La Hadopi passe en revue 30 ans de pratiques de partage
Ernst & (pas très) Young
Le 28 mars 2013 à 15h51
5 min
Droit
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La Hadopi vient de publier les résultats d'une étude commandée il y a quelques mois auprès d'un cabinet de conseil. Son but : décortiquer l'évolution de la consommation de biens culturels (livre, musique, film...) des Français depuis 1980. Cette étude se penche notamment sur les pratiques de partage et sur le « panier moyen » dépensé par les Français.
En octobre 2011, le collège de la Hadopi décidait d’ouvrir un chantier sur les « Pratiques de partage et panier moyen des foyers ». Cinq mois plus tard, un appel d’offres était lancé afin que la Haute autorité améliore ses connaissances relatives à « l'évolution des pratiques culturelles et les usages culturels des années 80 à nos jours et l'évolution du panier moyen dédié à la culture ». Pour cette étude, qui a finalement été confiée au cabinet de conseil Ernst & Young, la Rue du Texel proposait jusqu’à 50 000 euros d’argent public (voir notre article).
Plus d’un an après cette commande, la Hadopi vient finalement de dévoiler les résultats de cette étude :
- « Étude sur l’évolution des pratiques de partage et le panier moyen de consommation de biens culturels de l’ère pré-numérique à nos jours (1980 – 2011) » (PDF, 43 pages).
Une évolution des pratiques en quatre temps
Dans un premier temps, l’étude du cabinet Ernst & Young s’attache à décrire l’évolution des pratiques de partage de biens culturels (livres, films, musique...) depuis 1980, qui sont bien évidemment liées aux évolutions technologiques. Les auteurs distinguent ainsi quatre périodes distinctes :
- 1980 - 1985 : c’est « l’âge de l’audiovisuel », qui est caractérisé par la diffusion du magnétoscope et l’apparition du baladeur. Ces deux appareils ont permis de réduire progressivement les contraintes de consommation qui prévalaient jusqu’alors en matière de biens culturels. Ils ont également « facilité dans une certaine mesure le partage », même si celui-ci restait alors limité à un cercle de proches.
- 1986 - 1998 : c’est « l’âge du multi-équipement ». Cette période est celle au cours de laquelle les ménages se dotent de plus en plus facilement de chaînes hi-fi, de télévisions, de lecteurs CD... mais aussi celle de l’arrivée des ordinateurs personnels au sein des foyers. Le partage reste encore dans une sphère très « domestique ».
- 1999 - 2006 : c’est « l’âge du Web », qui voit Internet et ses nouveaux moyens de communication se démocratiser, au fur et à mesure que les capacités de stockage et l’ADSL se développent. Les possibilités de partage s’élargissent alors à de nouveaux cercles, la technologie permettant désormais un partage en ligne de tous les biens culturels. Même si cela n’est pas mentionné dans l’étude commandée par la Hadopi, on pense bien évidemment au peer-to-peer.
- 2007 - 2011 : c’est « l’âge de l’internet mobile ». Les smartphones, les nouvelles box et le Wi-Fi se développent, offrant ainsi « de nouveaux lieux de partage, virtuels et accessibles à la demande ». De nouveaux lieux de partage apparaissent (réseaux sociaux, cloud computing...).
Des pratiques de partage qui se sont poursuivies avec le Net
Si les auteurs de cette étude reconnaissent qu’Internet a « permis d’élargir les possibilités de partage avec des connaissances éloignées voire des anonymes », ils affirment dans le même temps que les relations avec ce cercle étendu « prennent la forme de liens faibles », en ce que la dimension sociale du partage est « moindre ». Il n’en demeure pas moins que les techniques de partage en ligne permettent aujourd’hui d’accéder « à un large éventail de biens et favorisent l’éclectisme culturel ».
L’année dernière, une étude des chercheurs français du M@rsouin mettait en lumière l’importance du « piratage de proximité », c’est-à-dire ces échanges réalisés en mains propres (partage depuis un disque dur ou CD, etc.). Ernst & Young conclut aujourd’hui que « les réseaux n’ont pas bouleversé les raisons motivant le partage ». Internet a en ce sens ouvert « un nouveau lieu de partage » permettant « de prolonger et d’intensifier les échanges avec le cercle proche », qui se tiennent par exemple encore dans les cours de récréation ou chez des amis... Le partage, qu’il se fasse en ligne ou hors ligne, vise ainsi « toujours à renforcer les liens sociaux entre les individus ».
Des dépenses tirées par les équipements et les coûts d’accès aux biens culturels
D’un point de vue plus économique, le cabinet Ernst & Young s’est efforcé dans un second temps de synthétiser les évolutions des dépenses de consommation en biens culturels, des années 1980 à nos jours. Les achats d’équipements technologiques, les frais relatifs aux coûts d’accès, de même que le prix des abonnements téléphoniques ou à Internet sont également compris dans l'évaluation de ce « panier moyen ».
