article 17 est une connerie, c’est du lobbyisme. Et si un organisme de presse vient expliquer que c’est “vital” pour eux, ça l’est aussi.
Les députés ne peuvent pas avoir des connaissances à jour sur tous les sujets, ni être proactifs sur tous les fronts. Selon moi, pouvoir venir parler aux députés, au nom d’un groupe, sur les sujets qui te semblent importants est carrément nécessaire.
Par contre, le fait que ça coûte une blinde, ça limite l’accès à la parole, et ça permet aux groupes les plus riches (les grosses boîtes privées donc) de parler plus que les autres. In fine, ça transforme ce mécanisme en trafic d’influence et c’est à mon sens la source de la plupart des dérives de ce mécanisme.
Interdire le lobbysime me parait donc dangereux, y compris pour les entreprises. Il est important que chacun puisse exprimer son point de vue et défendre ses points de vue et ses intérêts. Maintenant, changer ce mécanisme pour compter le temps de parole en terme d’intérêt général et de population affectée (plutôt qu’en pognon), d’aller chercher les acteurs d’un sujet qui n’ont pas forcement les moyens (financiers, administratifs, etc.) d’aller à Bruxelles, ça me paraît plus que nécéssaire, le système actuel est beaucoup (vraiment beaucoup) trop à l’avantage des plus gros.
Le 28/09/2020 à 12h42
Ou alors on peut considérer que tout lobbying est mauvais mais qu’aujourd’hui tout le monde est obligé d’en faire pour pas laisser le monopole de la parole aux grands groupes.
Donc justifier le lobbying par les associations qui sont obligées d’en faire c’est revenir au modèle “pile je gagne, face tu perds”. Aujourd’hui soit tu fais pas de lobbying et tu n’as aucun poids sur les lois européennes, soit t’en fais et tu légitimise le système du lobbying qui pourtant n’est pas en ta faveur.
Le 28/09/2020 à 10h33
Parce que tu penses qu’elle passe son temps à rien foutre la banque d’investissement Européenne ? La différence est juste qu’un organe public a des comptes à rendre et un devoir de contrôle avant de prendre de décisions. C’est principalement pour cela que les initiatives démarrent sur des fonds privés et qu’une latence énorme existe. Sinon, au premier investissement foireux -ou pire corrompu- les citoyens seraient en droit de demander l’arrêt pur et simple d’une telle agence.
Le 28/09/2020 à 12h20
Le problème c’est que les lobbies citoyens n’ont quasiment aucun poids.
Il faudrait encadrer plus rigoureusement les lobbies des grandes entreprise. 21 millions plus de 100 personnes employés à plein temps rien que pour faire ça. En face des petites associations qui peinent à avoir 1 ou 2 personne.
Le 28/09/2020 à 12h46
En vrai je pense que si tu demande à l’EFF ou à LQDN d’arrêter de faire du lobbying en échange de l’arrêt du lobbying par les entreprises, je suis presque sûr qu’ils seront d’accord.
Le lobbying c’est un exemple de comment le capitalisme finit toujours par gagner, soit t’accepte le système même s’il est en ta défaveur, soit tu n’existe pas.
Le 28/09/2020 à 14h49
A mon sens, il est très dangereux de chercher à limiter voire interdire le lobbying. Pour les institutions européennes, le lobbying est règlementé et soumis à une traçabilité (il me semble que chaque député doit rendre son agenda public, et que chaque organisme inscrit au registre des lobbyistes doit rendre compte des actions qu’il entreprend auprès des représentants de l’EU. Voir le registre* ici: registre européen ). Supprimer le lobbying “légal”, c’est ouvrir la voie au trafic d’influence (comme le disait Arkeen) voire à la corruption pure et simple qui gangrène nombre de systèmes prétendument démocratiques de part le monde, sans que vous et moi puissiez être au courant
Après, la pratique reste très problématique et pose effectivement un problème quant à la disproportion de certains moyens privés par rapport à d’autres. renforcer les exigences de transparence associées, établir des diverses règles limitatives afin de garantir l’égalité en droit des intérêts à défendre, voire encore accorder des accès facilités pour les organismes reconnus d’intérêt général, ca fait parti du boulot de nos députés européens.
Pour le reste, ca fait parti de notre boulot de citoyen vigilant d’aller y jeter un œil, aidé par nos amis les journalistes indépendants par exemple.
Le 28/09/2020 à 15h46
Je ne vais pas en rajouter une couche après plusieurs commentaires concernant un article de vendredi (25⁄09) sur le lobbying auprès du Parlement Européen : cf. Next INpactet suivants.
En résumé :
Le 28/09/2020 à 17h50
Je ne vois pas en quoi le lobbying “légal” pourrait empêcher le trafic d’influence…
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Le 29/09/2020 à 04h31
Et ces sommes, ce sont des montants complètement BS officiels, les dépenses véreuses dont ils ne veulent pas qu’on mette le nez dedans, c’est certainement 10x plus.
Le lobbying, terme elegant pour dire corruption, oui devrait être interdit et considéré comme une honte totale.
Le 29/09/2020 à 08h15
Non, le gros du budget passe dans des cabinets d’avocats pour faire des propositions de rédaction de directives, dans des études divers et variées, etc bref, pour amener de la matière.
Les restaux, c’est peanuts même à 500 balles par tête… Quant aux séminaires et voyages-vacances, je doute que ce soit si courant aujourd’hui.
Le 29/09/2020 à 08h19
J’ai jamais compris pourquoi les “industries” seraient le mal… En lisant certains, on a l’impression que puisque c’est un industriel qui propose un truc, c’est forcément mal. C’est aussi idiot de penser que puisque ça vient d’un “petit” (genre ONG, assoc divers, etc) alors c’est bien.
On le voit bien sur l’écologie par exemple, le bullshit incroyable d’un sacrément gros paquet de “petits” groupes de pression écologistes est absolument effrayant mais ça semble gêner bcp moins…
Qu’on me dise que les grosses industries visent leurs interêts, OK. Mais il faut m’expliquer en quoi leurs intérêts sont systématiquement à l’inverse de ceux du grand public alors…
Je veux dire que si les objectifs concordent, pourquoi les empecher ? par idéologie ?