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AdWords : Google finalement conforté dans son statut d’hébergeur

Suite de l'affaire Olivier Martinez

AdWords : Google finalement conforté dans son statut d’hébergeur

Le 16 décembre 2013 à 09h27

La cour d’appel de Paris a finalement donné raison à Google dans un arrêt inédit. Elle décide que l’entreprise profite bien du statut d’hébergeur sur les liens publicitaires Adwords. Elle déboute ainsi l’acteur Olivier Martinez qui tentait de la rendre responsable de la rédaction des annonces publiées par des tiers, ici Gala.fr.

olivier martinez

 

En juin 2008, Olivier Martinez avait porté plainte contre Prisma Presse (gala.fr) pour un article relatant ses problèmes sentimentaux. L’atteinte à la vie privée et au droit à l’image étaient confirmée par la justice le 27 juin 2012. Cependant, l’acteur attaquait par la même occasion Google puisque un lien publicitaire AdWords renvoyait un temps vers l’article en question. En saisissant l’identité du personnage, Google affichait en effet un lien commercial intitulé « News-Olivier MARTINEZ Les chagrins d’amour les plus célèbres : le cas Olivier Martinez » suivi du nom du site Galla.fr.

 

Cette affaire avait été enrichie par l’intervention de la Cour de justice de l’Union européenne, saisie par question préjudicielle dans un autre dossier. Il s’agissait justement de savoir si Google peut ou non s’abriter derrière le statut d’hébergeur pour cette activité publicitaire.

 

Le 23 mars 2010, la CJUE avait considéré que pour profiter de ce statut, l’activité du prestataire doit être neutre, soit purement technique, automatique et passive, « impliquant que ledit prestataire n'a pas la connaissance ou de contrôle des informations transmises ou stockées ». La CJUE expliquait par ailleurs que ce n’est pas parce qu’une activité est commerciale qu’elle fait perdre le statut d’hébergeur à celui qui remplit ces trois conditions. Bref, tout change lorsque Google a un rôle actif dans la rédaction du message commercial accompagnant le lien ou dans l'établissement ou la sélection des mots clés. Là, la société prend le risque de perdre ce statut.

Google peut controler, donc il contrôle et est responsable des liens Adwords

Le 14 novembre 2011, c’est à l’aide de ces critères que le TGI de Paris a justement refusé le statut d’hébergeur à Google. « Compte tenu de la connaissance avérée par le responsable du service “AdWords” du contenu des messages et mots-clés, comme de la maîtrise éditoriale qui lui est contractuellement réservée, il convenait d’exclure à son égard la qualification d’ hébergeur et le bénéfice de dérogation de responsabilité qui lui est réservé ». Pour arriver à cette conclusion, le tribunal s’était focalisé sur les conditions générales de vente d’Adwords selon lesquels « Google peut exiger que le client lui indique ses messages publicitaires au moins 3 jours avant la date de début prévue ». Une possibilité qui, selon le TGI, « implique la connaissance par Google, avant le début de la diffusion du message publicitaire, de son contenu ».

 

Pour les juges, c’est donc parce que Google « peut » contrôler qu’il « contrôle ». Il a donc « connaissance » et est coresponsable du contenu des liens Adwords. Le moteur et le journal furent ainsi condamnés solidairement à 1500 euros de dommages et intérêts et 3000 euros pour couvrir les frais de justice.

Google peut contrôler, donc il ne contrôle pas forcément

Le 11 décembre 2013, devant la Cour d’appel de Paris, l’appréciation des critères dégagés par la CJUE a diamétralement changé. Les magistrats ont d’abord posé que Prisma était seule auteure de la rédaction des articles. Dans le même temps, ajoute-t-elle, le fait que les conditions générales de vente de Adwords prévoit que Google « peut » avoir connaissance des contenus Adwords avant la campagne ne prouve pas que Google soit effectivement intervenu dans le choix des mots clés ou dans le rédaction de l’annonce litigieuse. Bref, ce n’est pas parce qu’il « peut » contrôler qu’il le « fait. » : « rien dans [les CGV] ne démontre que les sociétés Google sont intervenues dans le choix des mots clés ou dans le rédaction de l’annonce. »

 

Cette analyse rejoint celle qui fut exposée par le juriste Cédric Manara dans nos colonnes : « si ces conditions générales prévoient que Google peut agir, elles ne sont pas suffisantes pour dire que Google a agi en l'espèce, et a participé à la confection ou à la rédaction des annonces de Gala ! Le tribunal conclut à "la connaissance avérée (...) du contenu des messages et mots clés"... mais pourtant ne caractérise pas en quoi Google serait effectivement intervenu. Ce qui rend la décision (très) critiquable à mon sens. »