Principale conclusion : les dépenses en équipements technologiques (télévision, ordinateur, téléphone mobile...) et en accès aux biens culturels (abonnements, etc.) augmentent très fortement entre 1980 et 2011 (deux courbes grises). Ce n’est toutefois pas le cas des biens culturels, qui diminuent depuis 2005 (ligne bleue).
Tous les biens culturels ne sont néanmoins pas touchés de la même manière. La musique (CD, cassette, vinyle) et la presse sont les secteurs qui ont connu la plus forte baisse suite à la « révolution numérique ». Les marchés des livres, des jeux vidéo et du cinéma semblent avoir quant à eux subi une légère croissance.
Plus récemment, ce sont les ventes numériques qui se sont développées, et progressent désormais « constamment depuis 2004 ». Premier secteur concerné : celui de la musique, avec le succès des offres de téléchargement ou de streaming, mais aussi celui de la vidéo à la demande.
La Hadopi passe en revue 30 ans de pratiques de partage
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Une évolution des pratiques en quatre temps
Commentaires (42)
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Le 29/03/2013 à 20h23
Le 28/03/2013 à 15h58
Cercle des proches, les partages avant 1999 ? On voit qu’ils n’ont toujours pas entendu parler des copy-party, des bbs, etc, etc.
Le 28/03/2013 à 16h00
Une courbe blanche sur fond blanc, great idea.
Le 28/03/2013 à 19h27
2013-2015 : la crise s’aggrave, les francais en ont marre. Le gouvernement taille encore plus dans les ministeres et commissions inutiles. Hadopi sera la premiere à en faire les frais. Son budget sera réduit a presque néant avant son extinction totale en 2015!
Le 28/03/2013 à 21h02
Le 28/03/2013 à 21h22
Le 28/03/2013 à 21h38
Le 28/03/2013 à 21h47
Gaspillages, gaspillages…
HADOPI = PUR FAIL
Le 28/03/2013 à 22h10
Biens culturels (en légère baisse) = Quantités d’“œuvres” ?
Accès aux biens culturels (en très forte hausse) = Accès aux œuvres ?
C’est pas plutôt une bonne nouvelle tout ça ? " />
Moins d’œuvre quand on voit le vivier de bouses qui sortent encore… c’est pas forcément un mal… mais un meilleur accès à ces œuvres me parait clairement positif !" />
Le 28/03/2013 à 22h30
L’utilisation prioritaire du format MP3 …
Prioritaire ? Privilégiée ou majoritaire, ok, mais prioritaire ? " />
Le 29/03/2013 à 07h16
Et donc qu’est-ce que cette étude nous apprend qu’on ne savait déjà ???
Le 29/03/2013 à 07h46
Donc l’étude de la Hadopi montre que les ménages dépensent toujours + malgré la baisse de biens culturels . Ils ont démontré eux même leur inutilité, merci au revoir.
Le 29/03/2013 à 08h05
Le 29/03/2013 à 08h30
Des pratiques de partage qui se sont poursuivies avec le Net
La culture ne vaut que si elle est partagée
Le 29/03/2013 à 08h45
A quand l’étude sur l’offre faite aux consommateurs (majors, grandes surfaces, boutiques, contrefaçon, copie privée, partage…) et les demandes réelles des consommateurs, ie ce qu’ils veulent vraiment. Et donc le niveau de phase entre l’offre commerciale et la demande des consommateurs, la quantité de travail effectuée et par quelles acteurs (pas seulement les majors) pour satisfaire cette demande, les moyens mis en oeuvre par les majors pour satisfaire les consommateurs…
Le 29/03/2013 à 08h51
Le 29/03/2013 à 09h18
Le 29/03/2013 à 09h24
Comme quoi, comme le démontre cette intéressante étude, biens culturels et partages, copies et téléchargements sont intimement liés depuis longtemps et le début quitte à déplaire à nos censeurs Sarkozy and co.
I HAVE A DREAM… la liberté n’a pas de prix!
Le 29/03/2013 à 09h38
Quitte à remonter dans le passé ils auraient pu aussi nous dire le prix d’un vinyle dans les années 60 (30 f ~ 4,5 €) et le comparer aux prix des mêmes vinyles démat’ sur itunes (13 €) et nous expliquer le pourquoi du comment de l’inflation d’un produit immatériel dont la duplication a simplement un cout de stockage et electrique. (proches de 0 pour un album en flac auj avec des disques de plusieurs To)
Le 28/03/2013 à 16h02
Ils doivent vraiment s’ennuyer chez HADOPI.