 

Ainsi, faute de démonstration contraire, la Cour d’appel en a déduit que Google profite bien du statut d’hébergeur. De là, deux effets : la société n’est soumise à aucune obligation de contrôle a priori des contenus fournis par les annonceurs. Cependant, elle peut voir sa responsabilité engagée si, ayant été alertée, elle n’a rien fait. Ici, Google a été mis en demeure le 21 mars 2008. L’entreprise a retiré l’annonce sept jours plus tard. La Cour d’appel a donc estimé que la société n’était en rien responsable, contrairement à ce qu’avaient décidé les juges du tribunal de grande instance. L’acteur Olivier Martinez sera finalement condamné à supporter les frais de ce dossier.

Commentaires (19)

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En juin 2008, Olivier Martinez avait porté plainte …confirmée par la justice en 2012.



4 ans .. la vache .. j’hésite entre c’est fait exprès et c’est fait exprès <img data-src=" />

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Chrisrc01 a écrit :



Je vois perso plutôt une méthode de quota , ou part mot clé une certaine forme de “balayage rapide” , après je ne connais pas les capacités de Google ce qui me freine c’est juste la quantité monstre de données à analyser dans le cas d’une surveillance générale et approfondie





En fait l’analyse des pubs diffusés est ridicule vu que Google peut facilement reconnaître les doublons. A comparer aux mécaniques de sélection de la pub qui, elles, sont refaites à chaque page partenaire vue parce que spécifique à chaque url, chaque utilisateur et fonction de l’instant…



Et puis quand tu prends le temps de réfléchir à ce qu’est un monstre de bande passante comme Youtube ou à la complexité des algos de requête de Google, tu te rends compte que même s’il fallait refaire l’analyse à chaque fois ce serait ridicule.







fred42 a écrit :



C’est une décision de cours d’appel





Au temps pour moi, merci, je pensais que c’était déjà la cour de cassation.



Je te remercie également pour le lien fourni : si le texte de loi en question ne m’était pas inconnu, j’ignorais en revanche que le terme d’édition n’était pas défini dans ce cadre, ce qui explique beaucoup de choses et confirme mon intuition qu’il y a un problème avec la loi elle-même. En effet la loi ne précise pas si le fait de sélectionner les pubs diffusées est un travail d’édition du contenu pub par exemple.







v1nce a écrit :



TF1 vend aussi ses écrans publicitaires au plus offrant. C’est pas pour autant qu’on lui demande d’aller vérifier la véracité de toutes les pubs où un annonceur s’annonce comme le meilleur (sur le prix, le taux, la couverture 4G, la satisfaction client…)





Non mais TF1 est responsable des pubs diffusées pour certains cas de figure, par exemple si le contenu est raciste ou pornographique. Et également, je parie, en cas d’exploitation sans autorisation de l’image d’autrui.



TF1 ne peut pas simplement clamer que ce qui est diffusé sur leur chaîne durant les coupures de pub n’est pas de leur responsabilité. Question de bon sens.


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warf a écrit :



Peut-être aussi des cours de droits car on est sur problème classique: l’accusation doit apporter la preuve de ce qu’elle avance.







Et c’est bien pour ca que c’est un juge qui a rendu le verdict, et pas toi : la preuve peut se faire par tout moyen. Il a apporte des elements qui ont convaincus le juge, c’est lui le seul a pouvoir decider si c’est recevable ou non, en partant du principe que la forme ne pose aucun probleme.



Et en relisant le passage concerne de la news, ce n’est pas si “a cote de la plaque” que ca :





« Compte tenu de la connaissance avérée par le responsable du service “AdWords” du contenu des messages et mots-clés, comme de la maîtrise éditoriale qui lui est contractuellement réservée, il convenait d’exclure à son égard la qualification d’ hébergeur et le bénéfice de dérogation de responsabilité qui lui est réservé ». Pour arriver à cette conclusion, le tribunal s’était focalisé sur les conditions générales de vente d’Adwords selon lesquels « Google peut exiger que le client lui indique ses messages publicitaires au moins 3 jours avant la date de début prévue ». Une possibilité qui, selon le TGI, « implique la connaissance par Google, avant le début de la diffusion du message publicitaire, de son contenu »





Alors oui, c’est enorme Google, mais c’est justement ce qui oblige theoriquement Google a etre tres reactif sur tout un tas de choses litigieuses.



On le voit d’ailleurs avec la rapidite d’exclusion des videos “qui posent probleme” et des retraits de liens semi-automatiques dans les pages de Google.



En l’occurence, si il est avere que Google etait au courant de cette mise en demeure, et que la societe n’a pas agit (assez vite), alors il est normal de la voir condamnee.


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HarmattanBlow a écrit :



Non mais TF1 est responsable des pubs diffusées pour certains cas de figure, par exemple si le contenu est raciste ou pornographique. Et également, je parie, en cas d’exploitation sans autorisation de l’image d’autrui.



TF1 ne peut pas simplement clamer que ce qui est diffusé sur leur chaîne durant les coupures de pub n’est pas de leur responsabilité. Question de bon sens.







Le “bon sens” ce serait que l’annonceur soit responsable de sa publication.

Quand une chaine diffuse une publicité pour le journal gala/voici et que la pub reproduit la couverture du journal cela m’étonnerait que la chaine fasse des recherches pour savoir si le journal détient les droits d’exploitation de chacun des abr people sur la couverture.

Si tf1 passe une pub pour Apple/Samsung et que l’un obtient l’interdiction de l’autre pour une raison x/y accusera-t-on tf1 de complicité ?



De plus ce qui est possible avec un nombre restreint de publicité ne l’est pas forcément au niveau de Google qui en gère un nombre autrement plus important.


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On voit bien dans la première décision , le problème des juges qui ne connaissent pas le sujet et qui prennent des décisions sans en mesurer les conséquences , la court d’appel à prit une excellente décision , quand au juge du TGI il ferait mieux de prendre des cours d’informatique par correspondance

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Tant mieux, sinon s’en est fini de l’hébergement de site web. Ben oui, n’importe quel hébergeur a accès à toutes les infos (bdd, fichiers), donc il peut les modifier, mais il n’est pas pour autant responsable de leur création.



Enfin une bonne nouvelle, ces derniers temps c’est vraiment la loose (LPM, CSA, NSA), à vous coller une déprime de Noël même quand peut encore aller.

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J’aime pas trop Olivier Martinez…

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Chrisrc01 a écrit :



quand au juge du TGI il ferait mieux de prendre des cours d’informatique par correspondance







Peut-être aussi des cours de droits car on est sur problème classique: l’accusation doit apporter la preuve de ce qu’elle avance.


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warf a écrit :



Peut-être aussi des cours de droits car on est sur problème classique: l’accusation doit apporter la preuve de ce qu’elle avance.







Il y a aussi de ça , j’exagérai un peu avec les cours d’informatique , mais je pense raisonnablement que l’on peut pas juger un domaine sans avoir de solides connaissances dans celui-çi


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En même temps Google qui met 7 jours à virer la pub apres mise en demeure, ça fait quand même “fin de contrat planifié” plutôt qu’exécution de la dite mise en demeure…



Reste un point que je n’ai pas compris : Adwords, c’est bien Google qui rédige ses pubs, non ?

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Chrisrc01 a écrit :



Il y a aussi de ça , j’exagérai un peu avec les cours d’informatique , mais je pense raisonnablement que l’on peut pas juger un domaine sans avoir de solides connaissances dans celui-çi







c’est présomptueux de dire qu’on a de solides connaissances dans n’importe quel domaine… On fait comment alors? on ne juge plus rien ?



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Ewil a écrit :



c’est présomptueux de dire qu’on a de solides connaissances dans n’importe quel domaine… On fait comment alors? on ne juge plus rien ?







On fait comme avec l’antiterrorisme , on met des juges spécialisé dans le domaine de l’informatique et de la cybercriminalité .

C’est pareil pour les entreprises on à tendance à croire qu’on peut gérer une boite qui fabrique des yaourts de la même manière qu’une boite qui fabrique des autos , a chacun sont domaine et ça spécialité


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Chrisrc01 a écrit :



On voit bien dans la première décision , le problème des juges qui ne connaissent pas le sujet et qui prennent des décisions sans en mesurer les conséquences , la court d’appel à prit une excellente décision , quand au juge du TGI il ferait mieux de prendre des cours d’informatique par correspondance





Je ne vois pas le rapport entre un éventuel manque de connaissances en informatique et la décision rendue. Et pour ma part mes connaissances techniques sont dans le haut du panier.


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HarmattanBlow a écrit :



Je ne vois pas le rapport entre un éventuel manque de connaissances en informatique et la décision rendue. Et pour ma part mes connaissances techniques sont dans le haut du panier.