Faut bien s’occuper après un bon repas le midi qui finit à 15H et la fin de journée à 16H30 " />
Le 28/03/2013 à 16h02
30 ans que Marie-Françoise ne s’est pas rasée la moustache " />
Le 28/03/2013 à 16h06
et j’aurais aimer voir sur ce graphique la courbe des profits des majors qui vendent les dits bien culturels.
Le 28/03/2013 à 16h09
Le 28/03/2013 à 16h11
Alors, je vous fais mon petit historique à moi, à mettre en parallèle :
1970-1980 : les majors gueulent comme des putois que la cassette audio va tuer le marché de la musique ;
1980-1990 : le majors gueulent comme des putois que le magnétoscope va tuer le marché des films ;
1990-2000 : les majors gueulent comme des putois que les CD enregistrables vont tuer le marché de la musique ;
2000-2010 : les majors gueulent comme des putois que le P2P va tuer le marché de la musique et celui des films…
2010-2020 : ils vont nous sortir quoi comme excuse cette fois-ci ?
Bon, et puis, qu’on foute la paix aux putois, pauvres bêtes !
" />" />" />" />" />
Le 28/03/2013 à 16h14
Le partage, qu’il se fasse en ligne ou hors ligne, vise ainsi « toujours à renforcer les liens sociaux entre les individus ».
Le partage est donc d’utilité publique." />
Le 28/03/2013 à 16h16
Ah, j’oubliais :
Jusqu’en 1985, seulement trois chaînes de TV en France. Depuis cette date, le moindre bouquet de base du câble ou du satellite, sans parler de la TNT, en propose au moins dix fois plus.
Musique : avant les années 1980, l’achat de disques était réservé, pour autre chose que la variété, aux boutiques spécialisées. Pendant la décennie 1980-1990, les grandes surfaces spécialisées genre FNAC et consorts ont pris une position dominante qui n’a vraiment été remise en cause par les acteurs internet qu’à partir de la seconde moitié des années 2000.
Loisirs en général : le marché du jeu vidéo était balbutiant dans la seconde moitié des années 1970, il a décollé en force dans les années 1980, malgré quelques soubresauts au départ (crise majeure en 1983, par exemple) avant de s’ancrer dans le paysage dans les années 1990 avec les acteurs que l’on connaît aujourd’hui.
Le 28/03/2013 à 16h17
10 Millions de budget pour faire ça " />
GG les gars " /> le stagiaire à bien travaillé.
Le 28/03/2013 à 16h27
La Hadopi sait qu’elle n’a aucune légitimité auprès du gouvernement car ses résultats sont proches du 0 absolu, ce qui est une performance en soi. Seul HYOGA l’a fait.
Je ne parle pas même pas d’une quelconque légitimité auprès du grand publique. Par contre il fait chaud et on mange toujours très bien chez les majors.
En résumé, le couperet étant passé pas loin il y a 6 mois, mon PITT MFD communique à mort pour essayer de se rendre incontournable style “on est une autorité qui connait ces problématiques sociéto-techno rectales”, donc continuer à nous donner de l’argent pour que l’on puisse soulager le mou et la belle Fleur”
A.L. Analyste en chef
Le 28/03/2013 à 16h28
Le 28/03/2013 à 16h34
1988⁄1992 L’abonnement à The Réplicants sur Atari ST moyennant 200 francs pour 1 an, je recevais dans ma boite aux lettres entre 4 et 10 disquettes par mois, avec tous les jeux crackés, et même compilés sur 1 seule. Les nouveautés avant même leurs sorties.
Le bon temps… çà en faisait des économies…
Et que je sache, les éditeurs de l’époque s’appellaient Microsoft, Electronic Arts, Ubisoft et autres boutiques existant encore désormais cotées en bourse.
Mais Hadopi néglige volontairement cet argument.
Le 28/03/2013 à 16h44
Le 28/03/2013 à 17h02
Le 28/03/2013 à 18h08
Elle sont où les clés des blu ray? ffmpeg et vlc s’impatientent!
Le 28/03/2013 à 18h29
Ouais..Ca permet de mettre des courbes et des des nombres sur ce que l’on sait déjà,
les technologies évoluent ainsi que les usages.
Ce qu’il en ressort c’est que l’on connaît un véritable essor en matière de technologie, et que je me demande ce qui va faire stagner tout ça.
La propriété intellectuelle et la rentabilité qui brideront la recherche, savoir et créativité,
ou bien le manque de matériaux ou autre facteur technique/scientifique.
L’avenir nous le dira :) (je suis pas très confiant pour le moment " />)
Le 28/03/2013 à 18h31
Pas de disquettes dans cette étude :(
Mes boites à chapeau, sacs grands formats et caisses sont tristes (dans ma vie d’informatitien j’ai dû approcher le millier de disquettes), c’était le moyen numéro un de partage de 79 à 92 pour nous.
On a fait la fortune de 3M, memorex, maxell et j en passe…