C’est une règle général comme le dit l’article ce n’est pas parce qu’on peut surveiller que l’on surveille et même si on surveille la quantité de données à gérer devient vite colossale , je penses pour ma part que le juge à sur-estimer les capacités de surveillance et de traitement de données de Google


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Oliewan a écrit :



Reste un point que je n’ai pas compris : Adwords, c’est bien Google qui rédige ses pubs, non ?





Non. Le client rédige ses publicités, liste les mots clefs auquels il veut voir la pub associée, et envoi ça à Google.

Ensuite, quand un des mots clefs est cherché par un utilisateur, la pub s’affiche.

Google se réserve le droit de filtrer/censurer les pub, d’où la possibilité de demander le texte 3 jours avant le début de la campagne de pub, mais en règle général ils ne le font pas.


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Chrisrc01 a écrit :



C’est une règle général comme le dit l’article ce n’est pas parce qu’on peut surveiller que l’on surveille et même si on surveille la quantité de données à gérer devient vite colossale





D’abord le fait de choisir les annonces à diffuser en fonction du plus offrant et des critères spécifiés par l’annonceur témoigne d’un travail d’édition, quand bien même celle-ci ne porte pas sur le contenu publicitaire lui-même mais sur l’annonceur.



Ensuite, mais là c’est un problème avec la loi elle-même, un diffuseur publicitaire n’a pas à mes yeux à bénéficier du statut d’hébergeur. Si la loi fonde réellement Google dans son bon droit (on verra l’appel), c’est un problème avec la loi elle-même.





je penses pour ma part que le juge à sur-estimer les capacités de surveillance et de traitement de données de Google



Les capacités de traitement de Google lui permettent sans aucun doute d’analyser les messages publicitaires qu’ils diffusent et je suis certain qu’ils le font pour mieux comprendre le marché sur lequel ils agissent. En revanche je veux bien croire qu’à aucun moment il n’y a eu un humain lisant le message.


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HarmattanBlow a écrit :



Les capacités de traitement de Google lui permettent sans aucun doute d’analyser les messages publicitaires qu’ils diffusent et je suis certain qu’ils le font pour mieux comprendre le marché sur lequel ils agissent. En revanche je veux bien croire qu’à aucun moment il n’y a eu un humain lisant le message.







Je vois perso plutôt une méthode de quota , ou part mot clé une certaine forme de “balayage rapide” , après je ne connais pas les capacités de Google ce qui me freine c’est juste la quantité monstre de données à analyser dans le cas d’une surveillance générale et approfondie


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HarmattanBlow a écrit :



D’abord le fait de choisir les annonces à diffuser en fonction du plus offrant et des critères spécifiés par l’annonceur témoigne d’un travail d’édition, quand bien même celle-ci ne porte pas sur le contenu publicitaire lui-même mais sur l’annonceur.



Ensuite, mais là c’est un problème avec la loi elle-même, un diffuseur publicitaire n’a pas à mes yeux à bénéficier du statut d’hébergeur. Si la loi fonde réellement Google dans son bon droit (on verra l’appel), c’est un problème avec la loi elle-même.





C’est une décision de cours d’appel :



La cour d’appel de Paris a finalement donné raison à Google dans un arrêt inédit.



Quant à la différence éditeur/hébergeur, je suis tombé sur ce long article intéressant montrant que faute de définition dans la loi, il y a des décisions de justice parfois différentes.

Il semble quand même que le fait de rédiger le contenu ou d’exercer un contrôle (éditorial) sur le contenu est un critère déterminant. Le choix entre différents contenus pour afficher une pub plutôt qu’une autre n’intervient pas. Le choix ne se fait pas sur le contenu mais sur des critères de mots clés et de prix payé par l’annonceur.


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HarmattanBlow a écrit :



D’abord le fait de choisir les annonces à diffuser en fonction du plus offrant et des critères spécifiés par l’annonceur témoigne d’un travail d’édition, quand bien même celle-ci ne porte pas sur le contenu publicitaire lui-même mais sur l’annonceur.



Ensuite, mais là c’est un problème avec la loi elle-même, un diffuseur publicitaire n’a pas à mes yeux à bénéficier du statut d’hébergeur







TF1 vend aussi ses écrans publicitaires au plus offrant. C’est pas pour autant qu’on lui demande d’aller vérifier la véracité de toutes les pubs où un annonceur s’annonce comme le meilleur (sur le prix, le taux, la couverture 4G, la satisfaction client…)





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